Une poursuite au clair de lune

Cette soirée faisait souvent forte impression chez les personnes sensibles. Eleyna en faisait parti. Elle avait donc choisi de flâner dans les rues de quartiers animés. En soirée, ceux-ci était pleins de jeunes adolescents qui se faisaient officieusement la cour, d’autres qui venaient simplement boire un verre. Les tavernes avaient sorti les chaises et les tables à l’extérieur. Il faisait plutôt bon ce soir, une épaisseur supplémentaire était nécessaire par-dessus un simple haut mais la température était loin d’être froide même si l’hiver ne tarderait pas. Un jour sympathique avant de ne plus sentir ses doigts, de les voir se meurtrir à force de manier l’épée sans relâche et de manier les rênes en cuir pour manier le destrier. Eleyna marchait lentement, tête haute comme toujours, dans une démarche qui faisait son effet. La jeune femme était vêtue d’un simple pantalon de couleur clair qui s’enfonçait dans des bottes montant jusqu’aux genoux où se trouvait une courte épée qu’elle avait un jour ramené de l’armurerie. Son haut était simple et peu décolleté et elle portait une longue veste fine, pas forcément chaude, ouverte uniquement sur les deux premiers boutons. Il était ainsi très aisé de cacher son épée, toujours prête à s’en servir s’il se passait quelque chose dans ces rues.

Ses collègues lui avaient proposé de passer boire un ver à la Taverne du « Cochon Dansant », celle-ci se trouvait non loin et était le plus souvent monopolisé par les soldats en permission, le barman et sa femme les connaissaient tous plus ou moins et posaient ouvertement des questions sur l’identité des nouvelles recrues. Ils étaient très sympathiques et faisaient souvent des prix aux soldats, qu’ils considèrent grandement. Mais la jeune fille avait dit qu’elle arriverait tard, elle avait d’autres choses à voir et à faire…

Trainer dans les rues, observer les personnes s’amuser et, inconsciemment, veiller au bien être des personnes qu’elle protégeait. Sa haine contre ceux au-dessus d’elle était largement compensée par un désir de protéger la population. Ces deux sentiments la rendaient coriace sur les champs de bataille, sa petite taille n’était plus le sujet des rires des autres soldats depuis bien longtemps.
Eleyna observa la rue et deux personnes retinrent son attention. Tous deux portaient une cape sombre et avaient de nombreuses besaces qui débordaient de leur propre sac. Eleyna qui avait l’habitude de ce genre de situation continua dans leur direction, sans donner l’air d’avoir quelque chose à voir dans l’histoire. Sa petite taille leur donnerait peut-être envie de passer à l’action sur une cible inoffensive. Son attitude se modifia, elle laissa dépasser un peu la besace de sa poche, baissa les yeux et prit une démarche que l’on aurait pu dire « plus craintive ».

*Trop facile*

Les deux se déplacèrent autour d’elle avec rapidité et agilité, Eleyna ne tourna même pas le regard. C’était des bons à rien qui n’avaient aucun entrainement, de stupides pick-pockets. Au moment où les deux se rapprochèrent d’elle et qu’Eleyna entrevit leur sourire narquois, la cavalière se baissa comme pour ramasser quelque chose par terre. Elle dégaina brutalement, se redressa et assena avec violence un coup du plat de son épée dans les genoux du premier qui fléchit sous le coup tandis que l’autre venait de subir le coup de pied meurtrier de la jeune fille dans le ventre. Tous deux s’étaient pliés non loin.

L’agitation avait ramené la foule qui avait littéralement entouré les deux pick-pockets et qui observait bruyamment le déroulement de ce – bientôt terminé – « combat ». Le sac contenant les besaces étaient à terre mais personne n’avait osé bouger le petit doigt en sa direction. Le regard tellement dur qu’arborait Eleyna sonnait comme une interdiction. Mais ce n’était pas fini car elle se rendit compte qu’ils étaient tous deux armés et qu’ils n’abandonneraient pas même devant une foule.