[MdO2019] Glorifier la Décadence | Ellipse 13:XI

An XIII du onzième cycle
Seconde ennéade de Karfias - Été
Le premier jour...

« La grandeur sans faux éclat », telle était depuis longtemps la devise de la Maison Vossula. Dans cette famille de marchands richissimes, quelque lointain aïeul avait un jour voulu rappeler que la valeur d'un homme ne se jouait pas que sur l'apparence, et que le plus puissant des hommes ne devrait pas exhiber sa richesse comme une gourgandine racoleuse ; le véritable sens de la grandeur se situait ailleurs.

Bien sûr, les Vossula avaient depuis longtemps oublié le sens de leur propre devise.

Aucun superlatif ne serait trop fort pour décrire la débauche d'opulence qui inondait l'immense atrium. La nuit était tombée sur Thaar, mais la lumière des lampes, des torches et des braseros vous aveuglait sitôt que vous pénétriez dans la demeure ; elle éclairait les lieux avec une acuité folle, scintillait sur les colonnades chargées de motifs or et bronze, ce qui en accentuait encore l'éclat. Elle soulignait la finesse des innombrables ornements qui surchargeaient la pièce, dont de multiples tableaux de prétendus maîtres - dont certains représentaient des images tendancieuses et de fort mauvais goût, dont le caractère outrancier se cachait derrière la bonne licence artistique.

On eut dit que le chatoiement des lueurs dorées devait transfigurer chacun des éléments composant la pièce, et glorifier la maison, voire lui conférer une aura presque divine ; mais l'œil critique y verrait l'effet inverse : c'était le gaspillage éhonté, la profusion décadente qui était ainsi mise en lumière. Même les plats chargés de viandes et de fruits, que portaient des esclaves revêtus de soie vossulienne, suintaient l'exhibitionnisme dépensier de l'hôte.

Si les images en disaient long, le son n'était pas en reste. Le vin coulait à flot, lui aussi ; et l'on entendait en continu l'écoulement du liquide pourpre dans les coupes des convives, le bruit sourd des amphores que l'on débouche, tout cela de façon si répétée et éhontée que c'en devenait presque pervers. Le brouhaha des conversations, le tintement des plats, les bruits de mastication parachevaient cette ambiance de pornographie culinaire, alors que l'on célébrait le quarantième anniversaire d'Ascanio Vossula.

Pour l'hôte de cette soirée, c'était forcément un moment particulier. Le fils aîné de Tiberio Vossula avait fort récemment retrouvé le chemin de Thaar, regagnant les bonnes grâces de son père après un long exil qui aurait pu lui coûter son héritage. Ne tenant guère en place bien longtemps, il avait émis le souhait de célébrer publiquement sa nouvelle décennie en même temps que son retour dans l'orgueilleuse cité des Princes-Marchands. Tiberio avait cédé aux instances de son fils en lui permettant ce caprice ; tout le gratin de Thaar avait été convié, et le patriarche voyait là l'occasion de rappeler à tout un chacun que les Vossula, discrets sur le plan politique, étaient toujours bel et bien présents et qu'il fallait composer avec eux.

Dehors, la garde personnelle de Tiberio filtrait les entrées avec plus ou moins de succès, jugeant de façon fort arbitraire l'apparence vestimentaire ou la beauté des gens pour déterminer s'ils étaient bel et bien invités. Passé le vestibule, derrière l'immense porte donnant sur l'atrium, le Père et le Fils accueillaient les bienheureux élus, le sourire aux lèvres, feignant de bien connaître même ceux qui ne leur évoquaient rien, allant jusqu'à inventer des anecdotes pour donner le change. Ils ne parlaient jamais très longtemps, laissant chacun investir les lieux tandis qu'ils accueillaient l'invité suivant. Les poignées de main et les faux sourires s'enchaînaient à toute allure, avec la régularité d'une mise en scène bien répétée.

Très richement vêtu, Tiberio demeurait fort austère comparé à son fils. Son pourpoint rouge écarlate était brodé de fils d'or représentant le Taureau, emblème de la famille, et il croulait sous le poids des bijoux. Ascanio, quant à lui, arborait une tunique multicolore dont les couleurs vives semblaient, par l'effet des lumières, briller et changer à chacun de ses mouvements. Il était coiffé d'un énorme chapeau à plumes, et sur son épaule gauche se tenait son emblématique perroquet, le brave Chlamydia, qui ne cessait d'imiter par ses petits cris aigus les insanités qu'il entendait si souvent dans la bouche de son maître.

« Salope ! Saaaalooope ! » piaillait le bel animal.

HRP:

Une fête? Évidemment que Zaahrian y sera. Depuis son retour à Thaar, il se faisait un devoir d’assister à toutes les fêtes organisées en ville, qu’il soit sur la liste d’invitation ou non. Comme il est impossible d’être partout à la fois, il portait son choix sur les réceptions sur les plus susceptibles de dégénérer dans le bon sens du terme, naturellement. Sa réputation le précédait. Personne n’osait lui fermer la porte au nez, alors il en profitait plus que la décence ne le permettait. Valait mieux l’avoir comme ami que comme ennemi! Les gens savaient ce qu’il avait fait. Un seul homme avait réussi ce que toute une garde avait échoué à faire. Ils allaient en parler longtemps, mais est-ce que la légende allait se souvenir de l’exploit ou des mois de beuverie qui ont suivi? Peu importe! Lorsque la famille Vossula organisa ce qui promettait être la fête la plus décadente de l’année — Ascanio ayant lui aussi une réputation qui le précédait — Zaahrian ne pouvait pas résister. L’assassin se présenta à la porte dans ses plus beaux vêtements. Délaissant son éternelle tunique de lin, il opta pour de la soie d’un bleu profond avec les lisérés d’or au col et aux poignets. Un ceinturon de cuir ouvragé encerclait ses hanches et portait une dague au manche ornementé d’un saphir. Un pantalon en daim et des bottes complétaient l’ensemble. Avant de partir, il avait coiffé ses cheveux simplement en les attachant avec un lacet de cuir. Une cicatrice barrait maintenant son visage. Loin de le rendre laid, elle était plutôt la marque d’un homme qui a regardé la mort en face et est reparti. Il se présenta à ses hôtes qui le reçurent avec le sourire hypocrite typique des Princes Marchands. Zaahrian prit la peine de s’incliner brièvement. Rareté parmi les grands marchands de Thaar, ils étaient humains. Du coup, l’assassin les dominait de toute sa taille de demi-elfe. Puis, il alla rejoindre les autres invités, prêt à boire et à s’amuser jusqu’à ce qu’il ne soit plus capable de tenir sur ses pieds.

HRP:

HRP:

La Dame vêtue de Rouge parut au bras d'un riche armateur de la cité, le cri indignée de l'épouse de ce dernier s'évanouissant dans un sillage d'étoffe carmine. Encore ravie de son effet quand, en toute innocence, elle était venue rav- quérir la compagnie de cette "vieille connaissance" à sa dame, Ombeline riait à gorge déployée de l'esprit - paillard diraient certains, conscient des beautés de ce monde répondrait-elle - de son ami de circonstances. C'est que la charmante épouse n'aurait pu souffrir pareille soirée, son heureux évènement à venir devant être ménagé.

Avec un pourpoint et des chausses au turquoise chatoyant de dorure de son compagnon, la toilette tout juste achetée de la dame De Cyr jurait. En effet, en lieu et place de motifs extravagants, l'excentricité de sa robe reposait dans le doigt levé envers la gravité qu'était son décolleté. Dévoilant un V impudique de peau sans imperfection, jusqu'à un bouton de chair timide, il se poursuivait en un tissu rouge sanguin s'écoulant entre ses jambes élancées et le long de ses hanches larges, caressant le sol à chacune de ses avancées. Un vêtement simple, élégant et osé, qu'agrémentait la délicate parure de dentelle noire qui ceignait son cou, et dont seul le tissu bouffant de ses bras le différenciait d'une tenue de chambre à coucher. En un sens, c'était là une offrande faite aux hommes, et une offense, aux femmes.

Ainsi parut-elle, au bras de son ami, allant comme il sied saluer le maître des lieux et son fils. D'une inclinaison du buste ô combien risquée elle lui rendit hommage, tout en l'agrémentant d'une délicieuse mimique chafouine, les remerciant pour pareilles festivités qui, elle n'en doutait pas, resteraient dans les mémoires. Oh ! Et Monsieur De Cyr s'excusait de ne pouvoir être présent lui-même. C'est que l'âge, son vieil ennemi, avait remporté une nouvelle manche. De ses mains gantées elle gratta sous le bec du charmant volatile, et lui susurra un tendre "Votre sagesse vous perdra, cher salaud." avant de noyer toute récrimination dans un lascif rire de gorge.

Après quoi il fut temps de libérer leurs hôtes, et le duo se sépara prestement... Ou plutôt, Ombeline faussa compagnie sans attendre à sa carte d'entrée, ne voulant pas que la moindre curiosité soit réfrénée par un chevalier servant aux aguets... Et aux abois, pauvre armateur. Ses égards pour sa tendre lui en avait coûté, et l'ancienne courtisane n'était pas venue pour souffrir plus que nécessaire ses airs de bête en rut. Se glissant entre les convives non sans quelques œillades coquines, retenant quelques unes des idées de décoration dont elle pourrait étourdir l'intendant du domaine de son époux, la Dame vêtue de Rouge croqua dans un fruit écarlate puis s'empara d'une coupe du liquide dont les rigoles enivraient, rien qu'à l'odeur, les invités. Y trempant ses lippes, elle caressa du regard bien des êtres qui évoluaient en ce lieu aux milles promesses, à la recherche de... Ho, elle ne savait quoi encore. Une once d'imprévu ?

Ryth regardait son esclave alors qu’il attendait que les gardes finissent de le fouiller. Il avait du laisser ses deux épées longue avec son cheval pour pouvoir avoir une chance d’accéder à cette soirée. L’idée était désagréable mais celle de se retenir de tordre le bras de ce garde qui osait toucher à son esclave était encore pire. Le Noirelfe détestait qu’on touche à la marchandise avant livraison. Aussi comme pour rappeler au garde qu’il ne devait pas égarer ses mains, il tira sur les chaînes de sa protégée afin de la rapprocher un peu plus de lui d’un coup sec. Son regard rougeoyant croisant celui marronné du jeune garde fut suffisant pour le dissuader de faire une fouille au corps plus approfondie.

Thyis était une femme qu’il avait été cherché dans les wandres. Une belle femme d’1 mètre 70 à la longue chevelure d’un blond plus clair que la neige. Il lui avait acheté une longue robe plutôt simple faite d’un corsage. Les pans de cette robe dévoilaient plus ou moins ses longues jambes de nâcre à chacun de ses mouvements. Ses épaules étaient dénudées et elle portait un collier fin de cuivre autour du cou. Sa belle chevelure était nattée pour l’occasion. Ses poignets étaient joints sur son ventre et entravé par une chaîne plusieurs fois enroulée autour afin de former une masse qui émettait des bruits métalliques à chaque fois qu’elle ou ses chaînes bougeaient. Ces chaînes enroulées étaient assez serré pour que l’esclave ne puisse les enlever sans la clé et le reste pendait dans le vide. Autour de son cou était fermé un lourd collier en fer forgé fermé à clé et au bout de ce collier trônait une plus grosse chaîne que Ryth tenait entre ses mains.

Le Noirelfe pouvant enfin passé, il tira sur la chaîne pour amener l’esclave à le suivre. Puis, une fois arrivé aux festivités, il s’arrêta pour demander à un garde où était Ascanio. Puis, une fois repéré, il traversa les lieux avec son esclave pour donner son cadeau et en être débarrassé définitivement. Il était habillé d’un kaftan long aux couleurs sombres qui lui arrivait jusqu’aux genoux. Ce dernier ne possédait pas vraiment de garnitures spéciales. Il cachait un pantalon de cuir noir ceint d’une ceinture. Son interminable chevelure, lisse et blanche, était relâchée. Cette cascade de nacre coiffée se terminait à la croupe. Les manches larges de son Kaftan s’arrêtaient au niveau des poignets et même s’il était difficile de distinguer la force de ses bras, ses deux mètres et sa forme athlétique donnait une bonne idée sur la force du Noirelfe.

« Ascanio. Je suis Ryth’ten Cormryld. Envoyé du Puy d’Elda en tant qu’ambassade. Afin d’honorer les traités commerciaux d’esclavage entre les Princes Marchands et le Puy, il a été décidé de vous offrir un cadeau. Pour votre anniversaire, le Puy vous offre Thyis. Une Wandraise que j’ai été chercher moi-même dans les montagnes. »

Il était hors de question qu’il s’incline devant Ascanio alors il se contenta de porter son poing militaire à son torse en signe de geste honorifique. Ayant fini avec Ascanio, débarrassé, il plaqua la lourde chaîne contre le torse d’un serviteur après lui avoir donné les clés. Puis, il alla se mélanger aux convives sans même avoir un seul dernier regard pour l’esclave.

Ryth repensait à ce qu'il avait dit. S'était-il trompé ? Qu'est ce qu'il en avait à faire, après tout ? Il n'était qu'un guerrier à qui on avait donné des directives et des paroles à dire. Plusieurs Enneades avant la date de la fête. Le temps de trouver et capturer l'esclave, il avait un peu oublié la phrase exacte qu'il devait dire et ne se souvenait que de l'idée principale. Le Noirelfe se disait que si quelqu'un n'avait pas compris pourquoi il était là, il n'avait qu'à venir lui demander. Et il réexpliquerait jusqu'à ce que ca finisse par le saouler et qu'il décide d'écraser le crâne du pinailleur contre un mur afin de clore le sujet.

HRP:

HRP:

L’occasion était parfaite de laisser derrière moi Geresh et la politique derrière moi, enfin, seulement celle désagréable qui venait après une prise de pouvoir. Père profitait de mon travail de fond pour régner sur la cité que je lui avais offerte sur un plateau, mais je n’allais cette fois pas être mécontente qu’il reçoive toutes les louanges, car elles venaient avec trop de contraintes. Cela laissait surtout la politique relationnelle – plus distrayante – à ma charge en cette soirée. Il n’était pas encore question de négocier quoi que ce soit avec qui que ce soit, juste de me montrer et de rendre mon visage plus reconnaissable à ceux qui allaient compter dans le futur.

Mon visage, ou autre chose.

C’est à la tête d’un petit convoi que je me rendais à la demeure des Vossula, une demi-douzaine de charettes conduites par une demi-douzaine de charretiers embauchés pour l’occasion, elles transportaient des kilos et des kilos de fruits directement cueillis des meilleurs vergers de Geresh. Il y avait également une vingtaine de mes hommes arborant l’emblème des Hiisi, un soleil jaune sur fond noir, désormais celui de Geresh de fait. Ils étaient armés, mais s’ils me servaient d’escorte en arrivant, marquant mon importance, ils serviraient surtout à décharger le cadeau une fois arrivés à destination. Je n’étais accompagnée de personne de mon entourage habituel, ayant préférée m’afficher seule, soutenue sans surprise par un père qui pensait toujours à sa potentielle succession et qui se disait bien que ce n’était pas le pire endroit pour trouver un parti. Aethka avait fait la moue pendant deux nuits et deux jours, elle n’avait cédé que juste avant mon départ pour me dire au revoir.

Elle m’avait proposé une robe brune et simple, officiellement parce qu’au milieu de la débauche l’innocence était plus marquante et qu’on se souviendrait plus de moi, mais le parti pris serait finalement diamétralement opposé, alors que je savais son argument n’être que jalousie. L’innocence déchue l’avait remporté et je porterais une robe de soie blanche et légère qui mettait en valeur les rares formes qu’on pouvait me trouver. Je pâlirais certainement en comparaison de la plupart des femmes présentes, mais soit, je rattraperais ce défaut que je ne pouvais changer par la démonstration que j’allais faire, probablement. En parlant de démonstration, tout était prêt, les charrettes arrêtées, c’était le moment. L’hybride qui m’avait suivi à travers toutes mes épopées me prit par le bras, étrangement conciliant malgré les événements qui avaient renversé les siens à Geresh, il était toujours fier de moi et ce soir, il était responsable de ma sécurité, du moins jusqu’à ma présentation à nos hôtes. Il rôderait probablement à l’affut près de moi pendant le reste de la soirée mais j’avais appris à l’ignorer.

*** Thème de l’entrée d’Aerianna ***

D’un pas décidé et assuré j’avançai vers l’entrée, les gardes qui avaient vu la procession arriver et en avaient probablement été prévenus en avance ne me retinrent pas. Tout était démesuré mais j’allais faire semblant de n’y pas être sensible du tout, je devais en avoir l’habitude, même si la dernière avait été ridicule. J’avais doublé quelques invités de manière très grossière, alors que l’hybride jouait les gros bras, avant d’arriver devant les Vossula. « Aerianna de Geresh, ainsi que maint cadeaux provenant directement des meilleurs vergers de la cité blanche pour célébrer comme il se doit votre anniversaire. » L’hybride avait déclâmé d’une voix forte. J’accompagnai ses mots d’une courbette exagérée que certains auraient pu juger obscène, probablement pas le maître des lieux, cependant. Alors que les politesses avaient été échangées, je ne bougeai pas, l’hybride s’était eclipsé pendant la courbette et le grabuge à l’entrée me confirma qu’il avait donné le signal.

Des hommes aux vêtements sombres et discrets, si on oubliait l’énorme soleil qui arborait leur torse, se répandirent par paires dans l’atrium en amenant des gros récipients en marbre sur lesquels s’amoncelaient des fruits dont j’ignorais le nom mais connaissait la succulence. Des humains, des hybrides, des elfes et des drows, tout un florilège de diversité se succédait avec leur chargement, seuls les nains manquaient à l’appel, mais des paires trop déséquilibrées en taille auraient tout ruiné. Et quand ils avaient déposé leur fardeau, ils sortaient et revenaient avec un nouveau récipient, le manège dura de longues minutes pendant lesquelles je ne quittais des yeux les Prince Marchand et son fils. Nous avions répété l’entrée, jusqu’au moindre détail, et je piochais régulièrement quelques fruits alors que le flot d’hommes passait à mes côtés pour les dévorer doucement avec des gestes langoureux.

Au bout d’une douzaine d’allez-retours de chaque paire, je signalai à l’hybride d’un geste distrait que nous avions probablement un peu trop forcé sur les quantités et qu’il fallait que ce flot cesse, que le manège devenait un peu trop répétitif, il m’écouta et se précipita à l’extérieur. De la nourriture serait probablement gâchée, à moins qu'ils ne se servent. Une nouvelle courbette de ma part et je quittai les Vossula pour m’enfoncer plus avant dans l’atrium. Avais-je réussi mon effet ? Ascanio n’avait pas semblé ému par une telle démonstration d’opulence, mais j’avais la certitude d’avoir attiré l’attention d’un certain nombre de convives, et qui sait, il y avait probablement des gens importants dans le lot.

Je trouvai une position centrale quelque part bien en vue de tous, seule, invitant par mon attitude qui le voulait à m’approcher, je ne pouvais pas encore faire la fine bouche sur mes fréquentations, quiconque qui pouvait parler de moi après la fête ferait l’affaire.

Voilà qui n'est pas banal... Dans la main de la Dame vêtue de Rouge tournoie le robe carmine d'un liquide bien connu, alors que ses mires pâles en contemplent les conséquences sur certains des invités. Ceux-ci, pour des raisons beuglées avec enthousiasme, ce sont jetés le gant à la figure avant de s'improviser des fleurets des grandes broches dégoulinantes de graisse qui attendaient le bon vouloir des invités. A présent, sous les éclats de rires et les sifflements des joyeux convives, les deux sires bondissent et guerroient agilement, escaladant chaire et table avant de poursuivre leur jeu de jambes au milieu des plats garnis.

Vlan ! Un goret fourré valdingue. Schrak ! Un dorure est lacérée, et le flan de beau tissu couvert de tâches de graisse. Hop ! L'assailli vacille en bord de table, parvient à sauter et se réceptionne. Perdant pieds, il recule face aux assauts de son adversaire qui bondit à sa suite, gonflé d'assurance. Schalk ! Pic ! Touche et évite ! Mais soudain, la mine amusée d'Ombeline se crispe. Sans hésiter, sa main délicate saisit le pan de sa roche que l'imbécile de fuyard piétine et Vouf ! Tire. Avec un cri, le malandrin s'effondre et se fait griffer le torse par la brochette ennemie. Alors qu'elle cache son rire d'une main prude, la Dame croise le regard du triste sire... dont la figure crispée se déride alors que ses yeux remontent le long d'un galbe élancé jusqu'aux ombres d'une intimité où elle ne l'a pas invité. Quel vilain curieux vous êtes...

"Ma Dame... siffle le sot. Me feriez-vous l'honneur de..."

Sa demande s’essouffle alors que la belle se penche vers lui, lui offrant la vue de charmants valons... Et soudainement, le souvenir de la douleur lui revient, tandis que les convives alentours s'esclaffent et que le vin s'écoule du verre de la Dame vêtue de Rouge, droit dans l'éraflure visible dans la fente de son pourpoint.

"Pauvre Sire, voilà de quoi soulager votre peine." lui souffle la  Ombeline, fieffée gourgandine.

- Arrête de te morfondre ! ça ne change presque rien. Tu étais déjà moche avant. "

Les yeux dorés avaient bougés dans l'ombre des orbites du masque d'or parfaitement ajusté. La silhouette maladivement fine étirait toute la prestance de son cou décharné pour la regarder de haut. Malgré sa veste rouge au col montant, il suffisait d'un éclairage malheureux pour discerner le col roulé en soie qui dissimulait la dentelle de métal fondu prise dans la chair du croisement de race qu'était l'intendant de la Corporation d'Argent.

Krish le regardait pourtant avec un certain amusement pendant que son elfe de compagnie finissait de relever sa crinière blanche en un chignon piqué de plume d'or. Elle le fixait dans le reflet de son miroir. Il était toujours aussi froid et guindé qu'elle était féline et flamboyante... Et cela faisait rudement plaisir à sa maîtresse qui n'avait apprit que son jouet préféré était encore en vie qu'une poignée de jours plus tôt en débarquant à Thaar pour la deux-cent-millième fois en deux mois. Elle faisait tant d'aller-retours pour entretenir la nouvelle flamme entre Esion et Thaar pour raviver la flamme entre les deux puissances qu'elle pouvait bien se payer une soirée de relâche de temps en temps.

Elle arrivait mieux à contrôler ses pulsions vengeresses à présent... Mais beaucoup moins le blasphème. Et elle avait aussi remarqué que tant qu'elle œuvrait dans le sens de l'Eda, rien ne venait l'obliger à faire ce qu'elle ne voulait pas... Presque rien... Ce qui était tout de même un point très positif malgré toute l'adoration qu'elle éprouvait pour leur Père à tous.

Dans tous les cas, lorsque la nouvelle de la soirée d'Ascanio était arrivée jusqu'à ses longues oreilles, elle s'était empressée de passer commande d'une pièce bien particulière aux meilleurs des forgerons de sa Corporation - si on ne la comptait pas, vu qu'elle n'aurait décidément pas le temps. Puis elle s'y était inviter sans même vérifier si un carton lui avait été envoyé. Et pour l'occasion, elle avait également sortit son cher et flegmatique Wik dans une tenue digne de son visage ciselée.

Une tunique longue d'un rouge soutenue brodé d'or surplombait une chemise de soie noire et un sarouel clair posé sur des sandales sobres. Les manches longues au drapé lourd de dessins et de doublures laissaient par moment apercevoir de fin gant d'un fin cuir de daim. Pas une once de sa peau n'était visible et la crinière blanche qui tombait en cascade de sous les bordures du masque était trop fournie et trop éclatante pour être honnête.

Pour la Princesse de Thaar et membre de la plus haute instance dirigeante du Puy d'Elda, le costume était tout autre. Sa peau noire était couverte d'une simple toge de soie blanche nouée sur sa nuque et laissant son dos nu jusqu'à la naissance de son large fessier. Deux cercles d'or serraient le vêtement, l'un sous sa poitrine, l'autre au niveau des hanches pour éviter qu'elle ne descende Isten savait où. Les muscles finement ciselés de son dos et de ses épaules roulaient paisiblement sous la peau d'obsidienne mouchetée de cicatrice aussi sûrement que son opulente poitrine attirait les regards.

L'étrange coupe de cavalier cousu d'or, venu sur des montures aussi rayonnante que le métal de leur parure, passait bien inaperçu par rapport au manège de la Demoiselle de Geresh ou à la Femme en Rouge. Personne ne leur barra pourtant le passage. Non seulement ils étaient riches, mais en plus ils arboraient ce maintien des gens qui n'ont pas l'habitude d baisser les yeux... Où peut-être que les gardes écoutaient les dictons Thaaris qui circulaient depuis des siècles, reconnaissant la Princesse des forges aux griffes d'or qui ornaient tous les doigts de sa main droite et à son absence de chaussure.

Sans se soucier de la file d'attente et de la cohue, agissant comme si elle était la seule invité réellement attendue, la daedhel s'avança de son pas chaloupé jusqu'au duo de Vossula, l'air fier et le sourire taquin.

- Tiberio ! Ascanio ! C'est un plaisir de voir que le petit ne s'assagit pas avec l'âge ! " ronronna-t-elle avec un sourire trop appuyé pour qu'ils arrivent à savoir si c'était un compliment ou une insulte. Elle fit un signe à Wik qui tendit le coffret qu'il portait au maître de la fête. En en tirant le couvercle, il pourrait découvrir une statuette d'or, de vermeil et d'argent piqueté de quelques gemmes pour faire les yeux des cinq protagonistes. L’œuvre haut comme la moitié d'un bras, représentait avec les détails les plus réalistes un Ascanio nu sur un cheval cabré. Un étalon plus précisément, puisque le membre de la bête assaillait la vertu d'un homme recroquevillé dont le visage ne pouvait être que celui du dernier Duc des Sept-monts. Pour habillé le tout - au sens figuré étant donné la nudité de tous les personnages - deux femmes lascives se pâmaient devant le fier cavalier.

une œuvre d'un mauvais goût aussi outrageux qu'exquis.

- Joyeux anniversaire ! " lança l'Altesse en se détournant des deux propriétaires, caressant au passage la joue du quarantenaire.

Au bras de son cavalier masqué, elle s'enfonça dans la foule, regretta que la musique de soit pas plus prenante et se rabattit sur le buffet. Pour commencer, une coupe se retrouva entre ses doigts griffus et elle fourra une assiette dans les mains de Wik.

- Je ne peux pas manger avec ce masque, Maîtresse. " souffla-t-il sur un ton si neutre qu'il en devenait hilarant aux oreilles de la dite maîtresse.
- Et bien va l'offrir à quelqu'un pour engager la conversation !

Il ne s'autorisa pas même un soupire, reposant l'assiette chargée de viande sur le plateau le plus proche. Sans un bruit, il resta près de la drow dont les yeux fouillaient la foule avec intérêt. Il était encore près d'elle de la même manière lorsqu'elle s’esclaffa en voyant un pauvre hère se faire embroché plus ou moins littéralement puis macéré dans le vin... Mais il resta au milieu de la foule lorsqu'elle s'approcha de la courtisane au cœur de l'attention pour lui offrir son propre verre... Et prit un pas de retard en reconnaissant de l'autre côté un visage encadré de cheveux blonds... Que foutait ce damné hybride dans un endroit pareil...

Un sourire naquis sur ses lèvres en notant que cette fois, il était du côté des invités, non des esclaves. Elle le préférait nu, mais c'était un goût personnel après tout.

Et détail supplémentaire, il ne semblait pas encore l'avoir remarquée.

Avec un air aussi félin que sa démarche, la panthère s'approcha donc du centre de l'attention. Se glissant jusqu'à la courtisane qui pensait n'être une offrande que pour les seuls yeux des hommes, elle souriait, amusée.

- Sacrifier du vin dans un fête si chiche. Tu risque d'en manquer si tu n'y prêtes pas garde... "

Arrivant près d'elle - trop près selon les coutumes - elle tendit sa propre coupe pleine à la Femme en Rouge. Elle-même n'avait de rouge que les yeux qui semblaient jouer à détailler l'humaine avec autant de plaisir qu'un chat aux griffes plantés dans une pelote de laine.

Relevant la tête des déboires de son soupirant imprévu, la Dame vêtue de Rouge papillonne de ses longs ciles en réalisant la couleur de peau de sa nouvelle interlocutrice. Un délicat frisson d'avertissement la parcourt, alors qu'elle délivre un humble sourire... Et qu'une autre voix se fait entendre. Un Premier Feu ? Quel titre est-ce là ? A ses pieds, le "pauvre hère" semble quelque peu confus par ces splendeurs qui s'offrent à ses yeux, d'un point de vue fort appréciable. L'ancienne courtisane ne manque pas de noter le sourire de chat, qu'adresse la première drow à la seconde, de même que l'accent nullement dhoebéen de cette dernière.

"Je ne fais que suivre l'exemple de nos hôtes, à l'indubitable... Générosité. Souffle-t-elle en trempant ses lèvres fines, d'un délicat mouvement de tête, dans le verre qui lui est offert. En refuser les fruits serait une offense."

Un bout de langue vient sauver la dernière goutte du couteux breuvage, tandis que du pied elle pousse l'indigent au sol. Bouge donc vermisseau. Tâchant de reprendre contenance, l'intéressé se relève, son vêtement indubitablement fichu de graisse, de sang et de vin, avant de se faire entrainer par son rival encore hilare de sa déconvenue, qui en rajoute une couche d'un "Laisse ces dames discuter, tu n'es pas présentable !".

Aussi intimidant cela soit-il que d'être entourée de ces invitées supposées eldéennes, la Dame vêtue de Rouge n'en montre rien, rendant son regard franc à la première venue... Avant d'être poussée brusquement un pas en arrière par un géant elfique. Agacée sans le laisser paraître, seul un infime froncement de sourcil de son visage sans les imperfections dont l'âge la menace, atteste de sa surprise. Des eldéens, et maintenant le tueur de sauvage ! Au moins, les premières ont quelques manières.

"Ah ! Le savoir-vivre se perd, ce soir." clame-t-elle d'une voix faussement attristée.

Ce bestiau serait-il assez lourdaud pour me déchirer ma traine ? songe Ombeline, sa robe prise au piège du pied de l'elfe massif.

Résumé des actions:

Et ça frappa Zaahrian avec une telle force qu’il faillit en échapper son verre. Il n’avait pas pensé au cadeau! Merde! D’où il était, il voyait tous ces gens apporter leurs présents tous plus ridiculement riches les uns que les autres. Il n’avait pas cet argent. Enfin oui, il l’avait, mais il n’allait pas la dépenser pour un mec qu’il ne connaissait que de réputation. Alors que pouvait-il lui donner? La réponse était d’une évidence! Zaahrian pouvait proposer ses services gratuitement pour une seule mission. Les gens comme Tibério et le reste de sa famille risquent de voir le geste avec plus d’intérêt que s’il s’était présenté avec un machin couvert d’or et de pierre précieuse. Il y avait déjà des machins couverts d’or et de pierres précieuses partout! Quant à l’alcool, il n’avait aucune idée où trouver une bouteille ou un truc d’exception aussi hors de prix que difficile à obtenir. Non, les services d’un assassin tel que lui n’ont tout simplement pas de prix. Aucune raison de craindre sa réputation depuis qu’il a tué l’elfe! Personne ne savait pour ses réelles activités. Tous le croyaient être un simple mercenaire, d’où la quantité importante d’offres reçues depuis son retour à Thaar. Apparemment, les gens avaient du mal à se trouver du personnel fiable et efficace. Zaahrian avait dit non à tout le monde! « Je dois trouver le moyen de parler à cet Ascanio en privé... » Pensa-t-il avant de voler un autre verre sur le plateau d’un esclave.

Puis, il entendit une voix qu’il reconnaîtrait entre toutes. Ah oui, aucun ne doute, c’était bien sa petite Krish! Où était-elle? Ah! Là voilà! « Poussez-vous! » Zaahrian bifurqua brusquement pour aller en direction de Krish. Il ne l’avait pas vu depuis des lustres. Avec un peu de chance, elle le croyait mort. Mais non! Il était toujours de ce monde. Ça allait être une sacrée surprise! « Ah! Mais qui voilà dans ce palais de débauche? »

Puis il entendit le bruit caractéristique d’un tissu qui se déchire. Un son qui ne pardonnait pas et qui laissait entendre que des dégâts importants furent infligés à la tenue. « Mais c’est quoi l’idée de mettre une robe qui traine au sol lorsqu’il y a autant de monde !? Au moins, dites-vous une chose, vous vous fondez à la masse. Les esclaves sont déjà à moitié à poils! » Et avant de lui laisser le temps de répondre, il lui fourra sa coupe intouchée dans les mains. « Avec un peu d'alcool, ça passera mieux! »

HRP:

Quelle merveilleuse soirée.

Ascanio se sentait renaître. C'était si grisant, après son exil, de retrouver le saint des saints, de renouer avec l'élite, de sentir sur lui tous ces regards de dévotion, d'admiration, de jalousie et de désir ! Il lui importait peu que les politesses et les compliments soient creux et hypocrites ; il lui importait peu que tous ces gens soient là non pas pour lui mais pour ce que représentait cette fête. Cette soirée était la sienne, et il se sentait aussi bouffi d'orgueil qu'un empereur de Nisétis.

« Je vais me mêler aux invités, Père », déclara Ascanio, impatient de s'extirper des griffes de son géniteur et de commencer à s'amuser.
Tiberio arrêta son fils d'une main ferme sur son épaule ; ses longs doigts l'enserrant avec force arrachèrent à Ascanio une grimace.

« Tâche de ne pas trop nous faire honte ce soir, intima Tiberio.
- Allons, Père. Vous me connaissez.
- Justement, Ascanio. Justement. »

Et le nouveau quarantenaire s'avança hardiment dans l'atrium, souriant aux uns et aux autres d'un air béat, se remémorant les belles choses qu'il avait reçues, tout comme les plus laides. La plupart des invités avaient apporté des présents. Certains avaient eu l'indélicatesse de venir les mains vides, mais il n'avait rien dit, gardant seulement l'affront dans un coin de sa tête.  Pour le reste, les cadeaux étaient aussi divers que le degré de richesse des convives. Un petit marchand de tissu, concurrent des Vossula, avait amené une prostituée ; c'est du moins ce qu'Ascanio avait cru, avant de réaliser qu'il ne s'agissait nullement d'un cadeau mais tout simplement de la femme du marchand. Elle portait une improbable robe rouge qui cachait si peu son anatomie qu'elle eut été plus décente entièrement nue. Un homme au faciès de brute, mais grimé comme un prince, lui remit un coffre nacré et doré contenant une dague d'apparat finement ouvragée ; Ascanio admira l'objet en dissertant sur ses talents d'épéiste, rappelant au passage qu'il savait aussi en manier de plus longues, et insistant par force clins d'œil pour faire comprendre à son auditoire qu'il ne parlait pas que d'épées. Un esclavagiste eldéen amena une esclave wandraise, visiblement destinée à un tout autre ouvrage qu'aux travaux de soierie ; Ascanio remercia le drow d'un bref hochement de tête, plus intéressé par son nouveau jouet que par celui qui le lui offrait. « Peu farouche pour une Wandraise ! Je vais l'appeler Blanche-Neige », avait dit Ascanio, inspiré par la pâleur de son teint et de ses cheveux. La représentante d'un collège de mages avait eu quant à elle la curieuse idée d'offrir un livre à Ascanio. « Ah, oui... un livre oui, oui, la lecture, les mots... Les lettres tout ça. C'est bien ! »

Une dignitaire de Geresh avait fait une entrée fort remarquée, s'étant apparemment déplacée avec un potager entier. « Grâce à vous, je n'aurai aucun mal à manger cinq fruits et légumes par jour ! » s'était exclamé Ascanio, aussi surpris qu'amusé par l'excentricité d'un tel présent alors que la salle était envahie de porteurs de fruits, surveillés par les méfiants spadassins de la maison. Il y eut aussi, et non des moindres, le cadeau de la Maîtresse des Forges, une statuette qui représentait Ascanio en conquérant, accessoirement nu ; le prince avait jugé l'idée de très bon goût, bien qu'il trouvât les dimensions du cadeau quelque peu timides. Il avait gratifié Krish Al'Serat d'un sourire enjôleur et l'avait longuement regardée s'éloigner de sa démarche féline, attardant son regard sur sa divine chute de reins mise en valeur par une tenue des plus provocantes. Sois patiente, ma belle, je n'ignore pas que tu me désires depuis longtemps déjà, pensa Ascanio, les yeux pétillants. Il eut alors une pensée fugitive pour Caley, accompagnée d'un soupçon de remord, mais qu'y pouvait-il ? Son mariage avait souffert le blâme de son père, et était désormais maudit par la déesse de la mort. C'est parce qu'il ne pouvait lutter contre ces deux ennemis à la fois qu'Ascanio était rentré dans le rang.

Les convives semblaient s'amuser. Un groupe de femelles désinhibées semblait rire aux dépens d'un malchanceux gladiateur. Tout en flânant dans la salle, Ascanio manqua d'être percuté par un drow - celui qui lui avait offert Blanche-Neige - qui étreignait la marchande de fruits de Geresh.

« Quelle fougue ! Quelle passion ! » s'exclama-t-il, admiratif. « L'amour est une si belle invention. Holà ! Musique pour nos tourtereaux ! Dansons ! »

Un musicien maniant un étrange instrument en forme de tourteau fromager se mit à jouer une langoureuse mélopée. Ondulant du bassin de manière un peu grotesque, Ascanio invita le prétendu couple à danser, ne laissant pas le temps à Ryth'ten et Aerianna de s'expliquer sur ce quiproquo. Toujours juché sur l'épaule de son maître, Chlamydia dodelinait lui aussi de la tête, gai comme un pinson. « Rooobignoles ! Roooobignooooles », scandait le bel animal.

Résumé de l'action:

Spoiler:

synopsis:

Krish éclata de rire sans se cacher. Ce n'était pas sa faute, la rousse et le blondinet auraient put faire un sketch humoristique. L'offuscation de la concubine était aussi belle à voir que les manières de nouveau riche malpoli dans lesquelles se complaisaient Zaahrian.

- Et il sait de quoi il parle. Il l'a lui-même été... " ricana-t-elle en soutenant son regard lorsque le demi-elfe fit allusion aux esclaves à moitiés nus qui peuplaient de telles fêtes.

" Dis moi qu'il a souffert... " murmura-t-elle en se dressant pour s'approcher de son visage . Elle s'arrêta cependant avant de l'embrasser, laissant ses griffes - moins acérées que les lames de rasoirs qu'elle portait au puy - remonter le long de son cou jusqu'à son menton et... s'immobilisa soudain, son oreille frémissant vers l'origine des premières notes lentes avec un sourire renouvelé.

Elle envoya au jeune homme un regard aussi parlant qu'un clin d’œil. Il avait une Vengeance à lui raconter et - elle l'espérait - une dague ensanglantée à lui remettre... Et elle l'entendrait avec plaisir répété une centaine de fois les détails de son acte héroïque une fois qu'ils seraient dans un cadres plus privé, maintenant qu'elle avait la preuve qu'il était de retour. Ménageant sa propre impatience, elle lui tourna fluidement le dos. Du coin de l’œil, une silhouette gainée de lumière attira son attention. Elle la nota sans en laisser rien paraitre mais ne put retenir un chuintement amusé en apercevant Ascanio se dandiner juste à côté. Elle ne doutait pas qu'il croule rapidement sous les cavalières.

Puis elle fis enfin face à la jeune eldéenne qui avait eu l’audace de s'approcher tout en sachant à qui elle avait affaire. En se penchant légèrement pour tendre la main vers l'inconnue, elle offrit sans s'en préoccupé son dos dénudé à la vue du demi-sang et de la concubine pourpre. Elle ne courba pas la tête pour autant, vrillant ses iris pailletées d'or dans les mirettes rouges de la jeune femme. L'intensité carnassière de son regard allait fort bien - ou fort mal selon le point de vue - avec la langueur de la mélodie. Ses griffes étaient ouverte, prêtes à accueillir la main de sa cavalière.

- Accorde-moi cette danse. "

Résumé des actions:

Lourdaud et goujat. J'ose espérer pour sa chère mère qu'elle ne le pondit pas ainsi. L'ancienne courtisane se débarrasse presque aussitôt des verres qui l'encombrent, par la grâce d'un plateau que portait l'un des esclaves au corps dévoilé. D'un mouvement de hanche, Ombelin renvoit le morceau d'étoffe si malheureusement libéré derrière sa jambe nue. Mon pauvre époux en sera si déconvenu... Non pas que cela la dérange, bien au contraire, alors que se joue sous ses yeuxun curieux et délicat jeu entre le muffle et la sombre amusée. Lui, un esclave... ? Voilà qui nuance quelque peu le personnage.

Comme pour se jouer de sa déconvenue, la musique emplit l'air et les couples commencent à se former. Et quels couples... Songe-t-elle en percevant un éclat lumineux... Et l'honoré de la soirée, qui s'enjaille gaiement en se contortionnant parmi ses invités. Aïe, ses reins... S'amuse lascivement la Dame vêtue de rouge, avant de revenir vers son "agresseur" de toilette.

"Eh bien eh bien, sieur Sauveur de Thaar... soupire l'ancienne courtisane. ... Savez-vous faire autre chose que ruiner les toilettes des dames ?" demande-t-elle en tendant sa main à l'impudent, doucement moqueuse.

Ruiner était un bien grand mot, le bas de sa robe avait perdu légèrement en longueur... Et alors ? Elle avait déjà dansé avec moins que cela sur elle. Quoi de plus normal pour une ancienne courtisane que de savoir comment mouvoir son corps en toute situation, pour le plaisir des yeux ?

Actions:

Bon, on va pas se le cacher, ça n’est pas par gaieté de cœur que la Dame Blanche répondit à l’invitation des Vossula… Mais que voulez-vous, nécessité fait loi, apparemment.
Elle ne se pressa pas non plus, les faux-semblants, ça se modère et elle ne voulait pas apparaître parmi les premiers convives – connaissant le loustic, les premiers arrivaient auraient tôt fait de s’enivrer – mais elle s’y présenta tout de même.

De sa position légèrement en retrait, le colossal hybride Ryltar observait sa « maîtresse », qui pour l’occasion portait une riche tenue principalement verte autrement moins ouverte que les godiches qui présentaient leurs appâts aux mâles éméchés, mais en même temps, son sang elfique la privait des courbes pour se permettre ce jeu, mêlant astucieusement les styles d’Alëandir et de Thaar, une épaule renforcée par une pièce de cuir pour accueillir une jeune dräke cuivrée dont le maintien et la posture empruntait à la majesté d’une reine… C’est qu’elle avait son caractère, la petite ! Contrairement à son « frère » d’éclosion, les foules ne l’intimidaient pas, tandis que lui, et bien, il restait bien souvent près de sa mère…
D’abord accompagnée de plusieurs hommes, ne resta à la fin que la sale trogne du colosse pâle pour l’accompagner, un coffret dans les mains. Depuis des années déjà, il était devenu le véritable garde du corps de la Dame Blanche, et si le contraste entre ces deux-là était net, elle n’était nullement gêné par sa compagnie et ses manières…  qu’il gardait pour lui tant qu’il était en service. Elle lui passait sa conduite en dehors, les rixes et les bagarres, les duels avec d’autres épées-louées, sous l’effet de l’alcool, car la réputation qu’il se taillait, sa valeur au combat, tout cela pouvait lui servir. Et il avait la violence dans le sang, il fallait bien la satisfaire d’une manière ou d’une autre.

Bref, c’est à deux – trois si on compte la petite dräke – qu’ils pénétrèrent la demeure, et si les gardes eurent la moindre pensée, le rictus mauvais de Ryltar dû les dissuader… Il était clair que des têtes auraient sauté si ils s’étaient sentis le droit de la fouiller.
L’agitation qui régnait excitait le sang de l’hybride – tandis que la Princesse Marchande elle poussa un léger soupir -, mais c’est surtout la vue d’eldéens qui le fouetta, affichant un sourire et un air carnassier. C’est qu’il cultivait la même aversion pour cette sale engeance que ce qu’il faisait naître chez eux, alors en voir… Ça lui donnait des envies de leur faire ravaler leur fichu complexe de supériorité ! L’espèce d’énergumène que la Dame Blanche avait invité quelques années auparavant ne comptait pas vraiment… C’était une créature frêle et chêtive, particulièrement dérangé et qui n’avait pas cette fierté du noirelfe… Et puisque Milynéa disait qu’il avait de la valeur…

« Doucement… Évite de porter le premier coup, entendu ? » lui murmura-t-elle, devinant ses pensées

Ça, ça voulait dire qu’il pouvait répondre à l’offense ou à la violence, qu’importe le prestige supposé du gaillard… Il était de la maison des Lythandas, il devait faire bonne mesure, mais en aucun cas permettre l’insulte.

« Ne néglige pas ton devoir. » Et elle avait encore vu juste, mais non, il n’oublierait pas, c’est qu’il y avait un certain confort à être au service d’un tel personnage.

La Dame Blanche balaya les invités et l’agitation, repérant celui qui célébrait son anniversaire, elle s’en détourna quand elle trouva du regard son père.  Et c’est vers lui qu’elle se dirigea, ne souhaitant pas s’approcher du cœur turbulent de la fête.

« Tibério, je constate que vous avez retrouvé votre fils, j’en suis heureuse pour vous. Il ne semble pas avoir trop souffert de sa retraite. » Façon de dire que l’exil, pas plus que l’âge ne semblait calmé l’héritier des Vossula. « Il semble occuper à divertir ses invités, où Ryltar peut-il déposer mon présent ? » Elle n’était pas plus intéressée que cela par le fait d’être accueilli par le « jeune homme », et ne se formaliserait pas qu’il ignore son arrivée.

Et c’est un coffret de bois finement sculpté qu'alla déposé le colosse, constituant en lui-même un précieux cadeau, contenant des reproductions d’une série de petites tablettes d'argile gravées en nisétien – dont Milynéa possédait les originaux, remontant au temps où sa famille exploitait les ruines de l’empire pour faire son commerce de reliques – accompagnée d’une traduction sur un parchemin, et contenant un conte initiatique.

Saluant la figure paternelle, elle parcourut la pièce, restant à distance raisonnable de l’agitation, accompagnée de l’hydride dont l’attention semblait particulièrement fixée sur les eldéens… Et pas pour les mêmes raisons que la plupart des hommes présents.

Spoiler:

La danse s’éternisait, je ne comprenais plus trop de ce que je faisais, alors que beaucoup de sensations se mêlaient en moi. Il menait la danse et profitait des pauses pour me glisser quelques mots mais j’étais incapable d’y répondre au milieu de tout ces tournoiements, juste de les analyser comme je le pouvais, plutôt mal.

Si nous avions été présentés correctement et qu’il ne s’était pas jeté sur moi comme il l’avait fait, si sa peau avait été d’une autre couleur et si ses oreilles n’avaient pas été effilées, j’aurais pu considérer ce Möevöt comme un objet d’intérêt. Je ne pouvais prédire ce que j’en aurais fait, mais il avait quelques qualités, dont celle de pouvoir me faire danser beaucoup mieux que mon seul niveau ne me l’aurait permis. Ses compliments eux aussi ne tombaient à plat qu’à cause des circonstances, j’y aurais prêté une plus grande attention autrement. Les sottises qu’il racontait sur sa survie ou la guerre qui aurait pu éclaté me laissèrent de marbre cependant, c’était ridicule.

La seule chose que je pouvais prendre pour ce qu’elle était, c’était son commentaire sur cette magie qui me traversait, elle pouvait attirer l’attention, et c’était exactement ce qu’elle faisait, même si je ne l’avais même pas pensée de cette façon. Comme pour montrer que j’avais encore de la réserve j’ouvrais encore un peu plus mon corps à cette énergie et les lignes doublèrent d’épaisseur l’espace d’un instant, provoquant comme un flash de lumière. Un gémissement et de douleur et d’extase s’échappa de mes lèvres alors que je me maudissais, j’espérais surtout que Möevöt n’allait pas le prendre pour lui, je n’avais vraiment pas besoin de ça.

Alors que le couple que nous formions s’était arrêté pour respirer entre deux morceaux, je dégageai une main d’un geste vif, puis tout mon corps, avant de faire un pas en arrière. Du coin de l’œil, je vis une forme familière s’approcher en contournant les nombreux danseurs qui s’étaient massés autour de nous, ils avaient tous répondu au signal des musiciens mais surtout d’Ascanio. J’en avais été le point de départ grâce à lui, mais aussi, et je peinais à l’admettre, grâce à cette saleté de Möevöt. Comme toujours, un geste dans la direction de mon serviteur et il me tendait exactement ce dont j’avais besoin, un petit morceau de tissu. En portant mon regard vers celui du drow une énième fois, je m’essuyai ostensiblement la bouche, comme je l’aurais fait juste après le baiser volé si Ascanio n’était pas intervenu, lui signifiant une certaine forme de dégoût.

J’étais enfin libre, et l’hybride disparaissait à nouveau dans la foule.

Résumé: