Saisir sa chance | Solo

Septième ennéade de Karfïas,
De la onzième année du onzième cycle.

L’été touchait à sa fin et il avait encore en tête les paroles d’Estiam. Il avait discuté avec quelques uns de ses conseillers mais n’avait encore réuni personne. Il voulait mener ce projet à bien mais perdait un peu plus chaque jour le besoin de se consacrer à son peuple. Sa famille s’était reconstruite en un rien de temps et il lui donnait de plus en plus de son temps et de son énergie. Mais avant de penser à se retirer, il voulait amorcer ce qui l’animait depuis longtemps. La reprise progressive des terres qui leur appartenaient et l’accompagnement de l’Oeuvre au-delà de ses frontières actuelles pour essayer d’apporter aux autres ce que Kÿria leur avait donné. Une réunion avec ses conseillers avait donc lieu dans la journée.

- Je ne sais pas ce qui t’anime mais je sais que tu ne veux pas simplement suivre l’Oeuvre.
- Peu importe ce que je veux, Ald. C’est le peuple qui choisira sa destinée.
- Mais tu vas l’enclencher.
- C’est mon rôle. Ensuite je me retirerai.

Il avait déjà évoqué à son frère le désir de rentrer en Quatrième Saison pour le bien de sa famille. Il n’avait pas été contre mais ne l’avait pas non plus encouragé. A vrai dire, Anorn avait la trempe pour être régent. Mais si l’envie disparaissait, alors ça ne comptait plus vraiment. Lui plus que n’importe qui d’autre pouvait comprendre le besoin du régent de profiter de ce que lui avait rendu la Mère. Si là était son souhait, il ne l’en empêcherait jamais. Arwain cependant était un peu plus partagée. Naur dans les bras, elle tint à discuter avec son mari avant sa réunion.

- Tu es sûr que c’est ce que tu veux faire ? Je sais que rien ne sera acté maintenant mais nous savons pertinemment que c’est ce qui suivra.
- La déesse Mère a réuni notre famille et je refuse de rater la chance d’évoluer à ses côtés. Et puis, je n’abandonne pas nos frères et sœurs, je clos simplement une page pour revenir à mon poste d’origine. J’aurais sans doute pu garder encore longtemps ces fonctions mais je ne crois pas en avoir envie.
- Tu as toujours voulu guider notre peuple, je veux seulement m’assurer que tu ne regretteras pas.
- Jamais.

***

Face à ses conseillers, ce dont il avait parlé avec ses proches ne comptait plus. Tout ce qui lui importait était d’exposer ce qui pouvait se passer dans les prochains mois.

- Bien, maintenant que tout le monde est arrivé, nous pouvons commencer. Avant toute chose, je voudrais vous soumettre une proposition qui pourrait nous rapprocher des noss. C’est un sujet qui nous anime depuis longtemps et il y a une opportunité à saisir. Depuis le Voile, l’Oeuvre de la Mère croît plus vite et cherche à reprendre ce qui lui a été volé. Nous nous sommes battus à Eraïson, les noss se sont battues à Yutar. Il est temps de s’unir pour nous réapproprier le reste. J’ai pu m’entretenir avec Loethwil, anciennement Estiam Faerin. Il œuvre dans le but de reprendre ce qui appartenait à la Mère il y a des siècles de cela.

Il ne s’agit pas là d’envahir nos voisins mais bien d’accompagner la croissance de l’Oeuvre pour regagner l’entièreté de la Prime Forêt. Il est de notre devoir, en tant que fils et filles de la Mère de l’aider face à ce qu’elle ne peut surmonter seule. Je vous demande donc de réfléchir sérieusement à cela et aux moyens que nous pourrions mettre en place. J’en parlerai en Quatrième Saison, j’espère que vous ferez passer le message avec autant de ferveur que moi. Rien ne me tient plus à coeur que de reconstruire ce qui a été brisé. Notre peuple a trop longtemps souffert de sa position défensive et si nous n’agissons pas cela finira par nous détruire. Les noss et les cités sont loin de pouvoir vivre ensemble dans la paix mais nous pouvons en prendre le chemin.

Il lui fallait seulement lancer la chose. Les convaincre que c’était là une solution à beaucoup de problèmes qu’ils se posaient. Quelques mensonges parce qu’au fond, il voulait envahir les autres, mais nécessaires pour qu’ils adhèrent au projet. Une fois lancé, ils aviseront de la suite. La plupart acquiescèrent et il savait que pour les autres ce ne serait qu’une question de temps. Ils voulaient tourner l’idée dans tous les sens jusqu’à être persuadés qu’ils n’y avaient pas vraiment mieux. Et surtout que le timing était indécemment parfait. Les noss se mettraient en branle, peu importe leur soutien. Alors autant qu’ils mettent toutes leur chance de réussir de leur côté. Du moins ce fut ce qu’il leur dit pour effacer les dernières lueurs de réticence dans les yeux de certains. Le sujet fut suivi de d’autres dont ils devaient discuter puis ils se séparèrent. Anorn resta un instant dans la salle, seul. Quatrième-Saison lui manquait sans aucun doute mais ce genre de chose saurait aussi laisser un vide, assurément.

Neuvième ennéade de Karfïas,
De la onzième année du onzième cycle.

Il était temps. Non pas de rendre ses pouvoirs mais de tous se réunir pour statuer sur la suite. Rien d’encore officiel, seulement une évolution. Il ne voulait pas alerter qui que ce soit, ni même décider seul de l’avenir de son peuple. Si aucun candidat sérieux ne se présentait pour la régence, il savait d’ores et déjà qu’il ne pourrait pas laisser sa place. Peut-être que son heure ne serait pas venue et qu’il se devait d’attendre encore un peu. Alors au lieu d’annoncer de but en blanc ses intentions, il envoya une missive pour discuter de l’avenir.

 

Cités d’Anaëh

Du Palais d'Alëandir
Neuvième ennéade de Karfïas
De la onzième année du onzième cycle.

A chaque Seigneur Protecteur et Dame Protectrice,
Mes respectueuses salutations.

Cette missive a pour but de vous informer d’une réunion courant du mois prochain d’un Haut-Conseil. Il s’agira d’y discuter de l’avenir de la régence et de celle du Royaume. Vous m’aviez donné cette place temporairement et il est temps de savoir ce que nous voulons pour la suite.

Puisse la Mère veiller sur vous,

Anornedellon Nedi Lûcannui, Régent du Royaume elfique et Seigneur Protecteur des terres de la Quatrième Saison.