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 [Chiard] Les Promesses ne s'oublient pas

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Cécilie de Missède
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MessageSujet: [Chiard] Les Promesses ne s'oublient pas   [Chiard] Les Promesses ne s'oublient pas I_icon_minitimeLun 7 Aoû 2017 - 12:32

<< Une énième voie à prendreMissive à Soltariel >>


Hiver - 4e jour de la 1ere ennéade de Karfias
10e année du XIe Cycle
Enclave de Chiard


Vivement que ce sale hiver finisse ! Rien que l'idée qu'ils n'en soient qu'à la moitié le déprimait. Les seules coques qui quittaient volontiers les quais étaient tout sauf recommandable. L'ensemble du trafique était ralentit. Avec les troubles d'Etherna les échanges avec le nord était au point mort si l'on exceptait Alonna... Et encore le trajet en zone de conflit n'était pas de tout repos. Un paquet de manifestes sous le bras, Après un dernier baiser à son épouse, Renard descendait quatre à quatre les marche de son manoir en direction de la porte qui lui permettrait d'arriver, bien qu'en retard, à la réunion qui devait faire le point sur les pertes de Verimios par rapport aux prévisions attendus. Tout le monde ici savait que la Comtesse n’aurait pas la main innocente en ce qui concernait l'indépendance de Chiard et il avait beau avoir grande estime pour sa nièce, le trio de pouvoir qu'il formait avec ses deux compère n'avait pas l'intention de se laisser flouer. Les Chiardis étaient d'autant plus préparés que Renard, contrairement à beaucoup, ne sous-estimait en rien la soit disant naïve enfant qui avait maintenant leurs serments au creux des paumes.

Giuseppe, l'intendant au teint cramé par une jeunesse douteuse et moucheté, comme celui de son maître bien que cela fut moins visible, des cicatrices de la petite vérole, regarda le noble capitaine aux cheveux d'or, dégringoler les marches comme un fringant jeune homme et lui passer sous le nez en fredonnant. « Vous êtes bien gaillard ce matin. » sourit-il en reconnaissant une bluette enjôleuse traçant une histoire d'elfe, de nains et de fées. Le sourire était contagieux. « En retard surtout. » Le pas aussi pressé que sautillant, Renard entassait les vêtements chauds sur ses larges épaules. Sa bonne humeur était bien trop grande pour pouvoir être mise en doute. Le sourire de Giuseppe en faisait foi. « La lettre de Lambert. Figure toi qu'Arianna est enceinte. Mon fils va enfin être père et moi deux fois grand-père ! » Le regard de l'intendant s'éclaira. « J'espère que ce sera un garçon. Vif, beau et robuste comme leur grand père. » S'exclama encore l'exubérant personnage sous les rires et les félicitations de son serviteur.
« Madame doit être aux anges !
- Elle l'est... » L’Émissaire fit une pause bien sentie avec sur le visage le sourire du chat qui avait mangé le canari. Passant devant le miroir de bronze poli qui trônait dans l'entrée, il fit une moue en remettant en place les mèches blondes qu'il avait si peur de perdre d'ici peu du haut de sa cinquantaine. « Tien ! Préviens Philippe, qu'il garde sa soirée libre. Même si son frère n'est pas à Chiard, nous fêterons ça comme il se doit ! »

Avant que son serviteur n'ai le temps de lui ouvrir la porte, Reard avait attraper la poignée et... Et se trouva interdit face à ce qu'il y avait derrière le battant... Ou plutôt qui était derrière le battant. Après une bonne minute de silence, il parvint enfin à revenir de sa surprise... Mais dans le doute, il ne put s'empêcher de poser la question.
« Cécilie ?
- Pardonnez-moi d'arriver à l'improviste. Ne vous inquiétez pas. Je ne suis pas là pour vous prendre de court. J'ai seulement profité d'une accalmie dans la météo pour faire le trajet. »

L'accalmie... Il regarda rapidement le ciel en essayant de se souvenir de la couleur qu'il avait généralement derrière les nuages. Elle était seule... enfin seule avec une étrange femme en tenue d'homme et au regard farouche. Sa coiffure échevelée, sa robe d'équitation nordienne, son sourire un peu trop appuyé... Tout cela était des plus inhabituel... «  Oncle Renard ? » La voix de la jeune femme le ramena soudain de ses observations et fit redoubler son sourire. «  Oui ! Oui. Entrez. Vous êtes évidemment la bienvenue, même quelques jours avant ce que nous avions convenu. Tenez, je vous laisse aux bons soins de Giuseppe. Je suis déjà affreusement en retard. Réchauffez-vous et reposez-vous. Ce soir nous fêterons une grande nouvelle. Il vous expliquera. » L'homme claqua un baiser sur la joue de sa nièce et s'inclina avec un respect relatif devant son ombre armée avant de filer.

Pour l'instant il y avait sa réunion. Les questions viendraient plus tard... Ou ne viendraient pas. S'il raffolait de bonnes anecdotes, cuisiner une Comtesse pareille pouvait lui retomber sur le coin du nez. Que ce soit Arcam, Tyra ou Néera, les rumeurs étaient toutes d'accord sur un point et ce depuis les premiers pas de la musicienne dans le grand monde : au moins un dieu devait lui en vouloir personnellement.

___________________


Hiver - 6e jour de la 1ere ennéade de Karfias
10e année du XIe Cycle
Petit jour - Manoir de Renard d'Orman


Une simple sur-robe de laine passée sur sa chemise, Cécilie était sortie du lit sur la pointe des pieds, avait ramassé sa canne et avait tâtonné le long du mur jusqu'à s'extirper de sa chambre. Étant donné le peu de mouvement dans les couloirs, la nuit n'avait sans doute pas trouvée de fin. Le froid était vif, même dans le manoirs et des frissons lui remontaient le long du dos a chaque fois que ses pieds heurtaient la pierre nue. Suivant le couloir dont elle se souvenait vaguement, elle tourna jusqu'à trouver les escaliers qui descendaient au premier et gagna, non sans peine, le salon.

Après avoir manqué deux ou trois fois de s'effondrer à cause d'un tapis mal placé ou d'une console trop basse pour être repérée du bout des doigts, les contours d'une banquette rembourrée se dessinèrent sous ses doigts. Au bout de cette dernière : la lyre qu'elle avait posé là la veille, oubliant de la monter dans sa chambre en fin de soirée. Tout son périple avait été fort long finalement. Combien de temps exactement, c'était difficile à déterminer, mais savoir que cela avait bien pris une demie-heure ne l'aurait pas étonnée dans un endroit qu'elle connaissait si peu.

Enfin, elle pouvait s'asseoir dans le calme de la pièce, fraîche malgré le feu que l'intendant Giuzeppe s'escrimait à maintenir à toute heure du jour et de la nuit ainsi que les épaisses tentures qui obstruaient les fenêtres. La lyre sur les genoux comme le meilleur des alibis, ses doigts s'agitaient à un souffle des cordes, tissant, tirants et jouant sur un instrument bien plus subtile. Une inspiration et les mélodies éparses qui lui provenaient des Arcanes devenaient des pièces bien plus détaillées et oniriques malgré leur origine si lointaine que leur existence en restait ténue. La plupart des habitants de l'endroit dormaient encore. Elle répéta ses rituels de bases, silencieusement ou à voix basse, son médaillon chauffant sur sa peau. Des sorts simples exécutés sur elle même pour finir la mise en jambe.

« Vous êtes levée fort tôt, Votre Grandeur. »

Une voix dynamique et mâle. Un sursaut. Sa concentration vola en éclat. Elle sentit l'instrument de pur énergie se disloquer entre ses doigts alors que le flot puissant tendait à retrouver son inertie en finissant la tâche que la volonté lui indiquait sans qu'aucune mesure lui soit donnée. Voyageant au sein de sa propre mémoire, Cécilie fut propulsé à travers ses souvenirs d'enfance. Alors qu'elle cherchait juste les limites de ses souvenirs oubliés pour s’entraîner à différencier les types de mémoires qu'elle effleurait, elle ressentit avec extrême précision un groupement de situations sans ordre ni cohérence portée par une même émotion. Cela aurait pu être une tristesse sans fond ou une rage abyssale mais à la place, la magie lui offrir un déferlement de gaieté sans ombre. Le soleil sur sa peau. Les voix. Les contacts. Les odeurs. Les goûts. Les idées. Les bruits. Les intentions. Brouillés, emmêlés les uns aux autres.

Sa respiration se bloqua, la rendant incapable de crier. Ses mains se refermèrent sur l'instrument de bois, produisant un désaccord strident.
« Ma Dame ?! » Il ne fallut pas plus que la seconde de perdition pour que l'homme soit près d'elle. Le cœur battant, tout repère perdu, elle sentit une main caleuse se posée sur son bras. Malgré son malaise et la superposition étrange de la réalité avec les quelques souvenirs qui flottaient encore dans son esprit, elle se força a répondre.
- ça va... Vous m'avez surprise.
- … Pardonnez moi. » répondit l'homme, soucieux. « Vous êtes certaine que tout va bien ? Vous semblez... Pâle... »
Il fallut encore quelques instants à la jeune femme pour qu'elle se rende compte qu'elle avait ponctué sa phrase d'un éclat de rire. La voix qui s'enquérait de sa santé et à qui appartenait la main pesant sur sa peau n'était autre qu'Anthoine.
- Ce n'est rien. Vraiment. Après tout ce temps vous ne devriez pas vous en faire pour si peu. »

Le jeune garde rit à voix basse, semblant se retenir de plus, comme s'il craignait qu'on puisse l'entendre. Un sourire un peu moins extatique quoi que des plus sincère revenait peu à peu aux lèvres de la Comtesse. Ils avaient vécu bien des choses dans le nord... Et toutes étaient bien plus traumatisantes qu'un malaise entre les quatre murs d'un manoir confortable. Pour l'un comme pour l'autre, cela représentait bien des cauchemars et bien des nuits blanches. Depuis qu'elle avait réussi à venir lui parler après la mort de Jindanor, elle ne prenait pas régulièrement de ses nouvelles... Et pourtant, entre les murs de Missède c'était la personne qui lui semblait la plus amicale et de loin. A croire qu'elle se mettait elle-même en position de faiblesse par rapport à tous ces bruits de couloirs qui l'avaient tant touchés...

D'une main ferme mais le plus doucement possible, elle dégagea son bras de la prise du jeune homme et desserra la prise qu'elle maintenait toujours sur sa lyre.
« Et vous ? Il me semblait pourtant que vous avoir dit que vous n'aviez pas de quart ici. Vous devriez en profité pour vous détendre un peu. » plaisanta-t-elle du haut de son nuage.
- Mes nuits ne sont plus aussi sereines qu'autre fois.
- Nous sommes au moins deux alors... » Sa voie était à la fois guillerette et railleuse devant leur déboires partagés. Anthoine leva un sourcil. Il avait un peu de mal à suivre ces accents qui ne ressemblaient pas vraiment à la Cécilie qu'il connaissait depuis des années, mais il préféra tenir sa langue. Elle avait l'air un peu moins abattue et stricte que d'ordinaire alors peut-être la surprenait-il simplement la garde baissée. Il l'observa, toujours plus étonné alors qu'elle se décalait sur la banquette. « Venez vous asseoir, vous ne devez pas être moins fatigué que moi.
- Je ne pense pas que cela soit convenable...
- Comme vous voudrez. » concéda-t-elle sans insister. « Vous vous acclimatez bien à Missède ?
- Oui. Mon supérieur est ravie d'avoir quelqu'un d'expérimenter. Je pense que mon avancement arrivera plus vite que ce que vous ne pensiez... Par contre, je n'aurai jamais pensé que vous me manderiez pour venir vous rejoindre à Chiard.
- Pour parler franc, je n'y ai pas réfléchi. J'ai agi sur un coup de tête. Je voulais simplement être entourée de personnes avec lesquelles je peux être autre chose que la Comtesse de Missède.
- Et je m'en réjouis. »

Un silence profond suivit la réponse d'Anthoine. Elle sonnait de façon bien plus sérieuse que d'aucun auraient put le croire, mais la jeune femme n'avait pas besoin de plus pour savoir... Et ne savait trop que répondre à cela alors qu'elle-même n'aurait pas su expliqué totalement le réflexe qu'elle avait eu. Elle finit cependant par briser le silence avec une question qu'elle avait sur la conscience depuis quelques temps déjà.
« Je ne vous ai jamais demandé pourquoi vous vouliez à tout crin à rejoindre la garde du Palais. » Elle le sentit se raidir, debout à un pas d'elle. Il n'était pas en colère, du moins, elle l'espérait, mais elle venait d faire un pas sur un terrain glissant et c'était sûrement du à cet état de flottement béat qu'elle ressentait encore partiellement. Il fallut un certain temps à Anthoine pour mûrir sa réponse mais aucune formulation ne semblait adoucir ce qu'il avait à dire, alors il alla au plus simple, chargeant l’atmosphère d'une brusque froideur. « Jindanor m'a demander un nombre incalculable de fois de veiller sur vous. Je sais qu'il n'aurait pas voulu vous savoir un instant en danger.
- Alors vous restez...
- Alors je reste. »

Contre toute attente, le garde vit la Comtesse sourire à demi, elle semblait retenir un rire attendri.
« Noble ou non, votre père est un bien valeureux Souffle pour avoir inculqué un tel sens de la loyauté et du devoir à son fils cadet.
- Je vous remercie.
- ... Mais si c'est pour rembourser une dette de vie, sachez que je ne demande...
- Jindanor était mon ami. »

Sa voix avait fusé. Sans appelle. Depuis le temps qu'il se préparait à cette confrontation, il avait parlé sans réfléchir, l'évidence passant ses lèvres comme une explication magique à tout ce qu'elle aurait put objecté. Il se rendit compte de son incorrection et se ratatina plus ou moins sur lui même tout en reprenant rapidement.
« Je lui doit la vie comme il me devait la sienne. Je lui ai fait une promesse et je compte bien la tenir. Il y avait quelque chose qui comptait pour lui plus que sa propre vie te je ne veux pas qu'il l'ait sacrifiée pour rien...  »

Le sourire de Cécilie ne bougea pas mais elle détourna la tête en reposant avec une précision et une attention extrême son instrument sur le guéridon qui bordait la banquette. « Je comprends. Et je vous en remercie. » dit-elle tout en s'activant. Peut-être par peur de voir la conversation s'enliser à ce point crucial, Anthoine s'efforça de reprendre sur un ton un peu plus jovial.

« Mais dites-moi, pourquoi Rose ne voyage-t-elle pas avec vous cette fois-ci ?
- Pas maintenant, Anthoine. J'étais sur le point de répéter mes gammes.
- … Bien, Comtesse. »


___________________


Hiver - 3e jour de la 2e ennéade de Karfias
10e année du XIe Cycle
Palais Ponti


« Alors nous sommes d'accord ?
- Non. Absolument pas. »

Le ton d'Edward d'Aral, Juge de Chiard et vétéran de la politique Chiardi, était sans appel et déclencha les soupires de l'Amiral qui essayait tant bien que mal de le pousser dans ses retranchements. Cela faisait maintenant trois jours que les trois nobles en charge de la cité discutaient officieusement avec la Comtesse en ce qui concernait le retour de Chiard sous domination rivegeoise. Si Renard et Guillaume, respectivement Emissaire et Amiral, semblaient trouver peu à peu leur compte dans les perspectives que la jeune femme leur offrait, le Juge de la ville ne cédait sur rien et refusait la moindre proposition de changement dans l'organisation de la grande cité portuaire. S'il avait mis, comme ses deux compère, un véto total et absolu sur le retour à l'ancien régime et l'abolition des règles de commerce indépendantes de la Cité, il n'avait pas envisagé la moindre des proposition de la Comtesse comme autre chose qu'une farce abjecte pour leur tirer le pain de la bouche. Trois jours après le début des négociations, il en était toujours au même point de méfiance et de froideur.

« Je l'ai dit et redit. Je ne vois pas en quoi cette ville devrait pâtir de ces vieux arrangements entre lignées seigneuriales. A l'époque, les de Laval ont été châtiés pour leur rébellion. Si les de Beaurivages ont accepté de leur prêter leur dos, ce n'est pas à Chiard d'en faire les frais. »
Un débat plein de fiel manqua d'exploser à nouveau sur la responsabilité des acteurs de l'époque mais Cécilie ramena les trois hommes à un calme tout relatif d'un commentaire acerbe sur leur comportement puéril avant de s'adresser directement à son adversaire le plus ennuyeux.
« Juge Edward. Jusqu'ici vous n'avez donné que des raisons générales à vos refus. Les seigneurs envisagés ne sont pas suffisamment investis dans Chiard pour la comprendre, ou au contraire sont déjà de parti pris. Ils ont trahis et recommenceront. Ou ils sont trop jeune, trop âgés.
Nous comprenons vos inquiétudes. Ernest et moi n'avons aucunement l'intention de vous spolier et je ne suis pas ici pour prendre des décisions dans la précipitation. Mais une transition serait dans l'intérêt de beaucoup de gens et permettrait une simplification et une pacification durable des relations entres les grands seigneurs Missèdois. Alors pour que vos attentes soient prises en compte, il serait préférable que vous soyez le plus précis et le plus factuel possible. 

- Que voulez vous comme précision ? Je l'ai déjà été mainte fois !
- Et bien donnez moi le point qui vous tien le plus à cœur, que notre clerc puisse le noter avec clarté.
- Et bien... Vous nous privez de nos droits après des années de bons et loyaux services. Vous rétrogradez Chiard à une vassale de second plan au lieu de lui laisser le prestige d'être directement sous la suzeraineté du Comte. Et vous proposez même qu'elle soit sous juridiction partagée pendant un temps ce qui ne fera que complexifier les processus de décision et rendre nos réactions face au marché bien moins efficaces. Sans parlé des libertés que nous n'aurons sans doute plus pour traiter avec Thaar.
- Calmez vous. Vous en devenez peu clair mon ami. » railla l'amiral en exagérant volontairement ses quelques éclats de rire excédés. « On dirait que l'idée de perdre votre très cher pilori vous travail.
- Moquez vous. Chiard n'a jamais été aussi florissante et elle veut briser ça pour un caprice de lignée vieux d'un siècle !
- Edward... » gronda sourdement Renard comme un avertissement devant le manque de respect de plus en plus évident de l'homme aux cheveux blancs envers la Comtesse.

« Je comprends que vous puissiez avoir des craintes, mais elles sont pour la plupart infondées. La seule juridiction partagée que j'ai proposé ne concerne que la marine de guerre. Étant donné que les navires construits par Beaurivages seraient ajoutés à la flotte Comtale et qu'une partie mouillerait dans le port de Beaurivages également, la seigneurie peut prétendre à nommer des officiers et à jouir d'une certaine influence sur les décisions.
Je ne compte pas priver qui que ce soit de ses droits. Au contraire. Vous avez d'ailleurs fait un travail admirable et je vous rappelle que la première chose que je vous ai proposé est une position de choix ici ou à la cour. Vous ne l'avez peut-être pas trouvé à votre goût mais...

- Mais vous ne m'aurez pas avec un titre ronflant, ma Dame. Il en faut bien plus pour égaler l'importance du travail que j'accomplis ici et la liberté dont je jouis au quotidien.
- Et bien faite moi savoir ce que serait pour vous une reconnaissance suffisante en cas de changement d'organisation interne de la cité pour réimplanté le droit féodal héréditaire.
- C'est le retour même à l'ancien régime qui est en soi inconcevable. »

Un nouveau concert de soupire fleurit. Cette fois, Cécilie ne put retenir le sien. Dans la petite salle du Palais Ponti, calfeutrée et chauffée, pour laquelle ils avaient délaissé l'habituelle salle du conseil, l'un des deux hommes qui encadraient la Comtesse trépignait. Elle entendait la jambe de l'Amiral rebondir frénétiquement contre le sol tandis que Renard, la respiration exagérément profonde et le ton bas, faisait tout son possible pour ne pas s'énerver. Bien qu'il n'ait toujours pas répondu à la proposition qu'elle lui avait faite en privé, son oncle semblait relativement favorable au changement de statut qu'elle avait proposé à chaque membre du conseil... Non pas que son statut à lui change beaucoup puisque la seule différence serait qu'à la place de répondre de ses actes devant ses deux compères, il en répondrait devant le seigneur des lieux. Mais tout de même, il restait relativement indolent dans ses protestations. Il avait beau dire mot pour mot qu'il était contre le retour des de Laval, elle l'avait connu bien plus véhément lors de tractations commerciales.

Pour l'Amiral, le plus jeune des trois et de loin, c'était assez étrange. Des plus véhément lors de leur première rencontre, il avait suffit qu'elle prononce le mot Commodore pour qu'il accepte soudain les changements liés à la ville. Tout ce qui semblait lui importer était la défense navale des côtes Missèdoise et la perspective de réunifier les navires Rivegeois et la flotte Comtal semblait l'avoir mis dans une joie rare. Alors lorsqu'en plus, elle avait ajouté qu'il serait possiblement nommé membre du Conseil des Artilleurs à titre honorifique, sa voix traduisait à merveille la gaieté que les deux autres pouvaient voir sur le visage expressif de ce colosse aux traits burinés avant l'heure.

Et depuis la veille, ils piétinaient.

« Ecoutez. » reprit le juge « Je veux la garantie que nous ne seront pas mis au placard sous prétexte de reconnaissance et que Chiard devienne encore plus rayonnante qu'elle ne l'est aujourd'hui... Et je pensais que nous étions tous les trois d'accord à ce propos, bien qu'il semblerait que nous n'ayons pas exactement la même définition d'un accord. Vous avez beau m’appâter avec un titre ronflant, il n'en reste pas moins que nous devrons nous soumettre aux décisions finales d'une personne qui n'aura jamais vécu à Chiard et qui ne connaîtra aucune de ses spécificités. Je ne laisserai pas l’œuvre d'une vie se faire volée par quelqu'un d'autre. Peu importe son nom ou son rang.
- Vous ne perdrez en rien vos possibilité de participer aux jugements ni à l'élaboration des lois. C'est justement la prérogative d'un Juge et cela reste notre prérogative d'en envoyer un où il le pense nécessaire.
- Votre parole n'est pas une garantie suffisante.
- C'est vous qui devriez surveiller vos paroles lorsque vous parlez de la Comtesse ! » rugit soudain l'amiral, bien plus piqué par l'irrespect croissant de l'engeance qu'il avait face à lui plus que par la cible de cette grossièreté.
- C'est une menace ?!
- Suffit ! »

Les deux hommes s'étaient levés avec fracas pour s'arrêter soudain, baissant les yeux vers le visage de la jeune femme qui venait de hausser le ton avec une violence insoupçonnée. Jusque là, elle avait garder une voix douce, mais ses années de chants lui avaient donné une puissance vocale que bien des vendeurs sur le marché au poisson aurait pu lui envier. Elle se racla légèrement la gorge pour faire passer le moment d'hésitation que son interruption avait engendrée et repris de la même voix douce et égale qu'elle avait tenté de garder.
« Nous devrions faire une pause. Cela ne mènera à rien si nous commençons à nous écharper. Nous reprendrons demain ces discussion n'ont de toute façon pas pour but de tout régler, seulement de prendre en compte vos idées et vos objections pour la suite de nos décisions au niveau du Comté. »

Les trois hommes se levèrent en soupirant, récupérant feuillets et notes en parlant à voix basse pendant que le clerc rangeait son écritoire. Renard pris doucement la main de la Comtesse pour l'aider à se lever et... «  Je vous remercie mais ça sera inutile. » les doigts de la jeune femme lui échappèrent. « Messire d'Aral. Voulez-vous rester un moment je vous prie ? »

Guillaume et Renard échangèrent un regard avant de croiser celui du dit juge. Malgré l'air renfrogné de ce dernier, il finit par hocher la tête en retenant un soupire, indiquant silencieusement à l’œil sévère de ses pairs qu'il ne ferait rien d’irréfléchi et qu'ils pouvaient disposer. Le grand brun et le blond au teint mate fermèrent la porte derrière eux en resserrant les pans de leurs capelines. Le Juge tira la chaise que Renard venait de quitter pour être au plus près de cette jeune aventurière tarée qui leur servait de Comtesse. Son regard passablement maussade s'attarda un peu sur le visage blanc et les lèvres pleine de la jeune aveugle avant de faire un signe de coupe, invoquant Néera pour le protégé, lui et sa cité, sans que la dame n'en soit inquiétée.

Comme il gardait obstinément le silence, entretenant volontairement une atmosphère glaciale, elle finit par commencer, circonspecte. « Je sens bien que ma présence vous est infiniment détestable m...
- Jamais je ne me permettrais de... » Elle leva la main pour lui intimer le silence... Ce qui le renfrogna d'autant plus. Sa gorge tendue peinait à ravaler la gourme qu'il avait envie d'enfin jeter au visage de cette petite arriviste insolente.
« Je vais vous redire ce que j'ai exprimer le jour de mon mariage. Je ne hais rien plus que le mensonge. Jamais la vérité ne vous fera de tort devant moi pourvue qu'elle soit exprimée dans un cadre approprié... Et maintenant que vos pairs sont sorti, il me semble que c'est exactement ce que j'appelle un cadre approprié. »

Elle entendit le vieux roublard se racler la gorge. Tout en lui, jusqu'à sa façon de respirer lui semblait hautain et condescendant. Le voir gravé sur son visage aurait été encore pire. Mais encouragé par les mondanité honorables de sa suzeraine, l'homme se lança sans plus mâcher ses mots.
«  Vos dires sont louables... Mais votre titre ne fait pas oublié votre jeunesse ni la façon dont vous avez acquis le pouvoir dont vous tentez de faire usage aujourd'hui. Sa Grandeur Théobald qui est étrangement tombé dans une longue et douloureuse maladie après votre départ, ce baron nordien qui a abdiqué bien peu de temps après votre retour, un aventurier suderon qui a perdu son titre de baron après la rupture de votre mariage et maintenant un officier qui aurait seul pu vous barrer la route. Je prie Néera pour qu'elle vous pardonne car bien peu de ceux qui entrevoient la vérité pourront le faire.

Je sais que votre père vous a donné un mentor en magie quand vous étiez enfant, mais c'était avant l'Oeil Bleu. Maintenant que vous êtes hors de danger, vous ne cachez même plus vos appétences et vous nous amenez des mages étrangers jusque dans nos foyers. Payés et Blanchis. Maintenant vous voulez faire main basse sur Chiard et comme par hasard Guillaume et Renard vous mangent dans la main.

L'amiral est encore jeune mais j'ose croire que c'est parce qu'il est votre oncle et non pour autre chose que Sire d'Orman vous prête sa main avec l'air de ne pas y toucher. Sachez qu'il faut plus qu'un joli minois et quelques envoûtements de la part d'une enchanteresse telle que vous pour que je cède. Mon père était prêtre de Néera et j'ai assez de volonté pour ne pas être sensible à vos charmes de sorcières Arcamite. Une musicienne aveugle et aventurière, voilà ce que tout le monde devrait voir en vous. Jamais je ne laisserai votre lignée maudite mettre la main sur le travail de ce conseil. »


Terrible était le ton employé car il ne portait pas la moindre trace de colère. L'homme était si convaincu de ce qu'il énonçait qu'il l'expliquait comme des faits tangibles et maintes fois vérifiées. Et voilà... Toutes ces pertes et tous ses sacrifices pour se retrouver six ans en arrière. Pas une fois Cécilie n'avait tenté de l'interrompre. Par la force de sa volonté, et malgré sa gorge nouée, elle parvint à garder la tête droite et la voix posée.
« Bien. Si vous préférez vous fier aux rumeurs, libre à vous, mais tout ceci n'est que fabulation. Sans le recours aux mages nous aurions risqué une pénurie de bois de chauffe et c'est par la raison et non la magie ou une quelconque proposition indigne que j'ai rallié vos pairs. » Prenant appui sur le bord de la table, elle se leva avec précaution, tâtonna jusqu'à la canne qui reposait près de son siège et chercha le mur d'une main timide tout en continuant sur le même ton. «  J'espère que vous considérerez une entente acceptable. Je m'attarderai sur tous les documents et toutes les revendications que vous m'enverrez. Cependant... » Sa main rencontra enfin la poignée de la porte qu'elle ouvrit. Mais au lieu de passer le seuil, elle s'effaça pour laisser le vieil homme sortir en passant tout à côté d'elle. « ... Sachez que je ne tolérerai pas une seconde fois que ma parole soit mise en doute en publique. »

Les pas du Juge le menèrent à la hauteur de la jeune femme qu'il dominait d'une bonne tête. Posant une dernière fois son regard sur se fin minois surplombant des courbes toutes alléchantes, il s'arrêta pour lui glisser d'une voix à peine audible :
« Ne vous attendez pas à un chien docile de plus, Votre Grandeur. Votre famille n'est plus Chiardi depuis bien trop longtemps pour prétendre au moindre pavé de cette ville.
- Messire. Mes aïeux ont eux-même posés ces fameux pavés que vous prétendez vôtres. »

Il serra les dents mais ne répondit pas. Honneur ou non, il avait encore un atout fort dans sa manche. La bourgeoisie ne se laisserait pas si facilement remettre en cage. Et s'il devait passer par ces hommes de basse extraction pour le bien de ses droits. Alors il n'hésiterai pas un instant.

Quelques minutes plus tard, Anthoine franchissait la porte du petit salon silencieux.
" Les missives que vous avez rédigé à l'intention des deux Ordonnanceurs, leur ont bien été remises en main propre. "


___________________


Hiver - 5e jour de la 2e ennéade de Karfias
10e année du XIe Cycle
Fin de matinée - Manoir de Renard d'Orman

« Vous êtes sûr de vouloir partir ? Marchand et Voisseur avaient l'air prêt à vous accorder bien plus de temps.

- Cela ne braquerait que davantage messire d'Aral. J'ai bien peur qu'il soit plus opiniâtre que ce que vous pensez, mon oncle. »

Descendant dans la cour d'où les serviteurs s'escrimaient à déblayer quotidiennement la neige et le verglas, Cécilie s'accrochait sans vergogne au bras de son oncle, peu rassurée de sentir un sol aussi précaire sous ses pieds. Tout comme elle avait avancé son arrivé sans prévenir grand monde, la Comtesse avait décidé de son départ la veille au soir. L'Emissaire avait tout mis en branle aussi rapidement que possible, mais malgré tout, il ne se sentait pas confortable de la laisser ainsi repartir avec une escorte réduite au milieu de l'hiver. Cécilie avait sourit lorsqu'il avait tenté d'argumenter pour la quatrième fois au moins. Peu habituer à ce genre d'attention détourné, cela lui faisait étrangement chaud au coeur... Et plus il lui posait la question, plus elle avait envie de rester à Chiard quelques jours de plus. Mais cela n'aurait donné rien de bon.

« De toute façon, je ne suis pas venu pour agir en despote et vous n'êtes pas le seul à vouloir discuter au mieux la suite des événements. » sourit-elle « Il faut que je parle de tout cela à mon mari et sans même parler de notre ami Edward, nous aurons encore maints détails à voir avec Sire de la Proue ainsi que les guildes de la villes et aux ambassadeurs étrangers. Des bourgeois pour la plupart. Tout ça simplement pour me mettre au fait de l'état réel de la ville avant de prendre la moindre décision concernant Chiard.
- Chiard à bien changée en un demi siècle... Il est étrange de pensé que mon grand père servait votre aïeul ici même.
- Pas tant que cela. »

Il n'aurait su dire si cette réflexion de la part de cette femme en particulier était un compliment ou une insulte... Avait-il à ce point l'air d'un chien fidèle ou reconnaissait-elle par là un honneur indéfectible ? Il se posait sans doute trop de question et déglutit pour faire passer le poids qui tentait d'asseoir sa domination sur son cœur léger. Comme si le silence lui était tout aussi détestable qu'à lui, Cécilie reprenait avec légèreté.
« Vous savez, cela peut paraitre bête étant donné que je ne m'y sens pas le moins du monde chez moi, mais je rêve de savoir les enfants de mon frère nés entre les murs du Palais Ponti.
- Je comprends mieux que vous ne pouvez le penser... Mais en le retransformant, même un tant soit peu, en lieu de vie au lieu de le cantonner aux rencontres politiques, nous ferions un pas dans le bon sens. Peut-être devriez vous songer à cela comme premier pas. "
Un sourire fin quelque peu amusé se dessina sur les lèvres de la Comtesse.
- Nous ?
- Je ne vous l'ai pas cacher. Je ne souhaite pas le retour de la suzeraineté des de Laval sur Chiard... Mais la proposition que vous m'avez faite ne peu pas être balayer d'un revers de main... Surtout lorsque j'ai Eulalie à mon bras. Que je le veuille ou non, pour mes fils, la possession d'un domaine héréditaire est bien plus importante que ma charge dans cette cité...
- Désolée d'avoir dû vous mettre devant un tel choix.
- Ne vous excusez pas. Vous et votre tante faites en sorte de respecter le serment de votre famille. C'est tout à votre honneur. Si cela ne me demandait pas de renoncer à ma liberté de principe, je serais même le premier à applaudir des deux mains une telle force d'âme de la part de lointains descendants des concernés.
- Je vous remercie.
- Ce n'est que vérité. »

La prenant par la taille, Renard aida sa nièce à prendre place sur la cavale. Anthoine et Edward d'Heucville étaient déjà en tête du convoie. Alors que les chevaux s'en allaient au pas, entrainant les corps croulant sous les couches de lainage des voyageurs, il jeta encore de sa grosse voix de capitaine de navire :

« Vous savez, plus le temps passe, plus je trouve que les valeurs de votre nouveau nom vous vont bien mieux que celles de vos parents. »


Dernière édition par Cécilie de Missède le Ven 25 Aoû 2017 - 15:16, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Chiard] Les Promesses ne s'oublient pas   [Chiard] Les Promesses ne s'oublient pas I_icon_minitimeVen 25 Aoû 2017 - 15:14


Hiver - 8e jour de la 2e ennéade de Karfias
10e année du XIe Cycle


«  Ah ! Mon Neveux !
- Mon cher oncle ! Vous rajeunissez ma parole.
- Je te dirais bien la même chose mais je ne pense pas que l'idée voir encore du lait sortir de ton nez quand on le presse soit un bon compliment.
- La valeur n'attend pas le nombre des années... Vous devriez le savoir avec votre GRANDE expérience. »

Renard ne se gêna pas pour rire de bon cœur au regard brillant du jeune homme qui venait de mettre pied à terre dans sa cours. A les voir ainsi tout deux, il était difficile de croire qu'ils n'avaient aucun lien de sang. Même boucles blondes, même air goguenard, la complicité d'un père et d'un fils devenu assez grand pour ne plus avoir besoin d'être rabroué.

Quelques lettres ramenées du Ponti dans la main gauche, le vieux capitaine entraîna le jeune chevalier par l'épaule vers l'intérieur de sa demeure. Ils saluèrent rapidement Eulalie et montèrent se mettre au calme dans le bureau de l'Emissaire qui sortit immédiatement une bouteille de Charmeroux pour en servir un verre à son invité.

« Alors, comment va la marmaille ?
- Cécilie est à la foire et au moulin. J'entends dire qu'elle passe plus de temps en ville à soigner les pauvres ou à enjoindre bourgeoisie et noblesse à faire preuve de piété et charité qu'aucune épouse des de Missède depuis longtemps.
- ça ne m'étonne pas d'elle... Je l'ai vu il n'y a pas trois jours pour parler de Chiard.
- Chiard... avec la guerre qui se prépare dans le Nord et le Médian ?
- Mon jeune ami, tu apprendras que les meilleurs moments pour se créer des problèmes sont les même que ceux qui te servent à fêter : ceux précèdent et ceux qui suivent une guerre.  »

Sans demander son reste ni porté de toast, Renard trinqua et s'assit enfin derrière son bureau, jetant mêle-mêle les lettres devant lui pour savourer cette pause. Gaël prit une grande lampée avant de reprendre le tour de leurs connaissances communes.

« Sinon, Colombe fait de son mieux pour aller bien. Mélisande me demande constamment quand père et mère seront de retour... »

C'est vrai qu'il y avait ça depuis quelques temps déjà. Aucune nouvelle de Mathilde n'était venu troublé le quotidien Missèdois depuis le mariage comtal et aucune autre visites que celles de Gaël n'avait été admise à Fort Sainte-Aliénor pour s'enquérir de l'état de l'ancien seigneur de Missède. Les yeux bruns de Renard se détournèrent légèrement de son neveux, mal à l'aise avec toute cette histoire de fou dont il ne préférait pas trop se mêlé. Même sa femme restait étonnamment silencieuse à ce propos.

«  hmm... » acquiesça il sombrement en déglutissant sa goulée de rouge. « ça doit pas être tous les jours facile.
- ça dépend. Cécilie s'en moque mais les fille souffre de leur absence.
- Et toi tu viens voir Arnaut à Sainte-Aliénor, c'est pour ça que j'ai si souvent l'honneur de ta visite.
- Non ! … Enfin... » Il secoua la tête et bomba le torse. « Comment allez-vous, vous ?
- Ma bru se porte à merveille. Le petit est prévu pour le début d'été. Et mes garçons sont égaux à eux-même.
- Grand Père... Cela vous va décidément très bien.
- Et toi ? Décidé à prendre femme ? 
-  La jeunesse donne la possibilité d'attendre.
- Alors une petite servante peut-être... ? »

Le jeune homme failli recracher son vin, et se mit à tousser sur le côté pour éviter de tâcher les documents épars qui trônaient devant lui. « Oh... Serait-ce du rouge que je vois à tes joues ?
- Et serait-ce une le sceau des di Montecale  que je vois à cette lettre ? »

Juste à temps... Gaël n'avait jamais été si content de remarquer un détail à la volée ! … Même si une fois l'euphorie passée, c'était plus inquiétant qu'autre chose. Il croisa le regard ennuyé de Renard et toute trace de victoire le quitta immédiatement.

«  La seule et l'unique qui m'a été envoyée et c'est plus ou moins une fin de non recevoir...
- Tu en a parlé à Cécilie ?
- Honnêtement, non. Je n'ai pas envie d'être celui qui lui apprendra ce qui s'est passé entre Ernest et Enrico. Ce n'est pas mon rôle. Alors tant que la nouvelle ne se répand pas en Missède...
- Je vois.
- J'ai essayé de limité les pots cassés mais la mort d'Enrico pousse son frère à nous battre froid. Il ne s'adresse qu'au Conseil de régence de Langehack et d'après ce que je sais, il a l'air bien parti pour reprendre le titre de Baron notre Piezare.
- Après tout ce que le conseil a pu dire de leur famille ?
- Soit ils le légitiment soit ils s'exposent à des guerres internes interminables pour savoir qui doit prendre la succession alors que la régence peut venir réclamer l'île à tout moment. Ils ont même envoyé une part de la flotte sécuriser la Nelenite et patrouiller dans le secteur.
- … Et bien nous verrons...
- … Ouais... Nous verrons bien. »

Trop de bonheur tue le bonheur, parait-il...

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