Sauvé de justesse - La quête de Cidérion et les aventuriers 1.

La forêt…

Sauvage…

Pure…

Sensuelle…

La douce fragrances de l’humus embaumait les narines du druide, la rosée encore fraiche caressait ses doigts, la vue d’une mère renard et de son petit réjouissait son œil. Ah, qu’il aimait ainsi errer de part la Mère, insouciant, mais toutefois prêt à le défendre à la moindre alerte.

Un lecteur assidu pourrait me demander : « mais qu’est-ce qu’il fiche là, ce druide ? Il était pas à Fort Ellyrion voici peu de temps ? »

Ben si…

Mais bon, les druides, comme les animaux, ont un sixième sens qui les avertit du danger, et ca sentait vraiment trop mauvais la bas. Prudent comme le loup qui évite les griffes de l’ours, Hamanduil avait quitté le Fort quelques jours avant l’arrivée des armées drows. Que ses frères se débrouillent avec ces maudits êtres puants ! lui-même ne se sentait en rien concerné par la chute d’une forteresse, seule la forêt lui importait.

Bref, il s’était éloigné, préférant mettre de la distance entre eux et lui. Voilà donc comment il se retrouvait là, tranquille, pendant que d’autres agonisaient entre les mains des sombres. Et le pire, c’est qu’il assumait… voir souffrir un elfe ne le gênait pas… alors que voire un animal blessé lui brisait le cœur. Mais, qu’est-ce qui faisait ce bruit non loin ? Un animal en chasse ? Non, plusieurs animaux apparemment. S’avançant à travers les fourrés, le druide déboucha dans une clairière où un elfe était acculé contre une paroi rocheuse par trois lyngres.

Pourtant ces animaux étaient peu agressifs, mais des images jaillirent dans l’esprit du druide...une mère défendant ses petits contre un blaireau en maraude. Mouais, d’accord, tout s’expliquait. Cet elfe, peu au fait apparemment des secrets de la forêt, s’était trop approché d’une tanière, et les lyngres se sentaient menacés. Bon, coup de bol pour le gaillard, Hamanduil était de point trop mauvaise humeur ce jour là, et il pénétra dans la clairière à son tour.

Les trois langres se retournèrent en grognant contre le nouvel intrus, mais bon, un druide ayant pour totem le seigneur des chasseurs, le tigre blanc, n’avait guère à craindre des autres prédateurs. Doucement, Hamanduil s’avança dans la clairière envoyant des messages apaisants aux lyngres… deux loups courant dans la forêt côte à côte… un tigre croisant un lyngre près d’un point d’eau… peu à peu, les trois carnivores se calmèrent, obéissant aux ordres mentaux du druide.

Doucement, le vieil elfe s’interposa entre eux et leur précédente proie, un peu à la manière d’un tigre indiquant que la chasse lui est réservée. Qu’ils soient calmés ou qu’ils n’aient guère envie d’en découdre, les langres firent volte face et s’enfoncèrent dans le sous-bois. Se retournant, le druide fixa sévèrement le… un guerrier apparemment, vu la ferraille qu’il transportait.

Il vaut mieux éviter de trop s’approcher des tanières de ces bêtes. Elles ne sont guère agressives, sauf si elles ont des jeunes en bas âge à défendre.

Honorable… respectable... Cidérion s’engageait beaucoup dans les compliments, car le druide n’estimait pas que sa tâche mérite en rien ces qualificatifs. Seul la Mère méritait des compliments pour sa beauté et sa grandeur infinie. Enfin bref, le druide n’écoutait que d’une oreille distraite les explications du guerrier au sujet d’une quête. Une petite quête ? Une quequête quoi ? Ah non, apparemment une quête importante.

Hein ? A oui, son nom, les civilisés y attachaient beaucoup d’importance. Trop aux yeux du druide… les loups ont-ils besoin d’un nom pour reconnaître les membres de leur meute ? Non bien sur, seuls les deux pattes ressentent ce besoin de tout classifier… probable qu’ils passaient à côté de beaucoup de chose en simplifiant ainsi leurs échanges. Mais enfin, il lui fallait sacrifier aux politesses d’usage.

Je suis Hamanduil Elandriel, fidèle serviteur de la Nature.

Sobre comme présentation… mais le druide n’était pas un grand parleur, plutôt un grand contemplatif. La douce mélodie des arbres était brisée par la voix… un grand philosophe humain avait un jour dit que la parole était d’argent mais que le silence était d’or… pour une fois, le vieil elfe trouvait que cet adage des porcs de la péninsule se révélait assez exact. Comme quoi, même dans les déjections d’un sanglier on peut trouver une perle.

Qu’avait dit Cidérion à propos de son voyage ? Qu’il allait à la capitale ? Hamanduil évitait les villes autant que faire se pouvait, car il s’y sentait mal à l’aise, fusse dans une cité elfe, mais il était passé non loin d’Alëandir en revenant des portes de l’Anaëh, et la guerre au sud produisait des effets jusque là. Autant prévenir le voyageur immédiatement, cela lui éviterait une grosse surprise.

Vous ne trouverez plus beaucoup de vos collègues guerriers à la capitale, la plupart des forces sont parti vers Ellyrion pour contrer l’attaque drow.

Venir avec vous ?

Ben… surprenant comme demande, le druide étant un individualiste forcené au caractère de cochon. Comme la plupart des druides d’ailleurs, cette honorable confrérie n’étant pas connue pour la douceur de ses membres ni pour leur bonne volonté. Surtout dans leurs forêts, car ils considéraient généralement qu’elle leur appartenait et qu’un bipède n’avait rien à y faire… il risquait de l’abîmer.

Mais au fond… bah, ca le changerait un peu de voyager avec un autre membre de sa race. Fidèle à son habitude de ne pas croire au hasard mais uniquement aux desseins de la Mère, le druide se disait que s’il était intervenu pour sauver le guerrier des lyngres, cela devait être pour quelque chose. Que ce soit une bonne ou une mauvaise, il lui fallait le découvrir, et ce ne serait qu’en accompagnant Cidérion qu’il le pourrait.

Haussant les épaules, Hamanduil répondit nonchalamment :

Après tout, pourquoi pas ? Je peux faire un bout de route avec vous.

Des drows ? Mais non bien sur, voyons ils étaient encore trop loin de la zone des combats pour tomber sur ces maudites créatures. Poussant un soupir agacé, Hamanduil suivit son compagnon afin qu’ils puissent se cacher, mais vraiment, tout cela était ridicule !

Et rien ne se passa…

Alors qu’il s’apprêtait à se relever fièrement et à fustiger l’excès de prudence de Cidérion, le druide vit trois drows entrer dans la petite clairière… merde, autant pour son instinct, sur ce coup il s’était bien fait avoir ! Manque d’habitude de détecter les sombres sans doute, ou plus probablement de la distraction causée par sa certitude qu’ils étaient en sécurité. En tout cas, on ne l’y reprendrait plus.

Le guerrier lui demanda de servir d’appât et fila un peu à l’écart malgré les gestes rageurs du druide qui ne s’estimait pas du tout, mais alors pas du tout satisfait de jouer le rôle de l’asticot au bout de la ligne du pécheur. Grommelant, Hamanduil activa son sort d'armure d’écorce et sortit des fourrés en hurlant des injures au trois monstres du Puy qui regardaient stupidement les panneaux… ils ne savaient peut être pas lire ?

Alors que les trois sacripants s’approchaient, le guerrier elfe sauta sur les deux soldats, laissant l’officier au druide. Chargeant à une vitesse folle, le drow tenta de lui plonger son épée en pleine poitrine, mais le sort d’écorce arrêta net la lame… renvoyant une onde de choc dans le bras de l’attaquant qui ne put retenir une grimace de douleur.

Et oui, c’est douloureux… et ça paralyse… essayez donc de porter un puissant coup d’estoc sur un chêne centenaire et vous comprendrez pourquoi Naïm se retrouvait momentanément avec un bras qui ne répondait plus aux ordres. Avant qu’il n’ait eu le temps de changer son arme de main, la lame de Cidérion se plaça sous sa gorge.

Hamanduil ne put retenir un hoquet de surprise en entendant la proposition que Cidérion faisait au drow. L’épargner ? Et en échange, il venait avec eux ? Un drow comme compagnon de voyage, on aura vraiment tout vu ! Deux elfes et un drow, là c’était sur, ils allaient être reconnaissables aisément. Il ne manquerait plus qu’un nain et un humain, et la partie serait complète. Remettant de l’ordre dans ses fourrures, il grommela :

Epargner ce drow ? Je n’aime pas les drows !

Un instant de réflexion…

Bon, j’admets ne pas non plus aimer les humains ou les nains, ni même d’ailleurs les elfes… il n’y a que les animaux qui aient une valeur aux yeux de la Mère, car eux seuls vivent en vraie harmonie avec le cycle éternel de la Nature, en osmose avec la mélodie, pareil au torrent des montagnes qui chante le renouvellement perpétuel de la source et qui…

Le druide se rendit compte que les deux autres le regardaient en ouvrant de grands yeux. Lorsqu’il se lançait dans ses grandes envolées plus ou moins lyriques, il faisait souvent cet effet là aux gens. Sans doute étaient-ils émerveillées par la joyeuse ode en hommage à la nature, mais une petite voix au fond de sa tête disait au druide que c’était surtout parce qu’il était vraiment agaçant dans ces moments là.

Ayant étranglé consciencieusement la petite voix, le druide se concentra de nouveau. Cidérion semblait vraiment prêt à recruter tout le monde pour accomplir sa mystérieuse quête. Mais de quoi pouvait-il donc bien s’agir ? Bah, au fond, peu importait la destination, seul le chemin comptait. Et voyager avec ces deux étranges guerriers pourrait se révéler amusant et instructif… alors pourquoi pas ?

Hamanduil bailla ostensiblement tandis que les deux guerriers déblatéraient de quêtes et d’argent. Ne voyaient-ils pas que la richesse était sous leurs yeux, là ? Ne voyaient-ils pas que les miracles de la nature, un oiseau qui chante, un cascade d’eau pure, un renard qui tue un lapin, que toutes ces petites scènes avaient plus de valeurs que les richesses des rois ?

Bon, que le drow ne le voit pas, ca le druide le comprenait assez aisément. Cette race puante et infamante semblait incapable de comprendre la beauté des choses, préférant se rouler dans leur fange ignoble. Naim ne semblait pas être une exception à la règle… d’où venait-il d’ailleurs ? Sans doute de ce tas de bouse volcanique que cette sous-race dégénérée appelait Puy D’Elda.

Pouah !

A ce stade, vous aurez compris qu’Hamanduil n’a pas une très haute opinion de la race sombre.

Bon, donc d’accord, le drow n’y comprenait rien, mais à la limite, pour lui, c’était héréditaire, alors passons.

Mais Cidérion ne semblait pas non plus ébahi par la grandeur de la nature. C’était un véritable elfe, vous êtes sur ? Oui ? Ah…

Bizarre son comportement en tout cas. Il capturait un drow mais ne s’intéressait guère à sa mission ni aux raisons de sa présence en ces lieux, se focalisant sur sa mystérieuse quête. Hamanduil se doutait que le guerrier ne voulait pas trop leur en parler, au vu des excuses ridicules qu’il leur sortit. Une forêt riche et de l’or enterrée ? La salade n’était pas fraîche, mais la curiosité du druide suffisait à le faire rester. Au fond, cela l’amusait presque, ca brisait la routine…

Alors qu’ils s’approchaient de la capitale, l’elfe fit fort justement remarquer qu’il serait assez difficile de se balader aux côtés d’un drow. Pas faux…

Nous n’avons qu’à l'attacher et dire qu’il est notre prisonnier. Les gardes hésitent toujours lorsqu’on leur parle avec autorité et un air d’assurance, ils ont trop peur de se mettre en travers d’un ordre supérieur.

Il les écoutait déblatérer leur baragouin d'elfe, une lueur d'indifférence dans le regard aussi flagrante qu'un Drow en plein Aleandir... Leur première proposition, se servir de lui comme appat, ne lui plaisait guère, il allait sans dire . Mais malgré tout s'il fallait se jeter dans la gueule du loup pour réussir la mission et empocher le pactol, pourquoi pas... Mais finalement l'idée la meilleur était celle d'Amande Huile, sa deuxième, celle de rester à l'exterieur pendant que Cidérion faisait son affaire seul . Prendre les vêtements d'un Elfe était pour Naïm comme se travestir, il en était hors de question, de plus il passait pour un parfait rôdeur avec ses habits sombres . Seul son regard de braise pouvait prêter à confusion quant à sa race mais il n'avait qu'à baisser les yeux, tel un Sylvain apeuré :)

Le druide a raison . Que va t-on foutre à Alëandir ?

Il devait reconnaitre qu'il partageait l'avis du magot même si celui-ci n'avait pas l'air bien net, et semblait réticent à l'idée de s'allier avec un Sombre . Les préjugés allaient bon train en ces lieux, il ne s'étonnait même pas qu'on le dévisage de la tête aux pieds, mais si en plus il devait chasser les papillons avec cet attardé, il allait vite démissionner de son poste . La richesse de la nature n'était pas aussi bénéfique que celle de l'or brut , un point c'est tout, c'est l'argent qui l'attirait comme tout être normalement constitué, il fallait être un parfait demeuré pour préférer un arbre feuillu à une sacoche de pièces .

Nous attendrons ici, mais je te préviens, un mot de poésie et je te coupe la langue ! lacha t-il sèchement à Hamanduil

Il fallait s'en douter... Oui, ce qui devait arriver arriva. Cidérion savait bien que ses sous entendus incompréhensibles finiront par le forcer à dévoiler la vérité. Sa quête qu'était-elle ? C'est ce qu'ils voulaient savoir et l'elfe le lisait sur leur visage, pourtant Hamanduil s'interposa et proposa de rester en dehors de la capitale avec le Drow. Il avait raison, Cidérion acquiesça d'un simple signe de tête et continua à marcher : Le vent se levait, le ciel devenait de plus en plus gris ... il fallait se dépêcher pour trouver un abris à l'intérieur de la capitale, les deux autres aventuriers resteront sans doute sous un arbre en attendant le retour du guerrier.

Enfin, Hamanduil se jeta à l'eau et questionna l'elfe sur sa fameuse quête. Cidérion fronça les sourcils, sourit légèrement et répondit :

*- Autant te prévenir tout de suite dans ce cas. Le voyage sera long, je compte passer par Diantra afin de trouver un aventurier de plus qui se joindra à nous. Nous aurons ensuite besoin de passer par les terres neutres qui nous permettront de rejoindre les terres chaotiques où vivent les drows ... Là nous trouverons un trésor des plus énorme existant à Miradelphia, mais ca n'est encore rien, nous gagnerons surtout de l'expérience en route.

Ils marchèrent donc en direction de la capitale, Cidérion ferait vite pour prendre ses provisions. Arrivé à un croisement, l'elfe guerrier sentit une ombre se faufiler derrière le groupe... Il se retourna mais ne vit rien. Il proposa donc au groupe de faire une halte de quelques secondes le temps de boire un peu d'eau avant de repartir !

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