Au sortir d'un cauchemar (pv)

Le soupir de Nicolaï faillit empêcher Aureane de continuer à parler. Qu'avait-elle fait de mal pour qu'il paraisse aussi peu enthousiaste à l'idée de la voir ? Elle lui annonça qu'elle était guérie. Il avait deviné ? A la façon dont sa voix sonna, la jeune fille se recroquevilla intérieurement. Il n'avait pas l'air heureux de cette nouvelle alors qu'elle attendait cela depuis ce qui lui paraissait une éternité. Elle avait cru que c'était aussi ce qu'il voulait. A présent, elle ne pouvait que se dire qu'elle s'était trompée.

Infiniment déçue, ne sachant comment réagir, elle fit un pas en arrière et s'apprêta à lui souhaiter le bonsoir. Elle ne pouvait pas continuer à lui parler alors qu'elle avait cru pouvoir se réjouir avec lui. La gorge serrée, les yeux fixés au sol, elle ouvrait la bouche pour prendre congé lorsqu'il reprit la parole.

" De quoi te rappelles-tu ? "

Prise de court, Aureane marqua un temps d'arrêt. Ce dont elle se souvenait... C'était cela, qui justifiait un tel comportement ? Il craignait qu'elle ne se rappelle de rien ? Ou de tout ? Que préférait-il ? Ne sachant ce qu'il espérait, elle opta pour la vérité, ce qui, de toute façon, lui paraissait plus sain.

" Eh bien, cela dépend. "

Un poids venait de s'envoler. Il n'était pas mécontent qu'elle soit guérie, il était inquiet. Esquissant à nouveau un sourire, la jeune fille s'assit sur la margelle de la fontaine, se disant que, finalement, elle allait prendre un peu de temps pour discuter. Elle rassembla un peu ses idées avant de poursuivre relativement calmement, à présent capable de mettre un peu de distance entre ce qui s'était passé et elle :

" Je me souviens de tout ce qui s'est passé depuis que ma fièvre est tombée ici. Avant, c'est très flou, sans doute à cause de la fièvre. La traversée du désert est également ponctuée de moments où j'étais lucide et de vides trop vagues pour constituer de vrais souvenirs. Il en est de même depuis notre départ du Puy. "

Elle lui jeta un coup d'œil timide et précisa :

" Je me souviens que vous ne m'avez jamais abandonnée. "

Soit elle avait omis un passage, volontairement ou non, car oublié, soit cela ne lui semblait pas important au vu de tout le reste. Quoi qu'il en soit, il pouvait lire toute sa reconnaissance dans son regard. Ce qu'il avait fait pour elle avait beaucoup de valeur à ses yeux, même si tout ne lui restait pas précisément en mémoire.

" Je sais aussi que j'ai été loin de vous rendre justice. Je ne vous dirai jamais à quel point je suis désolée... vous ne méritiez pas cela. "

Il avait souffert bien plus que nécessaire à cause d'elle et elle s'en voulait terriblement. Elle baissa à nouveau les yeux pour continuer.

" Je me souviens de presque tout jusqu'à ce que nous soyons enlevés, le peu qui m'échappe revient petit à petit. Je ne me rappelle pas du moment où je vous ai retrouvé, ni ce qui s'est passé avant... mes souvenirs s'arrêtent lorsque nous avons été séparés... la façon dont elle rougit soudainement pouvait donner une bonne idée de ce dont elle se rappelait plus précisément. ...ils reviennent quelque part, lorsque nous avons quitté le Puy, avant la grotte. "

Elle se tut, sembla hésiter à ajouter quelque chose, mais ne dit rien. En réalité, elle attendait surtout la réaction de Nicolaï et restait suspendue à ses lèvres. Deux semaines qu'elle ne l'avait pas vu... elle se rendit compte qu'elle le détaillait, pensant confusément que même épuisé, il gardait une allure de chevalier. Elle se mordit à nouveau la lèvre pour cesser de divaguer. Elle avait essayé d'être la plus claire possible pour répondre à sa question, mais avait bien conscience qu'au fond, elle avait éludé l'essentiel.

Aureane parut hésité. Elle ne semblait pas savoir quoi répondre à se qu'on venait de lui demander. Sans doute se demandait-elle se qu'il voulait qu'elle lui réponde. Eh bien... pour être honnête, lui aussi se le demandait. Il ne savait pas trop où commençait l'espoir et où commençait la crainte. Au fond, la vérité était sans doute préférable. C'est se que dut également se dire Aureane.

" Eh bien, cela dépend. "

Elle esquissa un nouveau sourire avant d'aller s'assoir assez prêt de lui sur la margelle de la fontaine. Il y eu un moment de silence pendant lequel Nicolaï la laissa rassembler toutes ses pensées pour qu'elle lui fasse une explication cohérente. Se devait être difficile pour elle de faire l'inventaire de tout ses souvenirs.

" Je me souviens de tout ce qui s'est passé depuis que ma fièvre est tombée ici. Avant, c'est très flou, sans doute à cause de la fièvre. La traversée du désert est également ponctuée de moments où j'étais lucide et de vides trop vagues pour constituer de vrais souvenirs. Il en est de même depuis notre départ du Puy. "

Aureane parlait d'un ton calme et détaché. Bien loin de celui qu'elle avait employé au procès de Veshork. Oui. Terriblement loin. Elle s'était totalement détaché de cela. Comme si ces souvenirs ne lui appartenaient pas et qu'il s'agissait de ceux d'une autre personne. Au moins, elle n'était pas effondrée en larme dans sa chambre ou en train de s'abrutir de travail.

Quant à se qu'elle avait dit... c'était une nouvelle un peu triste. Si elle ne se rappelait de presque rien entre leur départ du Puy et son réveil ici quant la fièvre était tombé, elle ne se rappelait donc pas non plus de la partie la plus importante du voyage et de la tournure qu'avait prie laure relation. Le jeune homme se retint de justesse de pousser un soupire de découragement.

Elle lui jeta un petit coup d'œil timide avant de préciser :

" Je me souviens que vous ne m'avez jamais abandonnée. "

Faux.

Mais elle ne s'en souvenait sans doute pas au vu de se qu'elle lui avait dit avant. Non, sans doute pas. Mais il avait craqué. Il avait cédé et, même s'il ne l'avait pas vraiment abandonné, on ne pouvait pas non plus dire qu'il l'avait conservé avec lui. Loin de là. Il lui avait fait de la peine ce moment là comme elle lui en avait fait. C'était terrible, mais malheureusement, c'était vrai.

" Je sais aussi que j'ai été loin de vous rendre justice. Je ne vous dirai jamais à quel point je suis désolée... vous ne méritiez pas cela. "

*Oh non. Pas ça!*

Ne nous méprenons pas. Se n'était en rien les excuses d'Aureane qui causait au chevalier cette réaction qui dut se voir sur son visage. Des excuses de sa part, il aurait été surprit si elle ne lui en avait pas fait. Il s'attendait à cela. Après tout, Aureane était guérie et lorsqu'elle était dans son état normal, elle s'excusait pour un oui ou pour un non. Ne pas avoir d'excuse. Voilà se qui aurait été inquiétant.

Non. Se qui faisait mal à Nicolaï, s'était ce petit ''vous'' qui ponctuait sa phrase. Après tout se qu'ils avaient traversé et même si elle ne se rappelait pas de tout, elle continuait pourtant à employer cette ridicule formule de politesse.

Une fois de plus, Aureane baissa les yeux avant de continuer.

" Je me souviens de presque tout jusqu'à ce que nous soyons enlevés, le peu qui m'échappe revient petit à petit. Je ne me rappelle pas du moment où je vous ai retrouvé, ni ce qui s'est passé avant... mes souvenirs s'arrêtent lorsque nous avons été séparés... ''

Au vu des joues de la jeune femme, elle se rappelait un souvenir en particullié. Un de ceux qui était les plus précieux d'ailleurs. Se n'était pas le plus important, mais c'était déjà ça de prit.

'' ...ils reviennent quelque part, lorsque nous avons quitté le Puy, avant la grotte. "

Aureane était littéralement pendue à ses lèvres, attendant sa réaction. Mais comment devait-il réagir? Que faire. Il n'en avait pas la moindre idée. Loin de là. Sa aurait été tellement simple si tout s'était passé autrement. S'ils étaient tout les deux mort dans les terres stériles par exemple. Tellement plus. Il n'aurait alors pas toutes ces maudites questions à se poser.

Que répondre à Aureane qui se mordait la lèvre? Elle avait éludé se qu'il pouvait y avoir de plus important. En tout cas, de plus important pour Nicolaï. Le jeune homme ferma les yeux.

« Je suis heureux que tu ai retrouvé toute ta tête, dit-il après un moment de silence. »

C'était vrai. Il en était heureux. C'était vrai, mais pas toute le vérité en revanche. Il aurait aimé qu'elle se rappel de plus de choses. Doucement, Nicolaï prit la main de la jeune femme et lui accorda un sourire un peu triste.

« Bon retour parmi nous. »

Nicolaï hésita un instant avant de finalement déposer un baiser sur la fine main d'Aureane.

« Je suis heureux de te retrouver. »

Le silence lourd qui suivit son récit, puis la première phrase qu'elle reçut en réponse, firent baisser la tête à Aureane, désolée. Quelque chose n'allait pas, elle était certaine que le jeune homme était loin de lui dire le fond de sa pensée. Heureux, il ne paraissait pas l'être le moins du monde et pour cela, elle se sentait coupable.

Le fait qu'il lui prenne la main la fit tout de même sourire et elle alla même jusqu'à prendre elle-même sa main entre les siennes sans pouvoir s'en empêcher. Le fait qu'il paraisse aussi triste la rendait tout aussi malheureuse, mais elle ne savait que dire pour mettre fin à ses tourments.

" Bon retour parmi nous. "

La jeune fille murmura un "merci", comprenant qu'il essayait de faire au mieux, compte tenu des circonstances. L'ennui, c'était qu'il cachait bien mal le fond de sa pensée et qu'elle ne supportait pas l'idée de lui faire de la peine. Elle était venue dans l'idée de se réjouir d'avoir reprit ses esprits, même si elle s'était doutée que rien ne serait simple... mais elle n'avait pas pensé que ce serait si difficile de le retrouver. Elle aussi se sentait triste, à présent. Elle avait bien compris que son récit tronqué lui avait fait du mal et elle détourna à nouveau les yeux, mal à l'aise.

Du coup, le baiser la surprit et son visage s'illumina un bref instant alors qu'elle avait un infime mouvement pour se rapprocher de lui... mouvement qu'elle suspendit immédiatement en rougissant avant de reprendre sa place. Visiblement, cela lui avait fait beaucoup plus d'effet que les fois où il l'avait pourtant embrassée beaucoup moins sagement. Seulement là, elle était à nouveau elle-même et sa réaction était bien plus vive. Elle n'avait pourtant pas enlevé sa main, même si, le cœur battant, elle ne savait plus vraiment que faire. Elle hésitait, c'était évident, cherchait des mots qui ne venaient pas. Par trois fois, elle manqua dire quelque chose sans oser le regarder en face et à chaque fois elle se tut alors qu'elle était sur le point de parler. l'émotion passée, elle paraissait au moins aussi triste que lui, à présent.

" Nicolaï, je... "

Pas de "messire" pour cette fois, et apparemment utiliser enfin son prénom lui apparut naturel car elle ne releva pas. En revanche, elle se tut une nouvelle fois, incapable d'aller plus loin. Elle paraissait au bord des larmes et serrait doucement la main du jeune homme dans les siennes, ne s'étant pas encore résolue à le lâcher.

Il fallait qu'elle se décide, elle ne pouvait pas rester là sans rien dire. L'air malheureux de Nicolaï la poussait à parler, mais en même temps... elle lui serra la main un peu plus, ayant conscience qu'elle risquait de tout gâcher... est-ce que ce ne serait pas pire ? Et si elle se taisait maintenant, il faudrait qu'elle se décide tôt ou tard, elle le savait... Elle opta pour un intermédiaire et murmura en fixant le sol :

" Je... je me souviens très bien des quelques jours qui ont précédé mes séances avec la dame Noblegriffon... Je crois... avoir fait le tri entre ce qui était... réel et ne l'était pas... même si parfois la réalité paraissait... irréelle. "

Elle avait pesé chacun de ses mots, faisant un effort pour rester un tant soit peu calme malgré son anxiété. Elle ne put pourtant s'empêcher de lui jeter un coup d'œil à la dérobée, essayant de capter sa réaction et se mordit à nouveau la lèvre alors qu'elle se remettait à fixer le sol. Elle paraissait dans l'attente de quelque chose de précis, avec une lueur d'espoir dans le regard, mais elle retrouva assez rapidement son expression désespérée. Finalement, elle aurait mieux fait de se taire. D'ailleurs, avant même qu'il ait pu répondre, elle se leva, lui lâcha la main et bredouilla rapidement :

" Je... je suis désolée... je... je vais vous laisser... il est... tard... "

Elle ne savait plus où se mettre, n'attendait qu'une occasion pour fuir de suite cette situation qui la bouleversait complètement. Il devait se demander ce qui lui passait par la tête, tant elle semblait changer de comportement d'une fraction de seconde à l'autre. A présent, l'air d'être à deux doigts de paniquer, elle attendait juste qu'il lui donne la permission de se retirer, comme elle l'avait si souvent fait.

Aureane n'attendait qu'un mot pour quitter les lieux et rejoindre la sécurité de sa chambre où elle espérait pouvoir s'éclaircir les idées. Elle en avait vraiment besoin : elle était dans un tel état de nervosité qu'elle allait finir par se mettre à pleurer purement et simplement et cela, elle ne ne voulait pas. Nicolaï ne lui en laissa néanmoins pas le temps et s'approcha d'elle au lieu de lui accorder la fuite. Elle n'avait absolument aucune idée de ce qu'il allait bien pouvoir lui dire, d'autant qu'un instant plus tôt il avait paru avoir décider de la ménager.

" Je t'aime, Aureane. "

Apparemment, il avait décidé de la ménager pour mieux la surprendre ensuite, ou du moins, on peut sérieusement se poser la question. Quoiqu'il en soit, un séisme aurait sans doute eu beaucoup moins d'effet sur elle. Saisie, ouvrant la bouche pour protester, il ne le lui permit pas en l'embrassant tendrement. Ce n'était pas la première fois que cela arrivait, mais jamais encore la jeune fille n'avait été pleinement lucide en un tel instant. A tête reposé, elle eut sans doute jugé cela inconvenant, mais elle était loin d'être calme et maîtresse de ces sentiments ce soir là. Emportée par un flot d'émotions, elle ne put résister et le laissa faire avec plaisir. Se laissant envahir par une douce chaleur, elle ne tarda pas à se blottir contre lui et lui rendre son baiser, chose qu'elle n'avait encore jamais faite. Mais elle n'avait plus l'excuse de la fière ou des visions, elle était bien elle-même, à présent, et elle se trouvait incapable de résister à l'un de ses baisers.

Puis leurs lèvres se séparèrent et elle s'écarta légèrement, comme à regret. Il y eut un instant de silence pendant lequel elle sourit à Nicolaï, timidement, mais de tout son cœur... puis elle prit conscience de ce qu'elle venait de faire. Son ravissement se mua peu à peu en une expression d'effroi mêlé de tristesse et elle fit un pas de plus en arrière en secouant la tête, comme pour effacer ce baiser.

" Non... "

C'était une supplique qui mourut entre ses lèvres tremblantes. Décidément, lucide ou non, elle avait bien du mal à accepter les preuves d'amour du jeune homme. Encore une fois, passé le moment d'émerveillement, elle paniquait et reculait comme pour se mettre hors de portée d'un danger.

" Ne dites pas cela... "

Par pitié semblait-elle dire, alors qu'un instant plus tôt, elle savourait son baiser avec un plaisir non dissimulé. C'était à devenir folle ! Elle pensait que guérir de ses visions lui simplifierait la vie, mais c'était encore pire à présent qu'elle savait agir consciemment. Elle ne pouvait même pas le blâmer d'avoir agi de la sorte, elle avait souhaité qu'il le fasse, elle était forcée de le reconnaitre, ce qu'elle lui avait dit ne pouvait que l'y inciter. En même temps, elle ne pouvait accepter une telle situation. C'était tout simplement invivable, d'autant que lui allait sans doute se demander quel était le problème. Or, c'était au-delà de ses forces de le lui expliquer.

N'y tenant plus, elle fit demi-tour et partit en courant pour rejoindre sa chambre. Arrivée là, elle fondit en larmes sur son lit et décida de ne plus en bouger. (oui, c'est un beau cliché, mais avouez que quitte à aller pleurer quelque part toutes les larmes de son corps, autant le faire sur un édredon moelleux ; et puis d'abord, Nico n'avait qu'à pas la faire pleurer, ce gars n'est qu'un sadique qui me fait virer dans le mélo-dramatique ! )

Un petit garçon était debout au milieu d'une vaste salle pleine de divers jouets. Il regardait de ses yeux gris les trois autres enfants qui se trouvaient là eux aussi. Il y avait deux jumeaux demi elfe. Un garçon et une fille. C'était la fille qui, avec ses boucles blondes et s'écartaient pour laisser passer ses oreilles pointues, ressemblait le plus au peuple des forêt. Le garçon lui était bien plus... humain. Le troisième enfant, plus âgé qu'eux était un gaçon déjà presque adolescent. Trapus, le regard bas et marron, ses cheveux noirs lui cachant une bonne partie du visage.

« Voilà quelqu'un qui doit rester un moment parmi nous les enfant, déclara la jeune femme qui avait amené l'enfant ici. J'espère que vous l'accueillerez bien. »

Sur ce, elle laissa seuls les quatre enfants.

C'était étrange. Pour le nouvel arrivant, rien ne pouvait être pire. Les adultes s'étaient longtemps disputé devant lui, criant des mots très méchants les uns envers les autres. Il ne comprenait pas pourquoi son père et sa mère étaient venu ici. Se c'était pour se faire crier dessus, il aurait sans doute mieux valut qu'ils restent tranquille chez eux non? Ils avaient fait un long voyage et on les acceuillaient en les grondant.

Le grand monsieur aux cheveux blanc avait même réussi à faire pleurer sa mère et une autre dame. Jamais il n'avait vu sa mère dans un était pareille. Elle était triste à cause de se qui avait été dit. Père était furieux.

« Comment tu t'appelle? »

C'était le garçon humain qui venait de parler, brisant ainsi de silence. Mais l'enfant ne répondit rien, trop timide pour dire quoi que se soit de toute façon.

« Loras, soit plus gentil, demanda la fille demie-elfe. »

Celle-ci s'approcha du jeune garçon et lui déposa une grosse bise sur chacune des joues.

« Moi je m'appelle Alice, dit elle. Là bas, c'est mon frère Geoffroy et le râleur, c'est notre cousin Loras. »

Le garçon reste silencieux, ne sachant pas quoi répondre à se qui venait d'être dit.

« On ne vas pas te manger tu sais, fini par lui dire Geoffroy avec un grand sourire aux lèvres. »

Seul Loras continuait à le regarder de travers. Comme s'il était une menace.

« Je m'appelle Aurélien, fini par dire l'enfant. »

Alice lui accorda un immense sourire et se mit à triturer ses oreilles. Un geste très certainement réflexe.

« Tu viens de loin, demanda-t-elle? »

Le garçon hocha la tête et il jeta un regard vers Geoffroy et Loras qui avaient reprit leur jeu où des chevaliers de bois montaient à l'assaut d'une fausse montagne de papier mâché au sommet de laquelle trônait un dragon.

« Ils sont pas drôle les garçons. Quant ils jouent, il faut toujours qu'ils se battent pour savoir qui sera le chevalier blanc et qui sera le méchant. Et moi, je dois toujours être la princesse capturée par le méchant et je dois toujours faire un bisous au chevalier qui gagne. C'est pas drôle ça. »

Elle regarda ensuite Aurélien et lui colla un nouveau gros bisous sur la joue.

« Je les trouve jolis tes yeux. Tout métalliques comme l'épée de papa. »

Le garçon hocha timidement la tête.

« Mon papa a une grosse bague avec un joli dragon dessus fini-t-il par dire. »

* * *

Tapotis, tapotas, tapotis, tapotas.

On lui tapait sur la jour et une voix abominablement discordante venait lui enserrer la tête dans un étaux.

Raaaah. Mais qu'est-ce que c'était encore que tout ça? Est-ce qu'il n'avait pas passé une assez mauvaise soirée? Qu'on le laisse mourir en paix avec son mal de crâne.

" Niiiiiiiicoooooouuuuuooooooolaaaaaaaaaï, je t'eeeeeeeeennnnnn priiiiiiiiie, ooooooooouuuuuuuvre les yeeeeeeeeeeuuuuuuuuuux ! "

*Rooooh, mais foutez moi la paix. Laissez moi mourir tranquillement au moins. Et que quelqu'un aille arrêter cette voix tout de suite. C'est insupportable.*

" S'il te plait, Nicolaï ! "

Plus supportable déjà. Mais il avait toujours mal à la tête. Enfin, il lui semblait bien connaître cette voix. Une petite seconde de réflexion lui permis de se rappeler de la personne à qui elle appartenait. Aureane. Bon. Si c'était pour Aureane, il pouvait bien faire un effort.

Ouvrant les yeux, le chevalier battit des paupières un moment.

Le visage d'Aureane n'était guère loin du sien. Pourtant...

« Aureane? C'est toi? Pourquoi est-ce qu'il fait si noir? »

Le bras de Nicolaî se tendit dans la direction qu'il pensait être celle de la jeune femme. Mais passa à une bonne quarantaines de centimètres d'elle.

Nicolaï fut orrifier. Il ne voyait pas sa main. Tout était noir. Il n'y avait rien.

« Aureane, où es-tu? »

Le jeune homme s'accrocha à la main d'Aureane comme si c'était une bouée de sauvetage.

« Aureane... je ne vois plus rien. »

Il était paniqué et au bord de la crise de nerf. Les larmes coulaient de ses yeux immobiles et aveugles qu'il levait vers Aureane. Sans plus voir qu'elle était si proche.

" Vas... vas-y. "

Aureane prit tout de même le temps d'assurer un " Je reviens au plus vite, c'est promis. " et elle prit sa course pour aller chercher un médecin. Elle avait passé assez de temps au château pour connaitre quelques personnes, même si elle n'avait jamais osé leur parler. Il y avait un homme qui pratiquait la médecine et connaissait les simples. Elle savait qu'il était dévoué envers ses patients et espérait qu'il ne s'offusquerait pas qu'elle vienne le déranger en pleine nuit. Pour elle, elle aurait bien pu souffrir le martyre qu'elle n'aurait pas osé, mais pour Nicolaï, elle irait le tirer du lit sans scrupule - quoique poliment, evidemment.

Le pauvre homme n'eut donc d'autre choix que de répondre à l'appel, mais en même temps, il était suffisamment consciencieux pour aider quiconque à toute heure du jour et de la nuit. Il enjoignit à la jeune fille de se calmer et la renvoya auprès de Nicolaï le temps de se préparer et de prendre ses affaires. Aureane reprit sa course et déboula à nouveau dans la chambre, essoufflée.

Elle manqua mourir de peur en voyant le lit vide mais ne tarda pas à repérer le jeune homme, recroquevillé dans un coin. Que s'était-il donc passé ?

" Nicolaï ! "

Elle se précipita près de lui et tenta de voir s'il allait bien, commençant par lui prendre la main pour lui assurer qu'elle était là. Elle n'était tout de même pas partie bien longtemps ! Tâchant de l'aider à se relever un peu - du moins à s'asseoir plutôt que rester ainsi prostré - elle continua à parler :

" Le médecin va arriver sous peu, tout va bien se passer, vous verrez... "

Elle ne croyait que moyennement à ses derniers mots, mais y avait mis toute la conviction possible. Il avait l'air terrorisé, prêt à s'effondrer de nouveau et elle finit par l'enlacer pour tenter de l'apaiser. D'accord, cela n'était peut-être pas très correct... mais elle s'en moquait et était loin de se forcer. Il avaient tous les deux besoin de se calmer et c'était encore la solution la plus instinctive qu'elle avait trouvé. Essayant de paraitre moins affolée qu'elle ne l'était en réalité, elle murmura doucement :

" Ça va aller... calmez-vous... "

Elle était fébrile, elle aussi, terriblement inquiète à l'idée qu'il ne retrouve jamais la vue. D'ailleurs, il fallait être réaliste : elle n'avait jamais entendu parler de personne recouvrant la vue par miracle. Il allait forcément rester ainsi : si c'était ponctuel, il y avait eu le temps pour que cela s'arrange. Or, il ne voyait toujours rien, à en juger par son comportement. Elle le serra plus fort contre elle et essuya rapidement une larme : ah non, elle n'allait pas se mettre à pleurer, il avait besoin qu'elle le soutienne, pas qu'elle s'apitoie !

Le médecin ne tarda pas à faire son apparition, une poignée de minutes plus tard. Aureane lui avait rapidement expliqué qu'elle avait trouvé Nicolaï inconscient et que, depuis son réveil, il ne voyait rien. Il venait donc constater par lui même ce qu'il en était. La jeune fille se détacha du chevalier mais garda sa main dans la sienne pour lui signifier qu'elle restait à ses côtés.

" Le voilà... puis, au guérisseur : Merci d'être venu, messire. "

Elle n'en menait pas large, rongée par l'angoisse, mais s'efforçait de garder une voix ferme pour ne pas effrayer davantage Nicolaï. Mais plus les secondes passaient et elle se persuadait qu'il resterait aveugle.

Tendue, Aureane suivit chacun des gestes du médecin avec grande attention, sans pour autant lâcher la main du jeune homme. Après quelques examens à l'aide de la chandelle, le verdict tomba : il n'y a avait rien à faire d'autre qu'attendre. Le médecin était impuissant et désolé pour son patient et il refusa de se faire payer pour cette fois, considérant qu'il n'avait rien fait.

La porte se referma sur lui dans un silence de mort et Aureane sentit son cœur se serrer. Être aveugle était un handicap particulièrement lourd. Nicolaï ne pourrait plus rien faire par lui-même pendant longtemps et, même une fois habitué, il ne pourrait plus jamais être le chevalier qu'il était avant. Et encore fallait-il qu'il ne perde pas l'esprit, vaincu par l'obscurité. Il fallait une grande force de caractère pour ne pas finir désespéré et même si elle ne doutait pas qu'il était capable de s'en sortir, elle savait aussi qu'il avait déjà subit trop d'épreuves pour se relever éternellement. Et beaucoup trop à cause d'elle. Elle aurait mieux fait de ne jamais entrer dans sa vie, en y réfléchissant bien. Et si, maintenant... ? Elle balaya l'idée et en revint au fait qu'elle allait devoir l'aider de son mieux.

Tout cela, elle le pensait mais ne le dit pas, résolue à garder de l'espoir quant à la suite, avec ou sans le retour de la vue. Ce fut lui qui se décida à reprendre la parole, alors qu'elle peinait à savoir que dire.

" Aureane... j'aimerais comprendre... tout à l'heure... je... je n'ai rien compris... "

La jeune fille ne saisit pas, tout d'abord, à quoi il faisait allusion. "Tout à l'heure" ? Lorsqu'il avait perdu connaissance ? Puis la lumière se fit dans son esprit et elle fut soulagée que Nicolaï ne voit pas son visage qui se décomposait.

Silence.

" S'il te plait, explique moi. "

Nouveau silence. La lettre avait glissé depuis longtemps au sol et elle ne s'en était plus préoccupé. Il était hors de question qu'elle la lui lise dans ces conditions. Hors de question aussi qu'elle lui en évoque un tant soit peu le contenu. A quoi bon ? Il put sentir sa main se serrer, mais aucun son ne franchissait encore ses lèvres. Il fallait qu'elle trouve quelque chose à répondre, mais son esprit bloquait. Parle, Aureane, parle...

" Je... tout à l'heure, j'ai... je... "

Elle savait avant même de commencer qu'elle ne trouverait pas ses mots. Mais elle ne voulait pas le laisser dans un tel silence.

" Je... je suis désolée... je n'ai pas voulu... c'est... "

Elle fit un effort pour ne pas la lâcher et rester près de lui. Les yeux de Nicolaï se promenaient quelque part, mais pas vraiment où elle était. Il ne voyait toujours rien, il n'y avait plus moyen de capter son regard, mais il était évident qu'il attendait toujours. Alors, elle se décida et, de l'autre main, lui tourna légèrement la tête vers elle, de façon à ce qu'il sache où elle était. Elle lui effleura la joue doucement et reprit d'une voix un peu plus assurée :

" Je suis désolée, j'ai réagi de façon stupide. "

S'il ne pouvait voir son expression, il pouvait entendre au son de sa voix qu'elle était infiniment triste. Finalement, elle conclut dans un souffle, espérant qu'il se contenterait de cette réponse quelque peu fuyante :

" N'y pensez plus... je ne recommencerai plus. "

Son ton avait des allures de sentence inéluctable, mais elle lui prit l'autre main et la serra également. Elle était toujours là, elle ne partirait pas, il pouvait en être assuré. Elle regarda ses yeux métalliques et constata tristement qu'ils n'avaient pas perdu de leur éclat. Elle avait toujours aimé ce regard... Elle s'y perdit un instant, ne sachant que dire de plus. Le rassurer quant à sa guérison ? Elle n'y croyait pas elle-même, elle ne ferait que lui mentir ! Le pousser à aller de l'avant malgré tout ? Elle ne voulait pas le brusquer et encore moins le choquer en minimisant le fait. Finalement, elle reprit doucement :

" Il est tard, vous devriez dormir... Je reste là, si vous le souhaitez, je n'ai pas sommeil. "

Ce qui n'était pas tout à fait vrai, mais, même fatiguée, elle savait qu'elle ne parviendrait pas à trouver le sommeil. Elle allait penser à lui encore et encore et se dire mille et une fois qu'elle aurait sans doute pu tout éviter. Cette idée revenait régulièrement, lui faisant une boule dans la gorge à chaque fois. Comme la marée qui monte tout-à-coup, elle réprima un sanglot et se força à rester calme, bien qu'elle craigne que ses mains ne tremblent. Pour une fois, elle ne s'excusa pas : à quoi bon, vraiment ? Des mots alors qu'il était aveugle... c'était tellement dérisoire ! Elle laissa couler une larme en silence mais ne bougea pas. Tant qu'il ne l'entendait pas pleurer...

Nouveau silence. Oppressant, interminable. Il comprenait bien que parler devait être difficile pour elle. Mais il n'y avait rien d'autre. Il ne pouvait plus tenter de deviner se à quoi elle pensait par les mimiques de son visage. Le fait de sentir sa main se serrer contre la sienne ne l'avançait pas à grand chose. Il fallait qu'elle parle. Qu'elle parle.

" Je... tout à l'heure, j'ai... je... "

*Mais bon sang, remue toi. Arrête de me mettre au supplice. Parle. Par pitié Aureane. Parle. Je ne peux pas te voir. Je ne peux pas savoir se que tu penses.*

Mais pourquoi est-ce qu'elle ne parlait pas? Pourquoi est-ce qu'elle le laissait dans ce vide complet? Est-ce qu'elle ne comprenait pas? Oui. Sans doute qu'elle ne comprenait pas. Elle ne le pouvait pas en même temps.

" Je... je suis désolée... je n'ai pas voulu... c'est... "

Nicolaï se reteint de fermer les yeux. Comme un espoir fou de pouvoir la revoir. Doucement, sans lui lâcher la main, elle lui tourna légèrement la tête pour qu'il regarde dans sa direction. Il ne pouvait certes pas le savoir. Mais il s'en doutait un peu. Doucement, il sentit les doigts fin de la jeune femme lui effleurer la joue. Caresse volontaire ou non, il n'aurait pas été capable de le dire.

La seule chose qu'il fit, se fut la savourer.

" Je suis désolée, j'ai réagi de façon stupide. "

Sa voix était infiniment triste. Regrettait-elle la façon dont elle avait agit ou de se qu'elle s'apprêtait à lui dire? C'était beaucoup de questions et peu de réponses. Puis, un souffle. Rien qu'un simple souffle. Des paroles à peine murmurée d'une voix aussi fuyante que cette réponse:

" N'y pensez plus... je ne recommencerai plus. "

Le couperet d'une guillotine n'aurait pas sonné autrement pour Nicolaï. Ses mains dans celles d'Aureane, il sentait la jeune femme les serrer doucement. Quel message tentait-elle de lui faire passer? Et puis, comment est-ce qu'elle voulait qu'il puisse oublier ça? Non il ne pouvait pas. Impossible. Il s'écoula plusieurs minutes dans le silence alors que le jeune homme se sentait sombrer petit à petit dans les ténèbres qui l'entouraient à présent.

Finalement, Aureane reprit doucement :

" Il est tard, vous devriez dormir... Je reste là, si vous le souhaitez, je n'ai pas sommeil. "

Inconscient qu'elle était en train de pleurer, Nicolaï se remit debout, hésitant un peu.

« J'ai dormis plus que mon compte. »

Doucement, il lâcha Aureane. Pas pour la laisser partir. Les mains du chevalier remontèrent le long de ses bras, de ses épaules, de sa gorge pour finalement arriver jusqu'au visage de la jeune femme qu'il se mit à caresser avec tendresse du bout des doigts. En redessinant le contour. Délicatement, il passa sur ses sourcils, ses joues, son menton, ses paupières qui se fermèrent à se moment là. Hésitant un moment, le jeune homme passé un doigt sur les lèvres fines de la jeune femme avant de remonter sur son front, ses oreilles, de se perdre dans ses cheveux.

« Aureane. C'est important pour moi. Vraiment important. Je ne peux pas faire comme si rien ne s'était passé. Je n'en suis pas capable. S'il te plait ne me le demande pas. »

Le jeune homme baissa la tête et ferma un instant les yeux.

Aucune différence.

Qu'il ait les yeux ouverts ou fermé, cela ne faisait aucune différence.

« S'il te plait Aureane ne me laisse pas comme ça. »

L'expression de Nicolaï fit comprendre à la jeune fille qu'il n'avait sans doute pas saisi ce qu'elle lui avait dit. Avait-elle été claire ? Sans doute pas... Finalement, est-ce que ce n'était pas mieux ainsi ? Elle garda le silence, ne sachant plus que dire ou faire. Sa tentative de le rassurer avait lamentablement échouée : il n'avait rien compris et, étant donné la façon dont elle s'y était pris, ce n'était pas étonnant.

" J'ai dormi plus que mon compte. "

Elle s'était attendue à une telle réaction... Elle se leva en même temps que lui, ne sachant pas trop ce qu'il pensait faire à présent. Qu'il la lâche la surpris, mais alors qu'elle pensait le voir s'éloigner, il resta près d'elle et laissa ses mains remonter le long de ses bras. Aureane ne bougea pas mais frémit lorsqu'elle le sentit caresser son visage. Un instant, elle souhaita que ce moment n'ait jamais de fin. Il put sentir que ses joues étaient humides de larmes qu'elle n'avait pu retenir. Elle n'osait plus bouger, ferma les yeux et ne les rouvrit, à regret, que lorsqu'il se remit à parler.

" Aureane. C'est important pour moi. Vraiment important. Je ne peux pas faire comme si rien ne s'était passé. Je n'en suis pas capable. S'il te plait ne me le demande pas. "

Elle n'avait pas voulu dire cela. Ou peut-être que si, finalement, elle ne savait plus bien. Peut-être était-ce un signe pour qu'elle soit enfin un peu honnête avec lui. Claire, du moins, car honnête, elle pensait l'avoir toujours été. Seulement, tout était tellement embrouillé dans sa tête, qu'elle n'avait pu se résoudre à parler. L'idée de le perdre lui était insupportable. Elle avait l'impression de marcher sans cesse au bord du gouffre et ne savait plus s'il tentait de l'en tirer ou de l'y pousser à chacune de ses questions.

" Je... "

Elle lui avait écrit une lettre pour lui expliquer... elle avait voulu être raisonnable, puis c'était dit que ce n'était pas le moment... puis elle avait à nouveau changé d'avis et encore hésité... elle ne savait plus vraiment où elle en était et les solutions envisagées lui paraissaient toujours trop cruelles pour Nicolaï... et insupportables pour elle. Pourquoi fallait-il qu'il insiste dans de telles conditions ?

" S'il-te-plait Aureane ne me laisse pas comme ça. "

La jeune fille retint son souffle alors que son cœur s'accélérait. Elle devait se décider. Une bonne fois pour toutes. Il avait le droit de savoir, non ? Elle avait pensé le protéger en éludant la question, mais il devrait se trouver face à la réponse tôt ou tard. Attendre encore ne rendrait la vérité que pire à accepter.

" Asseyez-vous... je vais tâcher d'être claire. "

Elle-même s'assit sur le lit après l'avoir aidé à faire de même. Par où commencer ? Elle n'avait pas écrit pour rien : les mots avaient toujours du mal à venir et à s'ordonner. Elle aurait pu lui lire sa lettre, mais ce serait trop... impersonnel étant donné qu'elle pouvait aussi lui parler franchement. Elle avait la bouche sèche : au fond, elle ne voulait pas parler.

" Je... je ne sais pas comment vous expliquer... juste... juste, laissez-moi aller jusqu'au bout... Je vous avais écrit une lettre, je venais vous la donner lorsque je vous ai trouvé inconscient... je voulais tout vous expliquer ainsi... "

Sa voix tremblait et elle se forçait manifestement pour poursuivre. Elle essaya de se calmer, de ne pas se laisser envahir par ses émotions. Rester cohérente, surtout : elle ne supporterait pas de devoir lui expliquer une seconde fois.

" Je veux d'abord vous assurer que je vous aiderai à rentrer à Dyriet et à vous réinstaller chez vous, je ne vous abandonnerai pas ainsi... "

Raconter dans l'ordre chronologique n'était pas une mauvaise solution, au moins, elle s'y retrouvait. Il ne pouvait pas le voir, mais elle parlait en évitant de le regarder en face. En revanche il pouvait entendre à quel point elle se forçait pour poursuivre d'une voix hésitante.

" Après... laissez-moi finir, je vous en prie, écoutez-moi jusqu'au bout... "

Elle s'attendait à ce qu'il réagisse mais ne voulait surtout pas s'arrêter là. Finalement, lire la lettre aurait peut-être été plus simple. La gorge nouée, elle fit un effort pour continuer :

" Après je... je quitterai Dyriet, parce que... "

Sa voix se brisa, montrant assez que c'était une décision qui lui déchirait le cœur. Lorsqu'elle reprit la parole, ce fut en réprimant ses larmes à grand peine. Elle ne parlait déjà pas très fort, mais là, elle craignit un instant de devenir incompréhensible mais se força à poursuivre :

" Parce que... je... je... un jour... vous... vous trouverez... une femme de... de votre rang et... vous vous marierez... et... et ce jour là... je... je ne pourrai pas... je ne supporterai pas... j'aurai... le cœur... brisé... je vous aime trop... pour ça... je... préfère... partir avant... plus... c'est plus... raisonnable... "

Voilà. Le fin mot de l'histoire était dit. Elle se calma à grand peine, essuya ses yeux, même si elle ne pouvait s'empêcher de continuer à pleurer doucement. Elle avait su qu'elle devrait avoir cette conversation tôt ou tard. En vérité elle estimait qu'elle aurait dû lui en parler beaucoup plus tôt, avant qu'il ne se fasse des illusions. Elle savait pourtant qu'il n'était pas suffisamment raisonnable pour y penser lui-même. A moins que pour lui, cela n'ait pas de réelle importance et qu'il ne se soit pas rendu compte de ce qu'elle pouvait ressentir.

D'une voix un peu plus calme, car sonnant comme une condamnation, elle conclut sourdement :

" Je suis désolée, j'aurais dû vous parler plus tôt. Je vais vous aider à rejoindre Dyriet, si vous le permettez, je trouverai quelqu'un pour me remplacer en tant que bibliothécaire et cuisinière, puis j'irai hercher du travail ailleurs. "

La décision la rendait malade de désespoir, la boule qui s'était formée dans sa gorge menaçait à présent de l'étouffer, mais elle était allée jusqu'au bout. Elle avait su que ce serait douloureux, mais elle n'avait pas imaginé à quel point. Elle s'aperçut qu'elle tremblait et n'osa pas se lever. Et puis, il avait le droit de répondre, elle devait au moins lui en laisser le temps. Quoiqu'il dise, cela ne changerait sans doute rien, car elle ne voyait pas d'autre issue à leur situation, mais... elle voulait au moins s'assurer qu'il avait compris la totalité de ce qu'elle lui avait dit. C'était extrêmement important, elle ne pouvait pas juste le quitter sans explication, elle lui devait au moins ça.

La jeune femme lui prit doucement le bras, tremblante.

*Allons donc, qu'est-ce qui se passe?*

" Asseyez-vous... je vais tâcher d'être claire. "

Nicolaï sentit une boule se former dans sa gorge. Le ton qu'utilisait Aureane ne laissait rien présager de bon. Non. Vraiment rien. Elle s'installa elle aussi sur le lit. À côté de lui. Il regarda dans sa direction, devait où elle se trouvait à cause du lit qui pliait doucement sous son poids de plume. Il était pendu à ses lèvres, attendant sa réponse avec autant d'espoir que d'anxiété. Enfin. Peut-être un peu plus d'anxiété sans doute.

" Je... je ne sais pas comment vous expliquer... juste... juste, laissez-moi aller jusqu'au bout... Je vous avais écrit une lettre, je venais vous la donner lorsque je vous ai trouvé inconscient... je voulais tout vous expliquer ainsi... "

Sa voix tremblait. Elle se forçait pour continuer à parler. Cela s'entendait. De manière plus flagrante sans doute pour lui maintenant qu'il devait se concentrer sur d'autres sens que sa vue. Il guettait le moindre son, le moindre de ses mouvement qui aurait put être trahit par un changement de sa position sur le lit ou par un froissement du tissu de sa robe.

" Je veux d'abord vous assurer que je vous aiderai à rentrer à Dyriet et à vous réinstaller chez vous, je ne vous abandonnerai pas ainsi... "

Il entendit parfaitement à quel point elle se forçait pour poursuivre.

Finalement, il n'était pas tout à fait certain de vouloir entendre toute l'explication. Non. Il n'en était plus certains du tout. Il présentait se qu'elle allait dire et cela était bien loin de lui plaire. Il ouvrait la bouche pour l'interrompre quant elle l'en empêcha.

" Après... laissez-moi finir, je vous en prie, écoutez-moi jusqu'au bout... "

Nicolaï baissa la tête et la laissa continuer.

" Après je... je quitterai Dyriet, parce que... "

En même temps que la voix de la jeune femme se brisait, le coeur de Nicolaï faisait de même. Qu'elle... qu'elle... qu'elle quitte Dyriet? Elle n'en avait visiblement pas envie. Alors pourquoi?i Pourquoi faire ça? Non. Elle n'allait quant même pas le laisser tout seul. Il fallait qu'il l'en empêche. Qu'il fasse en sorte de la convaincre. Qu'il... qu'il... qu'il...

Pourquoi voulait-elle partir? S'il le savait, il pourrait sans doute remédier à cela. Peut-être que c'était ce baiser. Surement même. Mais... pourtant, elle avait eu l'air de l'apprécier ce baiser. Comme elle avait eu l'air d'apprécier ces petites caresses sur son visage il y a à peine quelques instants.
Lorsqu'elle reprit la parole, elle murmurait tout doucement. Un simple souffle dans lequel on sentait toutes les larmes sur le point de couler qu'elle ne réprimait qu'à grande peine.

" Parce que... je... je... un jour... vous... vous trouverez... une femme de... de votre rang et... vous vous marierez... et... et ce jour là... je... je ne pourrai pas... je ne supporterai pas... j'aurai... le cœur... brisé... je vous aime trop... pour ça... je... préfère... partir avant... plus... c'est plus... raisonnable... "

QUOI !!!

Après tout se qu'ils avaient fait, tout se qu'ils avaient parcourut ensemble, elle pensait qu'il allait l'abandonner comme ça? Comme un vieux torchon? Et elle pensait encore, après le tournoi royal, qu'il en avait quoi que se soit à faire de son titre de chevalier? Non. Pour lui, se n'était qu'un outil. Un objet plus encombrant qu'autre chose en réalité. Non. Il ne l'abandonnerait pas. Et moins encore pour une noble. C'était elle qui hantait ses pensées. C'était elle qui lui avait permis de tenir tout se temps. Elle elle et encore elle. Personne d'autre.

Une certitude s'alluma dans l'esprit de Nicolaï. Il y avait pensé depuis un moment. Mais cela ne saurait attendre plus longtemps. L'heure n'était plus aux tergiversions. Si il attendait trop longtemps, il risquait de perdre Aureane. Et cela, il ne le supporterait pas. Mieux valait qu'il s'empale sur une épée ou se pende par la fenêtre tout de suite plutôt que de la perdre.

Il jouait nerveusement avec l'ourlet de sa manche au point qu'un fil commençait sérieusement à s'en détacher.

D'une voix sonnant comme une condamnation, elle conclut :

" Je suis désolée, j'aurais dû vous parler plus tôt. Je vais vous aider à rejoindre Dyriet, si vous le permettez, je trouverai quelqu'un pour me remplacer en tant que bibliothécaire et cuisinière, puis j'irai hercher du travail ailleurs. "

Contrairement à se qu'il aurait put penser, elle resta assise sur le lit. Il avait imaginé qu'elle partirait. Qu'elle le laisserait digérer l'information. Mais se n'était pas le cas. Elle restait là. Attendant très certainement qu'il réagisse. Et pour réagir, il allait réagir. Elle n'allait sans doute pas comprendre. Peut-être refuserait-elle. Mais au moins, il aurait essayé. Il tenterait n'importe quoi pour qu'elle reste avec lui. N'importe quoi. Même se lancer dans un nouveau voyage vers le Puy.

« Non. »

Un simple mot dans lequel il avait mit autant de force qu'il pouvait. Juste un mot.

« Je ne te laisserait pas partir. C'est hors de question. »

Il y eu un moment de silence pendant lequel le jeune homme la fixa. Son regard aveugle, mais décidé braqué sur elle.

« Tu me connais mal si tu pense que j'accorde la moindre importance à un quelconque titre. Je ne rentrerais pas sans toi et je ne resterais pas à Dyriet sans toi. C'est hors de question. »

D'un coup sec, Nicolaï cassa le fil et en estima la longueur.

« Je ne veux pas te perdre Aureane. »

il se mit à tâtonner pour prendre sa main, elle fini par la lui donner. Un peu tremblante, un peu curieuse.

« Se n'est pas des paroles en l'air. Je suis très sérieux. Cela fait longtemps que j'y réfléchis et que j'ai prit ma décision. »

Doucement, il palpa la main avant de parvenir à trouver le doigt qu'il cherchait.

« C'est un peu rustique. Mais je ne peux pas faire mieux pour l'instant. »

Enroulant doucement le morceau de fil autour de l'annuaire d'Aureane, il fit un petit nœud, prenant bien garde à ne pas trop serrer.

Il y eu un moment de silence. Puis, Nicolaï reprit la parole. Anxieusement, timidement et tout doucement.

« Aureane Eldon. Veux-tu m'épouser? »

Le "non" de Nicolaï, même avec toute sa conviction, ne changea rien à la réaction de la jeune fille. Elle se doutait un peu qu'il réagirait de la sorte, mais ne voyait pas ce que cela changerait. Oh, au fond d'elle, elle espérait toujours un miracle, mais elle restait réaliste. Ce qu'elle venait de lui dire, il aurait fallut qu'elle l'exprime tôt ou tard. Ne pas la laisser partir ? S'il lui donnait l'ordre de rester et de faire comme si de rien était, alors elle le ferait sans doute, mais ce serait cruel de sa part. Elle ne pouvait pas faire éternellement comme si elle ne ressentait rien pour lui, elle se détruirait petit à petit sans rien dire.

Son regard croisa le sien, aveugle, et elle se demanda ce qui serait pire : vivre loin de lui ou près de lui en sachant que tôt ou tard il... elle se coupa dans ses pensées, réprima un sanglot.

" Tu me connais mal si tu penses que j'accorde la moindre importance à un quelconque titre. Je ne rentrerai pas sans toi et je ne resterai pas à Dyriet sans toi. C'est hors de question. "

Oh non, elle savait qu'il se moquait des rangs et, pour être honnête, cela lui plaisait chez lui, même si elle trouvait cela étrange. Seulement, qu'il s'en préoccupe ou non ne changeait strictement rien au problème, de son point de vue. Ces titres, ils existaient bel et bien, on ne pouvait les ignorer.

" Je ne veux pas te perdre Aureane. "

Par les Cinq ! Elle non plus ne voulait pas le perdre ! Mais... qu'y pouvait-elle ? Elle s'apprêtait à le raisonner, comme on expliquerait à un enfant innocent que la vie n'est pas si rose qu'elle en a l'air, lorsqu'il commença à tâtonner. Que cherchait-il ? Elle lui prit la main lorsqu'elle compris et s'aperçut qu'elle tremblait encore légèrement.

" Ce n'est pas des paroles en l'air. Je suis très sérieux. Cela fait longtemps que j'y réfléchis et que j'ai pris ma décision. "

Une décision ? Quelle décision ? Même si cela avait été une question de vie ou de mort, Aureane aurait été incapable d'avancer la bonne réponse. Elle n'avait pas la moindre idée de ce dont il lui parlait, son silence perplexe ne témoignait. Elle écouta la suite tout aussi incertaine, sans vraiment comprendre. Un fil autour de son doigt ? Elle ne risquait pas de briser le silence qui s'instaura quelques secondes.

" Aureane Eldon. Veux-tu m'épouser ? "

La jeune fille se figea. Silence. Grand silence. Pour Nicolaï, ce devait être particulièrement frustrant d'attendre ainsi, mais, même s'il avait pu la voir, il n'aurait eu aucun indice de plus sur sa réaction car elle ne bougeait plus, ayant même cessé de respirer.

Puis il l'entendit reprendre son souffle, s'animer, lui prendre la main et la serrer, mais aucun son ne sortit de ses lèvres dans un premier temps. Lorsque finalement, elle se mit à bredouiller, la seule chose qu'il put comprendre fut un faible :

" Je... crois que... j'ai... j'ai mal compris... vous... "

Oui, il la demandait en mariage, il fallait le temps que l'information fasse gigoter les neurones qui n'avaient pas été foudroyés par la crise cardiaque sous le choc. Il y eut encore un moment de silence pendant lequel elle s'efforça de rester assise et d'assimiler l'information.

Puis elle demanda d'une voix blanche :

" Vous... n'êtes pas sérieux ? "

Visiblement, à aucun moment, malgré tout ce qu'ils avaient pu vivre, elle n'avait envisagé une telle solution. Même au plus profond de ses délires, elle n'y avait pas songé. Même après qu'il lui ait dit qu'il l'aimait et qu'elle lui ait assuré que ses sentiments étaient réciproques. Ce n'était tout simplement pas envisageable. Amour ne rimait pas avec mariage et inversement, de toute manière. C'était bien triste, mais c'était comme ça. Disons que s'il lui avait dit qu'elle allait devenir reine des elfes ou qu'ils allaient grimper sur l'arc-en-ciel pour repeindre le ciel en rose, elle aurait réagi de la même façon. C'était tellement... tellement...

Elle se crispa sur sa main un bref instant : tout de même, ce serait stupide de s'évanouir avant d'avoir répondu, n'est-ce pas ? Mais que répondre ? La situation lui rappelait étrangement la demande de faveur, au tournoi, ou la proposition pour l'accompagner au bal. Encore une fois, elle avait l'impression qu'ils n'évoluaient pas dans le même monde et ce n'était pas un souci de milieu social : Nicolaï vivait ses rêves les yeux grands ouverts (mauvaise image, étant donné les circonstances,je vous l'accorde, mais Aure n'est pas en état de faire vraiment attention, soyez donc un peu indulgents).

Le silence devenait lourd, Nicolaï n'attendrait pas éternellement une réponse, la jeune fille le savait, mais ses mots se bousculaient sur ses lèvres et elle ne parvenait plus à les laisser sortir. Il devait entendre sa respiration entrecoupée de tentatives affolées de prise de parole mais pendant cinq bonnes minutes, ce fut tout ce qui tint lieu de réponse. Se marier... avec lui... l'épouser... L'épouser. Voulait-elle l'épouser ? Le voulait-elle ? Elle avait l'impression que son esprit tournait à l'envers au son des battements de son cœur qui s'emballait.

...

Puis Aureane parvint à s'apaiser un peu et à réfléchir à nouveau. Oh, ses pensées se bousculaient toujours, mais elle parvint à les ordonner à peu près et, mieux, à esquisser un semblant de réponse. Elle s'y prit tout doucement, dans un souffle qui tremblait légèrement sous l'émotion :

" Je... je n'ai rien. Ni argent, ni terre, encore moins de titre... je ne sais même pas si je peux espérer un semblant de dot ou de trousseau pour mon mariage... "

C'était pourtant censé être un minimum. Mais elle avait quitté les siens, il était hors de question de recevoir quoi que ce soit d'eux. Si Nicolaï avait pu en douter, il était présent fixé.

" Mais je sais que ces arguments vous font horreur, alors... "

Silence tendu, pendant lequel elle respira pour se donner la possibilité de poursuivre de façon audible :

" Alors... "

Peine perdue, sa voix semblait décidée à s'éteindre sous l'émotion.

" Oui. " Un souffle, rien de plus.

Elle ne bougea plus, ne sachant plus que faire, le cœur battant à tout rompre. Elle allait se réveiller. Forcément. C'était juste impossible. Elle, se marier avec le chevalier Nicolaï KalonErc'h ? Elle n'arrivait pas à réaliser. Si elle ne l'avait pas su incapable d'une telle malice, elle aurait pensé qu'il se moquait d'elle. D'ailleurs, le fait qu'elle l'ait cru sincère aussi rapidement montrait assez à quel point elle croyait en lui. Seulement...

" Je crains juste que... "

Elle avait finit par reprendre la parole, confuse, la voix etouffée par l'angoisse :

" Je crains que vous ne regrettiez... comme... comme le tournoi... "

Elle lui avait dit que ce n'était pas une bonne idée. Il était passé outre et, si ce n'était que leur lien s'était resserré, il avait souffert de cette idée saugrenue. Cette fois, c'était... démesuré. En réalité, elle se débattait dans ce genre d'arguments qui revenaient sans cesse à l'assaut. D'autres se seraient dit que l'occasion était trop belle et se seraient précipitées sur l'aubaine afin de s'assurer un train de vie bien supérieur à celui qu'elles avaient connu. D'autres encore, auraient attendu de s'assurer que le seigneur de retour du Puy avait encore des revenus intéressants avant de s'engager avec un aveugle ! Elle, elle se demandait seulement s'il ne risquait pas de regretter sa décision plus tard, lorsqu'il réaliserait que, contrairement à une femme de son rang, elle ne lui rapporterait pas un sou. Elle ne se sentait pas digne de lui, tout simplement. Même sans parler argent, elle n'avait pas son éducation.

Et en même temps... l'idée même de passer le restant de ses jours l'emplissait d'un bonheur sans limite. Alors, devenir sa femme... Le temps de réflexion quelque peu chaotique passé, sans crier gare, elle se jeta dans ses bras et le serra contre son cœur. Elle se rendit compte qu'elle était à nouveau secouée de sanglots, mais cette fois, c'étaient des larmes de joie.

Seul le silence répondit à Nicolaï.

Il s'y attendait un peu pour être honnête. Il fallait lui laisser le temps de digerer l'énorme information qu'il venait de lui lâcher sur la figure. Surtout avec cette stupide manie qu'il avait de toujours se trouver là ou elle ne l'attendait sans doute pas. Ah, on pouvait dire qu'il était très fort pour ça. Et aussi que là, il avait fait très fort.

Enfin bref.

Pendant qu'Aureane faisait son petit entrainement à la plongé sous-marine, mais sans eau, notre jeune chevalier ne faisaient rien de moins. Voir même pire. Il était incapable de faire quoi que se soit et tant qu'en face de lui, elle ne se serait pas décider à ouvrir la bouche ou au moins à prendre son souffle, il n'en serait pas capable non plus. Finalement, Aureane reprit son souffle et lui prit la main. Nicolaï quant à lui était toujours en apnée complète.

Elle lui prit la main et la serra tendrement dans la sienne avant de se mettre à tenter de parler. Il entendait les sons qui mourraient dans sa gorge alors qu'Aureane tentait vainement de trouver les mots juste pour parler. Finalement un faible bredouillement parvint à s'extraire de ses lèvres.

" Je... crois que... j'ai... j'ai mal compris... vous... "

Non. Elle avait parfaitement comprit. Et non elle ne rêvait pas et non il n'était pas en train de se moquer d'elle ou quoi que se soit d'autre. Non non non. Il était tout se qu'il y avait de plus sérieux.

Elle demanda d'une voix blanche, encore indécise face à cette demande :

" Vous... n'êtes pas sérieux ? "

Mais bien entendu qu'il était sérieux. Tout se qu'il pouvait y avoir de plus sérieux même. Il lui avait bien dit pourtant. Qu'est-ce qu'elle n'avait pas comprit? Il était sérieux. Tout à fait sérieux. C'était pas une blague. Pas du tout.

Il était pendu à ses lèvres, essayant de palier de ses autres sens tout indice qui pourrait l'aider à savoir se qu'elle allait répondre. L'attente était tout à fait insoutenable. Il n'en pouvait plus. Dans le principe, c'était une question somme toute très simple. Mais dans les fait, les choses étaient autrement plus compliquées.

La main de la jeune femme se crispa brièvement, le faisant sursauter. Bon ou mauvais signe? Il n'aurait pas été capable de le dire. Mais c'était surement un signe de sa décisions. Il en était persuadé. Ah, mais bon sang, qu'est-ce que cela signifiait? Il n'en savait rien.

Le silence était vraiment trèèèèèès lourd. Parfaitement insoutenable n'aurait pas été faut même. Il fallait qu'elle parle, qu'elle bouge, qu'elle fasse ou dise quelque chose. N'importe quoi, mais quelque chose.

Il n'en pouvait plus d'attendre.

" Je... je n'ai rien. Ni argent, ni terre, encore moins de titre... je ne sais même pas si je peux espérer un semblant de dot ou de trousseau pour mon mariage... "

Elle avait parlé d'une voix tout à fait calme et posée.

Mais bon sang qu'est-ce qu'elle allait encore lui sortir comme conneries?

Il savait qu'elle ne roulait pas sur l'or. Non mais sans rire? Il l'avait vu déballer et remballer ses affaires. Il savait se qu'elle possédait avant qu'il ne l'engage. Alors qu'elle ne se promène pas avec une dot ou un trousseau, cette révélation n'en était pas vraiment une. Quant au fait qu'elle ne possédait pas de titre ni de terre... comment dire? Serais-ce sarcastique si je disais qu'il s'en doutait un peu? Sans doute.

" Mais je sais que ces arguments vous font horreur, alors... "

*Exacte. Je m'en fiche pas mal.*

il était pendu à ses lèvres. Elle avait laissé sa phrase en suspend. Il allait avoir sa réponse. Il ne savait pas s'il devait espérer de tout son cœur qu'elle accepte ou se préparer à un échec afin de ne pas trop être déçus si jamais il essuyait un refus.

Silence.

Encore et toujours se silence plus intenable que jamais.

" Alors... "

Nicolaï était tendu comme un arc. Prêt à lâcher complètement. Il allait craquer alors que la voix d'Aureane semblait diminuer de plus en plus.

" Oui. "

Un souffle. Rien de plus qu'un simple souffle.

Le souffle le plus important de toute sa vie. Un tout petit mot de trois toutes petites lettres qui avait une importance considérable pour lui.

Puis, anxieuse et confuse, elle reprit la parole.

" Je crains juste que... Je crains que vous ne regrettiez... comme... comme le tournoi... "

Oh non. Encore? Elle n'avait pas comprit après tout ce temps? Oh bon sang. Mais qu'est-ce qu'elle pouvait être têtue et bornée dans ses idées. Mignonnement têtue et bornée. Mais têtue et bornée quant même.

Sans crier gare, elle se jeta sur lui et le sera contre son cœur. Nicolaï qui ne s'y attendait pas manqua de basculer en arrière. Il irradiait littéralement de bonheur, son visage rayonnant d'un superbe sourire malgré ses yeux aveugles. Elle tremblait à nouveau, le corps secoué de de sanglots. Pas, passant à nouveau une mains sur son visage, il put constater que se n'était pas des larmes de tristesse comme peu de temps auparavant. Mais des larmes de joie. Elle était heureuse.

Nicolaï caressa à nouveau doucement son visage.

« Je n'ai jamais regretté se qui s'est passé au tournoi, dit-il simplement en lui passant la main sur le front. J'ai regretté la réaction de la foule. Mais de t'avoir demandé ta faveur, jamais. »

Doucement, il laissa à nouveau ses doigts parcourir le visage d'Aureane avant de l'embrasser doucement sur le bout du nez et de la serrer contre lui.

« Je t'aime, lui murmura-t-il dans un souffle. »

Les pleurs d'Aureane redoublèrent lorsque le jeune homme lui assura qu'il ne regrettait en rien ce qui s'était passé au tournoi. Certes, elle ne savait pas vraiment pourquoi elle pleurait, sans doute toute la tension accumulée ces derniers temps... ces jours passés à se dire qu'il faudrait tôt ou tard qu'elle se décide à ne plus jamais le voir. Son sourire réapparut pourtant lorsqu'il caressa doucement son visage puis l'embrassa, la faisant frissonner de plaisir.

" Moi aussi. "

Au moins, voilà qui était clair et qui résonnait avec suffisamment de force et de sincérité pour qu'il n'y ait plus de doute. Elle resta blottie contre lui quelques minutes, cessa de pleurer, avant de reprendre un peu ses esprits et de se rendre compte de ce qu'elle faisait. Se redressant, elle reprit légèrement ses distances, murmurant un "hem" un peu gêné. Il pouvait facilement se douter qu'elle avait dû s'empourprer une fois de plus.

Tout de même, un peu de tenue ! Ils n'étaient pas encore mariés ! Elle commençait à peine à réaliser, à vrai dire et, maintenant, elle avait l'impression que tout cela la dépassait. C'était comme si un bon génie venait d'apparaitre et de lui exaucer son plus beau souhait. Impossible ! Elle allait se réveiller, non ? Elle avait gardé le silence quelque temps et Nicolaï put sentir qu'elle faisait preuve d'une certaine nervosité. Puis elle finit par demander d'une petite voix :

" Je... je ne suis pas en train de délirer à nouveau, n'est-ce pas ? "

Elle voulait être sûre, mais en même temps, elle savait déjà que tout était vrai. C'était mieux qu'un rêve, elle ne pouvait tout simplement pas inventer une telle situation ! Mais... l'entendre dire par Nicolaï lui-même était rassurant. Lui, il ne lui avait jamais fait défaut, même lorsqu'elle voyait sa sœur dans le désert. Alors s'il lui disait que c'était vrai, elle pouvait lui faire confiance. En réalité, Aureane essayait juste de faire un peu le point. Vint alors une idée qui la fit à nouveau se crisper.

" Euh... "

Comment lui dire cela ? Elle ne savait pas trop si c'était le moment, si ce n'était pas à lui d'aborder cette question, si dans le sud et dans la noblesse on procédait ainsi... Cette demande en mariage était déjà hors norme de son point de vue, alors... Mais tant qu'elle n'en aurait pas parlé, elle ne serait pas tranquille. Après, Nicolaï était libre de réagir comme il l'entendait, mais il fallait qu'elle s'exprime.

" Je... eh bien... "

Si elle continuait comme ça à tourner autour du pot, il allait se demander ce qu'il lui arrivait - encore - et être à nouveau inquiet. Il avait eu assez d'émotions comme cela, elle se décida à aller droit au but, même si c'était d'une petite voix timide.

" Je... je ne peux pas vraiment accepter tant que... tant que mon père n'a pas donné sa bénédiction pour le mariage. "

Le père en question devait paraitre bien lointain pour Nicolaï, la jeune fille n'en ayant jamais beaucoup parlé. Tout au plus pouvait-il s'en faire l'image de quelqu'un qui gérait d'une main de fer une famille nombreuse et qui n'appréciait pas beaucoup qu'on dévie un tant soit peu du droit chemin. Si Aureane avait reçu une paire de claques pour avoir émis l'envie absurde d'apprendre à lire, alors décider de se marier sans son accord équivalait sans doute à un lynchage en règle. D'ailleurs au ton employé par la jeune fille, Nicolaï pouvait se demander si le refus paternel n'équivaudrait pas à une annulation pure et simple de sa part.

" Il faudrait que... que j'écrive pour dire que je vais bien, de toute manière... "

Les mots se bousculaient, témoins de son trouble. Ce n'était pas une situation dans laquelle elle avait pensé se retrouver un jour et cela la rendait très nerveuse. Elle avait toujours imaginé que, comme pour ses sœurs, son père lui annoncerait un jour que quelqu'un avait demandé sa main et qu'il avait accepté. Dans le meilleur des cas, elle aurait connu et déjà beaucoup apprécié cette personne, mais de là à la connaitre comme elle connaissait Nicolaï... C'était totalement inconcevable comme façon de faire ! Du coup, elle ne savait pas trop la marche à suivre ni ce qui conviendrait au jeune homme. Mais elle avait besoin de réfléchir un minimum à tout cela pour ne pas se mettre à paniquer.

Et puis, le fait d'avoir encore envie de se serrer dans ses bras et de penser sans cesse au baiser qu'ils avaient échangé n'arrangeait rien : elle ne savait plus ou se mettre. Si elle avait écouté les dieux tous-puissants de la chatbox, elle aurait sautér sur Nicolaï pour le violer, et il aurait réagi en lui fracassant le crane - ou pas, me souffle une petite voix malicieuse. Mais Aureane étant une tête de mule, comme on me l'a si bien fait remarquer, elle se contenta de se mordiller la lèvre en restant assise sagement à une distance un peu plus raisonnable que quelques minutes plus tôt. Fixant finalement son attention sur le fil qu'elle avait toujours au doigt, elle ne put s'empêcher de sourire béatement devant un présent qui n'était peut-être pas grand chose mais représentait tout pour elle.

" Moi aussi. "

Nicolaï afficha un très large sourire. Combien de temps et combien de fois avait-il rêvé d'entendre? Elle les lui disait enfin. Enfin. Il se sentait d'humeur à aimer la terre entière. Tout allait bien. Même cette cécité auquel, le cœur débordant, il ne pensait même plus. Enfin, si un peu. Mais c'était à présent passé à un rang bien moindre dans ses priorités.

Aureane lui avait dit oui.

Voilà se qui était le plus important. Ça et rien d'autre.

La jeune femme resta un moment blottie contre lui. Aucun d'eux n'ayant envie que ce doux contacte soit rompus. Arrêtant de pleurer, elle fini par se reprendre et se redressa, reprenant ses esprit, elle s'éloigna du même coup du jeune homme (Arf zut. Dommage. Pas pour ce coup là qu'elle lui sautera dessus). Enfin, c'est vrai qu'il n'avait fait que lui passer la bague au doigt. Ils n'étaient pas encore marié. Et puis aussi, il fallait dire qu'en guise de bague, elle avait une ficelle. Un peu étrange.

Elle émit un "hem" un peu gêné. Son radar aureanométrique lui apprit qu'elle s'était empourprée au point de luire tout rouge dans le noir. Une Aureane phosphorescente en gros. Bon j'exagère un peu quant même. Beaucoup? Ah oui peut-être. Mais bon, en même temps, Nicolaï trouvait mignonne la façon qu'Aureane avait de rougir. Donc oui, il l'imaginait toute rouge.

Enfin bref. Si Aureane n'arrivait toujours pas à y croire, Nicolaï quant à lui se retenait pour ne pas sauter sur Aureane et la couvrir de baisers. Se serait sans doute très amusant et très confortable un câlin. Enfin, il y avait quant même deux éléments problématiques dans ce magnifique projet. D'une part, il ne savait pas trop où elle en était à cause de cette foutue cécité. D'autre part, elle allait sans doute rougir plus encore.

Ils gardèrent un certain temps le silence. Ah ah ah. Il l'imaginait tout à fait en train de se triturer les doigts nerveusement ou de se mordiller gentiment la lèvre. Finalement, Aureane prit la parole d'une toute petite voix :

" Je... je ne suis pas en train de délirer à nouveau, n'est-ce pas ? "

*Pas cette fois en tout cas. Essaye encore.*

Nicolaï secoua négativement la tête pour lui dire que non. Qu'elle n'était pas en train de délirer et que c'était bel et bien la réalité. Aureane avait sans doute besoin de l'entendre. De s'en assurer. Il n'avait pas l'intention de la laisser pense qu'elle faisait un rêve ou était en train de délirer. Na!

« Tu ne délire pas. Pas du tout. Tout ceci est bien réel. »

Soudain, il sentit Aureane comme se crisper à côté de lui.

" Euh... "

Aïe. Ça puait le problème à plein nez là. Oui. Vraiment et il n'aimait pas du tout ça. Il n'avait pas la moindre idée de se que cela pouvait être, mais il n'aimait pas. Tout simplement.

" Je... eh bien... "

Si elle continuait comme ça à tourner autour du pot, ils allaient finir par mourir de vieillesse avant de savoir se qui allait de travers. Encore de travers. Pour être honnête, il commençait un peu à s'inquiéter.

D'une voie tout aussi timide, elle reprit pour lui fournir une explication:

" Je... je ne peux pas vraiment accepter tant que... tant que mon père n'a pas donné sa bénédiction pour le mariage. "

Oups. Le père d'Aureane. Il l'avait oublié celui là. Et la perspective de remettre son mariage et son bonheur entre les mains de cet homme n'était pas pour le rassurer. En tout cas pour le peu qu'elle lui en avait parlé. Aureane avait reçut une baigne pour avoir émis le souhait d'apprendre à écrire au lieu d'aider sa famille au champ et de finir au trois quart morte avant ses vingt ans à cause de sa trop grande faiblesse physique. Déjà qu'apparemment il n'aimais pas vraiment les nobles, qu'est-ce que se serait quant elle en ramènerait un pour qu'il demande officiellement la main de sa fille? Aureane allait finir lapidée avant d'avoir fait trois pas.

Le ton qu'elle avait employé n'était d'ailleurs pas pour le rassurer. Il se demandait si elle n'allait pas purement et simplement annuler ce mariage parce qu'il refusait. Le jeune homme soupira. Bon sang, mais elle n'allait pas renoncer à son bonheur parce que celui qui l'avait fichu dehors. Se serait stupide de faire une chose pareille.

Le jeune homme soupira à nouveau.

" Il faudrait que... que j'écrive pour dire que je vais bien, de toute manière... "

Ah oui. Il allait peut-être falloir qu'ils donnent des nouvelles. Du genre: ''on est là, on ne nous enterrez pas encore, on est pas mort.''

Nouveau moment de silence.

« Pas ce soir en tout cas, dit Nicolaï. »

Il resta un moment sans bouger à réfléchir à se qu'il allait pouvoir faire. Reprendre Aureane dans ses bras? Oui, possible. Mais il n'était pas certain qu'elle apprécie ce geste. Rester là sans bouger? Possible aussi. Mais aucun d'entre eu n'allait pouvoir supporter des jours et des jours comme ça sans bouger. Lui bien plus qu'Aureane d'ailleurs, il faut le préciser.

Oui étrange hein? C'est vrai que cette jeune femme est tellement bavarde. Enfin bref. Il hésitait un peu, ne sachant pas trop quoi dire ou quoi faire.

Nicolaï se mordit les lèvres.

Ah, c'est contagieux ça.

« Est-ce que... tu voudrais bien rester avec moi? Cette nuit? »

Il n'était pas certain qu'elle allait accepter ou non. Mais au moins, il aurait essayé.

Aureane se demanda ce qui se passait lorsque le jeune homme se releva. Un souci ? Elle fit de même aussitôt, inquiète, venant à sa rencontre dans l'idée de le guider vers... vers quoi ? Ce fut lui qui la prit vers le bras alors qu'elle se demandait ce qui lui passait par la tête.

" Tu n'as pas compris ce que je voulais dire. "

Hein ? Euh... non, toujours pas d'ailleurs, ce qui la fit se troubler assez vite, même si elle se laissa faire sans opposer de résistance. Elle ne voyait pas où il voulait en venir, ni ce qu'elle avait pu mal comprendre. En revanche, elle saisit enfin ce qu'il voulait lorsqu'il entreprit de l'allonger sur le lit. Ouvrant la bouche pour protester, elle ne laissa échapper qu'un souffle :

" Mais... "

Elle n'avait pas prévu ça... Bon, elle se doutait que Nicolaï voulait juste dormir près d'elle, rien de plus. Seulement là, elle n'était pas dans un semi-délire, elle n'avait pas de fièvre, elle n'était pas désespérée pour une raison quelconque, bref, elle avait toute sa tête et la situation était plus que gênante. Elle ne pouvait décemment pas s'autoriser un tel écart de conduite. Il put d'ailleurs sentir, à défaut de voir, qu'elle s'était tendue malgré toute la douceur dont il faisait preuve. Si un peu plus tôt elle était à l'aise dans ses bras, parce qu'elle y était allée spontanément, là, elle se crispa plus qu'autre chose lorsqu'il lui caressa la joue.

" Tu rougis. "

Oh, pour ça, oui : elle avait les joues en feu. Le cœur battant à cent à l'heure, Aureane bredouilla un "je... je sais..." avant de se mordre la lèvre. Puis il la serra dans ses bras et elle n'y tint plus, se levant subitement en le repoussant malgré tout doucement. Elle se doutait qu'encore une fois, il n'allait pas comprendre, aussi, elle tenta de s'expliquer maladroitement :

" Je... je suis désolée mais... mais je ne peux pas... "

Aux mouvements qu'elle faisait, il put entendre qu'elle s'éloignait légèrement du lit.

" Je... nous... enfin... nous ne sommes pas encore... mariés. "

Alors non, elle ne pouvait pas dormir près de lui, c'était juste inconcevable. Qu'il ait pu imaginer une telle chose la laissait effarée. Oh, ce n'était pas une question d'en avoir envie ou non, c'était juste inimaginable, voilà tout.

" Je sais que... "

Sa voix baissa d'un ton alors qu'elle poursuivait timidement :

" Je sais que je l'ai fait durant notre voyage et... mais... enfin... je... je ne me rendais pas compte... enfin... vous... je n'aurais pas dû... enfin... je ne regrette pas, mais... ce que je veux dire... "

Elle s'emmêlait dans ses explications, finit par arrêter de bredouiller. Laissa passer un temps avant de demander, hésitante, un peu piteuse :

" Puis-je... regagner ma chambre ? "

Elle baissa la tête et se mordit la lèvre, désolée. Elle craignait de l'avoir fâché et s'attendait à ce qu'il prenne mal sa réaction même si... euh... c'était normal qu'elle réagisse ainsi, non ?