Ceux qui guident sur la bonne voie (Solo)

Ce jour-là, les choses s’avéraient particulièrement calmes dans la grande citée blanche. Après un mois particulièrement intense, le nouveau Maintyh de l’armée royale avait fini par retrouver un rythme confortable. Le temps avait encore à faire son œuvre bien entendu et Aegden ne comptait pas se reposer sur ce qu’il avait déjà acquis jusque-là, mais beaucoup de pas avait été franchis depuis qu’il avait pris la relève de feu son prédécesseur sur la milice. Il s’y sentait désormais à sa place.
Le soleil était presque à son plus haut point dans le ciel lorsqu’Aegden avait entendu une voix l’appeler derrière lui. C’est avec joie qu’il avait alors laissé venir à lui un mage qu’il connaissait bien désormais. Malgelir n’avait pas changé. Pas bien grand pour un elfe des cités, sa crinière bouclée d’un noir de jais était ramenée en une queue de cheval sur son épaule. D’habitude vêtu avec un certain soin même en service, sa tenue semblait bien plus pratique qu’élégante pour une fois ce qui intriguait le soldat. D’ailleurs il portait un sac sur son épaule.

-Tu va quelques part Malgelir ?

-Dans la forêt. Le mage hocha la tête, un petit sourire au coin des lèvres. Si tu as quelques minutes tu devrais m’accompagner, ça devrait te plaire.

-à ce point ?

Le lancier avait haussé un sourcil. Malgelir avait parfaitement sût attiser sa curiosité et il le soupçonnait fortement de l’avoir quelque peu fait exprès l’espiègle aéromancien… Cependant ce dernier ne sembla pas vouloir s’expliquer et fit mine de continuer son chemin l’air de rien.

-Tu as gagné… Je te suis. Promet moi juste que je serais vite rentré. Je n’aime pas disparaitre à l’improviste.

-ça mon ami, ça ne dépendra que de toi.

-Tu est sûr que tu ne veux pas m’expliquer où on va ?

Trop curieux pour laisser passer l’occasion, Aegden avait suivi son ami à travers la cité, sans en savoir vraiment plus sur leur destination que s’agissant de l’extérieur des murs. Malgelir ,lui, prenait un malin plaisir à garder le silence. Les rôles s’inversaient pour une fois, c’était le plus bavard des deux qui s’obstinait à garder le silence. C’était donc sans grandes attente qu’Aegden avait posé sa question. Pourtant cette fois Malgelir lui répondit.

-On ne va pas vraiment s’éloigner si ça peut te rassurer. On sera proche des jardins. Je crois.

-Tu crois ?

N’était-il donc pas certain d’où ils aillaient ? Cela étonnait franchement le mainyth. Que fabriquait donc le mage ?

Toujours est-il qu’il le suivit de longues minutes durant, l’observant par moment effectuer un étrange manège. Il sembla en effet, une fois un peu éloigné des murs, chercher une piste au sol et dans les branches. Et puis finalement, après une marche un peu hasardeuse, rythmé par les recherches de Malgelir, ce dernier finit par se figer et fit signe à son compagnon de route de faire de même. Le ruban constamment attaché à son poignet se mû alors comme par un courant d’air invisible puis une brise vint chatouiller leurs visages.

-Ils vont s’apercevoir que nous sommes là, mais si c’est la symphonie qui le leur dit, ils auront peut-être moins peur qu’en nous sentant.

Intrigué par tout ce manège, Aegden s’approcha avec précaution de son ami et suivit son regard à travers quelques fourrés épars. Il ne compris pas tout de suite la vision de la petite dizaine de créature tranquilles devant eux. Pourquoi Malgélir prennait-il autant de plaisir à l'amener ici ?

-Des chevaux ?

-Non. Des Mathandils, Aegden.

-Je croyais qu’ils n’étaient qu’une légende…

-Pas vraiment. Mais beaucoup d’entre nous les confondent avec des chevaux, comme tu viens de le faire. Tient je crois que nous somme repérés.

En effet l’un des équidés avait relevé la tête et pointé ses oreilles dans la direction des deux elfes. Il sembla au lancier que la créature réfléchissait. Comme si elle cherchait la meilleure façon de réagir à cette présence qu’elle ne connaissait pas.

-Montrons nous. Murmura-t-il à son ami. Ils risquent de fuir.

Malgelir hocha la tête et obtempéra. Tout doucement les deux taledhels sortirent de leur cachette, sans geste brusque, prêtant attention aux réactions des équidés qui les avaient à présent définitivement remarqués.

Celui qui avait semblé à Aegden qu’il réfléchissait frappa son sabot contre le sol et piétina quelques secondes.

 -Ne bouge plus. Il ne veut pas que nous approchions plus. C’est l’étalon qui défend le reste de la harde. C’est pour ça qu’il se place entre nous et eux.

-Comment tu sais tout ça Malgelir ?

-Je les observe depuis un moment. Ils ne sont pas souvent aussi proches de la cité.

Le mage ne mentait pas. A peine les deux elfes avaient-ils fait mine de se figer que le plus proche des mathandils avait stoppé son manège et se contentait à présent d’agiter sa queue en observant les deux étrangers. Malgelir semblait tout de même plus à l’aise que son camarade et s’assit tranquillement sur le sol. Ouvrant finalement son mystérieux sac en toile. D’un geste il invita son ami à faire de même et souris amusé.

-Ils ne resterons peut-être pas bien longtemps mais c’est un progrès, la première fois c’est à peine si j’ai pu les apercevoir avant qu’ils ne détalent.

Il se saisit de deux pommes et les fit gentiment rouler en direction de l’étalon toujours sur ses gardes. Celui-ci sembla hésiter entre donner de l’attention aux fruitx ou aux elfes. Les quelques autres mathandils observaient eux aussi la scène, tantôt curieux, tantôt méfiant. Tous restaient malgré tout sagement derrière le premier.

La scène dura quelques temps, les équidés cherchant à interpréter la raison de cette présence nouvelle parmis eux et les deux elfes cherchant à mieux comprendre les sublimes créatures. Malgelir partagea quelques observations quant à la place qu’il pensait attribuer à certains des équidés. Quelle jument semblait être la matriarche de la harde, quels étaient les plus jeunes... Et puis finalement, l’étalon se saisit de la pomme et émit un petit sifflement strident. Le groupes fila aussitôt à travers les bois.

-Ne soit pas déçu. Un pas après l’autre. Malgelir rit doucement en observant la tête que faisait son compagnon d’arme. Rentrons, ils ne reviendront pas avant un moment.

Le lendemain les deux amis avaient convenu de retrouver la trace de la harde, et lorsqu’ils y parvinrent ils sentirent le groupe un peu moins méfiant, bien qu’ils finirent encore par prendre la fuite au bout de quelques minutes.

Cela devint alors une sorte de rituel pour les elfes. Lorsque leurs occupations le leur permettaient, ils retrouvaient leurs chemins. Jamais ils ne tentaient de brusquer les choses et ils laissaient les mathandils prendre confiance par eux même. Éventuellement, les créatures finirent par cesser de fuir totalement, se contentant de quelques regards dans la direction de ces étranges bipèdes venus rythmer leur quotidien depuis quelques jours.

Un jour Malgelir ne put être présent, mais au lieu de renoncer, Aegden décida d’approcher le groupe seul.
Cette fois non plus les mathandils ne firent pas mine de s’enfuir. Au contraire ils semblèrent presque attendre de voir apparaitre la silhouette de l’élémentaliste. Amusé le lancier ne put s’empêcher une remarque à voix haute.

-Je suis seul cette fois. Désolé.

Doucement, il fit comme la première fois et s’assit sur le sol, se contentant d’observer le comportement du troupeau. Il n’était pas du genre érudit mais rares étaient les occasions de fréquenter la faune d’aussi près. Malgelir lui avait plus tôt expliqué que les mathandil avaient une organisation précise de leur groupe et Aegden trouvais cette observation tout à fait fascinante.

L’étalon garant de la sécurité du petit groupe finit d’ailleurs par se coucher tranquillement près d'un autre mâle bien plus âgé. Profitant de cette soudaine liberté, un mathandil à la robe grise pommelée et à la longe crinière noire s’approcha tout doucement. Il avait l’air curieux, on aurait dit ces enfants attirés par on ne savait qu’elle merveille à leurs yeux mais n’osant pas déranger. Le museau bas, les naseaux frétillant et les oreilles en avant, il était loin d’être aussi méfiant que son ainée…

-Viens mon grand, n’ai pas peur.

Aegden sourit et tendis gentiment sa main. L’animal cessa son manège, hésitant à nouveau. Alors le soldat baissa son bras conscient qu’il venait de faire une erreur…et l’animal recommença à s’approcher jusqu’à ce que l’elfe soit obligé de lever la tête pour le fixer. Le mathandil vint imprimer des petits coups contre l’épaule de l’elfe qui haussa un sourcil, ne comprenant pas tout de suite ce que la créature voulait. Et puis un coup un peu plus insistant que les autre le força à lever la main sur le chanfrein de l’animal pour lui demander de cesser.

-est-ce que c’est ta façon de me dire que c’est bon tu acceptes le contact ?

Car en effet le mathandil avait retrouvé son calme, soufflant tranquillement par ses naseaux. Ses grands yeux noirs pétillant autant d’intelligence que de satisfaction. Un pas après l’autre avait dit Malgelir…

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