[Esplanade des 9] Trame de l'Hydre :: Ordalie & Braises • À qui de drow !

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Premier jour – IVe Ennéade de Favriüs, 11° Année | Cycle XI

• la Cérémonie | des Héros Chus

Ainsi Vlos suivit Gorurh, ainsi il découvrit le Quartier Général de ces courageux Repentis, et s'y sentit comme chez lui. Chose étrange me diriez-vous pour un être aussi peu sociable que le Do'Ilisharr, préférant le silence et le calme de ses cryptes aux déplacements incessants et forts bruyants des victorieux, valeureux guerriers en effervescence...

Tellement plus habitué aux corps morts que meurtris, et encore migraineux pour cause de résistance magique de la part de Valsrik, notre prêtre de Teiweon se rendit donc auprès des défunts, ceux-là moins réticents que Vals à l'idée de se faire tripoter. À leurs côtés déjà se tenait le prêtre de l'Ordre prénommé Nogg, et c'est ensemble qu'ils se mirent au travail sans mot dire ; Vlos remerciant son homologue car il put encore une fois ce soir-là apporter sa pierre à l'édifice du changement en exerçant ce pourquoi il était semblait-il né, et Nogg honoré par la présence de si passionné et méticuleux prêtre à ses côtés.

Dire qu'ensemble ils firent des miracles eut été un peu exagéré, l'idée primordiale étant non pas de relever les corps aussi promptement, mais plutôt dans cette même optique, de les conserver. Ce qu'ils firent dans le respect, croque-morts assermentés priant tout au long de l'apprêt ; tout d'abord fut mise en place une thanatopraxie visant à réparer le système sanguin et à l'isoler du cœur –, ce dernier par la suite serait d'ailleurs retiré et remplacé par du charbon symbolique.
Une heure durant, la magie parcourut le système sanguin des deux cadavres afin de figer l'ichor de façon indéterminée. D'autres soins magiques de conservation furent invoqués dans le but de lutter contre la thanatomorphose, ou plutôt de l'empêcher à long terme de décomposer les chairs et les rares organes restants. Cela étant fait, ils leur firent une toilette mortuaire dans les règles de l'art, avant de procéder à des soins cosmétiques visant à présenter aux familles de dignes dépouilles dont une cure de jeunesse pourrait apaiser le tourment des endeuillés. Ils les parfumèrent, les pomponèrent, avant de tracer sur leurs fronts à chacun un disque noir uni symbolisant ainsi leur Déesse, en offrant humblement à celle-ci leurs Flammes désormais éteintes. Les paupières furent bien-sûr closes à l'instar de leurs bouches dont les lèvres furent elles cousues.

Enfin, les deux Repentis eurent droit tout au long de la soirée à plusieurs heures de prières offrant à l'Ordre le droit de veiller sur leurs dépouilles à défaut de la présence des proches qui déjà attendaient sans le savoir, lettre prévenant le décès de ces héros morts au champ d'honneur face aux rebelles de l'Etude Noire. Alors que la cérémonie battait son plein et que le cœur des héros flambait, demandant tacitement à qui le voulait, Vlos'Veldruk tout en prière chantée et dont la Foi décuplait une force incomesurable, intensifiant l'envergure des sorts de conservation, lui-même se nourrit de transcendance, préparant son mental à l'épreuve du lendemain.

Cette nuit, jamais au grand jamais il ne se permit de douter, et de fait c'est après avoir achevé une cérémonie rondement menée, qu'il s'entretint avec Shaar quelques instants, renforçant leurs volontés réciproques, qui s'avérèrent être identiques : écraser l'incompétence puis enterrer les impies. Et ils suffirent, ces quelques instants, à lier les deux daedhels à tout jamais : c'est le lendemain qu'ils prouveraient chacun leur tour, devant le Peuple et le Regard Divin, que le changement n'était pas une option, il était une évidence. Après avoir de concert décidé que les deux dépouilles seraient dès le lendemain préservées dans les entrailles du Grand-Temple de Teiweon – et ce afin de relever en temps voulu les deux glorieux guerriers –, ils prièrent ensemble, offrant pieusement aux Dieux l'issue de leur bataille. Sans plus s'attarder car le temps n'était pas aux grandes discussions ni philosophiques ni théologiques, ils se quittèrent, bénis des Dieux, et plus confiants que jamais.

Deuxième jour – IVe Ennéade de Favriüs, 11° Année | Cycle XI

• l'Ordalie | du Changement, c'est maintenant...

Vlos'Veldruk était quelqu'un de calme, d'extrêmement calme. Et c'est qu'il ne dérogeait pas à la règle en ce jour fatidique où, concentré à l'extrême il semblait ailleurs, ou plutôt à l'intérieur de lui-même enfoui dans de paisibles cogitations.

Il se permit enfin de douter un seul, éphémère instant, observant en perspective deux choix qui n'étaient pas pour lui déplaire ; soit – pour faire simple – il saignait Alvember et devenait Haut-Prêtre à sa place, soit il rejoignait Teiweon afin de la servir dans le Royaume des Morts si toutefois Uriz l'en jugeait méritant malgré son éventuelle défaite. L'un dans l'autre il serait gagnant, or donc rien de quoi s'affoler... Un rictus de prédateur vint modeler son visage de marbre.

Malgré une Esplanade bondée, ni les cris ni les rires vinrent le dérober à son ultime concentration ; rien ne put détourner son regard du coin de rue où enfin l'escomptée Morg'Arak apparut, nonchalante. Il la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle se positionne en face de lui, un sourire narquois aux lèvres.

– Alors ce gentil toutou a fait part hier de sa lubie... Celle de s'élever dans les hautes sphères de notre société, en défiant telle une blatte, la tarentule ornée que je suis... Elle se fendit d'un rire perçut par Vlos comme forcé. Ahum, gloussa-t-elle, trop confiante – or n'était-ce point, que du zèle ? À coup sûr !

Vlos'Veldruk leva une main à hauteur d'oreille, faisant cesser nets les murmures que l'orgueilleuse avait déclenchés.

– Il en est assez de tergiversations, Alvember. Nous n'avons plus le temps. Ni la patience. Leurs sourires s'estompèrent, aussitôt qu'il fut ajouté par le prêtre, avec emphase : Ce n'est point au premier sang, que la honte que tu as jetté, que tu jettes et que tu jetteras sur notre race, pourra être essuyée... SEULE LA MORT pourra effacer tes bévues et ton incompétence... Place aux vrais ecclésiastiques, et que les Dieux en soient témoins aujourd'hui...
– Soit, dit-elle la rage aux lèvres... Il était loin, son fameux stoïcisme.
– Soit, renchérit Vlos près à en découdre plus que jamais.

Si tu n’avais pas connu pire la veille, tu aurais bien cru mourir étouffé ici et maintenant. La foule était trop dense, les cris trop tonitruants, les odeurs trop fortes, les mouvements trop chaotiques. Encore aurais-tu pu trouver quelque place de choix loin d’eux, encore aurais-tu pu observer les choses de loin plutôt que depuis le cœur de l’entropie, que tu ne te serais pas plaint. Seulement s’éloigner et jouer l’œil de faucon au-dessus de l’esplanade, dans ton état, c’était bien trop dangereux. Ce sont les serpents qui se tapissent dans les recoins, et aujourd’hui, ton corps n’est pas de taille à affronter leur poison.

Ton corps est encore faible, et il en est de même pour ton pouvoir. Tes ressentis sont presque aussi troubles que ta vue. Tes perceptions secondaires surcompensent. Ton univers sensoriel est en profond déséquilibre, mais qu’importe, tant que tu parviens à le dissimuler. Cet homme t’a sauvé la vie. Alors même s’il est un piètre guérisseur, tu le lui dois bien. Espérons seulement que son offense soit meilleure que sa défense. Tu n’es venu ici ni pour être déçu par un duel ennuyeux, ni pour être déçu par la défaite de ton Champion.

Tu joues des coudes et des épaules pour traverser une foule dont ta baguette aura largement réduit les résistances. Tu cherches ta place au premier rang, pour admirer la sueur, le sang et surtout… l’esprit.

Combien de Haut-Prêtres se sont succédés l'un après l'autre, inlassablement, sans que différence ne soit faite ? La Dame aux Ombres n'est pas uniquement la rusée déesse qui libéra Uriz de sa prison, qui rendit fertilité aux premiers elfes libérés du joug de Kerhel, et qui entendit garder les Flammes dans le Royaume des Morts, et ce afin d'alléger leurs douleurs ou de les tourmenter... Elle est plus que cela. Elle est une partie d'Uriz, et bien qu'elle ne soit que le côté éthéré du Père Créateur, certes, elle reste impitoyable... À n'en point douter, les deux serviteurs de Teiweon sauront tous deux faire honneur à Celle qu'ils servent...

Il est une Braise de Vie ardente, que celle d'un être dont les illusions d'autrui l'ont bercées, car il les croyait siennes également, et qu'enfin, il se rend compte, que lui seul peut servir de son vivant les volontés divines ; lui seul semble comprendre qu'il est temps pour que race supérieure, se démarque et vainc.

Il est une autre Braise de Vie aussi ardente que la première, celle d'un être aussi fier que peut l'être un Daedhel, que celle de l'ecclésiastique noirelfe qui croit bien faire mais que pourtant un moins que rien de prêtre de pacotille vient défier ; usurpateur incapable qui croit pouvoir mieux faire, alors que l'une semble s'échiner au bon fonctionnement du Culte, et que l'autre ne sait que pomponner les morts ? La politique n'est point accessible à qui le veut par caprice ; elle n'est point non plus un inoffensif instrument que l'on doit négliger alors que la direction du Puy d'Elda tangue de pôle en pôle tel une boussole déréglée.

Si Morg'Arak Alvember est en ébullition, Vlos'Veldruk Do'Ilisharr est en fusion, et c'est les mires dans les mires qu'ils s'approchent à l'instance du clergé de Meingal, qui comme de coutume lance dans le règles de l'art, les hostilités.

Se peut-il que le corps et l'esprit ne fassent plus qu'un ? Ainsi l'ont peut affirmer que l'acte n'est qu'évidence... Allez savoir ce qu'il se passe dans le corps d'un être encensé par la Foi ? Quelle relation entre maître et pantin, quelle différence alors entre l'artisan, l'outil, le matériel ? Aucune ? Tout est Un, et Un pour Tous ?

Vlos'Veldruk Do'Ilisharr ne glisse pas sur la vague à la recherche d'une meilleure position, à la recherche de meilleure navigation ; il est la vague, il est le mouvement, la puissance. Pourtant il ne bouge pas.

Par un murmure commence le duel qui oppose les deux prêtres de Teiweon, tous deux thaumaturge, l'un maniant ce qui a trait à la vie, l'autre ce qui concerne l'immatériel. Autour d'eux le silence s'est installé si bien que leurs chants qui n'étaient au début que murmures envahissent l'Esplanade à mesure qu'ils s'intensifient. Qu'ils se mélangent, qu'ils se lient comme s'il s'agissait d'un duo qui de concert offre à la populace jubilatoire entendement.

Si Vlos focalise son Art à travers la pierre précieuse ornant sa bague, c'est plutôt une dague que Morg'Arak manipule avant de saisir cette dernière à même la lame. Les deux adversaires se fondent dans leur mélopée et sans le savoir chacun attaque au même moment.

Il a été décidé que les homologues s'affronteront à l'aide de ce qui les distingue tous deux communément, comme arme leur point fort tel la magie ou cette force méditative digne des pieux serviteurs daedhels : c'est cette foi placée sur la balance, et à qui, pourra maintenir l'équilibre au plus concis.
Il a été décidé que malgré la présence d'une dague de rituel déjà bien enchâssée dans la paume d'Alvember, aucune lame ne fera aujourd'hui couler plus de sang. Homicide volontaire ou pas, ne peut être tolérée en ce duel et il signifierait pour le fautif la défaite, tout autant que pour la victime il va sans dire. Tous deux dans ce cas de figure, indignes de leurs revendications.
L'humiliation est-elle pire que la mort se demandent à ce moment les deux pieux daedhels qui s'affrontent ? Indubitablement, indubitablement qu'ils se l'affirment, vice-versa. Le but est de plier l'autre, de le torde, de le distrodre, jusqu'à ce qu'il cède enfin et qu'il implore, offrant au vainqueur le poste en l'occurrence convoité. L'emprise totale... Que le vaincu ressorte saint ou non d'esprit de cette ordalie, et il sera voué à vie à l'esclavage en l'honneur du – proclamé – Haut-Prêtre de Teiweon. C'est dire s'ils préfèrent la mort à ce triste sort.

S'ensuivent alors les déflagrations que leurs pouvoirs occasionnent et que les avertis apprécient depuis le publique. Elles surviennent pour l'instant sans amoindrir ou affaiblir ne serait-ce qu'un brin, l'adversaire. Tout n'est que spectacle de l'illusion, tandis que les ombres déforment et que la chaleur distortionne ; que les couleurs en prennent un coup à en palir, subitement ; que le silence pourtant roi se fait bruit et les cris se font tacites... Que le spectacle est beau alors que chacun des duellistes, reptiles à tour de rôle ou félins à tour de bras se balancent l'un l'autre gestes et incantations douceureuses, visant à confondre l'autre, l'embrumer, l'étourdir. Chacun tente donc de déstabiliser l'autre ou du moins de perturber la précieuse concentration qu'ils essayent de préserver respectivement, mais aucun n'acquiert de terrain suffisant à vive confrontation, comme s'ils préféraient avant, le tâter.

À l'instance d'une Haute-Prêtresse ombrageuse, de sombres nuées se répandant ne prenant que le cercle abritant la terrible ordalie, et le noir envahi la scène que l'œil nu ne peut plus observer.
Sombre prêtre également, et que la nuit pour lui a été courte et comment les évènements de la veille, l'ont quelque peu démonté ; celui que l'ichor saoule ne s'est pourtant point démonté et pendant que l'adversaire cumule le noir, d'imperceptibles mécanismes en le Do'Ilisharr se mettent en route dans le but de défendre. Mais que défendre, se défendre ? Oncques mais ! – de quoi ?

À coups de méninges les premières secondes durent disons des heures jusqu'à ce qu'enfin, les deux prêtres conquièrent les lieux et tentent d'avancer l'un vers l'autre, comme si d'un contact physique dépendait l'issue de leur querelle. La plupart des spectateurs ne peuvent rien apercevoir dans le dense nuage de brume charbon, l'on entend cependant parfois quelques pas accompagnés de cris ou de gémissements. Des paroles parfois lancées font sens par intermittence, mais comment imaginer leur dénouement, si ne sont saisies et comprises subtilement, les forces qui en découdent sous la voute éthérée. Les prêtres agrippés par les mains à l'intérieur du tourbillon se fondent en une danse frénétique et ineffable, tandis que de leur bouche une ode chantée aux Dieux, ce faisant et par leur contribution se fait entendre, comme si leurs voix ne faisaient plus qu'une.

Le duel a duré quelques heures. Et hormis les sauvages grognements que l'on entend sur la fin, malgré une heure passée de silence, rien n'a perturbé la quiétude de l'auditoire. Enfin, le noir dissipé laisse entrevoir deux corps enlacés, tandis que les derniers nuages s'estompent. Ils sont nus. Ne restent comme tissus témoignant de leurs habits disparus, que des lambeaux retournés et froissés comme un cuir de mouton que la charogne a rongé.

Au bas du dos d'un corps déjà entièrement recouvert de toutes sortes de tatouages et de scarifications, un cercle rouge – et en son centre un point – s'est prononcé sur le coccyx de Vlos. Touché par la fertilité de Natha semble-t-il à en croire le fumant symbole sur la peau incrusté ; point faute d'avoir essayé, le pauvre était stérile, était-ce là encore un signe des Dieux ? C'est que le Père s'était exprimé plus tôt dans la journée usant d'un splendide vaisseau qui n'était autre que son nouvel Avatar, Krish Al-Serat ! Cela se pouvait-il que les Dieux se sentent en ce jour si bavards ?
De ce signe, et de cette histoire, les mires noires d'Alvember relatent également ce que les mains divines peuvent laisser sur le commun alors que force est remuée autour de foi infaillible. De fait, les deux corps sont entrelacés, comme des restes de leur apparemment brutale union, consumée, les prêtres s'étirent et s'admirent. L'un touché par une fertilité bienvenue, et l'autre par une beauté avenante...

Parce que juges et spectateurs avaient ainsi au préalable décidé, l'on proclama vainqueur celui qui put par quelque moyen qui soit – la ruse, la force, la soumission, les passions, les folies et autres – faire flancher l'autre sans avoir à le tuer. Ce qu'il se passa dans cet éther ne fut guère compris par tous, mais à ceux qui ne purent ressentir du maelstrom quelques vagues d'Art, de perception, de lucidité, de divin, alors il leur fallut ces quelques mots pour comprendre.

– Morg'Arak Alvember, suis-je encore ! Cependant... Je peux vous dire qu'aujourd'hui je suis vaincue... C'est pour mon ambition et ma rage de vivre que l'Ambitieuse et Sulfureuse Dame Isten m'a recueilli alors que je flanchais... Au point de non-retour, alors que Vlos avait enfin pu m'atteindre au coeur même du problème et moi donc bientôt perdue à tout jamais dans les ténèbres, Isten m'offrit une chance de la complaire, car il est en ce monde un rôle de prévu par les divinités, pour tout un chacun de nous autres, enfants du Père Créateur et de tous Ceux qu'Il a Créé.

– Vlos'Veldruk Do'Ilisharr suis-je, nouveau Haut-Prêtre de Teiweon après avoir par mon Art vaincu les illusions de l'ancienne Haute-Prêtresse. Si elle est mon esclave par sa défaite, je fais d'elle une daedhelle libre... Bien qu'il se confirme par Meingal et par le Peuple que ma victoire sur Alvember est incontestable après l'issue des pourparlers, je porte une marque forte que la Mère a offerte à nul autre que moi. Et ce Cadeau que, pour maudir la Traîtresse, la Gardienne a demandé à la Mère, se voit aujourd'hui répercuté, par ma semence en une antre confiée et confinée.

C'est en ce jour saint que fut conçue une petite furie, qu'ils nommeront à sa naissance, Ordalie.

« Que vas-tu faire de mieux que moi ? » Demanda Morg'Arak, l'ancienne Haute-Prêtresse de Teiweon, le plus calmement qui soit, à Vlos'Veldruk, celui qui l'avait ni plus ni moins, devant tous humiliée. Puis, ce n'était pas le sexe la raison ou la cause de sa défaite. Le thaumaturge l'avait bel et bien surpassé en finesse et en Art. L'acte sexuel n'avait été qu'une ouverture en soi, à un état de transe qu'ils avaient partagé. Et ils avaient partagé bien plus que cela, alors que sans palabres ils avaient perçut, Volontés Divines les concernant. Les cartes posées, une partie des émotions de la journée digérées, il était temps de se dire l'au revoir ou qui sait, l'adieu.

Car la daedhelle avait par la suite sut ravaler une honte cuisante, celle dont elle avait écopé en ordalie, et que seule la vengeance apaiserait et donnerait peut-être accès à l’Elghinyrr's Thac'zilen au bon vouloir des Dieux Pilliers, elle accepta sa Destinée. Pour l'heure elle suivrait Isten en l'honneur de la Rusée et mettrait au monde un enfant que l'on vouerait aux Dieux, indubitablement. Et à ce si prétentieux et insondable prêtre, elle réussirait à rendre la monnaie de sa pièce.

Le Haut-Prêtre entonna une locution des plus insultantes comme son grade le lui permettait, surtout face à une adepte d'Isten qu'il avait vaincu, puis affranchi.

« Les Dieux, ont parlé. Il faut se bouger le cul, Morg'Arak. Ou bien veux-tu attendre encore un siècle dans le doute avant de se faire de nouveau taper sur les doigts, pour cause, notre incompétence ! Soyons réactifs, intelligents, soyons le grand peuple d'antan... Éradiquons l'impiété ! Punissons l'inanniton ! Il faut... Ne sois pas vexée, fille d'Uriz... C'est le moment d'agir, après ce long sommeil en votre faveur, réparateur au possible je l'espère... Sa voix doucereuse n'était pas la raison du sourire d'Alvember
– Comment oses-tu me dire ça, à moi, alors que ce PUTAIN de Triumvir...
– Je n'ose rien, j'entreprends. Nous irons très vite lui rendre visite, à Malag'Eyl. Ne t'en fais pas. Ces ordalies ne sont qu'un avant goût, qu'il sache qu'on vient pour lui. Écoutes... Cela fait plus de quarante ans que je voue ma vie à Teïweon. Je connais d'elle son attrait. Ses craintes. Je saurais la complaire, car chaque jour est Saint. Les Haute-Prêtresses avant toi se sont trop reposées sur leurs lauriers ! Quant à toi, ta foi est la mienne, Morg'Arak. Mais tu ne fais pas le poids. Tout comme le dernier des Triumvir... Rien que des incapables s'acaparent le pouvoir...Et leurs raisons... Occultent ce que nos Braises doivent ici, accomplir.

Encore nu d'une dernière partie de jambes en l'air, en suspens, sur le bureau, mais surtout en privé cette fois-ci, Vlos se revêtit, caressa la joue de celle qui comme lui l'aimait inexplicablement, mais se détestaient tous deux pour bien des raisons cela dit.

« Ce fut un plaisir... Mais je dois... Prendre mes repères dans ce bureau et une geigneuses comme toi m'empêcherait, toute concentration. Ce n'est pas un secret, je n'aime pas tergiverser. Et je ne t'ai jamais beaucoup apprécié avant ce qu'il s'est passé... Ce qu'il s'est passé... Là-bas... Et ici... Je te ferai porter tes affaires au Temple d'Isten... Si jamais le temps ne me fait pas défaut, je viendrais peut-être te rendre visite, hein... Et pour l'enfant... Il faudra... »

Morg'Arak Alvember fit quelques pas en direction de Vlos, s'arrêta juste devant lui et asséna quelques mots fatidiques.

– Tu mourras de la main de la main de « l'enfant », Vlos'Veldruk. Un jour ou l'autre, Vlos, un jour ou l'autre... Et encore merci pour l'affranchissement, dit-elle en l'embrassant à moitié.

Elle lui fit ensuite une grimace attestant de sa rancune – qui point donc s'en irait sans avoir été un jour assouvie ; elle s'en alla aussi courroucée par sa déchéance comme un animal blessé, lécher ses plaies, poursuivre le destin prévu pour elle par les Dieux. Elle redorerait le bason de son monde, à sa façon, expiant, ruminant ses propres échecs...

– Tu me diras quand l'enfant divin sera né, hein..., réussit-il tout juste à lâcher avant que la porte ne se ferme.

Vlos'Veldruk Do'Ilisharr resta alors au Temple de Teiweon comme il l'aurait fait habituellement. Jusqu'à très tard, et très peu soucieux de rejoindre le confort de son logement, il décida de dormir sur place, au petit bonheur la chance, peut-être à même la roche ou près de l'eau. Il avait besoin d'être seul. D'être près d'Elle. La Gardienne veille.

Dès le lendemain le Do'Ilisharr plaiderait justement sa cause au Culte, car ses projets étaient cadrés, logiques et bien ciblés. Le prochain à rendre des comptes serait Malag'Eyl, devant nuls autres que les serviteurs divins.

Tu attends que la magie fasse rage. Tu attends que les corps se retrouvent imbibés d’essences arcaniques, que les énergies les déchirent de l’intérieur, que leurs Arts se mêlent, se nouent, s’affrontent et s’entredétruisent… mais tu n’obtiens rien. Tu n’obtiens rien que n’importe quel arcaniste en n’importe quelle situation aurait pu donner. Tu n’obtiens rien qui ne défie tes attentes, ne te surprenne, ou même ne te divertisse. Le combat entre les Prêtres de Teiweion est ailleurs, et là où il est, il ne t’est aucunement palpitant.
Les esprits capables de percer à jour l’illusion festoient. Les yeux capables de voir à travers l’éther dégustent. Toi, si ta sangle abdominale n’était pas autant affaiblie, tu aurais certainement rendu ta bile de déception. Tu pestes intérieurement, tu roules tes yeux mornes à t’en arracher les ligaments, mais tu attends, tu attends toujours que quelque chose vienne, que l’un des deux te surprenne, que l’affrontement, le véritable affrontement reprenne. Ils sont censés se battre pour une place devant celle qui touche les Braises. Ils sont censés se battre pour la Gardienne du Nahali. La Mort est censé être au centre de leur dispute… alors pourquoi faire ode à Isten ? Pourquoi alors ainsi se faire menteurs et attiser la tentation d’Isten et Natha… Nul doute que les foudres de leur colère soient prêtes à s’abattre au jour où serait dévoilée l’imposture.

Ta patience trouve sa limite. Ton intérêt est épuisé. Tu n’as plus rien à faire ici.

Au moins la foule séduite par les ébats se sera laissée trancher par tes coudes plus aisément qu’elle ne l’avait été au départ, quand l’ordalie n’était encore qu’à venir, et que l’excitation était à son comble.

Que la compagnie de La Chimère puisse raviver chez toi le souvenir de la grandeur des mages. Celui qu’ils venaient de bafouer.

Aux exégètes, ayant la terrible prétention de connaître l'ineffable piété, en n'écoutant que la feuille glissante, je vous invite à l'approche, car en-dessous de l'eau se cache une rivière et en son lit, un éréthisme continuel.

Si certains, de l'Esplanade sont repartis bredouille, c'est qu'ils n'ont point saisi le sens inouï de l'ordalie achevée ; il est une explication à chaque chose qui soit. Vouliez-vous encore voir le sang des fidèles couler ? Alors que l'on devrait l'économiser au risque de le voir se délayer, goutte après goutte, par si vaniteuse nonchalance.

Les daedhels, ne sont pas ces êtres dénués d'humanité et de bon sens, sous prétexte qu'il sont une race violente dans une société méritocrate ! Que nenni ! Les drows sont la plus impressionnante des races miradelphiennes qui soit. Car ils sont le reflet des Dieux. Et c'est dire si le Panthéon en question est complexe. Et c'est dire si les deux prêtres en question sont épuisés par tant de pouvoir remué, malgré la vraisemblablement passivité de leur affrontement.

Les drows sont les plus beaux, les plus forts, certes. Or la force ne se dénote pas dans le meurtre pur et dur, bête et méchant, mais surtout dans l'intelligence et la réflexion qui peut découler d'une confrontation. Cette ordalie n'est-elle point, important sujet à réflexion ! C'est par une communion de l'Art et de l'Esprit que les deux prêtres ont combattu, et il se peut même qu'eux seuls aient eu connaissance de l'envergure de leur combat, des enjeux qui s'y sont opposés, nivelés, puis enfin harmonisés. Sans Ichor ni boxon.

Il n'est point d'ordalie plus auguste et sacrée que celle où un des
opposant est évincé par commun accord de ceux-là même qui s'affrontent, suite à tel bras de fer mental et dit-on, intervention divine...
Il ne fut onques ordalie plus rondement menée ! – car l'on dit que la Haute-Prêtresse à qui une chance a été accordée, est l'exemple même de l'ambition, de l'envie et de la rage de vivre. Il se dit également que dans sa déchéance – car à l'instar des déçus assoiffés d'étincelles et de sang – la prêtresse ayant perdu l'accord de son Art dissolu, aurait en définitive préféré mourir séant. Mais il n'est pas de combat perdu, tant que Flamme ne se consume dans l'attente d'embraser sa Destinée.

Et si à une Doeben repentie l'on a donné une seconde chance, bien que rudement assénée, quel Dieu, aussi impitoyable soit-il, ne pourrait pas à une irréfragable fidèle et croyante telle que Morg'Arak Alvember, éviter un départ trop prématuré ; tandis que la Foi au Puy vacillait et que les Drows encore stagnaient jusqu'à ce jour sacré où Avatar d'Uriz fut révélé, et par Teïweon, accommodement bénin fut fait.

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