Une banale soirée...

Lorsqu’elle sentit le pommeau de la lame d’Ikar s’abattre sur son crâne, le feu qui la consumait de l’intérieur s’éteint brusquement. La bête en elle poussa un hurlement de rage mais pourtant aucun son ne sortit de sa bouche. Au contraire ce mugissement lui tordit les entrailles, lui tordait les poumons jusqu’à ce qu’elle tomba… Lourdement….sur le sol, inanimée, son esprit libéré enfin de sa soudaine rage.

Evidemment il lui était impossible de deviner ce qu’il se passait autour d’elle bien que quelques sons, quelques murmures réussissaient à pénétrer dans son esprit, aussi parfois elle entendait les cris plaintifs de sa louve. Elle devait être près d’elle, c’était une idée des plus rassurantes. La nuit n’était pourtant pas calme. Bien que son envie de détruire fût partie, la profonde répulsion qu’elle avait envers elle-même après un de ses épisodes était persistante. De profondes douleurs étirées tout son corps, et bien qu’endormie, elles se ressentaient jusque dans ses songes.
Une nuit de cauchemars et de démons tourmentés commençait. Evidemment c’était les mêmes rêves, les mêmes peurs, les mêmes angoisses. Encore encore et encore. Parfois elle devait avoir des moments de lucidité vu qu’elle se réveillait en sursaut, criant, avant de se rendormir et de recommencer un autre cauchemar.

Le port était presque désert mais il faisait jour, une petite fille aux cheveux noirs s’avance sur le quai avec sa mère. Elle aime regarder la mer, elle aime contempler l’océan. Lorsque l’agitation se fait sentir à quelque pas. Elle reconnait un signe de violence et cours vers le groupe pour éviter qu’ils ne s’entretuent. Un grand vide…. Elle ne voit plus ce qu’elle fait, elle ne ressent plus rien… Elle est là mais elle est absente. Lorsqu’elle se réveille de sa léthargie elle est contre la poitrine de sa mère. Pourtant elle sens une odeur familière, du fer… chaud… rouge…du sang…tout rouge… Un cri de terreur lui échappa.

Elywin poussa un cri de terreur dans son sommeil en se réveillant pendant un moment.

La lune est voilée par les nuages, et pourtant le ciel semble être teinté d’une couleur rouge. Le roulement des vagues se fait entendre, les oiseaux se sont tus, il faisait encore nuit, mais l’aube devait être proche. La chambre est étroite, seule une petite fenêtre laisse filtrer la lumière, pourtant il fait sombre. Deux ombres se dessinent dans l’obscurité. Un contact rassurant comme une chaleur humaine et protectrice. Mon père me serrait dans ses bras. Une fois de plus j’étais là, mais j’étais absente. Sa voix me parvenait mais je n’en comprenais pas le sens… J’entendis une lame qui sortait de son étui. Cette fois j’étais consciente. Le sang frais et chaud déclencha une réaction imminente… Je voulais me retenir mais impossible, je continuais de m’acharner sur le corps alors qu’il agonisait déjà… Mon père souriait, il ne criait pas. J’étais la seule qui hurlait.

Brusquement le rêve se transforma derechef. J’étais dans la clairière… Je me réveillais… Cylas à mes côtés… Inanimé. ..
« NON » …. Pourquoi le monde est injuste ? Pourquoi suis-je née à tuer tous ceux qui me sont chers ? Pourquoi être née comme sa ?
….. Le monde est injuste Elywin tu devrais l’avoir compris depuis longtemps……
Je ne veux pas vivre, je ne veux pas continuer à vivre.
……Alors laisse-moi vivre à ta place…………….

C’était cette voix, cette « moi » qui me dégoutait… je ne voulais plus vivre… La douleur de la lame qui transperça mon abdomen.

Elywin se réveilla en sursaut. Couverte de sueur, la respiration haletante. C’était le matin cette fois. Le patron de l’auberge était à ses côtés. Elle regarda son état… Elle devait partir, elle étouffait… le sang. Elle se leva brusquement malgré les réprimandes du patron. Il lui suffit pourtant de 2 phrases pour décourager le patron de l’auberge, elle lui envoya une pièce de monnaie le remerciant avant de sortir de sa chambre et débouler les escaliers.

Son regard s’arrêta sur Aureanne et Ikar… Evidemment elle pouvait partir discrètement mais elle avait quelque chose à faire avant. Elle se dirigea vers eux, devançant Ikar à la question de la jeune femme.

« Je vais beaucoup mieux ne vous inquiétez pas. »

Ces cernes et son visage trempé de sueur disait le contraire mais elle s’efforça de sourire. Se tournant vers Ikar, elle fit une courte révérence.

« Merci infiniment…de m’avoir empêché de tuer des innocents. Je vous en serai reconnaissante toute ma vie. »