L'hégémonie féminine [Privé, Lilianna & Ashenie]

[Privé, Lilianna]

L’automne laissait glisser son souffle délicat et frais, après l’été tumultueux aux vertus funestes, brisant les cœurs et laissant pourfendre les âmes sous les lames acérées. La perte grave du duc avait laissait une brèche ouverte dans le cœur de la pucelle, pleurant encore sa mort parfois, lorsque la nuit la couvrait de son manteau lourd. Loin des regards, de la dignité féminine et la prohibition des émois, elle pouvait laisser aller son cœur et murmurer au ciel combien l’homme lui manquait. Encore à l’aube, elle portait les charmes du chagrin, frappant les hommes au cœur par ces émois tendre.

Revêtissent les parures de la volupté, la damoiselle avait mandé audience au près de Lilianna De Christabel, reine souveraine du royaume humaine, cousine de la pucelle par alliance. Désireuse de connaître sa reine, elle avait été poussée sur les chemins de la douceur par la naissance de la petite Lyhann, princesse désirée et œuvre d’amour, perdant la damoiselle enfantine dans ses songes. Ce mariage d’amour avait été un coup d’éclat, preuve d’un conté existant, enfant même d’une délicatesse réciproque, et porteur de la fertilité. Sans en connaître que l’extérieur, la petite damoiselle souriait à l’alliance du devoir et du bonheur. L’amour était venu rapidement pour ces gens, et elle doutait qu’elle eut pu avoir la même chance. Elle serait donnée au méritant mari, et l’aimerait comme il se doit jusqu’à la fin de ses jours, sans se préoccuper de ses sentiments, œuvrant à être disponible et agréable, et a le plonger dans la douceur, veillant également à fructifier ses affaires sans aucune faute conjugale. Tel était son destin…

Sa robe unifiait les contours de son corps en une douceur grandiose. Blanche, elle affichait quelques coloris bleutés, voilés d’organdi, aux broderies d’or. Un lourd décolleté dévoilait la naissance de sa poitrine, recouvert d’une mousseline céruléenne. La taille affinée par le corset était jochées de voiles entrecroisés, dégradé de l’or à l’azur terne. Quelques incrustations de diamants laissaient briller les voiles somptueux, tombant sur la robe en forme de cloche, suivant une crinoline de fer ample. Une longue traine en pétale d’hortensia bleuté. Ses pas étaient rythmée d’un bruit feutré par le talon haut, chaussant son pied fin: bottine en cuir de daim travaillée et délicate, de couleur blanche.

Elle comparaissait au près de Lilianna, après avoir été annoncée. La damoiselle découvrait sa reine dans son intimité. Souriante, elle apparaissait sous un visage illuminé de pureté et de douceur, posant ses yeux sur Lyhann. A sa vue, son cœur défaillait admirant la reine, et l’étrange ressemblance de l’enfant à Trystan. Son regard s’embrasait d’une tendresse dévolue à la jeune princesse et son sourire s’arrondissait en un croissant de lune. Son regard se reportait sur Lilianna de Christalbel, et son corps se cambrait en une longue révérence douce et souple, œuvre même de son respect.

« - Mes hommages, Reine Lilianna. Je vous remercie de m’accorder audience… Je n’ai d’ailleurs pu trouver l’occasion de vous présenter mes sincères félicitations pour l’avènement de votre enfant d’amour, lui souhaitant une vie longue et heureuse, et prie les dieux pour qu’ils la protègent des intempéries que le royaume humain voit déferler devant ses yeux. Mais excusez mon indiscrétion, j’ose espérer que vous vous portez bien… J’ai ouïe dire quelques malaises vous concernant, suite à la naissance de la princesse… »

Derrière Ashenie suivait son Ombre : SaYoLe. Toujours derrière elle, aux moindres de ses pas publiques ou privé, il ne la quittait que très rarement. Amoureux éconduit au cœur en cendre, il continuait de remplir son rôle, enfermé sur lui-même, prisonnier de ses sentiments.
Son cœur résigné, il n’était plus qu’un fantôme, pantin soumis aux bonnes volontés de sa protégée.

Derrière son maque, ses yeux gris scrutaient les alentours, évitant le corps de la future duchesse, fuyant comme la peste ses yeux bicolores. Avant, il misait de grand espoirs sur la reine, espérant sa protection et une influence magnifique sur la jeune femme, la sortant de ses dogmes et de ses malheurs. Il espérait encore cela, mais il n’y mettait plus autant d’importante. Le jeune homme brisé espérait juste pouvoir remplir son rôle encore quelques temps.

Enfin, ses pas s’arrêtèrent, relevant le gout de sang qui se répandait dans sa bouche et sa gorge. Il laissa Ashenie continuer seule pour rejoindre la reine. Il s’adossa au mur alors que la porte se refermait. Son regard s’attarda sur le Gardes présent quelques secondes avant que ses paupières ne se renferment, savourant un mouvement de repos.

Depuis que Lyhann était née , Lilianna n'avait que très peu songé à recevoir dans ses appartements , préférant de loin prendre soin du bébé. Ses dames de compagnie se faisaient rares , ayant visiblement compris que la jeune mère souhaitait être seule avec sa fille. C'était légitime d'ailleurs. Et le royaume attendait d'elle qu'elle prenne soin de l'enfant du roi , qu'elle veille sur sa santé. Sans oublier que beaucoup pensaient que sa place auprès du roi n'était justifiée que si elle lui donnait des enfants et s'en occupait par la suite. Certes , elle avait donné naissance à une fille. Mais au moins , ils étaient tous sûrs que la reine était fertile et surtout , fidèle à son roi... Qui en douterait , en voyant les traits de l'adorable princesse ?

Cependant , Lilianna avait tenu à rencontrer la jeune Ashenie , cousine de Trystan. Elle n'avait aperçue cette dernière que très brièvement et n'avait jamais vraiment fait connaissance avec elle. Elle pensait donc que le moment était idéal. Elle avait du temps à elle , devant s'occuper du bébé et pouvait ainsi la recevoir. De plus , Lyhann avait plus d'un mois et Lilianna s'était remise de son accouchement. Tout allant pour le mieux , pourquoi reculer cette audience ?

Lilianna avait envoyé un garde chercher la jeune femme , tandis qu'elle s'occupait de Lyhann. La petite était réveillée et ne tenait visiblement pas à se rendormir. Bien éveillée , elle regardait tout autour d'elle depuis son berceau. Et dès que sa mère se pencha vers elle , elle lui sourit , ses grands yeux verts brillants. Lilianna avait vêtu sa fille d'une petite robe blanche , avant de la prendre dans ses bras et d'ensuite s'en retourner dans le salon. Au cas où elle se lasserait de l'avoir dans les bras ( chose peu probable ) , Lilianna avait fait installer un second berceau , plus petit et plus discret dans le salon. En attendant la venue d'Ashenie , la jeune mère s'était assise sur le divan , berçant doucement Lyhann qui restait calmement blottie contre le sein de sa mère.

Puis , la porte s'ouvrit et un garde introduisit Ashenie. Lilianna s'était levée , afin d'accueillir la nouvelle venue. Elle lui avait sourit , avant de remercier le garde d'un geste de la tête. D'un geste de la main , elle désigna un siège à la demoiselle , puis elle reprit place dans le divan. Elle la tutoya , pour qu'il n'y ait pas de distance entre elles.

« Oh je t'en prie , ce n'est pas véritablement une audience. Plus une rencontre entre cousines je dirais. »

Elle eut un nouveau sourire. En effet , n'était-elle pas sa cousine par alliance ? Son sourire s'agrandit légèrement , alors qu'Ashenie la félicitait pour Lyhann. Automatiquement , ses yeux violets se posèrent sur le nourrisson silencieux dans ses bras.

« Merci. Mais vois-tu , je doute que les dieux puissent la protéger aussi bien que Trystan et moi-même. »

Elle avait dit cela sur un ton mi sérieux mi amusé. Elle n'offensait cependant nullement les dieux. Mais elle pensait sincèrement que Lyhann serait mieux protégée par ceux qui lui avaient donné la vie , plutôt que par des êtres inconnus. La jeune femme leva les yeux vers Ashenie , alors que cette dernière lui demandait comment elle se portait. Elle eut un petit soupir. Cette histoire avait vraisemblablement parcouru tout le royaume.

« Il est vrai que la naissance de Lyhann fut assez difficile. J'ai perdu connaissance après qu'elle soit née. J'ai oscillé quatre jours entre la vie et la mort avant de me réveiller , au plus grand soulagement de Trystan. »

Doucement elle caressa la joue de Lyhann , qui commençait à s'agiter.

« Mais je vais très bien aujourd'hui. Cet événement ne restera qu'un mauvais souvenir , hélas impossible à oublier. L'important , c'est que nous nous portons toutes deux très bien.»

Lilianna redressa légèrement Lyhann , caressant doucement son dos pour l'apaiser.

« Et toi Ashenie , comment te portes-tu ? Es-tu à l'aise au palais ? »

Le spectacle attendrissant s’épanchait doucement sous les yeux de la petite De Sephren, souriant doucement à sa reine majestueux et la petite Lyhann, dont la douceur était la même que celle de Sa Majesté, et pourtant si vive. L’enfant était des plus belles qui soient. Ses cheveux noir de jais ornaient son crane avec grâce, tandis que ses yeux intenses et verts rappelaient indubitablement la parenté de Trystan. Ashenie souriait face à la petite, vive et déjà curieuse, appelant sa mère, demandeuse de tendresse. La douceur féminine en ces lieux valait bien plus qu’une place de roi. Assises sur le trône de majesté, les deux femmes étaient les souveraines d’un royaume, et bien au-delà, d’une féminité absolue. Ashenie, spectatrice, s’émerveillait de la petite, de sa mère majestueuse. Ronde et petite, la jeune reine était d’une beauté remarquable.

Le spectacle qui se déroulait sous les yeux de la pucelle était un des rares qu’elle n’eut jamais pu contempler. L’amour d’une mère pour sa fille était une chose bien rare, et Trystan possédait une famille de rêve. Loin de la sienne, elle se rappelait combien l’indifférence de sa mère l’avait refroidie, la plongeant des les dogmes, cautionnant chacun des appels au silence. Là, la tendresse affective sublimait le reste, et offrait une délicate scène intime, expliquant quelque peu le léger isolement de Lilianna en compagnie de sa fille.

Ashenie souriait tendrement, et s’imaginait, mère. Son enfant, lui aussi, connaîtrait l’amour, d’une quelconque façon, elle se le promettait. Mais déjà, les contours du bambin se faisaient flous, et disparaissaient doucement, devenaient flous, et le père qui lui souriait n’était plus qu’un informe, incapable d’imaginer l’homme qui aurait semé la vie en elle. L’aurait-il seulement aimé ? Sans doute non. Son destin n’était pas d’être aimé, mais de servir un mari avec amour, de le satisfaire et de lui rester serviable jusqu’au bout. Et l’amour de son mari n’était pas nécessaire à cette tache, tant bien qu’elle l’accepterait, toute sa vie durant, et qu’importe si eut fallut affronter le malheur. Le devoir était plus important, n’est il pas ?

Doucement, Ashenie reportait son regard sur le tableau d’amour, pleine de compassion, souriant, les larmes aux yeux. La tendresse de l’une a l’autre était manifeste, et simple caresse était des plus douces qui fut, animant tout l’esprit de la damoiselle de Sephren. Les violons de son cœur pleuraient doucement la compassion et l’émotion que le spectacle unique lui inspirait. Lentement, sa voix se levait, claire et féminine, haute et émue. Suivant les courbes du rossignol, elle gardait sa féminité dans la musicalité claire.

« - Je me porte merveilleusement bien dans ce château protecteur, sous le joug de sa majesté, je vous remercie de vous en inquiéter, vos intentions sont louables. Je suis heureuse d’apprendre votre rétablissement le plus complet, et bien soulagée de savoir ces tourments terminés. Si certaines langues perfides épandent le tragique souhait de vous voir endormie à jamais sur votre lit de mort, je ne saurais laisser cette enfant sans mère, tant bien que j’estime votre personne, et suis ravie que les dieux aient pu sauvegarder l’amour si tendre de votre union, à tout trois. Le sort de Trystan m’importe vraiment, et tant bien que le votre à présent que je vous découvre… Je ne sais s’il l’a mentionné, et je ne saurais si je devrais, mais… il fut d’une affection fraternelle à mon égard, si tendre que j’eus pu en oublier l’absence d’Aaran, pour mieux la regretter. Mais qu’importe, sa protection est l’une des plus sûre qui soit capable de sublimer un être, vous devez sans doute le savoir mieux que quiconque. Enfin, j’ai fait déposer à l’égard de votre magnifique princesse quelques présents de Langehack, pour célébrer sa naissance et votre rétablissement, ma Reine. Les huiles de Serramire, réputée, tant que quelques mixture de Langehack, ainsi qu’un nombre de vêtements de bas âge sont a votre disposition Lilianna, dans un tissu des plus doux pour ne pas froisser votre enfant, ainsi que quelques huiles pour la maintenir dans une sainteté des plus vives.»

En effet, quelques présent avaient été transmit aux domestiques, privilégiant les teintes roses, ocres, violacées et ivoires.

Lilianna souriait , heureuse de rencontrer enfin la petite Ashenie , que Trystan avait pris sous sa protection. La jeune fille lui semblait être d'une fragilité incroyable. Poupée de porcelaine , elle semblait pouvoir se briser en un rien de temps. Elle lui rappelait combien elle même avait été fragile à son âge. Dès qu'elle eut quinze ans , Lilianna avait commencé à craindre que son père ne la donne au plus offrant. Si Ariane n'avait pas été là , manipulant Edward de temps à autre , sans doute aurait-elle été mariée très tôt... Heureuse d'être protégée par sa mère , elle avait fini par s'endurcir en quelque sorte , repoussant les hommes trop impatients et trop désireux d'en faire leur femme. C'était étonnant , elle avait tenu ainsi jusqu'à ses vingt quatre ans. Et de son côté , Edward n'avait cessé de viser plus haut. Plus que tout , il était navré qu'Ultuant n'eut aucun fils. Le fou... S'il avait su ! Il aurait laissé faire les choses et serait resté à sa place. Mais à trop jouer , il avait perdu.

La jeune reine chassa ces sombres pensées de son esprit et baissa les yeux sur sa petite merveille. Elle avait vu le sourire attendri et les yeux brillants d'Ashenie , lorsque cette dernière avait posé ses yeux sur Lyhann. La petite s'agitait un peu , réclamant l'attention de sa mère. Si la petite était un bébé très calme , on eut dit qu'elle n'était véritablement à l'aise que dans les bras de ses parents. Non pas qu'elle rechignait à dormir dans son berceau. Mais quand elle pouvait profiter de bras de son père ou de sa mère... Lilianna eut un petit sourire en repensant à la nuit ou Trystan s'était endormi avec Lyhann. La petite coquine avait eu ce qu'elle voulait...

Lilianna releva ses yeux violets vers Ashenie , puis elle lui sourit doucement , avant de soupirer.

« Je suis contente que tout se passe bien pour toi. Il ne saurait en être autrement. Et je te remercie de t'inquiéter pour ma santé et pour celle de ma famille. Il est vrai que certains auraient aimé que j'y laisse la vie , mais que veux tu , il y aura toujours des vipères prêtent à distiller leur poison un peu partout. Ne leur en déplaise , je suis plus forte qu'il n'y paraît. Je n'étais pas prête à abandonner ma famille. »

Sans doute ne serait-elle jamais prête. Mais elle avait bien des années devant elle. Et elle donnerait d'autres enfants à Trystan , quand bien même ce dernier n'était pas prêt du tout , trop secoué par la naissance de Lyhann. Elle ne lui en voulait pas , mais pour autant elle refusait que cet épisode ne les éloigne. Ils s'était d'ailleurs déjà retrouvés. Et puis , elle doutait de retomber enceinte très vite. Peut-être se trompait-elle , cependant. Ils verraient bien ce que l'avenir leur réservait.

Lilianna n'était guère très étonnée par les dires d'Ashenie. Elle savait que Trystan pouvait se montrer très doux et très tendre avec les femmes de sa famille. Sans doute était-elle la mieux placée pour le savoir. C'était un homme qui respirait la confiance , la sérénité et la sécurité. N'allait-elle pas se réfugier dans ses bras , contre lui , lorsque quelque chose n'allait pas ? Trystan était d'une tendresse incroyable avec sa femme , sa fille et sa sœur. Et maintenant , c'était la jeune Ashenie qui avait la chance d'avoir sa protection.

« Mon époux est un homme très réconfortant. Tu peux compter sur lui en toute circonstance. Tout comme tu peux compter sur moi , Ashenie. Ne me vois pas comme ta reine , mais comme ton ami , comme ta cousine. N'hésite surtout pas à nous demander ce dont tu as besoin. »

Lilianna se faisait douce et amicale. L'adolescente n'avait pas eu une vie des plus douces , alors elle cherchait à la mettre en confiance , à la rassurer. Trystan comme Ariane lui disaient qu'elle avait cet espèce de don à rassurer les gens , à les comprendre. Lyhann attrapa alors une mèche de cheveux de sa mère et tira doucement dessus , involontairement. Lilianna eut un petit rire et elle fit lâcher prise à Lyhann , qui eut une petite grimace , avant d'avoir un sourire. La jeune reine leva les yeux vers Ashenie , affichant une mine surprise.

« Oh... Il ne fallait pas... C'est vraiment adorable de ta part. Jamais je n'aurais osé t'en demander tant ! Je te remercie infiniment pour ton geste. Lyhann est véritablement chanceuse de t'avoir en tant que cousine. »

Le visage d’Ashenie s’illuminait radieusement, contemplant cette enfant désirée aux mœurs si délicates. Elle s’attendrissait à la vue de cette enfant, œuvre même d’une magnificence délectable. Doucement, Lyhann devenait la prise d’attention de son regard ingénu, une fois de plus, heureuse de cette nièce que le ciel offrait à sa cousine, et au valeureux Trystan, méritant. L’aveugle était sans doute un père des plus délicat, au vu de l’état de sa femme et de sa fille, ou du moins, se plaisait-elle à le croire. Sa tendresse sans égal et pourtant égalée était l’une de celle dont l’envie de s’en passer n’apparait jamais.

Doucement, ses yeux se reportaient vers Lilianna, avec lenteur, contemplant le feu violacé qui animait la jeune mère, tendresse féminine dévolue à son enfant. Le lilas se dégradait en un lavande des plus doux, œuvre même des enchantements. Sa voix s’élevait alors, cristalline et suave, animée d’un léger émoi, trop tendre, sous le portrait aux traits dur de Trystan. Elle semblait visiblement touchée par l’homme, quoi que loin de l’amour autre que celui d’une cousine à son cousin, une dame à son protecteur, un sujet à son roi.

« - Trystan est l’un de ces rares hommes dont la vertu indubitable se conjugue à la tendresse en effet. L’homme est d’une habilité rare, et est prince même de sa condition magistrale, protecteur des abysses noirs qui déchaînent mes tourments ! Il m’a, je le confesse, ouverte une voie lumineuse suite à la mort de mon pauvre père.. et je ne saurais que lui être redevable jusqu’au dernier de mes souffles pour sa gentillesse et sa prudence à mon égard et son étreinte tant symbolique lorsque la haine de nos famille eut distillé venins et poisons à nos cœurs, et même sur votre image, Lilianna… Il m’a également confié, confinée entre les mains du seigneur Arthur de Melasinir, homme de vertu et de sagesse, œuvrant à notre bonne protection. Peut être le connaissez vous ?

Si le nom de Trystan œuvrait en une lueur iridescente dans les yeux de la petite pucelle, le nom d’Arthur conjugué à la protection des deux hommes offrait un véritable soleil sur la douce fée de son visage, semblable à une éclosion de rose. Là, dans les mystères d’un champ de bataille alanguis, où trônaient les nuages de la volupté, s’épandait une galaxie stellaire, aux milles miroirs ensoleillés réchauffant le visage de la dame en un sourire tendre et délicat, preuve même de son émoi face aux deux hommes. Après quelques secondes, elle reprenait.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie de votre gentillesse et de votre hospitalité à mon égard. L’isolement au près de vous laisse à mon cœur meurtri les douceurs d’un printemps du renouveau. Et ne me remercier pas davantage, les présents que j’offre à ma cousine sont l’humble contribution de Langehack , qui, depuis trop longtemps, vous tourne le dos. Votre enfant est des plus belles qui soient, et sa naissance difficile mérite qu’on y porte l’attention la plus tendre. Ces quelques présents sauront, je l’espère, adoucir son quotidien, et la plonger dans une croissance magnifique, et méritée. Peut être aurais-je le plaisir, moi aussi, de porter la vie aussi dignement que vous, Lilianna, et découvrir le bonheur de la maternité. Au moins, ce plaisir s’ouvre lorsque je vous contemple si heureuse… et votre sourire est un véritable baume au cœur. »

Elle souriait, sincère et fragile. Porter la vie était sans nul doute un rêve de petite fille… replongeant dans les abysses où trônaient son père vivant, et où l’image idéale de son frère se confondait avec le preux chevalier, mari et amant, quoi que jamais elle n’eut songé à l’inceste. Mais les idéaux masculins se rassemblaient en une seule et même image, qu’elle aurait eu le loisir de découvrir plus tard. Aaran lui manquait, c’était certain…

Lilianna souriait , attentive aux paroles d'Ashenie. Elle avait été touchée par Trystan et Lilianna n'en était guère étonnée... Après tout , Trystan savait être adorable. Si elle était la mieux placée pour le savoir , elle était aussi certaine que son époux pouvait être tendre avec les enfants ou les autres femmes de sa famille. Lilianna n'en était pas jalouse , elle savait trop combien sa douceur et sa force pouvaient être réconfortantes. Elle était bien heureuse qu'il ait pu apaiser Ashenie. Si elle n'avait pas vu la jeune fille très longtemps , il avait semblé à Lilianna que la demoiselle avait besoin d'être rassurée , tout comme elle avait besoin d'un environnement stable. Elle même avait apporté la stabilité à Trystan et n'avait pas manqué de voir à quel point cette stabilité l'avait apaisé... Ashenie devait avoir besoin de cette stabilité , elle devait avoir besoin de bases solides pour prochaine vie d'adulte. De tout cœur , Lilianna espérait qu'Ashenie trouverait la stabilité au palais.

« Je suis bien heureuse que tu aies eu non pas affaire au roi , mais au cousin. Et je suis certaine qu'il demeurera ton protecteur pour longtemps Ashenie. Trystan n'a qu'une parole. »

De cela , elle était certaine. Le temps d'un instant , le visage de Lilianna afficha l'étonnement. Trystan l'avait mis sous la protection d'Arthur de Melasinir ? La jeune fille devait être bien mal entourée pour qu'il en vienne à une telle extrémité... A moins qu'il ne veuille simplement la protéger au mieux ? Dans tous les cas , elle ne pouvait qu'être d'accord avec lui. Jamais encore il n'y avait eu un quelconque sujet de discorde entre eux. D'un point de vue purement politique en tout cas. Avait-elle jamais contesté une seule de ses décisions ? Loin de là , c'était un homme et un roi remarquable , avec un jugement toujours juste.

« Arthur ne m'est pas inconnu en effet. Vous êtes en de bonnes mains , je doute qu'il vous fasse le moindre tort. Auquel cas , ce ne serait pas volontaire. »

Ashenie semblait être heureuse en tout cas. Ses yeux pétillaient et il lui semblait qu'elle allait mieux que les rares fois où elles s'étaient vues. Lilianna avait gardé en tête l'image de la fille pleurant son père. Et dire qu'elle n'avait pas pleuré son père une seule seconde ! Edward ne l'avait pas mérité. Comme elle aurait aimé avoir un vrai père ! Elle soupira doucement , caressa la peau soyeuse de Lyhann. Qu'importait le passé après tout ? L'important , c'était le présent. L'important c'était sa famille , et surtout son époux et sa fille. Rien d'autre pour le moment.

« Tu n'as pas à nous remercier Ashenie. T'accueillir ici , c'est bien la moindre des choses. Tu ne nous dois rien , rien du tout. Ne sommes nous pas une famille après tout ? »

La générosité de la demoiselle laissait presque Lilianna sans voix. Nombreux avaient été les présents qu'avaient reçu Lyhann. À son poignet , il y avait le cadeau d'Ariane. Elle lui avait fait faire un petit bracelet d'or blanc , gravé de son prénom , et orné de deux petits émeraudes. C'était fou de voir à quel point ces pierres avaient la couleur de ses yeux. Lilianna regrettait de ne pas avoir levé les yeux vers Trystan pour mieux voir ses yeux , le jour où ils avaient dansé et s'étaient oubliés ensuite , à un bal organisé par Ultuant... Verrait-elle jamais ses yeux de cette couleur ? Sans doute pas... Et elle en était bien désolée.

« Quoiqu'il en soit je t'en remercie, Ashenie. Tu n'y étais en rien obligée. »

Elle se fit pensive , lorsque la jeune fille évoqua la maternité. En effet , c'était un vrai bonheur. Elle avait adoré sentir Lyhann grandir dans son ventre , prendre ses aises petit à petit... La sentir bouger , s'agiter... Quand Trystan avait été à Alonna , la présence de Lyhann avait été plus que réconfortante. Elle n'avait pas été seule. Et puis Lyhann était née et la comblait de joie. Trystan le lui avait dit , elle était une maman née. Elle commençait sérieusement à le croire.

« Je te le souhaite Ashenie , vraiment. Lyhann est la plus belle chose qui me soit arrivée après Trystan. »

Lui avoir donné une fille , c'était... quelque chose d'indescriptible. Dans ses bras , Lyhann gazouilla doucement , avant de fourrer son poing dans sa bouche , comme pour attraper son pouce.

« Tu veux prendre Lyhann dans tes bras peut-être ? »

La délicatesse voluptueuse de la jeune mère était notable, et fascinait Ashenie posant Lilianna sur ce piédestal, admirant la jeune princesse qui scintillait avec éclat. Le sourire de Lilianna était si délicat qu’il en devenait perditif, et s’accordait en une symphonie magnifique à la tendresse dévolue à Lyhann, petit poupon de porcelaine entre ses bras, animée d’une vie curieuse et fougueuse, fascinante et apaisante. Lyhann rythmait ainsi l’échange, bercée dans la soie des bras de sa mère, si tendre que ne l’était aucune dans cette triste époque, durement menée par les femmes.

Sortant de sa légère torpeur, Ashenie contemplait Lilianna, voyant en elle l’image jumelée de Trystan. L’étreinte salvatrice, trêve de la haine des deux familles, flottait encore en marques délicates sur sa peau douce. Les brulures encore chaudes des doigts de Trystan gisaient toujours en un sigle diabolique et protecteur sur la poupée de cristal, entrevoyant cette suavité infantile qu’elle avait trouvé dans ses bras d’homme. Sur le visage de Lyhann se peignait la délicate peinture du portrait de son père, aux traits si envoutant dans le guide gardien. Ashenie souriait simplement à cette idée de sublime, œuvre même des dieux de rapprocher deux êtres du même sang, si haineux, en un contre enfantin et délicat, rêveur, qui saurait endormir la petite dans les rêves les plus fous.

Et la danse de la folie la laissait valser dans ses songes, bercée par la voix de la reine, tandis que les pans voletaient, les voiles s’ouvraient, le ciel se déchiraient, et une mer de soie flottait autour de la petite duchesse. Là, au creux des siphons et des attractions, elle tournoyait au creux de ces voiles colorés, ondulant soyeusement autour d’elle. Les rayons des astres d’argent de Néera fusaient, tressant dans leur sillage les poussières des étoiles, se joignant à la tempête de furie. Doucement, le miroir céleste laissait les constellations se mouvoir, constituant le palais de la protection. Les mélodies de la douceur s’enlaçaient à celles de la vertu sublime, œuvre masculine d’excellence, dont les yeux envoûtants et verts dépeignaient la perdition. Taisant les secrets de la contemplation à son âme, elle s’illuminait, rayonnante. Le tableau s’effaçait doucement, ne gardant qu’un couple danseur. La carrure virile épousait la finesse de la damoiselle, la protégeait, bercée dans ses songes. Lilianna la poussait sur ces sentiers de souveraineté féminine.

Touchée par la proposition de Lilianna, elle souriait savamment, laissant sa voix envoûter l’air une fois de plus. Une douceur extrême semblait animer ses paroles sincères.

« -Votre mari, le roi Trystan, est l’un des hommes que j’estime le plus en ma mémoire, et par delà les apparence et les haines, il aura su me protéger, reine Lilianna, tant bien que je n’en n’avais fais aucune demande. Mes éloges ne sauraient combler ce qu’il m’inspire, au même titre que le sieur de Melasinir. Il est un homme des plus vertueux, et dont la subtilité et la vertu me sont si agréable, que ses yeux me perdent dans les siphons d’une voie lactée gardée, savamment gardée, au point même de se sentir emprisonnée dans les geôles du soleil, dansant sur les braises de sa délicatesse. Si les rumeurs nous prêtent quelques discourtoisies, il n’en est pas moins l’homme protecteur qui hante bien des songes, lorsque les boucliers ébréchés défaillent. Quoi qu’il en soit, je ne peux que chanter les louanges de partager les liens du sang en votre compagnie, tant vous êtes une radieuse muse du sourire. Lyhann est un être tant adorable, que la gentillesse n’est autre que le naturel. Décriée et admirée, votre enfant attire bien des convoitises, Lilianna. Je craignais qu’elle ne fut déjà assaille, et voulais éperdument rendre la protection que Trystan m’avait accordé, également par le biais du sir Melasinir. J’adorerais la prendre dans mes bras, mais ne craignez vous pas qu’elle ne vous réclame..?»

Ashenie souriait, sincère, attachée et attendrie. Au-delà des miroirs, elle brisait les reflets des rumeurs avilies, ne laissant qu’une silhouette pure et émotive aux yeux de Lilianna.

Lilianna voyait combien la jeune femme admirait son époux. Elle ne tarissait pas d'éloges à son égard , tout comme elle ne cessait de confesser combien il lui avait été d'un grand secours. S'il était évident qu'elle était sincère , Lilianna se demandait bien quelle avait été sa vie pour qu'elle en arrive à être si redevable à Trystan , comme elle le disait si bien. Elle espérait cependant qu'Ashenie ne s'imaginerait pas être leur obligée éternellement... Mais la jeune femme avait été conditionnée de façon à être la plus docile possible. Aussi ce genre de principes devaient être ancrés en elle , tout comme l'amour de Trystan était ancré dans son propre être. Finalement , chacun était l'obligé de quelqu'un d'autre. Mais Lilianna ne se faisait aucune illusion , loin de là ! Elle savait parfaitement que sans son époux , elle n'était rien. Tout comme elle ne serait plus grand chose sans Lyhann. Elle l'avait aimée dès l'instant où elle avait su qu'elle était enceinte. Son coeur était désormais partagé entre sa fille et son époux. Elle n'aimait pas Lyhann plus que Trystan , et n'aimait pas Trystan plus que Lyhann. Elle les aimait autant , bien que de manières différentes.

Ashenie avait tout aussi l'air de mettre Arthur de Melasinir sur un piédestal. Il était vrai que cet homme était un homme des plus vertueux et des plus fidèles à la couronne. Il n'était pas surprenant que ce soit cet homme que Trystan avait choisi pour assurer la protection de sa cousine. Mais n'avait-elle pas un garde du corps ? Lilianna était curieuse de savoir ce que SaYole était devenu. Elle ne l'avait guère vu qu'à leur entretien , qui n'avait pas duré très longtemps qui plus est. C'était lui qui , en dernier , leur avait demandé de mettre Ashenie à l'abri. Il lui avait d'ailleurs semblé que cet homme tenait à sa protégée bien plus qu'il ne l'aurait dû...

« Nous savons toutes deux que les rumeurs ne sont que mensonges. Arthur saura veiller sur vous , cela ne fait aucun doute. »

Lilianna éclata d'un doux rire , alors que la jeune fille la qualifiait de «Muse du sourire». Certes , Lilianna avait le sourire facile et le sourire rassurant , mais elle avait aussi les larmes faciles. Sur ce point encore , elle différait de Trystan. Combien de fois avait-elle pleuré dans ses bras , cherchant à ce qu'il l'apaise et la rassure ? Bien des fois... Elle ne l'avait guère vu pleuré qu'une unique fois , alors qu'il venait chercher son pardon , pour avoir manqué de la faire tuer en la repoussant. Loin de le trouver faible , elle l'avait trouvé touchant , en n'avait pas tardé à sécher les larmes qui avaient roulé sur ses joues.

Lyhann , qu'Ashenie disait adorable , s'agita un instant , avant de pousser un petit cri joyeux. Lilianna caressa son dos , déposa un baiser sur son petit crâne chevelu. La petite était blottie au possible contre sa mère , mais elle cherchait sans cesse à avoir son attention. Comment vouliez vous que Lilianna la confie à une nourrice ? Elle refusait de se priver de cela. Trystan avait dit qu'elle était née pour être mère , aussi prenait-elle son rôle très au sérieux.

Elle proposa à Ashenie de prendre la petite dans ses bras , tant elle semblait en admiration devant elle. Il est vrai qu'en plus d'être un bébé très sage , Lyhann était aussi magnifique. Elle avait la peau claire de ses deux parents , la douceur des traits de sa mère , ainsi que la couleur des yeux et des cheveux de son père. Elle ressemblait d'ailleurs plus à ce dernier qu'à sa mère. Même s'il semblait que Lilianna lui avait transmis la faculté de faire craquer ce dernier en toute occasion.

« Ne t'inquiète pas , Ashenie , si elle me réclame , je suis tout près. »

Lilianna se leva et vint se rasseoir à côté d'Ashenie. Elle déposa sa poupée dans ses bras , lui montrant comment soutenir sa tête , comment la caler contre elle , pour que Lyhann soit à l'aise. Lyhann se fit silencieuse , curieuse. Ses yeux émeraude se posèrent sur Ashenie. Elle semblait curieuse de découvrir un nouveau visage. Lilianna caressa doucement son visage , et Lyhann lui sourit en retour , agrippant ses doigts.

« Là... Tu vois ? Elle a l'air d'être à l'aise dans tes bras. »

Les boucliers éperdus d’une protection enivrante tournoyaient en mille parfums intenses aux saveurs délicates autour de la pucelle de Langehack, poupée vertueuse, dont l’incarnation câline des protections dessinait les visages masculins de l’aurore. Là, au cœur, du néant même, les chants tisseurs de rêves filaient les peur féminines d’or et d’argent, en vaste parures placées sur le seuil de la virilité gardienne, œuvre même d’une suprématie douce et angélique. Le visage du sieur De Melasinir restait en un tableau inachevé, pourtant précipité autour de la damoiselle, épanchant ses bras autour d’elle une vaste couverture hermétique aux intempéries du destin. Les mots de Lilianna caressaient doucement les songes salvateurs, miroirs même d’une instanté gracieuse aux mœurs protectrices.

La reine était de ces femmes trônant au sommet, par son rang et son titre, étrange opposition tant la froideur contrastait avec cette chaleur réconfortante qu’elle usait presque familièrement, et dignement, de façon à plonger sa cousine dans la délicatesse la plus profonde, caresse du monde à la vertu, rassurante et enivrante. L’atmosphère se teintait de la légèreté de la rose sous la complexité féminine, nourrissant une amitié respective dans le cœur d’Ashenie, idéalisant à bien des égards sa reine en un modèle, non pas à suivre, mais à admirer. De l’autre coté de l’enfer, les souvenirs se tarissaient sous ces effluves du paradis, dont les Archanges de folies s’embrasaient de virilité, voilant la féminité sous les piliers que restaient Lilianna, Astéride et Ashenie, déjà sevrées par Melissandre défunte, Ariane et Esidenir. Les femmes n’étaient pas moins tributaires des hommes qu’elles leur restaient complémentaires.

Doucement, le mouvement de Lilianna répondait à l’émerveillement maternel d’Ashenie, désireuse d’explorer les passions délicates de la vertu. La douceur de Lyhann se mêlait à sa joie et son activité bambine, joliment dépeinte par ses mouvements curieux. L’enfant à la peau de pèche se lovait dans les bras de la petite pucelle, admirablement guidée par la jeune mère. Là, blottie contre son sein, Ashenie contemplait Lyhann, la caressait du regard. Les voiles d’organdi dessinaient un véritable berceau délicat, jonchés de douceurs diverses, tandis que la tendresse des gestes d’Ashenie s’éprenaient de la douce enfant.

Pourtant, et pour une première, Ashenie laissait doucement battre son cœur face au visage angelique de la petite Lyhann, souriant de l’âme. Dévouant un amour délicat, familiale et éperdu, elle semblait s’attacher à la petite, voyant Trystan et Lilianna en elle, voyant la femme que serait Lyhann. Doucement, elle souriait, presque tendrement, trop tendrement pour les dogmes. Pourtant, l’idéal de vie que lui insufflait Lyhann dépassait allègrement toutes les contraintes effarouchées de la Bonté, effacée des à présent.

Ashenie berçait doucement Lyhann, calée contre elle, la laissant découvrir sa voix par d’agréables murmures enfantins, s’afférant a aiguiller ses sens, et épier ses réactions. Elle relevait doucement la tête vers Lilianna. Sa voix douce dépassait ses lèvres fines. L’attendrissement se mêlait à sa voix, palpable, laissant émaner la franche douceur et de l’émoi. Haute et cristalline, sa voix épandait doucement l’air en une berceuse digne et fraiche, délicate, emplie d’une douceur et d’une compassion ardente.

« - Vous devez être heureuse, majesté, en compagnie de cette douce enfant. Elle semble attentive et merveilleuse… et vous semblez déjà accomplis. La maternité semble vous donner des ailes, et me laisse songeuse de la merveille qu’elle puisse donner, étant le centre même du rôle féminin. Peut-être oserais-je, un jour, m’unir à l’homme digne afin de servir cette noble cause de descendance… Cette enfant reste le véritable fruit d’un amour dont je ne saurais tarir mes éloges, Lilianna. Quant à lui, Arthur est en effet un gardien des plus méritants. Je suis heureuse qu’il vous convienne tout autant qu’à moi. Il est d’une vertu louable… et fascinante. »

Ashenie souriait, parlant tendrement, avec franchise et délicatesse. Enfin, elle s’embrumait l’esprit de songes célestes et interdits, prouvant à l’âme les secrets de l’avenir. Son doigt s’égarait doucement dans les cheveux de la petite, avec une sainte tendresse…

Rares étaient les personnes qui pouvaient se vanter d'avoir un jour eu le privilège de prendre la princesse dans leurs bras. En effet , Trystan et Lilianna faisaient très attention à leur petite Lyhann , ne laissant que les personnes de confiance s'approcher près d'elle. Lyhann était trop précieuse pour qu'on laissât quiconque de mauvais l'effleurer. Sachant pertinemment qu'Ashenie ne pouvait être animée de mauvaises intentions , Lilianna avait déposé la petite princesse dans ses bras. Lyhann avait paru un instant être dérangée par ce changement de bras , mais n'étant pas farouche , elle se laissa faire. Un moment , elle chercha sa mère du regard et agita ses menottes vers elle , au cas où il lui serait venu à l'idée de l'abandonner. Avec un sourire rassurant , Lilianna lui caressa la joue et sa fille agrippa ses doigts comme elle en avait l'habitude. Doucement , Lilianna lui ouvrit la main et elle alla s'asseoir dans un fauteuil situé en face d'Ashenie , afin que Lyhann puisse la voir , et ainsi rester calme et à l'aise dans les bras d'Ashenie.

Lyhann émit un gazouilli bienheureux , avant de lever ses yeux vers Ashenie. Elle semblait l'étudier avec attention. C'est qu'elle ne connaissait pas beaucoup de visages , mis à part ceux de ses parents , de sa tante et de sa grand-mère. Elle reconnaissait leurs voix aussi. Et celle de la jeune fille lui était inconnue. Ashenie elle aussi semblait découvrir Lyhann. Lilianna doutait qu'elle eut vu beaucoup de nourrissons dans sa vie. Elle même n'en avait pas vu énormément avant d'avoir Lyhann. Et Trystan encore moins , même s'il se débrouillait très bien avec sa fille , qui lui faisait déjà faire n'importe quoi. À ce niveau là , c'était de sa mère qu'elle avait hérité !

Les paroles d'Ashenie résonnaient étrangement à ses oreilles... On entendait bien là combien et comment elle avait été conditionnée. En effet , le rôle dit principal d'une femme est de donner la vie... Mais toutes les femmes ne sont pas heureuses de donner la vie. Et toutes les femmes ne sont pas heureuses d'être considérées comme des ventres prêts à porter des héritiers. De ce côté là , Lilianna n'avait pas à s'en faire , elle savait que Trystan la respectait trop pour la considérer simplement comme cela. Ce n'était hélas pas le cas de tout le monde. Beaucoup d'hommes ( et de femmes ) considéraient que le rôle premier de la reine était de donner des héritiers au royaume. Ce qui , en un sens , n'était pas vraiment faux.

« J'aimerais beaucoup que tu trouves un homme qui te mérites , Ashenie. On ne devrait pas choisir pour toi l'homme avec lequel tu passeras ta vie. Ce n'est pas juste. »

Non , ce n'est vraiment pas juste. Elle frissonna , en songeant que s'il n'y avait pas eu Trystan , elle aurait dû épouser un homme qu'elle haïssait et lui donner des enfants... Quelle horreur que celle ci ! Fort heureusement , il n'en était rien... Lyhann semblait s'être détournée à la fois de sa mère et d'Ashenie , cherchant son pouce. Parfois elle réussissait , parfois elle ne parvenait qu'à fourrer son poing entier dans sa bouche. Cela ne semblait pas la perturber plus que ça. Ashenie disait vrai , Lyhann était un véritable fruit de l'amour. C'étaient Trystan et elle qui se retrouvaient mêlés dans cette toute nouvelle vie. Encore si petite et si fragile... Mais déjà adorée par ses parents.

Il y avait une note songeuse dans la voix d'Ashenie , alors qu'elle évoquait à Arthur. On aurait dit qu'elle l'admirait bien plus qu'elle ne l'aurait dû. Lilianna ne dit rien , mais nota sa supposition dans un coin de la tête. Elle sourit à l'attention d'Ashenie alors que celle ci caressait les cheveux de Lyhann avec une douceur étonnante. Lyhann eut un merveilleux sourire , avant de babiller joyeusement à l'attention de la jeune fille , comme si elle essayait de lui parler. Eh oui ! Depuis peu de temps , Lyhann semblait avoir compris comment fonctionnaient ses cordes vocales et elle commençait à les utiliser autrement que pour pleurer. Elle «parlait» déjà beaucoup avec sa mère et savait attirer l'attention de son père en s'agitant et en produisant de drôles de sons dès qu'il s'approchait d'elle. Si elle pensait que cela fut possible , Lilianna aurait dit que Lyhann avait compris que Trystan ne pouvait la voir...

« J'ai l'impression que tu plais beaucoup à Lyhann , Ashenie. »

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