Lün meurtrie, Lün bafouée, Lün martyrisée... Mais Lün, libérée.

8ème jour de la 6ème ennéade de Vérimios, premier mois de l’Eté de l’an XVIII.
Quelques heures après que Marc-Aurèle se soit rendu à Valcan.
Dans la cité de Lün.

Une journée bien chargée pour le régent du Comté d’Arétria. En quelques jours, Marc-Aurèle dû se rendre à Terrefière, depuis Arétria. Sur ses terres, accompagné par sa future épouse, il n’y resta qu’une nuit et une matinée, car déjà, il devait repartir en direction de Valcan. Une bourgade qu’il rallia en quelques jours, et dans laquelle il confia au seigneur local, le très lâche mais pardonné Théodore de Valcan, le pardon Comtal, en plus de sa mission décidée par Magnus de Terresang.

A Valcan, il n’y resta qu’une heure, à peine. Théodore ne souffrirait d’aucune discussion, ni aucune négociation. Les décisions furent données, et la mission expliquée, et Théodore comprit bien vite qu’il n’avait point d’autre choix. Si le pardon Comtal était un exploit en soi, il s’accompagnait d’une mission ô combien difficile, et qui, elle, ne souffrirait d’aucun échec.

Immédiatement après la fin de cette entrevue, Marc-Aurèle, sa promise, et toute sa cohorte de soldats et de diplomates, se remit en route en direction de la très proche cité de Lûn, reprise depuis plusieurs ennéades par les forces Comtales, et qui, aujourd’hui, était gérée par quelques guildes et quelques prêtres.

D’ailleurs, Marc-Aurèle devait rencontrer la prêtresse Zofia, et le chevalier Andran. Ces gens devaient être, selon Magnus, les principaux protagonistes de cette nouvelle mission, et ceux avec qui le régent Comtal devait dorénavant travailler. Alors, lorsqu’enfin la cohorte arriva à Lün, Marc-Aurèle descendit de son destrier, au beau milieu de la cour principale de la cité, devant la forteresse de Lün. Pieds au sol, engoncé dans son armure, sa fidèle claymore dans le dos, Marc-Aurèle avait fière allure, mais il avait hâte de commencer sa tâche. Autant par intérêt, et par honneur, que par ennui. Car tous ces trajets étaient quelque peu ennuyeux…

« Je suis Marc-Aurèle de Terrefière, régent de notre suzerain, le Comte Magnus. » Dit-il à voix haute à l’assemblée formée devant lui. « Qui, parmi vous, est Sire Andran ? Et Mère Zofia ? »

Il ne fallait pas traîner, en effet.

Korm Prédeaux
Korm Prédeaux était assis sur une grande chaise, à l'extrêmité d'une longue table rectangulaire nichée au milieu de la grande salle. La forteresse de Lün était presque devenue sa nouvelle demeure, maintenant qu'il siégait là depuis des mois et des mois. Expérience oblige, les autres chevaliers l'avaient de facto désigné comme le chef, le commandeur. Il donnait les consignes et conseillait les bourgeois que le Comte Magnus avait nommé pour régenter la cité, et les autres chevaliers s'exécutaient. Cela avait au moins le mérite de fonctionner plus ou moins efficacement, lorsque les Guildes ne passaient pas leur temps à se prendre le bec. Mais, pour un chevalier d'Othar comme l'était Korm, devoir jouer les bureaucrates pendant que les autres guerroyaient était une situation assez frustrante.

La fin de l'année approchait, et rien n'y changeait. Ou presque. Magnus était ce qu'il était, certes, mais il n'était pas assez stupide pour penser qu'il pouvait laisser Lün sans un véritable dirigeant. Les Guildes de la ville, ou même les Marcheurs Austères, ne pouvaient fonctionner qu'à court terme, afin de se laisser le temps de dégoter quelqu'un qui aurait les épaules pour tenir à long terme. Tôt ou tard, le Comte viendrait avec l'heureux élu… ou plutôt le malheureux élu. Cette ville paraissait être un chantier immense et insoutenable comparé à celui d'une cathédrale. Quoi qu'il en soit, Korm et ses frères d'armes présents à Lün pouvaient se réjouir à l'idée de pouvoir prendre du repos, après avoir trouvé un endroit dans lequel il pourrait installer leur nouvelle commanderie, comme le leur avait promis le Comte.

« Hé ! Korm ! Viens voir ! On a de la visite ! » l'interpela Spahi, ne manquant pas de l'arracher de ses pensées d'une manière assez brusque.

Spahi Royce

Le chevalier se leva et suivit son ami à l'extérieur, où Terrance les attendait déjà, s'appuyant sur son écu planté au sol par les avants-bras. Kolgrim était encore et toujours avec la milice urbaine, qu'il s'était chargé d'entraîner afin de leur apprendre à tenir une épée sans tressaillir devant le moindre bandit. Il n'était que rarement présent aux réunions.

« Tu sais qui c'est ? »
« Non… mais qu'importe. C'est une délégation comtale. »

Effectivement, il s'agissait d'une délégation comtale, reconnaissable aux quelques étendards qui flottaient au gré du vent. Elle était menée par un homme en armure de plates complète, probablement un chevalier, à tout le moins un noble représentant du Comte. Les Marcheurs Austères accompagnèrent son arrivée du regard, jusqu'à ce qu'il se présente devant eux, ne manquant pas de se regarder d'un air interloqué. Régent du Comte ? Qu'est-ce que c'était que cette histoire ?

« Ah… mais si ! Il a du partir à Diantra pour les célébrations de la nouvelle année. » marmonna Spahi, qui avait complètement omis cette histoire.
« Soyez le bienvenue dans ce cas, Monseigneur de Terrefière. Cela dit, je dois vous avertir que Sire Andran Straggen n'est pas ici… il ne l'a même jamais été, bien que nous lui devons notre présence ici. Je suis Sire Korm Prédeaux de l'Ordre des Marcheurs Austères. Voici Sire Terrance Duiliff et Sire Spahi Royce. Sire Kolgrim Sastefor entraîne la milice donc je crains qu'il ne rentre pas avant un moment. » l'accueillit Korm, désignant ses camarades d'un geste de la main. « Pour ce qui est de Mère Zofia… » Le chevalier d'Othar s'interrompit, pensif. Il n'était plus tout à fait sur de savoir où en était les Hospitaliers. « Je crois qu'elle n'est plus présente en ville non plus. Tiens, Terrance, je te laisse aller me quérir les Hospitaliers. » Korm se tourna vers Marc-Aurèle. « Entrez, entrez, je vous prie. Nous serons plus à l'aise pour discuter à l'intérieur. »

Alors que Korm laissa entrer les figures de la délégation Comtale, mandant aux serviteurs d'apporter une boisson et de quoi manger, Terrance descendit les marches et prit le chemin Temple de Néera afin de trouver quelqu'un pouvant représenter les Hospitaliers.