Un pieux mensonge vaut parfois mieux qu'une vérité qui dérange | Solo

1er jour de la 7ème ennéade de Bàrkios.
Second mois de l’Automne | Année XXI | XI Cycle.
Soltariel-la-Ville | Bureau ducal.

Le retour de l’océan d’Eris c’était fait doucement, mais sûrement. Les vents, toujours levés, charriaient avec eux le froid glacial d’un hiver acharné qui ne faisait que pointer le bout de son nez pourtant. Les marins, inquiets par les conditions se détériorant de jours en jours, manœuvraient avec précautions et délicatesse, tandis que le rassemblement de navires qui avait été réquisitionné par Adriano en vue de l’entrevue avec le capitaine pirate se faisant appeler « le Rokvenha », tentait de ne point se heurter face aux vents et aux flots. Ils arrivèrent néanmoins à bon port et, conformément à l’accord signé avec le flibustier, le Duc ordonna que soient fortement diminuées les patrouilles de l’armada, et que soient libérés les pirates capturés sur les dernières ennéades. Si, cette fois, il n’offrit aucun navire – car cela n’avait point été négocié et sa bonté avait des limites – il laissa toutefois les pirates libérés sur son territoire avec, notamment, l’information selon laquelle ils devaient leur liberté au désormais célèbre Rokvenha. Nul doute que cela suffirait à les motiver à retourner jusqu’à Méca, et à s’enrôler dans l’équipage du forban.

Puis, il entreprit, quelques-jours après – car il avait fort à faire et il était glacé par ce voyage désagréable – de réaliser l’autre partie du contrat : annoncer la mort d’Adélina Emmeline de Lourbier, mariée Cortès di Alcacio. Celle qui ne fut Duchesse que pour quelques-jours, serait, dorénavant, connue comme une martyre et une victime de la folie d’un homme. Enlevée, faite prisonnière et disparue en mer à cause de la félonie d’un Comte trop gourmand, nul doute que certains lui rendraient bientôt un culte… Ou de grands hommages. Adriano, bien-sûr, organiserait des funérailles en grandes pompes afin qu’une urne portant son nom puisse reposer dans la chasse des Ducs et Duchesses de Soltariel. Il enverrait donc plusieurs lettres : une au Roy, et une à la famille d’Adélina en Alonna, laquelle ressemblerait à la première évidemment.

1er jour, 7ème ennéade de Bàrkios – An XXI : XI. Cité de Soltariel – Duché de Soltariel. Votre Majesté le Roy Bohémond Phiiram Ier, béni de La Mère. C’est avec une grande tristesse, et un immense chagrin, que je dois vous faire part de la mort de ma jeune épouse, Adélina Cortès di Alcacio, née Adélina Emmeline de Lourbier, décédée sur un navire abimé en mer suite à l’attaque avérée de pirates sanguinaires. S’il a été impossible de retrouver un corps, les dépositions des pirates et les témoignages de ces derniers et des marins du Soltaar ayant retrouvé l’épave, sont sans équivoques : la Duchesse de Soltariel fut tuée lors d’une attaque meurtrière, au large de Tylère, peu après le coup d’état manqué de feu l’Archomte Norbert d’Ydril. En tant que Roy de la Péninsule, et au vu du contexte autour de cette disparition, vous prévenir était, je le sens, une partie de mon devoir en tant que vassal et Paire de votre Royaume à la destinée divine. Le Soltaar observera une ennéade de deuil, et de grandes funérailles seront réalisées pour aider son Souffle à rejoindre La Mère. A l’issue, comme le demandent nos lois, je demanderais au Grand Prêtre et à la Grande Prêtresse de Néera, de faire de moi un veuf. Puisse la Mère vous guider dans votre destinée bénie. Adriano Cortès di Alcacio, Duc de Soltariel et Seigneur d’Alcacio.

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