Alea jacta est [Kerath]

<<< Conseil de Thaar – A la rencontre des puissants



Les gens s’étaient agglutinés autour du joyau, tentant tant bien que mal d’apercevoir les principaux acteurs de l’orage qui grondait à l’horizon. Les gens avaient peur, certes, mais cette peur semblait attiser leur curiosité. Curiosité qui ne semblait s’assouvir qu’en ayant l’opportunité d’apercevoir ces gens et le lendemain d’innombrables rumeurs tous plus surprenantes les unes des autres se promèneraient dans Thaar. Certains blâmant l’inaction des Princes Marchands, tandis que d’autres se terraient en mentionnant que le fait de rester neutre était la meilleure des solutions. Les Thaaris se taiserent soudainement alors que le diplomate Naélisiens sortait du joyaux, l’air enthousiaste alors qu’il se dirigeait vers une pâtisserie. Ce ne fut que quelques minutes plus tard que le géant sortit du joyau. Les Thaaris semblèrent s’effacer devant lui, apeuré de rencontrer l’immense noirelfe. Ce fut un jeune drow qui s’avança vers ce dernier pour lui tendre un vélin. Aucun mot échangé, qu’un regard insistant avant de s’éclipser alors que la missive était dans les mains de son interlocuteur. Une invitation des plus discrètes, avec des instructions bien précises.

***

La nuit était tombée depuis un moment alors que les clients tentèrent tant que mal d’entrer dans la maison, mais le gérant tentait tant bien que mal de raisonner les deux hommes aux allures un peu trop pompeuses.

« Comment ça, réservé pour une soirée privée? »
« Tu te rend comptes que l’on a même pas été invité! Au nombre de souverains que l’on rapporte à la maison c’est la moindre des choses. »


Le gérant déglutit en tentant tant bien que mal de raisonner les deux dramaturges en herbe qui tentait d’avoir leur habituel plaisir.


« Non mais j’ai besoin de Gilberte, sinon je vois vraiment pas comment je vais m’en sortir »
« Ça va, Diego. » répondit le plus grand des deux. « Puisque le gérant ne veut rien entendre, j’enverrais un message à la Princesse d’Uldal’Rhiz. Après tout, nous nous connaissons si bien! Je peux vous assurer messire, que demain vous n’aurez plus de travail. »
« Je crois qu’il sera inutile de gaspiller votre énergie. »


Les trois hommes se retournèrent pour faire face à une fine silhouette encapuchonnée. Maralina retira doucement sa capuche pour révéler son visage. Un sourire amusé aux lèvres, le menton légèrement vers le bas alors que la Princesse Marchande fixait les deux phénomènes, communément chez les Thaari appelée Ka’Reen – un nom quelques peu singulier qui décrivait les clients un peu trop demandant d’une façon peu flatteuse. Les trois hommes s’inclinèrent à la vue de la Vaanie alors que quatre gardes du corps s’arrêtèrent à quelques pas de leur employeur, la main déjà sur le pommeau de leur épée alors que les deux clients semblaient un peu plus nerveux qu’il y a quelques secondes.


«Princesse, c’est un plaisir de vous revoir. Vous vous souvenez de moi? Nous nous sommes rencontrés à la soirée de mon confrère, Mer…»


Maralina haussa les épaules, un air nonchalant au visage, elle n’en n’avait absolument rien a faire de quand ils s’étaient croisé. Après tout, elle ne se souciait guère des insectes qui tentait tant bien que mal de se rapprocher d’elle. L’homme toussota avant de lancer un regard discret a son confrère avant de continuer;


« Le gérant ici présent refuse de nous laisser participer à la soirée privée. Sachant que nous sommes deux clients réguliers, j’exige d’avoir accès à la propriété. »


Le regard de la Princesse Marchande devint soudainement noir alors qu’elle penchait un peu la tête sur le côté. « Vous exigez? » demanda-t-elle d’une voix douce avant de s’avancer vers le client qui avait osé lui parler. Ce dernier sembla beaucoup plus nerveux avant déglutir, il ouvrit la bouche, prêt à rétorquer avant de la refermer, se disant qu’il avait déjà causé assez de problème. La Vaanie s’arrêta à un souffle de ce dernier avant de reprendre la parole; « Si tu crois que tu peux exiger quoique se soit tu fais une grave erreur. Tristan! » Un des gardes brisa sa formation pour rejoindre la maîtresse des lieux. « Rappelle aux insectes ou est leur place. » Les deux hommes se jetèrent rapidement aux pieds de la marchande, tentant en vain d’obtenir sa clémence, mais les gardes empoignèrent rapidement les deux récalcitrants et les amenèrent dans le sous-sol pour un traitement des plus particuliers. La Vaanie entra finalement dans la maison avant que le gérant ne referme la porte derrière elle. Il s’arrêta un moment pour prendre la cape de la Vaanie. L’humain semblait incapable de contrôler sa nervosité. Jouant sans arrêt avec ses mains alors qu’il sautillait d’un pied à l’autre. Le bordel était théoriquement fermé pour une soirée privée ce soir, et ces événements le dérangeait en aucun point d’habitude, il fallait tout de fois avouer que généralement les soirées s’enchainaient dans ce riche établissement. Le vin coulait à flots alors que les convives profitaient de la compagnie des plus belles créatures de Thaar.  Mais les invités qui avaient déjà traverser la porte de l’établissement lui avait fait comprendre la gravité de cette rencontre. Une fois qu’il eut débarrasser la Thaarie de sa cape, ce dernier se remit a marcher nerveusement avant de s’arrêter devant le grand escalier, avant de se retourner vers la Princesse Marchande;


« Vos invités sont à l’étage, Votre Altesse. J’ai suivi vos instructions, je lui ai demandé de monter seuls, pendant que nous nous occuperons du reste à l’arrière. » dit-il nerveusement.


Maralina eut un léger sourire avant de hocher la tête au gérant. Sans attendre elle se mit en marche, montant d’un pas gracile le grand escalier en bois, avant de s’arrêter doucement devant la grande porte où son invité l’attendait. Elle replaça doucement le décolleté de sa robe de soie avant de fermer les yeux pendant quelques secondes alors qu’un sourire venait éclaircir son visage. C’était le moment, son moment. Il était temps de montrer ce dont elle était réellement capable. Maralina ouvrit rapidement les yeux avant d’ouvrir les portes et entrer rapidement dans la pièce, richement décoré. Les tissus satinés contrastaient magnifiquement avec les tapisseries finement tissées en fils d’or. Des paniers de fruits, des assiettes remplies de plats fins – et d’autres épicées- se trouvaient sur une table basse entourée de long divans moelleux. Refermant la porte derrière elle, la Princesse d’Uldal’Rhiz s’avança d’un pas félin vers son invité en tendant les mains. « Veuillez accepter mes excuses pour vous avoir fait attendre, cher ami. J’ai été légèrement retardé par les affaires. J’espère que vous comprendrez. » dit-elle en lui échangeant un sourire légèrement plus carnassier alors que ses prunelles semblèrent un peu plus obscures. Une expression quelque peu différente, qui ne dura que quelques minuscule secondes, en effet, lorsque Maralina s’arrêta à quelques pas du géant, cette expression étaient déjà disparu, au contraire elle eut un air faussement déçu avant de continuer; « Ma parole, vous n’avez pas amené votre pyjama? Quel dommage! »  Son regard se posa sur le bras précédemment meurtri de son invité, reprenant son sérieux, la Princesse le désigna du menton en continuant; « J’espère que quelqu’un s’est occupé de votre blessure. À moins que vous voudriez que j’appelle un médecin? Après tout il serait dommage de vous renvoyer sur le champ de bataille en piteux état… »

Une fois sortis du Joyau, Kerath s’arrêta devant la foule en remerciant le fonctionnement du Puy qui interdisait l’accès à la Chambre Magmatique à quiconque n’était pas assez important pour avoir besoin de s’y présenter. Au moins il n’y avait pas de foule qui attendait devant l’Etat-Major à disperser à la fin de chaque session. Le colosse traversa ladite foule, prêt à jouer de sa carrure au cas-où mais il n’en eut pas besoin, ce qui n’était pas plus mal étant donné que la situation aurait pu dégénérer. En voyant un ilythiiri s’approcher il s’arrêta et haussa un sourcil. Dépliant le vélin, le Karliik Glenn le parcouru rapidement des yeux avant de le replier.

Lorsqu’il poussa la porte de la taverne où l’attendaient la poignée de gardes draconniques chargés de sa sécurité, le général put les voir se lever brusquement. Il en fut de même de Murrpau qui attendait couché à côté de la porte et s’étira avant de venir frotter sa tête pleine de pointes contre son maître.

« Alors, comment ça s’est passé ? » Demanda Lirdnol’Sorn après avoir fini d’avaler une tranche de viande bovine et essuyé un filet de jus qui lui coulait sur le menton.
« Ils refusent de se soumettre. » Expliqua leur supérieur en se dirigeant vers leur table.
« Tout est prêt pour le départ, je m’en suis assuré. »
« Tu dis ça comme si t’avais tout fait. » Siffla Shi’niira entre ses dents.
« T’es partis te taper Phyxdorl pendant que je m’occupais d’harnacher Murrpau ! » Indigné, le soldat soutenait le regard de sa camarade sans broncher.
« Allez vous battre dehors, on part pas tout de suite de toute façon. »
« Ah bon? » La question provint des deux intéressés en même temps, leur tête tournée vers Kerath, aussi surpris que les deux autres qui n’avaient pas dit un mot.
« Je suis invité dans un bordel ce soir et vous allez m’accompagner. »
« Qu’est-ce que c’est que ce truc? » Haussant un sourcil, Taz’Endar regarda les autres pour voir s’il était le seul à être perdu mais heureusement ce n’était pas le cas.
« Un endroit où on paie pour baiser. » Répondit gracieusement Shi’niira. « La dernière fois on m’a dit que j’aurais beaucoup de succès. » On pouvait entendre de la fierté dans sa voix alors que sa main gantelée vint pousser une mèche neigeuse pour mettre en avant son visage sans marques.
« Ils sont fous ces humains... » Taz’Endar poussa un soupir consterné devant la révélation. « Et tu veux pas aller à un temple d’Isten à la place ? »
« J’en connais un qui a des prêtres particulièrement doués. » Renchérit l’eldéenne à la question de son camarade.
« J’y vais pas pour faire une offrande à la Sulfureuse. Comme je vous l’ai dit, on y est invité. On y va cette nuit. »

Le soir venu le groupe de drows arrivèrent devant l’établissement en se demandant si c’était bien là mais la réaction du tenancier dissipa tout doute. Entrant dans la pièce principale vide, Taz’Endar observait avec curiosité cet étrange endroit, faisant un commentaire dédaigneux sur le manque flagrant d’idoles représentant Isten. Puis le propriétaire des lieux baragouina à nouveau quelque chose en oliyan.

« Taz’, qu’est-ce qu’il raconte? » Kerath commençait à se dire qu’il aurait dû à nouveau soliciter les services d’Ayub mais c’était malheureusement trop tard.
« Je suis pas certain, il parle vite ce con... » la réponse tira un rire moqueur à Lirdnol’Sorn.
« C’est pas toi qui te vantais de ta Vitesse d’apprentissage ? »
« Au moins je sais commander un zat’kyr tout seul. » Lui rétorqua l’intéressé sans même se tourner vers lui.
« Je t’ai demandé parce que c’était à mon tour de jouer ! »
« Ouais, ouais, et Tesso... » le garde draconnique n’eut pas le temps de terminer sa phrase, interrompu qu’il fut par le grondement de son supérieur.
« Concentres-toi. » Après avoir répété pour la troisième fois, plus lentement, sa phrase, le tenancier fut enfin compris par Taz’Endar qui éclata de rire.
« Il veut que tu montes seul au premier étage, Sagar. »
« Si c’est pas le piège le plus ridicule que j’ai vu, il en est pas loin. » En parlant, Shi’niira lança un coup d’œil à l’escalier qu’avait montré l’humain et sa surprise fut totale lorsqu’elle put voir le colosse se diriger vers lesdits escaliers. Elle fit un pas dans sa direction mais une main attrapa son épaulière et l’arrêta dans son élan. « Qu’est-ce que tu fous?! » Se retournant brusquement, l’eldéenne voulut s’en prendre à la main qui l’entravait mais celle-ci se retira avant d’être frappée.

Pendant ce temps le général montait les escaliers en remerciant intérieurement Phyxdorl de comprendre un peu plus vite que les autres. Le gérant, quant à lui, s’élança à sa poursuite sans être interrompu et, ayant compris que le colosse ne parlait pas l’oliyan tenta de se faire comprendre par des signes pour l’amener jusqu’à la pièce où il devrait attendre, comme sa maîtresse le lui avait indiqué. En entrant, Kerath embrassa la pièce du regard en souriant devant la présentation. Il attrapa un des couteaux et s’entailla la main au-dessus d’une table et grâce à la pointe du couteau il traça avec son sang deux lèvres stylisée barrées d’un index en adressant une prière à Tesso.

Lorsqu’enfin son hôtesse se montra l’eldéen hocha la tête.

« Je comprends . » La phrase qui suivit lui arracha un rire. « Je l’ai oublié au Palais des Trois, je ne pensais pas en avoir besoin en venant à Thaar. Cela dit je vois que tu ne portes pas le tiens non plus. »

Il suivit ensuite son regard jusqu’à son bras qui avait arrêté de saigner et qu’il faisait maintenant respirer, sa manche étant remontée au-dessus de son coude.

« Non et personne ne s’en occupera. » Il se plaça légèrement de profil pour mettre un peu de distance entre son bras et Maralina. « Seuls les dieux décideront de ma guérison, s’ils jugent bon de me mettre à l’épreuve avec une blessure supplémentaire sur un champ de bataille, qu’il en soit ainsi. »

C’était à Meingal qu’il avait fait son sacrifice mais les soins ne font pas partie de son domaine de compétence alors sans doute pour que sa blessure guérisse, il fallait l’intervention d’autres divinités, au moins celle de Kiran et vu que les jumelles avaient pour but initial de mettre les eldéens à l’épreuve, l’interprétation d’une guérison, ou son absence, n’était pas bien difficile. Pas besoin d’être prêtre. Le blessé se tourna vers les plats servis et un sourire revint sur ses lèvres.

« Je vois que tu t’es donné du mal. Pour rien malheureusement, mon sens du goût est mort depuis des siècles, de l’eau et du rewt oock’i ont le même parfum qu’un shyk’na corsé ou que la plus épicé des chasses sauvages. » Il se retourna vers Maralina en observant curieusement une tranche de viande pimentée en main, se demandant quel goût elle pouvait bien avoir avant de l’avaler sans sommation. « J’espère que ça ne t’empêchera pas de te faire plaisir, si je ne peux pas en profiter, ça serait dommage que tu te prives. »

Comment ne pas sourire devant ce spectacle? Elle aurait tellement pu lui rétorquer un nombre de répliques, mais elle préféra se taire et garder ses réflexions sur le pyjama, de peur d’aller trop loin et d’apeurer son invité. Surtout que le général ressemblait à un enfant effrayé qui souhaitait cacher quelques choses à ses parents. Le bras étiré vers l’arrière tentant de cacher la blessure à son hôte. La Vaanie ne put s’empêcher d’avancer, comblant le vide entre les deux êtres, le regard fixé sur le général, déterminé avant de ne s’arrêter qu’a un souffle de ce dernier. Elle posa doucement sa main sur son torse, avant de lever les yeux pour rencontrer les siens; « A agir ainsi, on pourrait presque penser que tu me crains. » dit-elle en riant, enlevant tout de suite sa main qui semblait si petite contre lui. Si la réaction du général semblait assez ludique, Maralina était bien consciente que le drow n’était en aucun cas effrayé par sa présence. Ou si c’était le cas, il ne le laisserait pas paraître. Le géant aurait pu la briser avec une seule de ces énormes mains avant même qu’un de ses gardes ait le temps d’intervenir et soyons honnête, la Princesse Marchande était loin de l’avoir invité pour déclarer une guerre ouverte. Ces intentions étaient bien différentes, et s’il avait entendu parler de la Princesse d’Uldal’Rhiz, Kerath devait bien être au courant que les armes de la Vaanie étaient bien différentes des siennes.


Néanmoins, elle le laissa s’échapper alors qu’il désignait les plats servis sur la table. « On dit que Thaar est la ville du vice. La ville des plaisirs. Si certains de ces vices ont des formes un peu plus sombres, cela n’empêche pas qu’il y a quelques bases qui doivent être satisfaites. » lui répondit-elle avec un sourire en coin. La Princesse balaya la salle du regard avant de se diriger vers une autre table un peu plus en retrait où se trouvait une carafe en cristal ampli d’un liquide ambre. Dos au géant, elle emplit doucement deux coupes avant de se retourner, coupe à la main. Elle s’avança vers Kerath avant de porter un des verres à ses lèvres, trempant ses lèvres dans la coupe, avant de tendre cette même coupe à son invité. Preuve non seulement de ses bonnes intentions, mais aussi du fait qu’elle n’avait pas l’intention de l’empoisonner. « Il aurait été mal vu que la Princesse de la chair ne te reçoive pas correctement, non? Certes il n’y a pas d’amuseur et de danser, mais je voulais une rencontre disons plus intime… » Elle porta sa propre coupe à ses lèvres non sans lâcher son regard du Karliik Glenn avant de le contourner pour s’asseoir sur un des divans. Elle déplaça un cousin du dos de la main avant de déposer sa coupe sur la table, croisant ses jambes qui se dévoilèrent dans la fente de sa robe. Elle attrapa un petit fruit du bout des doigts avant de le déposer dans sa bouche. Prenant quelques secondes pour le mâcher avant de reprendre la parole après avoir avalé; « Pour ce qui es de me faire plaisir, je ne m’inquièterais pas. Après toute la soirée ne vient de commencer… » Tentait-elle de le séduire? Non pas réellement. C’était simplement comment elle avait toujours agi. Séductrice, provocante, cherchant à obtenir le plus de réaction possible sur son interlocuteur pour le tester. Maralina se doutait bien que le pieux Kerath ne tenterait rien. Après tout, elle était très loin de la parfaite eldéenne. Un complet opposé en réalité… Elle tapota du bout des doigts le divan, invitant le géant à s’installer. Avant de se caler un peu plus dans les cousins, laissant son regard vagabonder sur ces derniers. « Pour être honnête, j’avais des doutes. Il y a un moment où j’ai pensé que tu n’accepterais pas mon invitation. Après tout, les négociations n’ont pas été nécessairement concluantes… » Elle croisa soudainement le regard vers son invité avant de se redresser légèrement; « Mais j’ai tellement entendu parler du grand Kerath, qu’il aurait été stupide de ne pas tenter le coup… »

Est-ce que c’était le cas ? Peut-être. Après tout si Maralina se trouvait au conseil de Thaar c’était qu’il y avait bien une raison ou deux de s’en méfier, voir de la craindre, mais pour le moment, parmi les choses que Kerath craignait, il ne se trouvait pas un seul mortel ; ou immortel d’ailleurs, il avait peur des dieux comme tout bon eldéen qui se respecte, et d’autres éléments mais rien d’autre d’intelligent. Il faut dire que les enseignements de la prêtrise de Kiel, passer sa vie à combattre, à côtoyer une machine à tuer comme un félin à pointe élevée pour la guerre, ça aide à être téméraire. Est-ce que le drow était courageux ou est-ce qu’il était blasé ? Lui-même n’avait pas la réponse.

« De sombres vices… » un ricanement passa ses lèvres, l’expression l’amusait et qu’elle vienne de la bouche de Maralina ne la rendait que plus rigolote. « C’est comme ça que vous appelez ce qu’on a tenté de vous apprendre durant le cycle précédent ? »

Il se doutait que ce n’était pas ce qu’elle voulait dire par là mais il n’avait jamais compris cette manie de colorer n’importe quel mot ou expression. C’était bien un truc d’humains et comme pour des idioties telles que le casus belli ou la déclaration de guerre, Kerath se demandait si ça valait vraiment le coup de s’y intéresser pour le comprendre. A la place il la regarda verser deux coupes et haussa un sourcil. Pourquoi deux ? Il ignora celle qu’elle lui tendit pour prendre la seconde et trempa ses lèvres dans le liquide qui, s’il était plaisant à l’œil, n’avait aucun goût bien qu’il aurait sûrement dû en avoir un.

« En effet mais la princesse de la chair se donne un peu plus de mal pour rien : au Puy on boit dans le même récipient, une coupe suffit. » Ce qui n’était pas tout à fait vrai durant les grands repas mais pour une rencontre en tête à tête c’était de bon aloi. « Quant aux danseurs et aux amuseurs, tu as bien fait de t’économiser cette peine, je ne suis pas très festif. »

Comme pour le reste concernant Kerath l’exception qui confirmait la règle se trouvait dans la religion : s’il ne participait pas aux fêtes interminables organisées par ses congénères il ne ratait aucune cérémonie religieuse ; il donnait même de sa personne, et de ses possessions, pour les rendre plus grandioses qu’elles ne devraient l’être. Le général rendit ensuite sa coupe à la princesse et alla poser la sienne à côté de la bouteille dont provenait le liquide ambré qui, s’il n’avait pas de goût, n’était pas très alcoolisé mais en même temps tout ce qui tombait en dessous de soixante-dix degrés n’était pas très alcoolisé pour le colosse qui était capable de boire des quantités astronomiques. Il se retourna pour voir Maralina jouer avec un fruit, il attendit qu'elle finisse de l'avaler et après avoir attendu, décida de répondre à ses deux remarques d'un coup.

« Mais sinon tu as réussi, c’est très intime. Cela dit si je devais me plaindre je dirais que c’est trop éclairé, dire que la princesse de la chair a besoin de tant de lumière si tôt… » un sourire énigmatique flotta quelques instants sur ses lèvres avant de disparaître pour retrouver son sérieux habituel. Le géant s’en alla rejoindre la demi-elfe, s’asseyant doucement sur le divan en ne sachant pas vraiment ou s’installer ni comment le faire, lui qui cherchait à fuir le luxe autant que possible. Les princes marchands, tant habitués à l’extravagances, riraient sans doute des appartements du Karliik Glenn maintenant que Kerath les avait dénudés ; si leur taille reflétait très bien l’importance de leur occupant, il avait retiré toute la décoration en métal, pierres ou bois précieux qui s’y trouvait. Comme de coutume il n’avait pas touché aux statues, fresques et toute autre représentations divines. « Tu te fais flatteuse maintenant… j’en viendrais presque à croire que tu as quelque chose à me demander. Mais qui sait, je suis peut-être ton héros d’enfance. Pour ce qui est des négociations, je m’y attendais un peu et de toute façon si elles ne se sont pas bien passées ce n’est pas de ta faute, sauf si tu as quelque chose à m’avouer. »

L’eldée plaça une jambe sur le divan et se pencha en avant alors que ses doigts éffleurait ceux de Maralina pour s'emparer de sa coupe.

Mieux valait ne pas réagir à la remarque du géant. Peut-être avait-elle passé trop de temps avec les péninsulaires? Après tout apprendre leur protocole et leur langue lui avait pris beaucoup plus de temps que prévu. Surtout pour des êtres aussi insignifiants. Elle se doutait bien que Kerath tentait de lui soutirer une réaction, mais malheureusement il ne reçut rien. Elle le regarda attentivement alors que ce dernier alla déposer le verre sur la table, tentant tant bien que mal d’apercevoir la marque sur son bras. Quel dieu avait-il prié avant d’entrer dans cette pièce? Et surtout, pourquoi avait-il réellement accepté son invitation? Probablement pas pour son intervention durant le conseil ou son joli minois… «C’est dommage pour le festif, j’ai quelques bonnes idées de comment te dégourdir. » La demie-elfe fut rapidement sortie de ses pensées par Kerath qui renchérit au sujet de l’ambiance de la pièce. Elle eut un air faussement choqué avant de claquer des doigts. Un serviteur entra timidement dans la pièce, observant, l’air clairement apeurer, le géant et la maîtresse des lieux; « Tamise la pièce. » lui dit-elle d’un ton cinglant en oliyan. L’humain fit une révérence avant que de s’attaquer à la tâche. Cela ne prit que quelques minutes avant que la pièce soit un peu plus obscure, plus intime. Le serviteur regarda sa maîtresse, qui ne lui accorda même pas un regard, et refit une nouvelle révérence avant de sortir de la pièce, l’air terrifié. Pendant ce temps, Maralina ne lâcha pas du regard son invité, même pas lorsque le serviteur faillit tomber tête la première dans sur le sol, alors qu’il tentait d’accomplir sa tâche trop rapidement. Elle n’avait pas manqué l’expression de Kerath, ce sourire qui ne dura que quelques secondes. À croire, qu’il n’était pas fait de marbre après tout. Elle reprit finalement la parole alors qu’elle entendit la porte se refermer derrière elle. « J’espère que cela te satisfait un peu plus » dit-elle en se penchant légèrement vers ce dernier, un sourire aux lèvres.


« Moi? Quelques choses à demander? » Elle leva les yeux aux ciels, feignant de penser avant de retourner ses prunelles azurées dans ceux de son invité. « Je n’ai pas l’habitude de demander. Je vais prendre ce que je veux. » Confiante, la Princesse Marchande posa doucement la main sur la cuisse de Kerath, caressant du bout des doigts l’étoffe de la tenue du général. Les yeux baissés, observant le mouvement de ces doigts, elle continua; « Désolé de te décevoir, mais non. Je n’ai pas d’héros d’enfance. Par contre, je peux dire que cela fait plusieurs mois que j’entends ton nom, tes exploits. Il est revenu très souvent dans le rapport de mes espions. » Elle releva rapidement les yeux vers lui, en souriant. Admettant volontairement qu’elle surveillait étroitement ses nouveaux voisins, un peu comme tous les autres Princes Marchands en somme. Mais elle se souvenait très bien d’un rapport que son assassin favori lui avait envoyé au sujet du Karliik Glenn. « Alors quand j’ai entendu ton nom au conseil je n’ai pu m’empêcher de vouloir te rencontrer. Peux-tu réellement m’en vouloir? » Elle lâcha finalement la cuisse de Kerath pour enrouler ses doigts autour des siens, alors qu’il tenait toujours la coupe, qu’elle attira à nouveau à ses lèvres afin de prendre une gorgée du vin. Il y avait quelques choses d’amusant dans le jeu que les deux êtres jouaient. L’eldéen avait définitivement surpris la Vaanie, jamais elle n’aurait pensé que ce dernier suivrait la cadence. À croire que certain rapport n’était pas tous véridique ou que l’analyse qu’elle avait faite du personnage était fausse. Mais il y avait toujours cette opportunité pour elle, ce moment qui la ferait gravir les échelons et elle s’assurerait de le saisir, après tout, elle n’était pas encore une légende.


Relâchant ensuite la coupe – et par la même occasion la main de Kerath – la Princesse se pencha à nouveau pour attraper un des petits fruits, non sans lâcher son regard du sombre. Elle soupira avant de relever doucement la tête; « Je n’ai rien à avouer. Les négociations étaient prévues pour éviter une guerre, mais c’était évident que c’était une perte de temps. Par contre, quand m’annonceras-tu ce que tu prévois pour la Principauté? Car après Naélis, nous sommes les prochains n’est-ce pas? » Ses prunelles fixées dans les siennes, elle eut un sourire amusé, observant la réaction de son invité, puis, elle reprit la parole avant que ce dernier ne puisse glisser un mot; « Être sous un drow ne me dérange pas nécessairement » dit-elle en observant Kerath de la tête aux pieds en se mordillant doucement la lèvre inférieure. Elle se pencha légèrement vers lui, laissant sa main se poser une nouvelle fois sur sa poitrine, le caressant une nouvelle fois avant de relever la tête pour rencontrer son regard. « Par contre, j’aimerais savoir ce que j’aurais en retour. »

Une fois la lumière baissée à un niveau plus… eldéen, même s’il faisait bien moins sombre que dans son Puy natal, Kerath se sentait déjà un peu plus détendu. Comme quoi, c’est fou ce que peuvent faire quelques chandelles en moins.

« Ça suffira. » Confirma-t-il en hochant la tête.

Pour ce que fut de la réponse de Maralina à ses dernières paroles, le Karliik Glenn ne réagit pas. Prendre ce qu’on voulait sans demander, voilà enfin quelque chose qui lui parlait, qu’il comprenait sans avoir à réfléchir. Pour quelqu’un qui a du sang elfe dans les veines, la princesse penses beaucoup comme une drow, remarqua le colosse qui suivit la main de cette dernière sur sa cuisse en sentant les battements de son cœur s’accélérer.

« Tu fais bien d’être désolée, me voilà très déçu. » L’eldéen qui avait gardé son ton monocorde et son masque inexpressif en prononçant cette phrase donnait à cette dernière un certain aspect comique qui ne lui échappa pas. Un aspect comique qui vint accompagner une idée toute aussi amusante pour le général : celle des agents de Maralina et de la Doth’ka se battant pour l’espionner. « Tu es bien la première à vouloir me rencontrer. »

Cette fois un sourire amusé passa quelques instants sur ses lèvres. Il fallait admettre que les personnes voulant le rencontrer étaient au final assez peu nombreuses, surtout en dehors du Puy. Avec son poste militaire, son fanatisme, sa réputation de ne pas être quelqu’un d’amusant et en plus de ça d’être violent, il fallait admettre que ça ne donnait pas forcément envie ; après tout on ne l’appelait pas Carnage pour rien.

« Ce ne sont pas des méthodes que j’approuve, et encore moins que j’encourageais dans mon ost, mais je comprends qu’on surveille ses voisins, au Puy, un ilythiiri qui leur fait confiance est un eldéen mort. » A peu de choses près c’était vrai et c’était l’une des raisons principales de l’instabilité qui secouait à intervalles presque réguliers son volcan adoré alors pourquoi ne pas l’attendre de l’Ithri’Vaan, la fille rebelle d’Elda ? « Je suppose que je n’ai pas à me plaindre, tu veux me rencontrer au lieu de me planter un couteau dans le dos. »

Pouvait-il en dire autant de nombre de ses compatriotes ? Probablement pas mais c’était ce qui faisait toute la beauté de la société drow : il s’y passait toujours quelque chose, on ne s’y ennuie jamais ou en meurt. En réalité on peut très bien en mourir sans s’en ennuyer mais là n’était pas la question. C’était entre autres pour ça que le colosse avait préféré s’engager dans les osts plutôt que de rester au service d’une famille de primas ; ironiquement une carrière militaire, en plus de permettre une ascension plus rapide, était plus sûre. Du moins c’était parfois le cas, à nouveau la nature chaotique du Puy devait rentrer en ligne de compte. Kerath continuait d’observer la princesse et son manège, en sachant pertinemment qu’elle lui planterait un couteau dans le dos à la moindre occasion si elle savait qu’elle pourrait s’en tirer, se demandant où elle voulait en venir. Après tant de siècles de vie, il n’était pas stupide au point de croire que c’était pour son joli minois qu’elle l’avait invité. Si c’était le cas le moins que l’on pouvait dire était que Maralina avait de drôle de goûts, même pour les eldéens le général était tout sauf beau : couturé de cicatrices, un nez qui n’était pas droit, des cheveux certes blancs mais courts, des traits carrés, loin de la finesse et de l’élégance habituelle qu’on pouvait trouver chez les elfes en général. Quant à son corps, il n’avait rien d’esthétique non plus, le soldat était taillé pour être une machine à tuer, un monstre, et non pas une statue représentant les canons de beautés de son époque. Alors il la laissa parler, elle finirait bien par dire ce qu’elle derrière la tête et en effet, ça ne tarda pas. Sa question lui arracha un sourire carnassier et alors qu’elle reprenait la parole, il attrapa à nouveau la coupe mais cette fois il n’y trempa pas ses lèvres, il la déposa sur la première table à portée de main. Déjà penché vers elle, lorsque la princesse se pencha à son tour, ils étaient proches.

« Peut-être que vous êtes les prochains. » Souffla-t-il en réajustant sa position, un pied touchait encore le sol tandis que l’autre était sur le divan, à moitié assis sur ce dernier. Et puis il la poussa en arrière pour qu’elle tombe sur le dos et l’eldéen la poursuivit, se tenant à quatre pattes au-dessus d’elle. Une main du colosse attrapa un de ses poignets, laissant l’autre libre bien qu’il plaça sa seconde main entre le cou de Maralina et la main libre de la princesse. Sa tête descendit ensuite mais au lieu d’embrasser la vaanie il murmura directement à son oreille : « Je croyais que tu ne demandais pas, que tu prenais ce que tu voulais, qu'est-ce que tu veux prendre, Maralina? »

Maralina pencha légèrement la tête sur le côté  alors qu’elle entendit la remarque du drow sur l’espionnage. « Ce n’est pas non plus comme si j’avais les mêmes armes que toi. » Son visage devint sérieux pendant un instant. Les guerres étaient bien différentes chez les Vaanies, ici, cela ne servait à rien de prendre les armes, tendre un piège pour les voir tombé sous leurs erreurs était beaucoup plus satisfaisant. Seulement à ce moment-là, on pouvait s’assurer que son ennemi ne soit pas considéré comme un héros ou un martyr. Les guerres Vaanies étaient traîtres, et c’est lui qui avait le plus de pions d’avance et qui anticipais la situation qui gagnait.  « Assassiner quelqu’un ou utiliser la force n’est pas toujours ce qui est de plus avantageux, on n’a qu’à penser à ce qui s’est passé il y a quelques mois au palais d’argent. » Elle sembla agacer pendant un instant, ce rappelant de la situation merdique que les Thaaris s’étaient retrouvé du a trois personnages belliqueux. « Si l’on devait s’affronter sur un champ de bataille, je ne crois pas que personne ne parierait sur moi. Par contre, je peux garantir que j’en connais assez pour toi pour te faire tomber. » Elle eut un sourire amusé alors qu’elle s’approchait un peu plus de Kerath avant d’ajouter; « Je n’ai point de raison de te planter un couteau dans le dos pour le moment et de toute façon j’aime mieux regarder mes ennemis tombés devant moi. La chute est toujours plus attrayante » répondit-elle du tac au tac. Était-ce une menace? Pas du tout. Maralina n’avait aucune envie d’être l’ennemi du Karliik Glenn. Au contraire, une collaboration entre les deux êtres pourrait être très bénéfique. L’un et l’autre se complétait, l’un avait la force brute, l’autre savait manipuler les gens pour les faire tomber.


Kerath lui enleva la coupe des mains avant de la déposer sur la table, un sourire carnassier sur son visage. Décidément elle venait de toucher une corde sensible, et elle comprit rapidement pourquoi cette expression était apparu. Elle ne put cacher la surprise sur son visage, alors que Kerath l’entrainait sur le dos. Ça, elle ne l’avait pas vu venir. Interdite, La demie-elfe prit quelques secondes avant de reprendre contenance – ou du moins – tenta-t-elle alors qu’elle sentait son souffle s’accélérer alors que son corps tentait tant bien que mal de contenir l’excitation qui montait. Elle n’en n’avait rien à faire de l’apparence d’une personne, non ce qu’elle admirait chez une personne était le pouvoir, et ça, Kerath l’avait. Il y avait quelques choses de sauvage chez Kerath, peut-être le fait qu’il aurait pu la briser en une seconde, surtout à ce moment précis où elle était à sa merci. Elle ferma doucement les yeux, en laissant tomber doucement sa tête vers l’arrière alors que son invité lui murmurait à l’oreille. Ce ne fut que lorsqu’il eut terminé sa phrase, qu’elle rouvrit rapidement les yeux, sourire aux lèvres.  Elle posa doucement sa main sur la joue du drow avant de remonter doucement pour agripper ses cheveux. Elle l’attira son visage près du sien avant de lui lancer un regard défiant. « Oh Pardon, les manies Vaanies ne doivent pas être assez claires. Je n’ai généralement à dire ce que je veux aux autres. Généralement cela se fait assez naturellement où je m’arrange pour que cela soit le cas. »


Elle tenta de libérer sa main de sa prison, mais le général ne semblait pas vouloir la lâcher de sitôt, ne semblant pas s’en soucier plus qu’il faut, elle abandonna la lutte, qui de toute façon n’irait pas loin – avant de reprendre la parole; « Il y a deux choses que je veux; le pouvoir et toi. » Et ce fut elle qui combla le vide pour l’embrasser, scellant ses paroles. L’aimait-elle? Non pas du tout et soyons honnête, elle savait très bien que Kerath n’avait aucun sentiment non plus. Elle n’avait pas besoin d’avoir quelconques sentiments pour combler ses désirs, la motivation, seule, était bien assez. Reprenant son souffle, elle se sépara du drow avant de lui lancer un regard amusé, se demandant s’il continuerait le jeu où reprendrait son sérieux. Elle suivit du regard sa main, alors qu’elle lâcha les courts cheveux du général en descendant doucement le long de son cou, pour continuer; « Attaquer de plein front la principauté serait une erreur, par contre la laisser mourir à petit feu en contrôlant les routes commerciales et en l’isolant est une bien meilleure alternative. » dit-elle en souriant, évitant son regard. Maralina n’était pas dupe, peut-être que les drows ne voulaient pas leurs terres ancestrales, mais elle avait un énorme doute et Kerath n’avait rien fait pour apaiser ces derniers.  

Il profita de sa position pour mordiller le lobe de l’oreille de la princesse marchande tandis que l’eldéen sentait la main de celle-ci lui effleurer la joue pour remonter se perdre dans ses cheveux avant que cette dernière ne l’enjoigne à remonter, ce qu’il fit. Il n’avait pas la réponse à sa question mais ça n’était pas bien grave : l’immortalité avait ça d’intéressant qu’elle enseignait un peu de patience à ceux qui la possédait. Toutefois il la voulait se réponse alors lorsque Maralina tenta de dégager sa main, elle ne put la bouger, son poignet toujours prise dans la poigne du général, décidé à ne pas la laisser partir. Du moins pas tant qu’elle ne lui aurait pas répondu. Réponse qui ne tarda pas à venir mais ça ne l’empêcha pas de remonter sa jambe, frôlant l’intérieur de la cuisse de la demi-elfe ce et parce que la fameuse réponse était… un peu décevante. La première partie était évidente, après tout on ne devient pas princesse marchande sans vouloir être capable de dicter sa volonté à une part non négligeable de la population de ce monde.

La suite de sa pensée fut éclipsée par un baiser qu’il lui rendit sans même y réfléchir à deux fois. Il n’y avait pas de passion, c’était presque par réflexe, mais l’expérience comblait ce défaut-là : les enseignements de la prêtrise d’Isten couplées la sexualité débridée de leurs ouailles faisait que trouver un eldéen mauvais amant, ou amante, était rare, du moins pour les autres peuples. Kerath pouvait entendre son cœur battre dans ses tempes comme lorsqu’il combattait et ça lui rappela la sagesse d’un prêtre de Kiel qui lui révéla que tous avaient le don d’arrêter la course du temps. C’est même terriblement facile, lui avait assuré l’adepte de la Maîtresse des Souffrances en testant le tranchant d’une dague à la lame aussi fine que son ongle sur la chair de son pouce, il suffit de souffrir ou de faire souffrir… ou de rendre hommage à la Sulfureuse, avait-il ajouté avant de le démontrer à l’enfant qu’était alors le Karliik Glenn. Le souvenir, jusqu’à présent réprimé, provoqua un frisson que l’adulte ne put réussir à réprimer.

Pendant qu’il l’écoutait, le général remonta sa seconde jambe, contrairement à la première elle fit plus que frôler celle de Maralina et passa sa main libre dans son dos avant de la faire doucement descendre jusqu’à arriver au creux des reins de la princesse marchande. Lorsqu’elle eut fini de parler il re bascula en arrière pour s’asseoir en tailleur, emportant Maralina avec lui, lâchant son poignet pour placer son autre main dans son dos afin de lui assurer une position stable.

« Comme nous avons fait pour Nisétis? » Le sourire carnassier du drow refit son apparition avant d’aller déposer un baiser dans le cou de la demi-elfe. « Ou nous pouvons l’attaquer une fois de front mais avec des alliés dans le Conseil. » Il déposa un nouveau baiser, un peu plus bas tandis que du bout de ses ongles il traçait des arabesques dans le creux des reines de Maralina. « Des alliés qui pourraient ensuite régner sur la cité. »

Etait-il nécessaire de préciser que ces alliés régneraient au nom du Puy ? Kerath pensait que non et ce fut bien pour ça qu’il ne le précisa pas, si Maralina était arrivé jusqu’ici elle n’était probablement pas assez dupe pour ne pas s’en douter.

« Comme c’était le cas avant l’établissement du Conseil. » Kerath déposa un ultime baiser sur le cou de la princesse marchande, arrivant à la fin de celui-ci alors il se redressa et embrassa directement Maralina. « Mais dis-moi comment tu t’y prendrais. »

La Princesse Marchande ne put s’empêcher de réprimandera un frisson alors que la jambe du général remontait doucement, faisant monter le désir de la demie-elfe. Elle ferma doucement les yeux, non sans lâcher un petit gémissement à peine perceptible. Décidément cette discussion prenait une tournure quelque peu différente de ce qu’elle avait imaginé. Elle ouvrit de nouveau les yeux alors que ce dernier passa doucement la main sous son dos, avant de la faire basculer sur ce dernier sans effort. Son poignet maintenant libre, ses deux mains se posèrent à plat sur le torse du géant alors que ce dernier la retenait maintenant prisonnière contre lui. Position quelque peu délicate, mais qui arracha un sourire à la Princesse Marchande. On disait des eldéens qu’ils étaient de fantastique amant, et la Princesse de la Chair avait bien envie de le découvrir par elle-même. Maralina l’écouta dans l’interrompre alors que ce dernier un baiser dans son coup. Elle remonta la tête, les yeux mi-clos, laissant la route libre au général alors que ce dernier continuait son manège. Il se voulait stratégique, mais il y avait plusieurs choses qui avaient échappéd au général et c’était pour cela qu’elle était là. Maralina connaissait les différents peuples, les avaient explorés, les avait observés, et bien qu’elle fût bien plus jeune que lui, la Princesse ne laissait définitivement pas sa place. Il l’embrassa une nouvelle fois son cou dénudé avant de s’approprier ses lèvres. Testant légèrement le général, elle poussa légèrement sur son torse, mais elle fut fermement retenue par le drow.


Ce fut finalement Kerath metta finalement fin au baiser en lui demandant comment elle s’y prendrait. Sourire aux lèvres, elle remonta doucement une main vers la joue du drow attirant son regard dans le sien. « Je crois que tu ne m’as bien compris. » Sa main droite vint rejoindre à son tour la joue de Kerath, attirant son regard dans le sien, alors que la Princesse Marchande se redressa. « Je ne veux pas juste prendre Thaar, je veux le continent au complet. » Un sourire aux lèvres, la Princesse Marchande releva le menton avant de continuer; « Cela fait des années que je place mes pions, et personne ne pourra m’arrêter. La question est veux-tu faire partie de cette conquête ou non. » C’était bien la première fois que la Princesse d’Uldal’Rhiz révélait son but ultime. Une preuve de confiance pour le Karliik Glenn? Non, tout simplement une provocation. Elle lui prouverait qu’il avait besoin d’elle pour avancer et qu’elle ne serait pas qu’un simple pion de l’Elda. « Allons-y par étapes; la principauté. Ma première question est quels alliés? Le conseil se déchire à chaque jour, si certains vous craignent, d’autres vous voient comme de lointain cousin. » Elle eut un léger air dégouté lorsqu’elle prononça les derniers mots. Preuve de son affection hors du commun pour la voix de Qyriah qu’elle considérait comme un vulgaire morpion incapable de gouverner. « Avoir trop de personnes qui ont le pouvoir devient dangereux. Choisi la personne en qui tu as le plus confiance et surtout qui a les capacités pour. Alors si nous allons par élimination, le seul Prince Marchand qui vous soit réellement loyal est un drow qui a le quotient intellectuel d’une babouche. » Elle s’arrêta un moment, rapprochant son visage du sien avant de murmurer; « Ou il y a moi. Moi, qui sois resté neutre pendant tout ce conflit. Les citoyens me craignent mais me respectent. Nul ne m’a contesté et ceux qui ont tenté de me faire tomber, ou m’ont menacé sont dans une boîte sur une de mes étagères. Après tout, gouverner c’est mettre nos sujets hors d’état de nuire et encore moins d’y penser. » Une décoration des plus fines, mais qui lui rappelait certaines victoires qui méritaient d’être célébré, autant les révoltes d’Uldal’Rhiz, que la mort brutale d’un Comte un peu trop ambitieux…


Elle approcha ses lèvres près des siennes avant de rajouter; « Vous avez besoin de quelqu’un qui sait manipuler son peuple. » Elle l’attira à elle avant de l’embrasser passionnément, fermant doucement les yeux, alors qu’elle sentait le désir brûler en elle. Se détachant doucement de ce dernier, elle descendit doucement ses mains sur ton torse, allant rejoindre l’ourlet de sa tunique. « Quant au comment faire, je l’ai déjà dit. L’attaquer de front serait la pire des idées. Thaar est riches, et toutes les factions ont un œil dessus. N’allez pas croire, que personne ne réagirait à un appel à l’aide alors que l’entièreté de Miradelphia a un lien avec nous. » Elle remonta ses mains, enlevant la tunique de Kerath, avant de le passer par-dessus sa tête. Maralina pencha la tête sur le côté admirant ce qu’elle venait de découvrir, avant de suivre du bout des doigts les cicatrices du général. Elle fixa l’immense tatouage sur son torse pendant quelques secondes avant de reprendre la parole; « Pour prendre Thaar il faudra être beaucoup plus subtile que d’arriver avec l’entièreté de tes osts pour tout détruire…» Soudainement la Princesse se redressa, et poussa le drow sur le dos, se retrouvant sur ce dernier. Finalement libérer de son emprise, la Princesse alla doucement lui mordiller l’oreille, avant de descendre tout doucement le long de son coup, embrassant, mordant la peau noire du drow, Elle s’arrêta au niveau de la base, avant de plonger son regard dans le sien avec un air défiant « Est-ce que j’ai réussi à capter ton attention ou dois-je m’arrêter là? » Elle se doutait très bien de ce que serait la réponse à cette question, mais si ce dernier décidait de prendre une autre direction, elle n’irait certainement pas plus loin dans son plan.

Le jaune qui cerclait les yeux rouges de Kerath prit davantage de place alors que son sang se mettait à bouillir tandis que son regard était guidé dans celui de Maralina. Il réprima un rire pour ne laisser sortir qu’un sourire et un souffle.

« Tout Miradelphia, rien que ça? »

S’il ne doutait pas un instant qu’elle y travaillait depuis des années, l’eldéen doutait très fortement que personne n’arrive à l’en empêcher. En réalité il était plus ou moins certain que dans les principautés elles-mêmes se trouvaient nombre de gens capables de l’arrêter. Mais là n’était pas la question. Toutefois il comprenait mieux pourquoi elle s’était tournée vers lui : lorsque l’on cherche à conquérir le monde mieux valait avoir les armées qui ont tués un empire dragonnier de son côté. De plus elle s’adressait à la bonne personne, au bon moment, lui qui réfléchissait encore à la nouvelle place qu’il devait accorder à Uriz dans son cœur et, surtout, dans ses plans. Dans tous les cas il hocha la tête pour répondre à sa question. Oui, ça l’intéressait mais il devait admettre qu’il avait des doutes quant à la possibilité de réaliser de telles ambitions toutefois ce n’était pas la première fois qu’une chose invraisemblable arriverait.

« Un pouvoir fragmenté est un pouvoir faible, surtout si ceux qui le partagent s’entre déchirent. » Et ça, il en savait quelque chose étant donné que c’était régulièrement le cas au Puy, après tout il n’y avait qu’à jeter un coup d’œil au passé récent, la chute du Karliik Glenn précédent était un bel exemple et surtout les purges qui l’avait suivi. Quant aux détails des relations des princes marchands, Kerath n’en savait pas grand-chose. Il n’en avait rencontré aucun, enfin si, il avait connu Krish et il avait croisé le nain mais l’une était morte et l’autre était resté presque hors de vue à se terrer dans ses galeries. N’ayant donc aucune idée de qui pouvait bien être l’imbécile qu’évoquait Maralina, il se contenta de la laisser poursuivre son exposé. « Je collectionne les armes de mes ennemis au lieu de leur tête, ça à l’avantage de ne pas pourrir et d’être utile pour me permettre d’en ajouter d’autre à ma collecton. »

L’autre soucis des têtes était qu’après un certain temps, une fois que l’étagère commençait à se peupler, les crânes commençaient à tous se ressembler alors que pour une arme c’était plus simple, rien que sa forme et ses décorations aidaient à faire remonter des souvenirs. Il eut une pensée émue pour l’épée du dernier despote à défier le Puy et la lame reforgée à partir de celles d’une despote et des dagues de l’Ombre qui attendaient patiemment dans son armurerie d’être à nouveau utilisée. Cela étant dit, il était rare qu’il se serve à nouveau de toutes ces armes pour la simple raison qu’elles n’étaient que rarement faites pour lui et, par conséquent, qu’elles étaient trop petites mais il aimait tout de même les reprendre de temps en temps pour se dégourdir.

« On a besoin de bien plus que ça. » Souffla-t-il avant d’embrasser la princesse. En y repensant si on lui avait un jour dit qu’il finirait dans cette position avec une demi-elfe qui plus était, il n’y aurait pas cru mais les dieux avait cette, parfois fâcheuse, tendance à bouleverser le cour de la vie et d’en changer la direction d’un revers de main en se moquant des répercussions sur leurs adeptes, même les plus zélés. Mais qu’importait, si le Puy et ses habitants, avec son instabilité chronique, avait intégré une leçon universelle c’était bien celle qui dictait que pour survivre il fallait savoir s’adapter. « C’est pour ça que des alliés dans le Conseil pourrait être utiles... » il leva les bras pour aider Maralina à se débarrasser de sa tunique avant de reprendre le cours de sa phrase pendant qu’elle observait le tatouage qui symbolisait sa montée dans les rangs du second ost, rendu difficilement lisible à cause des cicatrices qu’il collectionnait comme les armes qui les lui avaient infligées. D’autant que le tatouage n’était complet que depuis récemment, à chaque nouvelle montée en grade il tatouait un nouveau pan de sa peau, commémorant les batailles qu’il avait mené et souvent c’était fait par-dessus des cicatrices préexistantes donnant par endroits un patchwork encore plus illisible. « Des alliés qui pourraient ralentir les négociations avec des puissances extérieures. »

Il allait répondre quelque chose mais n’en eut pas le temps alors qu’il tombait en arrière, ses abdominaux se contractèrent pour ralentir sa chute, chute qu’il aurait pu arrêter mais la curiosité, vilain défaut selon certains, le poussait à se laisser faire. Il bloqua sa respiration un instant pour empêcher un début de râle de passer ses lèvres en sentant les lèvres, ou les dents, de Maralina sur sa peau épaisse. Décidé à ne pas complétement se laisser faire, bien qu’en réalité c’était lui qui s’en était pris en premier à son cou, l’eldéen lança ses mains à la recherche des attaches de la robe de la princesse. Travaillant plus ou moins à l’aveugle, les yeux de Kerath fixant ceux de la demi-elfe lorsque sa tête remonta de son cou, les mains en question ne se débrouillaient pas trop mal, l’habitude aidant.

« Mon attention, tu l’as depuis que je suis rentré. » Expliqua-t-il en tirant doucement sur le lacet dans le dos de la princesse marchande et qui tenait le haut de la robe en place, lacet qu’il lâcha ensuite à côté du divan, le laissant tomber au sol avant de l’ignorer comme s’il n’avait jamais existé. « J’en déduis que tu as un plan pour faire tomber les principautés à genoux. Dois-je dire aux Voix d’Elda de Sol’Dorn et d’Esion de bloquer toutes les caravanes en direction de Thaar ? »

Son autre main tira ensuite sur un des côtés de l’ouverture de la robe pour la desserrer tandis que la seconde, celle qui s’était débarrassé du lacet vint lui caresser le flanc pour descendre afin de se reposer sur la hanche de la vaanie.

« Comment vous prendre à la gorge? » Se dressant légèrement, il s’attaqua, à nouveau, directement à la gorge de Maralina, sans mordre à proprement parler, il n’était plus question de baiser comme c’était le cas auparavant.

« Qui a dit que c’était des têtes? » lui répondit-elle tout simplement. Si la collection d’armes en soi n’était pas une mauvaise idée, quoi que totalement inutile pour la Princesse Marchande. Certes, elle savait se débrouiller avec une épée, mais pourquoi se salir les mains alors qu’elle avait une milice qui était payé pour cela? Pour le moment la solution qu’elle avait trouvée pour les conserver fonctionnait très bien et pour être honnête, le sort des restes de ses ennemis était loin d’être une priorité. Ce n’était qu’un plus, qu’un souvenir pour les nombreuses victoires qu’elle avait eues. La prochaine réplique attira l’attention de la Princesse Marchande. « On a besoin de plus que ça… » Et bien décidément ses arguments l’avaient convaincu rapidement s’il l’incluait déjà dans ses plans ainsi. Peut-être essayait-il de la tromper, mais elle s’en rendrait compte bien assez vite. « On dirait que tu as déjà une personne en tête… Dis-moi qui s’est? » Elle savait très bien comment procéder pour garder le conseil dans le creux de sa main. Ce dernier était déjà beaucoup trop dans le creux de sa main, lui laissant la charge des tâches les plus importantes comme la protection de la principauté. Cela serait si aisé de les tromper… et les pauvres n’auraient rien vu venir… Par contre, les cités qui se disaient indépendante pourraient causer un peu plus de problèmes, et Maralina n’était aucunement proche de la Princesse d’Ys. L’air pensif, la Princesse Marchande sembla perdu dans ses pensées pendant un moment, tentant de se concentrer même si elle était victime des assauts de Kerath. « Le Prince des milles-caves à céder sa place à un nouveau personnage que je n’ai pas eu le temps de rencontrer. Laisse-moi voir ce que je peux faire… » Comment s’appelait-il déjà? Ah oui... Marzaban.


Elle reprit rapidement ses esprits alors qu’elle put sentir sa robe devenir beaucoup plus lâche. Du coin de l’œil, elle put voir l’un des lacets finement brodés sur le sol, preuve que le général n’avait pas chômé. « Tu vas trop vite. Si tu mets Thaar à dos avant de prendre Naélis, j’ai bien peur que réagisse. Non, il vaut mieux monter la température peu à peu. Les Vaanies sont déjà terrifiés de prendre l’Oliya pour le commerce. Même moi qui à des affaires en Oesgard, envoie mes vivres par le golfe pour rejoindre Isgaard. Sans le vouloir, vous faites déjà une pression suffisante. Qui plus est, les Princes Marchands croient déjà qu’ils vous soient redevables avec le meurtre de Viconia. » Quelle belle façon de les manipuler d’ailleurs! Les Princes Marchands n’avaient rien à faire avec le meurtre de Viconia et pourtant ils avaient agi comme les responsables. Une réelle comédie. Elle senti la main du géant qui détacha la dernière attache de sa robe, et lui fit un sourire amusé. Allait-il l’aider ou la laisser ainsi? D’une main habile, elle repoussa les pans de soie de sa robe, avant d’enlever le tout, faisant passer le luxueux tissu par-dessus sa tête. Elle replaça doucement une des broches couvertes de pierre précieuse sur ses cheveux avant de se penser sur le général. Sa main remonta doucement pour s’arrêter à la gorge du drow. Le contraste des deux êtres était surprenant, si l’un semblait avoir affronter de terribles ennemis, la peau de la Vaanie n’avait pas une seule cicatrice, rien qui montrait ses grossesses, aucun défaut, choyé par son héritage.  « Tu veux nous prendre à la gorge? Isole-nous. Sans route commerciale, nous ne sommes rien.  Fais-en sorte que le peuple se soulève contre l’autorité en place, brûle ou prend nos récoltes, fait de leur vie un calvaire. La seule route commerciale qui nous resterait serait la mer, qui est déjà très dangereuse avec les pirates et le dragon. » Maralina appuya un peu sur la gorge du drow, pas assez pour le blessé, seulement une petite pression. Elle approcha ses lèvres de son oreille avant de murmurer; « Si le peuple se soulève contre les Princes, je crains que beaucoup soient incapable de gérer la crise, et je m’occuperais du reste… » Maralina eut un sourire défiant avant de mordiller le lobe d’oreille du drow, ses mains descendant doucement pour s’attaquer au pantalon du drow. Délaçant le lacet d’une main experte alors qu’elle continuait à lui susurrer à l’oreille. « Les Princes Marchands vous craint. Ils ne vous attaqueront jamais de plein front et n’ont pas la capacité de le faire. »

Sa réponse le fit rire, il se demanda alors si elle conservait l’entièreté des corps et si oui qu’est-ce qu’elle pouvait bien en faire. Il garda pour lui l’image d’une armée des ennemis de Maralina conservés comme les prêtres de Teiweon savaient protéger les chaires mortes des ravages du temps, regardant droit devant eux alors que la princesse marchait dans les rangs en se souvenant avec une certaine nostalgie la façon dont elle s’était débarrassée de chacun. Quant à l’autre question, il lui fallut u certain temps pour répondre ; non seulement parce qu’il était occupé, qu’il avait la tête ailleurs, mais surtout parce que les noms des non eldéens n’étaient pas vraiment son fort. Il fouilla alors sa mémoire à la recherche des rapports sur les deux princes marchands auxquels il pensait, là où il était certain que leur nom fut mentionné, pour s’en souvenir.

« Ethirëlon et… » l’autre ne voulait pas venir et malgré un claquement de langue dans l’espoir de faire tomber le nom du bout de cette dernière, ledit nom s’accrocha. « Geresh. »

Il n’avait pas le nom de sa princesse bien qu’il se souvenait d’elle lorsqu’elle était venu au Puy pour le mariage bien qu’il n’eut finalement pas lieu ; ces deux princes avaient montrer être plus proches d’Elda que tous les autres en décidant de venir au Puy et peut-être que tout ça les intéresserait.

« Avec Uldal’Rhiz et Baaz’Hima nous pouvons contrôler l’Oliya. » Ce qui en réalité était déjà possible depuis Sol’Dorn mais si l’on voulait étrangler quelqu’un mieux valait serrer le plus fort possible. « Et si on rajoutait Geresh il en resterait plus qu’Ashaï pour complétement isoler Thaar du reste de l’Ithri’Vaan. »


Mais tout ça c’était en comptant sur l’aval des deux princes marchands mentionnés plus tôt et la seule chose dont il se souvenait à leur sujet c’était qu’ils s’étaient déplacés au Puy. Il se souvenait aussi que ses gardes draconniques, assignés à la protection de ces hôtes de marques, avaient d’abord rouspétés à l’idée de veiller sur des vaanis au lieu de remplir leur devoir : protéger les officiers supérieurs du second ost ainsi que les grands-prêtres qui accompagnaient les armées ilythiiriennes. La mention des Milles-Caves lui arracha un grondement de mécontentement.

« Vous auriez dû détourner l’Oliya dans leurs terriers pour voir combien de temps les nabots peuvent tenir leur respiration. » En tout cas c’est ainsi qu’il aurait procédé à la place du Conseil dès lors que les nains refusaient de sortir de leurs foyers. Leur cas était une farce, ils n’avaient reçus qu’une amende alors que les deux autres responsables s’étaient vus jetés dans les mains de leurs cibles initiales et l’autre exilée l’eldéen ne savait où ; s’il y avait une punition inutile c’était bien celle-ci, c’était punir l’Olienne en lui confisquant un seau d’eau. Cependant la soirée s’annonçait trop belle pour parler de choses qui fâchent et il la laissa poursuivre et leur conversation prit une tournure qu’il n’avait pas prévu, du moins encore plus qu’avant. Légèrement refroidi par la mention de sa petite-fille, et de sa mort, Kerath cessa de s’en prendre à la robe de Maralina. « Tu sais qui l’a tué? »

C’était plus par curiosité qu’autre chose étant donné qu’il n’avait jamais été proche d’elle, bien qu’il fut son grand-père, le général ne la connaissait pour ainsi dire pas mais ils avaient discutés une ou deux fois. Il n’avait aucune idée de qui pouvait bien l’avoir tué, et de toute façon s’il l’apprenait il ne ferait sans doute rien à ce sujet, Krish n’avait pas l’air de le savoir non plus et visiblement elle s’en était moqué, l’important était le résultat, l’opportunité que ça leur avait apporté. Et quelle opportunité d’ailleurs ! Devant l’inactivité de l’eldéen Maralina se débrouilla toute seule pour terminer le boulot, ou presque, Kerath l’aida à se débarrasser de la luxueuse couche de tissus mais il n’eut pas vraiment l’occasion d’admirer la peau nue qui se cachait en dessous vu que la princesse marchande décida d’utiliser cet instant pour contre-attaquer. En appuyant sur son cou elle put entendre son sang passer en trombe dans sa jugulaire, témoins de l’activité intensive de son cœur. Ecoutant d’une oreille distraite, en grande partie par le corps sans imperfection de Maralina, une oreille qui tressauta sous le traitement qui lui fut imposé le général parcourut ce dernier de ses mains.

« Comment vous isoler sans flotte? Bloquer l’Oliya ne suffira pas. » Il s’attaque ensuite à la poitrine de la demi-elfe. « Et brûler vos recoltes serait... » il chercha le mot qu’il avait entendu ce matin de la part du gros naélisien qu’il prononça en riant : « un casus belli. Mais tu as raison… » il arrêta sa phrase en plein milieu pour l’embrasser avant de la reprendre quelques instants plus tard. « Il faudra attendre la prise de Naélis, que dirais-tu de laisser tomber ta neutralité pour l’occasion ? »

Maralina ne répondit rien alors qu’il mentionnait les noms du Prince Marchand de Baaz’hima ainsi que de l’héritière de Geresh. Deux personnalités qu’elle côtoyait à peine. Si l’un lui semblait être un être des plus dramatique, ne cachant aucunement sa peur de l’Elda, l’héritière semblait beaucoup plus douce, réservée. Était-ce vraiment des gens avec qui elle se serait associée? Elle qui voulait contrôler Thaar seule. Ou devait-elle le voir comme une opportunitée de se débarrasser des gens de trop dans le conseil, une première étape avant la conquête finale? Mais peut-être que leurs actions étaient totalement calculées. Que tout cela était des images. Peut-être devrait-elle s’intéresser un peu plus à eux maintenant que Thaar s’était débarrassé des jardiniers… «J’ignore si Baaz’Hima ou Geresh a quelconque force militaire qui pourrait nous être utile… Je vais devoir te revenir là-dessus. » Avoua-t-elle en haussant des épaules, un air presque nonchalant. Elle ne manqua pas le grognement du général alors qu’elle mentionnait les milles-caves ou Viconia. Maralina put sentir ses doigts se resserrer sur elle, alors que l’inaction du drow ne laissait rien au hasard. Décidément, Viconia et Kerath étaient liés d’une façon ou d’une autre. Un détail qu’on avait omis de lui donner. La Vaanie tenta plutôt de l’apaiser en lui mordillant son oreille, avant de murmurer; « Non. Pas encore. Mais je ne crois pas que les Princes Marchands n’avaient rien à y voir. »


Pour être honnête, ce n’était pas une priorité pour elle, mais si cela pouvait aider Kerath, elle enverrait  quelques hommes enquêter sur les événements. Pour le moment, elle se devait de reprendre l’attention de Kerath. Ce qui ne tarda pas à arriver alors qu’elle enleva sa robe. Par contre, les paroles du géant attirèrent son attention, abandonner sa neutralité? La Princesse s’arrêta, avant de hausser un sourcil avant de se coller un peu plus contre le drow, se redressant un peu, elle se releva sur ses genoux, tentant de dominer le géant, ses mains sur ses joues, la Princesse s’arrêta a un souffle des lèvres de ce dernier avant de murmurer ; « Qu’as-tu en tête? » L’amènerait-elle à Naélis pour regarder leur chute? Après tout, tout le monde connaissait les histoires entre la reine Glinaina et la principauté. Maralina ne s’était pas du tout remise de la perte des commerces qu’elles avaient négociés avec le roi il y a quelques années… et la rancune qu’elle cultivait pour cette reine n’était pas un secret. Une reine qui avait choisi de s’isoler, d’aller à l’encontre de tout ce que son mari avait tenté de construire... Si ce n’était pas de la route commerciale, elle était certaine que la principauté n’aurait pas levé le petit doigt pour aider ce royaume maintenant dirigé par une ignare. Un trophée de plus à ajouter à sa collection. Son pouce droit caressant doucement la mâchoire ciselée du drow alors qu’une lueur s’alluma dans son regard, alors qu’elle pensait aux innombrables façons de torturer son ennemie. Maralina frissonna alors qu’elle sentit les mains du général se promener sur sa peau, cette négociation devait réellement finir au plus vite, car la Vaanie ne pouvait pas réprimander son plaisir plus longtemps…


Incapable de se concentrer plus longtemps, elle le laissa parler alors qu’elle se sépara de ce dernier pour lui enlever le pantalon. Elle lui enleva finalement son pantalon, suivant la pièce de tissus avant de se mettre au genou au pied de Kerath. Le silence sembla s’emparer de l’air alors que la Princesse regardait le drow d’un air amusé avant de laisser tomber le pantalon sur le sol. Elle baissa son regard, observant ce qu’elle venait de découvrir en se mordillant légèrement la lèvre inférieure. La Vaanie pouvait sentir son cœur se contrit sous son regard, elle pouvait sentir sentir ces rubis la consumer, l’observer, alors que la chaleur s’accumulait en elle. Et au bout de quelques secondes, tout sembla s’enchaîner rapidement. Les deux corps se réunissent pendant un long moment. La Princesse Marchande prenant plaisir à satisfaire son nouvel allié. Et pendant ce moment ni l’un ni l’autre ne  put se concentrer sur un quelconque stratagème, préférant se laisser absorber par leur désir. Ce ne fut que plusieurs heures plus tard, allongées contre le drow, la tête dans le creux de son épaule, qu’elle put finalement reprendre son souffle. Caressant du bout des doigts le biceps de Kerath, la demie-elfe soupira de satisfaction avant de reprendre la parole; «Quand dois-tu partir pour Sol’Dorn?»

Que Baaz’Hima ou Geresh ait une armée ne changeait pas grand-chose au final, bien qu’elles aient sans doute une milice, ne serait-ce que pour maintenir l’ordre et protéger une caravane marchande de temps en temps. Ce qui intéressait l’eldéen n’était pas des bras supplémentaires, bien que ce soit toujours ça de pris, mais la position desdites villes. Pour ce qui fut de sa réponse à propos de Viconia, il ne répondit pas, il ne savait pas vraiment s’il préférait que les princes en soient responsables ou non. Il ne savait pas si son intérêt pour sa mort venait de sa simple curiosité ou si c’était là l’œuvre d’une sorte de fidélité filiale qu’il ne se savait pas posséder jusqu’à présent. De toute façon ça n’avait que bien peu d’importance.

Le souffle encore court, Kerath, allongé sur le divan, un bras pendant dans le vide, le bout de ses doigts jouant avec le lacet de la robe de la princesse, tandis que l’autre enveloppait Maralina pour la maintenir contre lui.

« J’étais sensé partir cet après-midi, après le sommet pour être précis. » Il serait en retard mais il ne s’en inquiétait pas : les osts ne bougeraient pas sans lui. Comme à leur sortie du Puy, ce serait son ordre qui les mettraient en marche et si le Karliik Glenn n’était pas présent pour le donner, ce fameux ordre, alors ils resteraient à patienter. « Mon départ a été reporté à cette nuit, j’imagine que tu en connais la cause, et ce ne sera pas en direction de Sol’Dorn. Je vais remonter la Route des Sables pour rejoindre mes troupes à la frontière naélissienne. » Des troupes qui devaient sans doute s’impatienter, à ronger leurs freins, à regarder Erlem au loin, chaque jour en devant attendre. Son retour serait donc annonciateur de bonne nouvelle pour les plus impatients. « Je ne devrais d’ailleurs pas tarder à me mettre en route. »


Il avait déjà assez retardé son départ et l’invasion du royaume de Naélis, n’avait que trop trainé. Il se releva mais avant de se rhabiller il attrapa quelque chose à boire, la coupe de vin ambré y passa, engloutie comme s’il s’agissait d’eau.

« Est-ce que tu veux venir avec moi pour voir les osts à l’œuvre ? » N’y avait-il pas meilleure façon de se faire une idée des capacités des armées eldéennes que de les voir combattre en étant tranquillement derrière elles ? Bien qu’avant de les voir combattre, les voir en marche, d’observer leur organisation et, accessoirement, d’assister aux passe-temps auxquels se livraient les soldats drows, pouvait être un spectacle tout aussi impressionnant, ou divertissant.

Maralina sentait le souffle chaud du Karliik Glenn dans son coup, alors que ce dernier – semblant satisfait – semblait reprendre son souffle tout en la pressant contre lui. À croire que la Princesse Marchande l’avait épuisé! Quel dommage ! Le drow se releva avant d’attraper une coupe de vin pour la vider. La Princesse se retourna sur le ventre, une main sous son coup alors qu’un sourire vint ornée ses lèvres. «Toutes mes excuses… J’ai cru que tu aurais eu besoin d’un certain moment de détente avant de partir. » Se retournant sur le dos en souriant, elle s’étira doucement tel un chat.


« Tu veux recommencer? » Demanda-t-il en haussant un sourcil.


Sourire aux lèvres, fixant le plafond, « Je ne voudrais pas t’épuiser avant une guerre. » La Princesse se retourna sur le ventre à nouveau en regardant le général.


« « Est-ce que tu veux venir avec moi pour voir les osts à l’œuvre ? »


«Pourquoi pas. » Dit-elle un sourire aux lèvres. La Vaanie se releva doucement, et s’approcha de son pas félin vers le général. Sa main se déposa doucement sur le torse du drow avant de remonter doucement pour rejoindre sa mâchoire. «Montre-moi ce dont tu es capable. » Dit-elle en lui lançant un regard mi-moqueur, mi- défiant. Elle l’attira à lui pour lui donner un dernier baiser passionné, question de sceller la soirée en beauté. Maralina se sépara finalement du général avant de se séparer doucement de lui, s’arrêtant à un souffle de ses lèvres, elle lui murmura; « J’ai quelques affaires à gérer. Je te rejoindrais dans quelques jours. » Après tout elle avait le temps, les osts étaient beaucoup plus lents qu’un petit groupe à cheval… Laissant sa main glisser sur sa peau, la Vaanie se retourna avant d’attraper une couverture qui traînait sur l’un des divans, avant de l’enrouler lâchement autour d’elle, cachant à peine son corps. Elle jeta un dernier à regard à Kerath, avant de sortir par une porte dérobée, elle avait payé bien cher pour installer ses bains, elle avait bien hâte de les essayer. Un moment de détente avant de déployer tout le reste…

-Terminé-