Réunion de famille [T'sisra]

Elenwënas, Neuvième ennéade de Bàrkios, An XVIII, Cycle XI

Tu es si près…
On peut sentir son pouvoir
Appelle-la.
La haine se répand dans la forêt.
Elle est partout
Peux-tu le ressentir?


Les doigts se crispèrent à nouveau alors que la tête de la favorite faisait de léger cercle. Les mouvements étaient lents, souple, les yeux fermés, son esprit tentait de séparer les innombrables murmures.  Tentant d’entendre la maîtresse des souffrances. C’était une tâche qui semblait de plus en plus compliqué, elles se multipliaient, parfois de nouvelles apparaissait pour ensuite disparaitre. Mais une plus forte que les autres, plus autoritaire, semblait toujours prendre le dessus sur les autres murmures. Celle-là n’hésitait pas à interrompu par les autres. Elle était la voix de sa maîtresse, son guide. Et c’est cette dernière qui l’avait finalement guidé dans l’Arduram. Une forêt aux innombrables rumeurs, qui apparemment effrayait la moindre vermine qui osait y entrer et pourtant Kha’linas la trouvait… pathétique. Si les esclaves semblaient de plus en plus nerveux, les ilythiiris ne semblèrent pas se soucier des dangers qui les entouraient. Au contraire, la sombre forêt leur paraissait fraîche, tranquille, presque paisible et ce malgré le fait qu’elle était étrangement silencieuse. Comme si la moindre bestiole était trop terrifiée pour émettre le moindre couinement.


Et puis soudainement un bruit vint déranger sa méditation. La lame arrêta sa course, alors que les oreilles de la favorite se dressèrent, son regard balaya les alentours, tentant de repérer d’où venait le son avant qu’un nouveau craquement ne vienne briser le silence. Sans attendre, Kha’linas se leva, dague ensanglantée en main avant de s’engager vers la forêt. Les pas étaient trop faibles pour être une créature. Peut-être était-ce une des goules du fameux Porte-La-Peste? Après tout l’elfe n’était pas étranger à se mettre dans les pieds de la Légion Sainte. S’approchant furtivement, ses sens la guidèrent jusqu’à une petite clairière, là où elle la vit… Ses doigts se crispèrent encore une fois dans une des positions des plus singulière, alors qu’elle penchait doucement sa tête vers la droite, fixant de ses yeux sans vie la proie qui était dos à elle. La favorite l’a reconnu sans problème et quel cadeau! Une proie convoitée, une proie qu’elle avait cherchée pendant longtemps, et voilà que le petit animal sortait finalement de son terrier à l’endroit le plus surprenant qui soit!


Elle ne pourra pas courir
Pas de fuite
De toute façon s’enfuir de la sauvera pas.
Silence!


Les yeux vides se fixèrent sur sa proie, alors qu’un sourire carnassier faisait son apparition derrière le masque. Un sourire, extrêmement rare, mais les possibilités que cette rencontre lui donnait en valait largement la peine. Sa patience avait finalement payée… Gul’Uss fit un pas en avant, faisant volontairement craquer une branche sous son poids pour attirer l’attention de la flamme devant elle. « Cela fait longtemps, T’sisra. » Comment oublié le nom de celle qui avait brisé votre famille? Comment oublié l’hérétique qui vous avait fait perdre ce qui vous revenait?  C’était à cause d’elle que le manoir Do’ath était dans les mains de cette ordure de Chandra. D’ailleurs, les supposés assassin de cette dernière devait avoir fait un piètre travail. L’Obok Yatharil bougea doucement des doigts, les sortants de leurs transes, avant d’enlever son masque de sa main ensanglanté, révélant finalement un visage presque intact, toujours orné de son sourire peu rassurant.  « On ne dit plus bonjour à sa grande sœur? » Ce n’était peut-être pas un mal en soi qu’elle soit à l’autre bout de la clairière, au moins cela lui épargnerait une dague en plein cœur.

Peu de gens en ce bas monde n’osaient réellement s’y aventurer, au cœur de ces bois maudits régnaient en maître des dangers insoupçonnés, et des horreurs vivant à l’épicentre de la sylve maudite naquirent des légendes connues de bien des peuples. Les rumeurs contant les effrayants exploits de Porte-La-Peste n’en étaient qu’un sombre exemple. Quant aux cercles extérieurs de l’Aduram, ils étaient arpentés à la fois par les habitants de la Dross comme par des créatures cauchemardesques.
La noirelfe louvoyait entre les taillis avec précaution, plus encore depuis que les bois s’étaient faits silencieux. Le bruissement des feuilles lui-même s’était fait discret. Pour une forêt si forte, si hargneuse, si violente, cette absence de vacarme paraissait bien étrange.

D’autant qu’elle sentait la vie, partout aux alentours. La noiraude s’avançait sous la frondaison, une main sur la garde de son épée, l’autre refermée sur son arbalète, un modèle bien plus petit qui se maniait d’une seule main. À mesure qu’elle s’enfonçait dans la clairière, T’sisra commençait à comprendre. Rien n’avait de quoi l’effrayer, non, elle était simplement patiente, l’Aduram était une prédatrice en pleine chasse et la daedhelle se trouvait sur son territoire.
La nécromancienne s’agenouilla un instant aux côtés d’un cadavre animal, si mutilé qu’il ne ressemblait plus qu’à un tas informe de chair pourrissante. Et pourtant il transpirait de vie, fourmillait de danger. Comme les autres dispersés çà et là. À peine redressée, ce fut une autre présence qui attira ses sens. Un battement différent des autres.

Et sa voix pourfendit le silence, brisant le calme apparent des lieux pour y installer une tension à nulle autre pareille. T’sisra se retourna, découvrant une vieille connaissance qu’elle n’avait plus revue depuis de longues années. Derrière ce masque, la première fille Do'ath.

- Kha’linas, commença la noirelfe tout en pointant son arme vers son interlocutrice, cela fait si longtemps. Je te demanderai bien ce que tu fais si loin de chez toi, perdue au beau milieu de ces contrées inhospitalières, mais je ne suis pas certaine de vouloir connaître la réponse.

T’sisra ne bougeait plus un cil, elle attendait d’observer le moindre changement dans la trame avant d’agir. Elle se devait de garder la main, surtout en ces lieux traitres et hostiles.

- Ne me dis pas que notre tante a fait de toi son pion ? Demanda-t-elle avec un sourire en coin. Voilà qui lui ressemblerait bien remarque, qu’inconsciemment ou non, tu te sois faite l’outil de ses quatre volontés. J’imagine qu’elle possède toujours le manoir ? Ah... Et je te conseille de rester là où tu es, soit dit en passant...

L’ilythiiri pouvait sentir les voix s’écrier, jurer. Si certaines d’entre elles semblaient excitées, les autres semblaient méfiantes. Que faisait cette hérétique dans ces bois? Et surtout pourquoi était-elle sur son chemin maintenant? Un cadeau empoisonné probablement. Un test de la maîtresse des souffrances pour déterminer ce qu’elle choisirait. La vengeance? Ou la quête qu’on lui avait impartie?  L’Obok Yatharil pencha légèrement la tête sur le côté alors que ses prunelles vides observaient celle qui partageait son nom. Partager? Non s’était le mauvais mot… Souiller semblait être approprié, surtout lorsque l’on savait à quel point leur stupide père avait travaillé pour garder ce nom en vie… « Je ne crois pas que tu veux le savoir non plus… Mes motivations ne te concernent guère. Quoique je dois avouer avoir un doute de te trouver dans les parages. Après tout, tu as toujours trouvé nécessaire d’aider la vermine. » Après tout, elle s’était bien douté que sa sœur se serait trouvé dans les environs de Naélis… Elle qui n’avait jamais été une réelle puysarde, cela n’aurait pas étonné l’Obok Yatharil de la retrouver en train de combattre les osts qui tentait de s’emparer de cette ville inutile.



Kha’linas remonta doucement la dague vers son visage, avant de mettre son doigt sur la pointe de cette dernière, enfonçant la pointe dans sa peau torturée, alors que la lame tournoyait dans sa main. Aucune réaction, aucune douleur ne transpirait chez la prêtresse. Il fallait dire qu’elle avait subi des traitements beaucoup plus difficiles que cela… Et ce fut qu’un léger sourire qui vint accueillir les remarques de l’Obok Yatharil. Croyait-elle réellement qu’elle allait mordre à un si pathétique hameçon? Croyait-elle qu’elle se laisserait emparer par une rage profonde et l’attaquerait de plein front?  « Un pion… Non… J’ai d’autres choses plus importantes que de m’occuper d’une hérétique. Mais je me ferais un malin plaisir de dire à Chandra qu’elle devrait peut-être revoir ses manières de te traquer. Si elle respire encore lorsque j’aurais fini ma prochaine discussion avec elle. » Elle avait un magnifique plan pour Chandra… mais elle ne le dévoilerait pas à T’sisra pour tout l’art du monde, de toute façon une collaboration entre les deux ilythiiris étaient tout simplement impossible. Kha’linas détestait cette marque qu’elle avait faite à son nom, détestait qu’elle soit responsable de la perte du manoir Do’ath. Pas qu’elle avait besoin d’un toit, mais c’était le fait que quelqu’un ait décidé de prendre quelques choses qui appartenait à Kiel Elamshinae.


Le sourire de la prêtresse sembla s’agrandir alors que T’sisra lui conseillait de ne pas avancer, puis un léger rire vint emplir la clairière alors que son index quitta finalement la lame ensanglantée. « Qui es-tu pour essayer de m’arrêter? » L’Obok Yatharil sembla se ressaisir avant de pencher le menton vers le bas, plongeant son regard vide dans celui de sa sœur. « Attaque ou enfui- toi. Après tout, le choix est le tien… Mais mes lames sont plus tranchantes que les siennes. » C’était un pari risqué, nécromant contre nécromant, mais au moins cela lui donnerait l’excitation qu’elle recherchait tant pendant quelques minutes… ou du moins jusqu'à ce que les autres de son groupe décide d'intervenir.

La daedhelle n’avait pas cillé, ni même bougée d’un pouce. Elle était restée plantée, de l’autre côté de la clairière. Son doigt caressait toujours la détente de sa petite arbalète, ses yeux rivés dans ceux de sa sœur ne dénotaient pas d’animosité particulière. Et c’est avec un sourire en coin que la noirelfe répondit.

- Mais tu feras comme tu le voudras, Kha’linas. Tu vois des menaces là où il n’y a qu’un simple conseil. T’sisra secoua doucement la tête, sans la quitter des yeux à l'écoute des battements environnants. Quant à Chadra, elle a su manipuler son entourage et les convaincre de se lancer à l’assaut du domaine. Sois certaine qu’elle trouvera un moyen de faire pression sur toi aussi, ou tout du moins d’essayer. Elle est ainsi. Toujours à rôder dans le noir à la recherche de petits secrets, à échauffer les esprits et les monter les uns contre les autres. Personnellement, elle n’a fait que me pourrir la vie du mieux qu’elle le pouvait… Alors quand tu serras tes mains autour de son cou, rends-moi un service et transmets-lui mes salutations. Et, je t’en prie, épargne nos cousins Vhukiir et Tebagh, ils ne sont que les jouets de leur mère.

La noiraude recula d’un pas dans une lenteur faisant écho à celle d'un félin, prenant soin de ne pas poser le pied dans un des tas informes de chairs en décomposition. Ainsi, la lignée Thanor’Thal allait connaître l’extinction d’ici peu. Si la nouvelle n’avait rien de bien réjouissant, la noirelfe ne pouvait s’empêcher d’y trouver une certaine ironie du sort presque réjouissante.

- Notre père nourrissait une… Légère paranoïa. Le domaine est truffé de combles et de secrets. Si tu y pénètres par les quartiers alloués aux esclaves, cherche la statue à la gloire de Tesso. Derrière se trouve un passage dans le mur, assez étroit et peu confortable, qui mène au bureau dans lequel travaillait Amalghar. Elle ne te verra jamais venir. Du reste… Sois prudente dans cette forêt, Porte-La-Peste n’est jamais très loin, tout comme la nature morte qu’il maintient en vie. La daedhelle dressa l'index de sa main libre. Ah et... On entend parler de toi jusqu'au Zagazorn, pour information.

C’était une scène des plus étranges, les deux sœurs qui se tenaient le plus loin possible l’une de l’autre. Se jaugeant mutuellement. Les deux ilythiiris savaient pertinemment de quoi l’autre était capable, et bien que les années les eussent séparés, ni l’une ni l’autre ne semblaient avoir oublié le manque de confiance qu’elles se portaient mutuellement. Si la première réplique de sa sœur ne fit pas sourire l’Obok Yatharil, la mention de Chandra ne fit qu’agrandir son sourire carnassier. « Elle peut essayer… Disons que cette fois, ce n’est pas elle qui est en position de force. » Nul besoin de lui dire qu’elle s’était hissé dans la hiérarchie. « Quant à Vhukiir et Tebagh… » Elle fit une moue amusée, « tout dépend de quel camp ils choisissent…  Les plus faibles n’ont pas de place dans mon monde. » Mais la conversation prit une tournure disons... des plus surprenantes. T’sisra lui donna des informations plus qu’importante pour la prise du manoir Do’Ath. Générosité? Ou tout simplement voulait-elle se réjouir d’avance du sort qui attendait leur tante? Qui pouvait réellement le dire! Peut-être une faiblesse de l’ilythiiri qui lui faisait face. Si Kha’linas ne répondit rien aux informations de sa sœur, la dernière réplique lui fit hausser un sourcil. Elle ne put s’empêcher de cacher sa surprise alors qu’elle entendit ce que venait de révéler sa sœur… Jusqu’au Zagazorn? La péninsule, elle aurait compris, mais le zagazorn? Qu’est-ce que les nains pouvaient en avoir à faire de son existence? Quoique apprendre que son nom traversait les frontières devaient certainement dire quelques choses et le murmure du visage hurlant sembla des plus enthousiasmes…


C’est ton aura.
Elle traverse les factions.
Tous te connaîtront, tous craindront Kiel Elamshinae…


La main torturée de la prêtresse sembla se décrisper un moment alors que sa tête se penchait légèrement sur le côté; « De quoi parles-tu? Pourquoi le zagazorn s’intéresserait à moi? » Les nains n’étaient pas sa cible – du moins pas sa première cible – et elle avait bien du mal à imaginer pourquoi son nom traverserait aussi vite les frontières. Est-ce que les nains avaient fait des alliances avec la péninsule? C’était bien nouveau! Mais cela apportait une autre facette qu’elle n’avait guère envisagée… Se pourrait-il que les nains répondent à un appel à l’aide de la péninsule?

Au Puy d’Elda, éradiquer la faiblesse avait toujours été une priorité, et ce, depuis des siècles. Les forts tiraient la société vers le haut depuis sa fondation. Qui de Tebagh et Vhukiir se ferait le rempart de Chadra ? T’sisra pariait sur le premier. Il était plus sanguin et nerveux que son frère retors et sournois, cela ne faisait aucun doute.

- Je sais que les plus faibles n’ont pas leur place au Puy. J’espère pour eux qu’ils sauront faire le bon choix, et qu’ils le feront rapidement. Souffla T’sisra avec un sourire un coin. Quant au Zagazorn… Les nains ne s’intéressent pas à ton cas particulièrement, pas du tout en vérité. En revanche… Les humains, c'est une tout autre histoire.

T’sisra n’avait toujours pas bougé d’un cil etson attention se portait toujours les battements alentours. Cependant, elle avait piqué la curiosité de sa sœur, ainsi cette rencontre réservait peut-être encore quelques rebondissements.

- Je n’ai malheureusement pas pu réellement… Discuter avec eux. Les nordiens ont tendance à mouiller leurs pantalons lorsqu’ils croisent une peau grise, même une comme la mienne. La noirelfe marqua une pause l’espace d’un bref instant, alors que filait entre ses pensées le souvenir de la Dame de Fernel et celle d’Oësgard. Toujours est-il que si tu as été évoquée, c’est que tu dois leur ficher une peur bleue et que tu es certainement une de leurs préoccupations, si ce n’est pas le centre de celles-ci.

Si la noirelfe n’était pas en pleine situation de prédation, elle aurait haussé les épaules. Elle se contenta pour l’heure de contourner, lentement, le tas de chairs informes, sans quitter Khal’linas des yeux. Et depuis que leurs regards s’étaient croisés, elle n’avait toujours pas cillé.

- Je gage que vos… Relations seront… Retentissantes.

Elle n’en avait que faire de ses cousins. Leurs choix étaient simples. Suivre l’Obok Yatharil ou mourir devant elle alors qu’elle prendrait ce qui lui revenait. « Je l’espère aussi. Mais je verrais bien ce qui se passera avec ce passage. Peut-être aurais-je la chance de savourer leurs hurlements. » Sa main se crispa alors qu’elle entendit les murmures se transformer en cris. Elle attendait ce moment avec impatience, et utiliserait certainement les informations que T’sisra lui avait dévoilées. Quoiqu’en réalité Kiel Elamshinae ignorait si cela était une manigance de sa jeune sœur. Ou peut-être souhaitait-elle voir Chandra mourir dans les plus atroces souffrances? Qui sait? Peut-être avait-elle toujours une fibre drow en elle. Cela ne la sauverait pas au final… Mais au moins elle avait gagné un peu de temps. Les murmures ne la voulaient pas. Du moins pas tout de suite et T’sisra s’était révélé plus qu’utile jusqu’à maintenant. Puis vinrent les informations sur les humains…


Ah les humains…


Dans leurs cas, l’intelligence semblait être un pur accident. Jamais elle n’avait vu d’être aussi pathétique. Kha’linas haussa les épaules, un air las s’empara de son visage. Ces petites créatures pouvaient parler comme ils le voulaient, ils seraient définitivement les premières à se faire éliminer du nouveau monde qu’elle s’apprêtait à mettre sur pied. Ce nouveau monde où Kiel règnerait, où les plus faibles seraient soumis au tourment. Des sacrifices pour le visage hurlant. La seule pensée d’entendre la symphonie de cri la fit frissonner. Enfin, elle pourrait ressentir quelques choses, enfin elle retrouverait l’extase, le plaisir de la douleur… L’oreille de la noirelfe se dressa soudainement, comme si elle avait entendu un quelconque son. Son regard vide se porta sur le sol, écoutant doucement les alentours, laissant pas la même occasion sa sœur continuer sa rengaine. Elle voyait bien qu’elle souhaitait lui retirer quelconques informations pour les données à ses ennemis. Mais elle ne pourrait rien faire. Personne ne pourrait rien faire pour contrer la volonté de sa maîtresse.


« La dame de Fernel je suppose? »  Kha’linas eut un sourire carnassier alors qu’elle revoyait le visage horrifié de l’humaine alors que son pantin s’approchait d’elle. Oh oui… elle se souvenait de son expression, des hurlements, de sons visage blafard alors qu’elle déambulait dans les rues de Thaar pour s’échapper de l’Obok Yatharil.  Cela avait été si bon… si excitant...« Ce n’est rien de personnel. Je ne veux qu’entendre leurs cris… et qui sait? Peut-être leurs apprendre à s’agenouiller devant moi. » Soyons honnête, dans le cas de Kha’linas, agenouillé quelqu’un était probablement l’expérience la plus déplaisante qu’ils pourraient subir… Probablement qu’ils ne pourraient jamais se relever après qu’elle ait terminé avec eux. « Mais s’ils me considèrent déjà comme un vilain, que sera mon titre quand je réussirais ma quête? » Son sourire carnassier sembla s’agrandir alors qu’elle imaginait déjà la suite… Oh oui, ils hurleraient tous…

Si les eldéens cultivait une force d’une violence toute naturelle, que leur société y puisait une force primale à l’origine de la structure de leur société, Kha’linas semblait éprouver un besoin malsain bien éloigné des préceptes des forces de destruction primale. Un esprit malade rongé par une folie indicible qui tôt ou tard se voudrait délétère et probablement mortelle.

- Fernel… Souffla T’sisra en acquiesçant lentement. Un nom qui ne m’est pas étranger. Je crois bien que c’est elle qui fit colporter ton nom jusqu’à mes oreilles.

La daedhelle restait interdite face aux ambitions mortifères de son sang. Quant à ce titre auquel elle semblait courir après, cela promettait d’insoupçonnables conflits par delà les forêts et les déserts.

- Enfin… Non que nos retrouvailles ne me déplaisent, cependant il semble que nous ayons réussi à rattraper des décennies de  temps perdu en ces quelques échanges aussi courts fussent-ils. Alors, à moins que tu n’aies quoi que ce soit à ajouter, nous allons devoir nous quitter.

T’sisra se tenait toujours au même endroit, elle n’avait plus bougé depuis quelques secondes déjà. Son regard toujours rivé dans celui de sa sœur, son attention allant à la prédation de l’Aduram elle-même. La tension culminait en cet instant et leur rencontre touchait à sa fin, quand la civilité de son issue, les secondes suivantes allaient être révélatrices.

Son menton semble se baisser légèrement alors que les prunelles blanchâtres sont fixés sur celle qui partage son nom. Un sourire carnassier vint orner ses lèvres, alors que sa main semble se crisper de nouveau sur les cris rageurs des voix qui semblent se déchaîner. Décidément cette réunion familiale ne semble pas plaire à tout le monde.


Tue-là.
Fais-la hurler.
Montre-lui la puissance de l’Elda.
Non…
Il y a plus important que cela.
SILENCE.


Les voix s’interrompirent alors que l’Obok Yatharil eut une espèce de spasme.


Laisse-là. Elle contemplera bientôt notre travail et là, là tu auras ton moment.


Un sourire vint éclairer ses lèvres, alors qu’elle fit tournoyer sa dague, la rangeant finalement à sa ceinture de chaîne. Son regard se planta dans celui de sa sœur, laissant volontairement un silence s’imposer dans la forêt, alors que sa voix rauque vint de nouveau orner la clairière. « Tu as de la chance… Elle ne te veut pas maintenant. » Sans bouger son regard, l’Obok Yatharil défit doucement les liens qui retenaient son masque d’ Onous'Delab, avant de le poser sur son visage. « Nous nous reverrons bientôt T’sisra. » Sans rajouter quoique ce soit, la favorite de Kiel tourna les talons avant de s’enfoncer dans la forêt. Il y avait plus important que sa sœur… Un jour elle aurait son moment avec cette dernière, mais le moment n’était pas encore arrivé.