[Prison de Diantra] La Grande Evasion

Aarnis venait à peine d'entrer dans la cabine du cap... SA cabine, n'avait ne serait-ce que pu jeter un oeil furtif au bordel qui y régnait que des bruits de combats étouffés lui parvinrent.

- Je me disais aussi c'était trop beau... Et il remonta sur le pont pour voir 4 corps étendus sur le sol : 2 morts, un assommé (pour un sacré bout de temps au vu de ses yeux révulsés) et Kassandra avec "La vieille" qui faisait son possible pour la soigner. Elle avait reçu un coup de poignard dans l'abdomen. Cela aurait du être une blessure relativement facile à soigner mais étant donné l'état de la lame il fallait désinfecter, recoudre et cicatriser. Quoiqu'il en soit le magnifique corps de Kassandra allait à jamais porter la marque de cet assaut.

Il fît signe à Ménélor et au colosse (il avait déduit que ce dernier était avec lui ou du moins pas contre, en voyant le corps du mutin et le grand sourire niais qu'arborait la montagne de muscles) d'emmener la blessée dans sa cabine afin de la soigner dans un cadre un petit peu plus sain.

Au passage il capta le regard de la vieille et chose assez étrange, il ne put absolument rien lire sur ce visage buriné par le temps et fermé comme une huître. Une vague un peu plus haute que les autres secoua le bateau et ramena notre désormais Capitaine à la réalité.

Il enleva alors sa chemise de taulard, maculée de tâches de sang de graisse et autres substances peu ragoûtantes, et la jeta par dessus bord. Elle flotta un instant, ballottée par les courants d'air, passant de l'un à l'autre d'une manière presque consciente. Une fois disparue il se retourna et fit face à l'équipage :

- Bon, commença-t-il, je crois qu'on a pas pris un très très bon départ là hein? Je crois qu'on peut même parler d'un échec. Si si! fit il en voyant certaines moues dubitatives, un putain d’échec! Et pourquoi? Parce que certains n'acceptent pas (et n'accepteront jamais d'ailleurs) l'autorité. Oui mais voilà, je vous ai guidés jusqu'ici, même si je dois le reconnaître je n'y serais jamais arrivé sans vous, j'ai pris la responsabilité de ce groupe et jusqu'à présent tout le monde avait trop peur pour oser le faire. Mais voyant le nombre se réduire certains se sont dis "hé mais pourquoi lui en fait?". Tiens mais oui, fit-il en s'adressant au cadavre du chauve, pourquoi moi? Ah d'accord, mais c'est bien sûr!

Et il éclata de rire. Mais pas un de ces rires qui sont chauds et que tout le monde a envie de partager, non, celui là était froid et chaque homme et femme présent sur le pont à ce moment là ressentirent comme une lame glacée leur percer les entrailles. Puis il s'arrêta aussi soudainement et brusquement que lorsqu'il avait commencé.

- Alors oui je me suis auto-proclamé Capitaine parce que personne n'a eu les couilles de le faire. Oui je parle beaucoup (et même beaucoup trop selon certains). Mais soit réglons cette affaire de la seule manière que vous semblez comprendre : je défie ici quiconque en aura l'audace, de m'affronter en duel singulier sans autre règle que celle du premier sang versé. Le vainqueur aura alors montré sa puissance et sa vaillance au combat et sera donc légitimement capitaine de ce navire. Si plusieurs prétendants se manifestent je me ferais une joie de les affronter les uns après les autres toujours selon cette même règle. Si malheureusement personne ne se présente je me réserve le droit de rester à mon poste actuel c'est à dire Capitaine. Des questions? Bien. Des prétendants?

Personne en bougeait ni même ne respirait, lorsqu'un des gaillards les plus costauds s'avança et pour toute forme de défi cria, ou plutôt rugit.

Il prit une épée courte des mains d'un des autres ex-prisonniers présents et chargea. Aarnis se dit pendant une seconde que l'épée faisait vraiment petite par rapport à la taille de cet "homme". Il esquiva l'assaut assez aisément en effectuant un demi tour tout en profitant du déséquilibre de son adversaire pour le désarmer. Il jeta au loin l'arme et fit face au taureau désormais passablement excité qui lui faisait face. Il ne voulait pas tuer cet homme juste gagner son respect. La brute chargea, son poing décrivant une formidable parabole un poil plus rapidement que ce qu'Aarnis avait prévu. Lorsqu'il ouvrit les yeux, notre Apollon blondinet voyait quelques chandelles. Il se releva tant bien que mal et se remit en garde. Il devait réduire la distance entre lui et son adversaire afin que ce dernier ne puisse utiliser son allonge. Il sauta alors en avant fit une roulade et ressortit ses deux pieds dans le foie du géant. Celui-ci se plia en deux, le souffle coupé. Aarnis prît sa tête et remonta son genou droit dans la face du "Taureau". Aarnis sentit l'arête nasale se fracturer et un liquide perler sur ses chausses. Il avait gagné ce premier duel.

Il se remit en place au centre du cercle formé par les "matelots" et se remit en garde.

- Au suivant

Et il attendit que quelqu'un se manifeste.

On voyait de plus en plus de prisonniers fous de rage et pressés de sortir. C’est donc à cause de toute cette agitation que Noémie n’a pas aperçu la flèche se dirigeait à toute allure vers elle. Une forte douleur se fit alors sentir et ce n’est que quelques secondes après que la jeune femme se rendit compte qu’elle était blessée à l’épaule. Heureusement Noémie put encore suivre le groupe sans réel problème. Mais quelle ne fut pas sa surprise de voir un des prisonniers lui venir en aide. Une fois la flèche retirée, après une forte douleur et un cri aigu, un bandage de fortune fit son apparition pour éviter toute hémorragie. La jeune femme sut seulement chuchoter un remerciement avant de continuer à suivre le groupe. Une fois dehors la cohue et le manque de force empêcha Noémie de s’équiper d’une quelconque arme. D’ailleurs elle n’avait plus les idées claires et transpirait de grosses gouttes.

Puissant le maximum de ses forces, Noémie essaya de ne pas s’éloigner des autres. Elle ne comprenait plus vraiment ce qui se passait autour d’elle. Ils étaient dans la ville, une ville qui paraissait être en guerre. Etait-ce réel ou bien était-ce les yeux de la jeune femme qui lui jouait des tours ? Pas le temps de réfléchir à cela, la petite bande s’était accaparer d’une … Barque ? Oui bon pourquoi pas, tant qu’ils quittaient la ville c’était le principal. Noémie, même affaiblie par la perte de sang essayait d’aider de son mieux. C’est donc dans une barque que l’équipe se dirigeait vers le port. Durant le voyage Noémie tombait petit à petit de fatigue. Elle avait de moins en moins de force et n’arrivait plus à suivre les conversations.
Une fois au port, la jeune femme vit le groupe attaquer un plus grand bateau. A peine avait-elle le temps de les rejoindre à bord que tout le « travail » était terminé. Le bandage devenait de moins en moins serré, le sang se remettait à couler de plus belle. C’est à ce moment-là qu’elle fut conduite dans une cabine, il fallait recoudre la plaie pour éviter qu’elle ne saigne encore plus. Pas moyen de trouver du fil et une aiguille là où on l’avait conduite.

« Bon faut que j’en trouve quelque part. » Se dit-elle en partant explorer le bateau. Après quelques minutes, elle tomba sur Halvdan qui la cherchait justement.

« J’ai besoin de fil et d’une aiguille. » Dit-elle au gaillard qui avait l’air de lui apporter un rafraîchissement.

Heureusement ils en trouvèrent assez rapidement. Un bout de bois dans la bouche, la voilà qu’elle se coud l’épaule après avoir avalé à grande gorgée une partie du breuvage qu’Halvy lui avait apporté.

Versant un peu d’alcool sur sa blessure, elle ne saigna plus ce qui soulagea la voleuse.

« Ça va laisser une vilaine marque. »

Assise, elle se laisse glisser en arrière pour se coucher sur le dos, soulagée, fatiguée surtout. Elle regarda l’homme et le remercia une dernière fois. Ils entamèrent une petite discussion tout en sirotant leurs bouteilles respectives. Rattrapée par la fatigue en plus d’avoir cumulée de l’ivresse, Noémie sombra dans le sommeil.

Aarnis ne ressentait pas d'émotions, juste le calme au milieu de ces évènements. Il défiait tous les mutins du regard, les provoquant, leur suppliant presque de venir se mesurer à lui. Il sentait le regard désapprobateur du demi drow sur sa nuque, mais rien ne le ferait décamper de ses positions. Trahi par ceux qu'il avait aider à s'enfuir, notre blondinet n'avait que le goût de la revanche en bouche. Depuis son départ d'Etherna il n'avait fait qu'encaisser les coups, le cours des évènements l'empêchant de riposter. La vie l'avait pris pour un con et il n'avait pas bougé d'un pouce. Mais aujourd'hui sur le pont de ce bateau bercé par la tempête, il avait enfin sa vie en main, il pouvait choisir ce qu'il allait devenir. Et ce choix il ne l'avait toujours pas fait.

Bien que combattant émérite il n'avait jamais pratiqué l'art de la navigation. Il allait dépendre de ses subordonnés et bien qu'il les choisirais en fonction de ses affinités il voulait garder ce contrôle sur sa vie. Bien qu'il en dise autrement il n'était pas à l'aise en mer. Son univers à lui c'était les cours et les intrigues politiques, les amis qui n'en étaient pas et autres joyeusetés de la vie de noble. La Mer était trop franche, trop honnête, punissant ceux qui n'étaient pas dignes de la parcourir. Et puis pour un séducteur comme notre bellâtre l'idée d'une semaine sans courir de jupons était insupportable.

Il baissa donc son épée rouillée, et la jeta au sol. Toute cette excitation lui avait fait perdre la tête : il n'était pas fait pour être Capitaine d'un quelconque navire. Il l'avait toujours su. Il tenait bien trop a son petit confort pour vivre en mer. Et puis ces hommes le sentaient : il était un leader certes, mais pas un Capitaine.

- Soit, je comprends votre colère et votre rébellion. Débarquez moi au prochain port, et oubliez moi comme je vous oublierais.

Il se retourna et fit mine de descendre dans sa cabine. Il se ravisa et fit de nouveau face aux mutins :

- Mais si jamais l'un de vous essaie de m'éliminer avant notre future escale je vous étripe tous un par un et je jette vos entrailles aux mouettes et aux poissons. Message reçu? dit il avec une lueur malsaine dans le regard.

D'après la tête que faisait les marins ils devaient avoir compris.

La mine sombre Aarnis descendit dans la cabine.

Après de longues heures de sommeil dont on avait bien besoin, Noémie se réveilla. Un long bâillement et des étirements étaient nécessaires. La jeune femme ressentait pas mal de courbatures et cela ne l'étonnait pas vraiment quand elle s'était rendue compte où elle avait dormit. Son épaule lui faisait toujours mal lorsqu'elle bougeait de trop, elle en gardera des séquelles encore longtemps. Bien qu'elle avait été soignée, une cicatrice sera bien présente. Mais soit, mieux vaut cela que d'être resté en prison. A choisir, mieux vaut courir libre.

Il était temps d'aller voir se qui se posait sur le pont surtout que le bateau avait l'air plus stable que d'habitude. Une fois en haut Noémie se rendit compte qu'ils étaient à quai. Tout d'un coup un sourire se présenta sur le visage de la jeune femme. Enfin ! Elle pouvait enfin quitter cette bicoque. Mais avant elle voulait absolument revoir Halvdan mais malheureusement elle ne le trouva nulle part. Il ne fallait pas tarder car l'équipage semblait déjà se préparer à lever l’ancre. La jeune femme demanda donc à ce qu'on fasse parvenir un message au gros lourdeau. Un dernier remerciement pour son aide, après cella, elle attrapa quelques bouteilles qu'elle pourra troquer facilement puis quitta le bateau. C'est donc ainsi qu'elle repartait à zéro, une nouvelle vie, même si elle ne savait pas où elle se trouvait, peut importe tant qu'elle n'était plus sur ce bateau. Il fallait avouer que Noémie n'avait pas vraiment la navigation, ayant suivit le groupe pour avoir plus de chances de réussite par rapport à leurs fuite.

Soit, la voilà à terre, prête à repartir d'un bon pas. C'est à ce moment précis qu'elle décida d'oublier tout son passé, ainsi que sa petite envie de vengeance envers le régent de la péninsule. Repartons à zéro, c'est encore la meilleurs chose à faire.

[HRP : j'ai pas spécifié où on était pour vous laisser le choix, petit poste mais je ne suis vraiment plus inspirée par ce sujet.]

EH ALLEEEEEEEEEEZ! Toujours la même rengaine. TOUJOURS. On vous habitue d'abord à la déception, à la consternation, on vous laisse trouver votre petite routine... et soudainement on ose faire miroiter quelque chose de plus acceptable juste là, sous votre nez. Quelque chose d'assez satisfaisant même pour ne pas vous donner l'envie de répandre vos précieux fluides gastriques sur tout l'auditoire ci-présent. De l'espoir en somme. Mais HA! Sots que vous êtres! Ignares! Le sort, non content de se jouer de vous, vient alors vous happer au sommet de votre allégresse, au paroxysme de votre exultation! Et de béat vous voilà brisé, plus triste qu'une pierre, plus accablé qu'un nain sans barbe, qu'une catin sans gagne-pain, qu'un régent sans Calmerrèse! Et bien cela, c'était l'effet Ninis. Soit, dans le cas d'Halvdan, le sempiternel processus s'appliquait aussi à la qualité des gargottes, pintes et putes que le bougre avait eu loisir de goûter durant sa longue carrière de trimardeur, mais restons focalisés si vous le voulez bien.
Ainsi donc l'éternel cycle désillusion-espérance-résignation se répétait-il une fois de plus en ce jour maudit. Le bien nommé Messer-les-Fesses baissait les bras, tout bêtement. Une brochette de branquignols qui montraient les crocs -ou pour être exact une paire de vieux chicots branlants tout juste assimilables audit concept de croc-, une flopée de lames plus émoussées que l'esprit de notre soiffard après deux bouteilles, et bim! V'là que ça faisait sa sucrée!
- Soit, je comprends votre colère et votre rébellion. Débarquez moi au prochain port, et oubliez moi comme je vous oublierais. Comme frappé par la foudre, l'animal se tint là, incapable du moindre geste, de la moindre réaction, quand Aarnis se décida à ajouter: mais si jamais l'un de vous essaie de m'éliminer avant notre future escale je vous étripe tous un par un et je jette vos entrailles aux mouettes et aux poissons. Message reçu?
- Ouaaais! Et j'me chargerai d'vous faire ravaler rapières, orgueil, et tout c'qui pourra encore y rentrer par l'cul ent'-temps, chiures d'kerkands! conclut son acolyte avec hargne après quelques secondes d’hébétement. Et tandis que tombait la sentence, tous s'apaisèrent. Les flots se firent plus calmes, l'embrun plus doux, l'univers plus serein. Les choses retrouvaient leur place. L'Ethernois reprenait sa destinée en main, le châtelain renouait avec sa véritable raison d'être. Aarnis entamait le prélude de sa reconquête, augure d'un avenir que l'on peindrait de gloire et de sang. Et Halvdan son second litron de Carruw.

Tout bonnement incapable de se rationner, notre outre d'outre-mer avait copieusement rattrapé le temps perdu dans les cales de la cogue. Enchaînant caisse sur caisse (qu'il s'agisse de son état ou des contenants de la précieuse vinasse), seul ou accompagné, de jour comme de nuit, qu'il vente ou qu'il pleuve, le bestiau se réveilla un beau matin au milieu d'une soute douloureusement vide. Et accessoirement d'une flaque de vomi. Une odeur de mort emplissait l'endroit, des cadavres gisaient de toutes parts. A genoux, paumes dressées vers les cieux, le meurtrier hurla alors tout son regret, toute sa peine à la face du monde. Soit, les cadavres étaient de verre, mais tel génocide importait pour lui bien plus que celui des nains ou des elfes d'Ellyrion. Il ne restait plus une bouteille.
Déboulant sur le pont la mine basse, le teint morbide, le suderon se fit brutalement alpaguer par l'une des ces ignobles caricatures de pirate au rabais. Un distingué "va donc voir dans l'cul d'une Hydre si j'y suis" -qu'on eut pu confondre avec un rot de basilic- plus tard, il finit par se rendre compte qu'on ne lui cherchait pas spécialement des noises, juste à lui transmettre un message.
- Ma parole elle est toujours aussi fute-fute la gamine, j'bouge pourtant pas souvent mes cuissots des cales! Bon l'est où qu'j'aille la sermonner bien comme y faut une dernière fois?
- Bah.. partie... ç'fait six jours depuis la dernière escale, lui répondit-on d'un ton égal.
- QUOI?! ET C’ÉTAIT TROP D'MANDER QUE T'RAMÈNES TES JAMBONS EN BAS POUR M'EN TOUCHER DEUX MOTS AVANT 'SPECE DE BACHI-BOUZOUK ICONOCLASTE!! MARIN D'EAU DOUCE!! Et cetera. Cette grande armoire à glace taillée dans le roc, avoir un petit faible pour Noémie? Allons allons, vous déraisonnez.
La petite épopée de cette bande de joyeux lurons se déroula par la suite sans réelle autre anicroche. Ne parlons pas même d'événement ou divertissement, car au-delà des bêtes fantastiques et autres aléas météorologiques, c'est bien l'ennui qui sut se faire le plus mortel. Sautant donc les quelques jours nous séparant encore de la dernière étape de ce voyage, nous arrivons plus tard à Thaar. Conservant un semblant d'unité les premiers temps, l'on vit rapidement l'équipage se morceler au gré des lupanars, tripots et petits boulots. Halvdan et Aarnis avaient bien-sûr dignement fêté leur retour sur la terre ferme à grands coups de pintes, de danseuses et de Kassandra pour ce dernier. Chacun reprenait en somme le cours de sa vie. Le soleil brillait, les oiseaux chantaient, les deux loubards roupillaient. Tout allait enfin pour le mieux dans le meilleur des mondes.