Meca, premiere étape (PV: Lund)

“L’azur se mélait à l’ondée en cette magnifique matinée. Très tot, le mystérieux voyageur avait entamé son périple sur cet imposant bâtiment fendant les eaux limpides. Impassible comme un gardien millénaire était resté de marbre pendant la traversée. L’aube avait dardé ses plus fiers éclats sur sa cape flamboyante et le fil de sa rapière étincelait de milles feux. Son regard perçant, un air emplit de droiture, il scrutait l’horizon d’un air soucieux. Il songeait. Quand revèrait-il sa belle? Pourrait-il l’arracher des griffes du roi Machiavélus? Serai-t-il capable de .....”

“Ahahahah, tissu d’inepties.”

La main referma le livre d’un geste sec.

“Comme si ces choses-là existaient vraiment.”

“Le chevalier étincelant”, encore un livre pour princesses désespérées et pour apprentis croisés en herbe. La jeune femme rangea le petit livre à couverture brune dans son sac, posé à ses pieds.
Adossée au bastinguage du navire, elle contempla un instant la voile blanche étincelante, avant de se tourner vers la mer.
Le soleil se montrait sous son meilleur jour. Il faisait bon, le vent d’Est était doux et caressait la chevelure rousse de la jeune femme, les faisant faiblement flotter au gré des courrants d’air. L’ondée était d’un bleu chatoyant et quelques ersatz de nuages paressaient dans l’azur.
C’était le temps idéal pour voyager en définitive.
L’elfe soupira. Les preux chevaliers s’en allant sauver les demoiselles en détresse, c’était d’un ridicule. Si elles n’étaient pas capable de se sauver elles-mêmes, pourquoi demander de l’aide à une barrique hormonée de faire les choses à leur place?
Il était vrai que Lyliane n’était pas une demoiselle en détresse. En général, elle était plutot du genre à les enfermer à double-tour dans une tour en riant aux éclats.
Toutes ces mièvreries dignes des paons de la cour elfique l’agaçaient. Fort heureusement, le métier qu’elle exerçait l’éloignait de ça, du moins, pour l’instant...

Lyliane passa sa main dans ses cheveux, dégageant une mèche lui gachant la vue d’un si beau paysage. Les coudes sur le bastinguage, les yeux dans le lointain, elle pouvait distinguer les premices de l’île de Meca, sa destination.
Le vent souffla de plus belle. La jeune femme frisonna. Vêtue d’une tunique pourpre serrée autour de la taille par sa ceinture et d’une simple jupe, elle n’avait pas prévu que le temps se raffraichirait autant.

*Vivement qu’on soit à terre, il y fera plus chaud, pensa-t-elle.*

Quelques heures plus tard, le navire arriva en vue de l’île. Après l’avoir amarré à quai, les membres de l’équipage commençèrent à décharger la marchandise. Lyliane avait eu bien de la chance de trouver un navire en partance pour Meca. L’elfe avait grassement payé le capitaine pour la laisser entrer sur le bateau et celui-ci n’avait pas trop bronché.

La jeune femme mis pied à terre. Tout autour d’elle s’ammoncelait caisses de marchandises et odeur iodée de l’océan. Une foule innombrable se pressait ça et là autour des navires, chargeant, déchargeant, vidant, remplissant, ...
L’odeur du poisson vint aux narines délicates de l’elfe. Elle décela, parmis le melting-pot , une odeur de saumon, son poisson préféré.
Elle remercia chaleureusement le capitaine, un vieil homme au demeurant for sympathique et prit la direction de l’auberge la plus proche. Là-bas, elle pourrait y trouver des renseignements sur sa mission.
En effet, si Lyliane était venue à Meca, c’était bien pour y faire son travail, pas pour la vilégiature. Elle aurait tout le temps pour ça après.
Elle repensa à la lettre cachetée dans son havresac...

Lyliane attrapa une tranche de pain dans ses provisions et la machona d’un air distrait. Ses pas finirent par la conduir vers sa destination, une vieille boutique bien à l’écart des autres, dans une ruelle en contrebas d’une des collines de Meca. La jeune femme reconnut tout de suite l’empreinte des Chuchoteurs sur cette maison. Celle-ci était à l’écart de toutes les rues passantes, de sorte que seule une personne informée puisse la trouver. Certains des murs portaient l’empreinte de la signature magique du Chuchoteur vivant ici: un oeil sur un fond de mer.
Avalant sa dernière bouchée de pain, elle se décida à frapper à la porte du vétuste lieu.
Une voix lui somma d’entrer.

Elle entra.

La jeune elfe ressortit de la boutique assez tard, avec un étrange paquet enveloppé dans du vieux tissu sous le bras. Elle le plaça dans son sac avant de partir vers l’auberge. Lyliane passa par les rues alors embrumées par le coucher du soleil et les embruns.

Lyliane eut un mouvement de recul. Si son ordre encourageait les relations sociales, discuter avec un Drow n'avait jamais été dans l'ordre des priorités. Ils avaient trop mauvaise réputation auprès de son peuple pour qu'elle eut jamais l'envie de leur parler. En guise de seule réponse, elle déclara d'une voix claire:

"Et à supposer que je te crois. Qu'as-tu à donner en échange de ce service?"

L'elfe savait que toute chose ne pouvait être acquise qu'en en sacrifiant une autre de même valeur. Si le Drow voulait des soins, il devrait en payer le prix. Si le credo de Lyliane concernant le fonctionnement du monde pouvait être résumé en cette seule phrase, qu'il en soit ainsi.

La jeune femme examina son interlocuteur d'un air attentif. Mis à part ses tatouages, la seule chose qui pouvait l'intéresser chez ce Drow était son argent. N'allons pas dire qu'elle en manquait, mais les temps étaient durs parfois, et les Chuchoteurs ne fournissaient pas toujours à temps la paye.
Mais Lyliane n'avait vraiment pas envie de s'enticher d'un compagnon de voyage. Cela reviendrai à s'enchaîner à quelqu'un, et elle se voulait sans attaches.
Quelque chose vint à frapper les sens de la jeune femme. Il y avait dans les poches du Drow, un objet pouvant faire office de paiement.
Son doigt pointa la poche gauche du pantalon du Drow.

"Il y a quelque chose dans ta poche qui pourrait m'intéresser. Mais ne te fais pas d'illusions, Drow, je ne suis absolument pas compatissante. Si j'avais été de mauvais humeur, je t'aurai éventré sur le champ."

Elle pouvait sentir que l'objet de valeur équivalente était de nature inerte, une sensation minérale et quelque peu magique venait se heurter à son aura.
Ses sens la trompaient rarement.

" Ce n'est qu'un caillou... "

Lyliane riait intérieurement. Ce devait être typiquement Drow de ne pas voir l'évidence. Les minéraux pouvaient contenir des charges magiques, parfois utiles pour la pratique des arcanes magiques. Mais étant donné qu'il avait l'air aussi doué avec la magie qu'elle avec un arc et des flèches, ce n'était pas la peine d'en dire plus.

L'elfe regarda d'un air presque amusé le guerrier en devenir se tortiller pour apaiser sa douleur. Peine perdue, d'après ce qu'elle pouvait constater.

" Vous me soignez ou pas...je ne voudrez pas vous faire perdre votre temps et m'en faire perdre non plus. Que voulez vous exactement ? Pourquoi me refusez vous en garde du corps alors que c'est la meilleur chose que je puisse proposer. "

Lyliane considéra l'individu d'un air grave.

"Je refuse que tu sois mon "garde du corps" pour la simple et unique raison qu'une simple action de charité ne mérite pas que l'on sacrifie sa vie pour autrui, Drow. La seule chose qui me retient de te dépecer sur place est que je ne m'en prend pas aux blessés, alors estime-t-en heureux. Je ne demande que ce cailloux et tu pourras repartir sain et sauf avec ça."

Là-dessus, elle tira de sa ceinture une petite flasque transparente. Un liquide bleu pâle était contenu à l'intérieur. Lyliane s'approcha doucement et tendit son bras vers l'inconnu.

"Alors marché conclu? Mon remède contre ce cailloux. Ne t'inquiètes pas, il te guérira à coup sûr de ta blessure."

Cette action à peine altruiste réveilla son côté marchand. On n'avait rien sans rien dans ce monde.

"Ouuuuuaaaaaaaaaahhhhh"

Telle fut la première pensée du jour de Lyliane. Elle avait mal dormi et se sentait d'humeur exécrable. Matelas trop dur, sommier grinçant, et cette désagréable impression qu'on l'avait épiée toute la soirée.
Elle enfila sa robe et descendit prendre un petit déjeuner léger. Les pièces d'or sonnèrent sur le comptoir et l'aubergiste n'eut pas le temps d'arriver au zinc qu'elle avait déjà quitté les lieux.

Une belle journée s'annonçait, ce qui contrastait grandement avec l'humeur de la jeune elfe.
N'ayant plus rien à faire sur l'île, elle se décida à trouver un bateau vers le port pour rejoindre le plus rapidement possible le continent.

" Jolie le Tatouage... "

Ces mots firent frissonner la jeune femme. D'ordinaire, le tatouage des Chuchoteurs n'apparaissait pas aux gens n'ayant pas une once de pouvoir de détection. Décidément, c'était bien sa journée. Elle se retourna, l'air furieux. Et puis...comment l'avait-il vu? L'évidence sauta aux yeux de Lyliane et elle sentit la colère monter en elle.

" Vous êtes très belle en ce jour ensolleillé. Etes vous sur de ne pas vouloir de moi comme garde ? Et si non, pouvez vous au moins me dire les raisons de votre refus ? Ma race ? Si ce n'est que ça je pourrais toujours trouvé un moyen de vous prouvez que je ne suis pas méchant. "

Des flatteries, encore et toujours des flatteries. Elle en avait assez entendu pour aujourd'hui. Comble de l'horreur, il s'était approché au-delà du seuil du politiquement correct envers une descendante des Sombrelune et de la gente féminine elfique en général. Lyliane avait enfin trouvé un exutoire à sa fureur contenue.

"Encore un pas, et tu pourras dire adieu à ta tête."

D'un geste fluide et rapide, elle avait à moitié dégainé Mélancolie. Elle avait une certaine répugnance à en arriver aux armes, mais la sensation de sa lame noire posée sur la gorge du Drow, l'arrêtant dans sa course la fit sourire. Si la situation devenait trop difficile à gérer, elle n'hésiterai pas à la tuer. Mélancolie s'ennuyait en ce moment, et la Pleureuse rêvait d'étancher sa soif.

"Plus un geste maintenant...."