Instant bucolique (libre)

Le soleil commençait à s'eclipser, son reflet prisonnier de l'étendue aquatique, une légère brise faisait ployer les hautes herbes autour du lac. Tout était calme, serein. Une forme sortit alors lentement de l'eau. Il s'agissait d'Agrilaz, le nouveau caporal de l'armée régulière naine. Fraichement promu il arborait depuis un sourire joyeux. Afin de se détendre il avait décidé de se détendre dans les eaux chaudes du lac de Rioska, son lieu de prédilection après les champs de bataille.
Sortit de l'eau il enfila une tunique grise légère. Il laissa son armure accoudée à un arbre. Il s'assit alors dans l'herbe, laissant ses pieds tremper dans l'eau au reflets rouges. Ce lieu l'apaisait. Il se sentait bien, reposé, loin de l'agitation de Kirgan. Il savourait intérieurement sa promotion. Son rêve était en train de se réaliser. D'ici peu il continuerais d'évoluer pour ateindre les hautes sphères du commendement de l'armée, il en était persuadé. Un instant il songea à son père. Il ne l'avait pas revu depuis son insertion dans l'armée. Ayant conscience de la deception de son père de quitter l'entreprise familiale il n'avait jamais osé retourner le voir.
Un sentiment de mélancolie vint se mêler à sa joie. Machinalement il saisit sa harpe, l'accorda et commença à enchainer quelques accords. Ses doigts se promenait de cordes en cordes de façon limpide. Les sons émient par l'instrument flottèrent au dessus du lac, ajoutant un peu de magie et de charme à ce lieu déjà si attirant. Les yeux clos Agrilaz continuait à jouer un air lent, triste, retranscrivant la mélancolie qui l'envahissait. Tellement absorbé par sa harpe il n'entendit pas les bruits de pas qui s'approchait de lui...

Dwalín venait de quitter Kirgan il y a peu. Sa formation pour devenir armurier avait été longue et fastidieuse, mais il ne le regrettait pas le moindre du monde. La seule inconnue qui l'inquiétait à présent était de savoir où aller.

Il avait choisi ce métier, car selon lui, c'était le meilleur moyen de rencontrer bon nombre de gens, toutes races confondues, tous idéaux confondus. Une fois qu'il aura vu tous les choix qui s'offrent à lui, peut-être choisira-t-il un camp... mais on ne peut pas dire quelle bière est la meilleure si l'on ne les a pas toutes goûtées !

Le voilà aujourd'hui dans l'impasse ! Les ans commencent à le rattraper et à présent il erre sans destination précise. Ses pensées perdues dans le passé et le futur, il marche machinalement vers ce lac dont on dit grand bien, mais qu'il n'a jamais eu l'occasion de voir.

Tandis qu'il se rapprochait du lac, une musique vint titiller ses oreilles. N'étant pas grand mélomane, il lui fut impossible de déterminer la nature de l'instrument. Instinctivement, il pensa à un elfe... Sa soif de savoir et de diversité à tout de même ses limites. Il se méfie toujours des elfes, ces êtres arrogants.

Mais la curiosité naturelle de Dwalín prit vite le dessus. Il se dirigea vers la source de cette musique. Plus il se rapprochait, plus les notes semblaient tristes. Lorsqu'il fut en vue du musicien, telle ne fut pas sa surprise en voyant un jeune nain assis aux bords du lac, les pieds dans l'eau et tenant à la main un harpe !

Bien le bonjour mon frère !

A la vue de l'expression de surprise sur le visage de l'inconnu, Dwalín venait de le ramener à la réalité assez brusquement.

N'aie crainte, continue ! Je me nomme Dwalín et ma foi, je suis bien heureux de voir que tu n'as pas les oreilles pointues !

Dwalín s'assit aux côté du jeune nain, enleva ses chausses et plongea ses pieds fatigués dans l'eau apaisante du lac. Il jetta un coup d'oeil à son compère. Il s'attendait à ce que le nain reprenne son instrument comme si rien ne l'avait perturbé...

Le vent continuait à faire virevolter les notes que créait Agrilaz. Il était comme en transe, comme chaque fois qu'il jouait seul, se remémorant son enfance, ses frères perdus au combat et tout ces moments qui nous font apprécier d'être encore vivant. Il savait que son espérance de vie, une fois engagé dans l'armée, c'était peut être raccourci de moitié, voir plus mais au final cela ne permettait-il pas de se sentir encore plus vivant? Et depuis sa promotion au rang de Caporal il savait que désormais de lourdes responsabilités pèseraient sur ses épaules sur le champ de bataille. Malgré la joie des perspectives futures était il réellement prêt à assumer son rôle. L'avenir lui dirait bien assez tôt.

Une voix masculine vint troubler sa quiétude et ses sombres interrogations, le saluant. Il se retourna précipitemment, surpris mais surtout en colère contre lui même de n'avoir pas entendu l'homme arriver. Un erreur pareil au coeur d'un combat pourrait être fatal. Heureusement l'homme semblait bienveillant et lui aussi rassuré qu'Agrilaz ne soit pas un elfe.



Bonsoir mon ami. Vient te joindre à moi. Ne t'inquiètes pas ces prétentieux bâtis comme des femmes ne rôdent que rarement près de Kirgan. Ils parlent beaucoup mais leur courage est aussi grand que celui d'un marcassin loin de sa mère.


L'homme, nommé Dwalin, vint s'asseoir près de lui, imitant sa position les pieds dans l'eau. En présence d'une autre personne Agrilaz changea de registre musical. Il n'était pas correct de partager un moment triste avec un frère.Ses doigts passèrent de corde à corde plus rapidement, battant une mesure rapide, créant un rythme joyeux et entrainant. Tout en jouant il observa son invité innatendu. Dwalin semblait plus vieux que lui et plus grand également. Sa musculature était impressionante. De plus Agrilaz remarqua une cicatrice au dessus de son oeil. Ajouté à cela une barbe et des cheveux grisonnants, le jeune caporal le prit pour un militaire.

Dit mon frère tu es de l'armée? Je ne t'ai jamais vu pourtant, de quel bataillon es-tu?

Agrilaz continuait à jouer tandis que le soleil commençait à laisser place à la lune et le jour à la nuit. La température de l'eau continuait à monter alors que l'air se rafraîchissait; des nuages de fumée s'évadèrent alors du lac, créant une atmosphère mystique.

Son nouveau compagnon reprit sa harpe et se remit à jouer. Mais la mélancolie avait fait place à la gaieté et à la chaleur.
Il ne manque que deux bonnes bières pour faire que cet instant soit parfait !
La musique était si entrainante que, sans en être conscient, Dwalín remua doucement ses gambettes faisant clapoter l'eau en rythme. De même, il chantonna dans sa barbe... pas des paroles, oh que non, le vieux nain n'était qu'un piètre poète ! Les yeux fixés devant lui, comme hypnotisé par les mouvements perpétuels du lac, il ne remarqua pas que son voisin le dévisageait tout en jouant.

Dit mon frère tu es de l'armée? Je ne t'ai jamais vu pourtant, de quel bataillon es-tu?

Ces paroles le suprirent, à la fois parce qu'il était si absorbé par le lieux et la musique qu'il avait oublié où il était, mais également parce qu'il y avait bien longtemps qu'on ne lui avait pas demandé son bataillon ! Fier, il bomba légèrement le torse, faisant ressortir la musculature que l'on ne faisait que deviner jusque là. Donnant un bonne tape amicale au jeune nain, il ajouta tout sourire :

Ah, ah, ah ! Mon ami, je vois que tu as l'oeil juste pour déceler les braves parmi les tiens ! Il est vrai que j'ai fait parti de l'armée, dans ma jeunesse. Et comme tu as pu le voir, j'en ai gardé ce beau corps robuste !

Au cas où son compagnon n'ait pas compris, il se tapa fermement le torse.

Mais pour répondre à ta question, non je ne fais pas parti de l'armée. Je l'ai quittée il y a de cela plusieurs années, non pas que ce métier me déplaisais, par Mogar, non ! Mais j'aspirais à d'avantage de liberté, à découvrir ce monde si vaste et si riche, mais qui était encore pour moi inconnu.

Ainsi qu'ils parlaient, la nuit commenca à se faire ressentir et Dwalín remarqua que l'eau qui entourait ses pieds se réchauffait doucement. Ainsi, c'était donc vrai ! Excité par ce phénomène, il remonta son pantalon et plongea un peu plus ses jambes dans le lac. Mais la nuit n'arrivait jamais seule pour le vieux nain, la faim la suivait toujours de près !

Hey, ... ! Tiens au fait mon frère, je n'ai pas encore eu le plaisir de connaître ton nom ! Mais quoi qu'il en soit, vois-tu un inconvénient à ce que nous partagions notre souper ?

Et sans attendre la réponse, Dwalín commença à sortir la nourriture de son sac, car même si son compagnon refusait, lui il avait faim !

Le nouvel arrivant semblait apprécier la musique, marmonnant des paroles dans se barbe et battant le rythme avec ses pieds. Voila ce qu'Agrilaz appréciait dans la musique, elle pénétrait tout le monde sans exception. Cet homme en était le parfait exemple, il ne semblait pas être un artiste dans l'âme et pourtant l'influence des sonorités de la harpe ne faisait pas de doute. La musique était plus forte que les races, les personnalité, elle était universel. Peut être deviendrait il barde si sa carrière militaire venait à s'arrêter.
A la mention de l'armée il sentit un sentiment de fierté envahir Dwalin. Ce dernier c'était redressé de tout son long, bombant le torse et contractant ses muscles. Il semblait encore plus imposant ainsi, tant par sa taille que par sa masse.

Ah, ah, ah ! Mon ami, je vois que tu as l'oeil juste pour déceler les braves parmi les tiens !
Il est vrai que j'ai fait parti de l'armée, dans ma jeunesse. Et comme
tu as pu le voir, j'en ai gardé ce beau corps robuste ! dit-t-il fièrement, son poing heurtant son torse.

Et tu a gagné un peu de ventre depuis à ce que je vois mon frère? A ta décharge il est vrai que la bière est bonne dans certaines tavernes de Kirgan.

Agrilaz partit d'un grand éclat de bruit, effrayant au passage quelques oiseaux nocturnes qui quittèrent leur perchoir rapidement. Il n'y avait aucune moquerie mesquine dans ses paroles, il se sentait juste bien, en compagnie d'un homme qu'il commençait à apprécier. Ce rire était juste l'expression de sa joie.
Son frère lui expliqua alors qu'il avait quitté l'armée, non par dégoût mais par goût pour l'inconnu. Il avait un tempérament aventurier apparemment.

Quel dommage de perdre un soldat de cette trempe et de cette stature à l'approche de la guerre conte les Drows! songea Agrilaz

Cependant Agrilaz comprenait ce que ressentait son nouvel ami. Depuis plusieurs mois maintenant il était cantonné à la surveillance de l'entrée de Kirgan et il devait bien avouer qu'il commençait à avoir des fourmis dans les jambes.
Dwalin lui proposa de partager son repas, mentionant qu'il ne connassait toujours pas son nom, tout en retirant de son sac plusieurs mets des plus appétissant.

Agrilaz se leva et s'approcha de ses affaires posées contre l'arbre. Il y saisit une outre et revint vers l'ancien soldat.

Je me nomme Agrilaz, caporal de l'armée, l'ami! Et j'accepte avec plaisir de manger avec toi! Par Mogar tout ça m'a l'air fort appétissant mais il manque de la bière pour faciliter la digestion.

Agrilaz but une rasade, s'essuya la barbe du revers de la main et la tendit a Dwalin.

Cela ne va pas aider notre ventre à perdre de sa rondeur! Où compte tu aller alors mon ami... Avec les peaux noirs qui rôdent partout tel des charognards les chemins ne sont plus très sûr.