L'irradiante épistole - Membres du Conseil de Thaar

Alors que s’étendait au dehors, les frimas sans fin d’un hiver aussi surprenant que rude ; crapahutaient entre les venelles et les impasses, les coursiers venus des souterrains. Trapus mais agile, ils virevoltaient avec la mission de ceux se sachant mandés. Possédant chacun une destination précise, rien n’aurait put et dut se mettre en travers de leurs routes ; aussi pour jouer de facilité, certains s’étaient grimés jusqu’à paraitre simple marchand cherchant à écouler, quelques babioles bien cachées. Ils parvinrent tous à bon port, dans les demeures et palais, des Princes Marchands siégeant de la Cité.

A mes chers confrères, Phares étincelant de notre monde, Princes et Princesses Marchands de Thaar,  

Mes amis, l’heure est grave.

C’est en ces temps troubles, que moi, Ozkun fils d’Ozir, souhaitent vous annoncer quelques sombres nouvelles. Bien qu’il me soit impossible de dire que nous nous connaissions tous par quelques biais intimes, j’espère penser n’être ici un réel inconnu pour personnes tant nos parcours se sont croisés ces dernières années dans notre splendide cité.

Aujourd’hui, je vous écris en ma qualité de Maître des Caves, et bien que je le regrette, il me faut vous annoncer le comment en sui tarrivé à cet état de fait. Nous durgazdawi n’avons pas pour habitude de s’épancher sur nos internes soucis, mais il m’est impossible de garder cette vérité à moi seul : durant les premiers jours de l’hiver j’accompagnais Marzaban Ambreroc en direction de la cité d’Esion. Sur le trajet, nous fûmes violemment attaqué par une bande de pilleur Massabonds. Dans cette terrible échauffourée, l’Ambreroc, fut gravement blessé. Et je le fus à mon tour, faillant perdre la vie sans l’arrivé impromptu d’une colonne des guerriers de Brââ qui nous tirèrent de ce mauvais pas.

Cet acte odieux ne saurait rester impuni. En s’attaquant à un Prince Marchand, les Zurthans on franchit une limite d’on ils auraient dut se prémunir. Afin de statuer sur le sort que le Conseil souhaitera trancher, j’organiserais en ma qualité de Prince siégeant, une séance aux derniers jours du mois.

Car vous l’aurez compris, Marzaban, que son nom résonne aux esgourdes du Fortuné, à rejoint les Derniers Halls. Dans ces dernières paroles et volontés, il me désigna comme son successeur direct.  J’entends donc bien, continuer à faire rayonner son aura et son engagement à travers celui qui sera le mien aujourd’hui.

Je souhaiterais aussi adresser un mot particulier à la Princesse de la Chair, grande philanthrope et merveille des sables, Maralina Irohivrah. Ces quelques mots j’espère, seront vous rassurer sur ma sincère démarche concernant les accords qui furent signé avec mon prédécesseur sur le devenir des Sept-Monts. En ma qualité de gouvernant assurant la gestion de la moitié de ce  fief, j’entends bien respecter les accords qui furent prises par mon parti, les Mille-Caves. A ce titre, je souhaiterais, à votre désir, vous rencontrer afin que nous nous épanchions sur le sujet en toute transparence.  

Dans l’attente de pouvoir partager quelques moments moins pénibles en vos illustres compagnies, recevez mes salutations les plus cavernicoles.

Sa Pansité, Ozkun Ozisson le Magnifique, Maître des Caves, Prince Marchand de Thaar et des Sept-Monts, Membre du Conseil de Thaar.

Le 4ème jour de la 3ème énnéade de Verimios, an 21 du XIème cycle.

« — Votre Altesse ?

Dans un gloussement, la tignasse brune releva la tête, distinguant à travers les rideaux de soie une forme impatiente se tenir non loin de là. Alors qu’elle se relevait, des mains aux griffes d’argent empoignèrent son torse dans un petit rire auquel elle ne put résister. Redirigeant son attention, elle posa un doigt impérieux sur la bouche de la rousse qui s’en empara avec les dents. Dans un sifflement réprobateur, Shaheem finit par daigner répondre, alors que le malheureux, vraisemblablement inconfortable, se balançait d’une jambe à l’autre.

— C’est pour quoi ?
— Vous m’avez fait mander votre Altesse, au sujet d’un courrier urgent.
— Ah oui.

Soudainement un peu moins accaparée par les yeux enivrants de Mihai, elle se détacha de son corps non sans un juron étouffé de l’intéressée. Fort heureusement pour le garde qui se trouvait de l’autre côté du rideau, il n’avait pas décliné son identité – sans quoi, la Princesse de Sel était presque certaine qu’elle n’aurait rien pu faire pour lui. D’un pas nonchalant, elle s’approcha de son secrétaire, essuyant sa bouche du revers de la main droite, et en tira une missive cachetée. Nue comme au premier jour, elle la tendit au coursier tout spécialement venu pour ce pli.

— A remettre au nouveau maitre des Mille-Caves sans attendre. Ne fais aucun détour, et tu auras le double de ton prix habituel. Maintenant va.
— Oui votre Altesse, comme vous le désirez votre Altesse.

Il s’inclina bien bas, et partit comme une furie, le rouge aux joues. Il avait lutté pour ne pas lui faire offense, mais n’avait su tout à fait détourner les yeux de son corps ; elle ne lui en voulait pas. C’était une chose somme toute humaine, et c’était la seule consolation qu’elle pouvait offrir à ces hommes au désespoir. Mais alors qu’elle observait la porte close, le bruit des draps à l’arrière la ramenèrent dans le réel.

— Crois-tu qu’il est de confiance ?
— Qui donc ?
— Ce gamin.

Elle haussa les épaules, s’en retournant sur la couche abandonnée, un sourire prédateur aux lèvres.
— Aucune importance. Il n’y a rien de compromettant.
— Alors pourquoi tout ce cérémonial ?

L’Asharite rit tout en remontant les interminables jambes de sa partenaire, couvrant chaque centimètre de baisers brûlants, jusqu’à l’intérieur de sa cuisse. Elle planta son regard cristallin dans le sien, un air de triomphe sur le visage.

— Pour faire sortir la vermine de son trou.

A son Altesse Ozkûn le Magnifique, Rhinocéros de Thaar et nouveau Maître des Caves,
Mon ami,

Je vous adresse mes plus sincères condoléances, à vous et aux vôtres, pour la perte du très estimé Marzaban. Sachez qu’Ashaï compatit à votre douleur, et gage un prompt rétablissement à votre mesnie. Nous aborderons, bien entendu, cette affreuse affaire lors de la prochaine plénière. Je gage qu’un tel crime ne saura être ignoré, et que les Mille-Caves pourront demander réparation. Vous avez, mon cher Ozkûn, mon indéfectible soutien.

Si d’aventure vous le souhaitez, nous nous faisons fort de vous accueillir pour un déjeuner dans les jours prochains afin d’assurer ensemble la pérennité des affaires courantes qui incombe à votre nouvelle charge et la famille El’Angharad. Je fais céans préparer tous les papiers utiles à votre succession dans les affaires qui nous lient.

Que la Mère veille sur vous,
Shaheem Misara El’Angharad, Princesse de Sel, Maîtresse d’Ashaï et membre du conseil de Thaar.