[Mare Noire] Les Façons de Sol'Dorn

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Règles spécifiques HRP :

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Sujet HRP de l'évènement

Clôturé le 22 septembre 2019

7e jour de la 1ere ennéade de Favrius ~ Automne
17e année du XIe Cycle
Camp Sud du siège eldéen

Le Maître du jeu s'adressant à tous... L'automne n'est bien souvent qu'un mot en Ithri'Vaan. Les ondées sont encore loin en ce matin assez doux. L'agitation perpétuelle et ordonnée qui habite les camps militaire rythmait la vie des soldats et des prêtres aussi simplement qu'à l'ordinaire... Malgré une atmosphère fébrile.

Cela faisait à présent un an et un mois que le siège était véritablement établi. Depuis sept jours, plus aucune marchandise ne passait dans Sol'Dorn. Plus aucune diplomate n'y avait été envoyé. Plus aucun voyageur ne pouvait passer à l'intérieur. Seuls les prêtres de Tesso et les membres de la Doth'ka travaillaient d’arrache-pied pour terminer ce qu'un an de tension et de corruption avait déjà bien entamé. L'ultimatum avait été adressé au conseil des prêtres : Les points sur lesquels revenaient sans cesse les prêtres étaient négligeables. Donc, à partir du début du mois de Favrius, plus rien ne passerait et plus aucune condition ne seraient négociée. Lorsque la ville serait prête à ouvrir ses portes, que chaque prêtre accepterait de jurer fidélité à leur Haut-Prêtre Eldéen respectif ainsi qu'à Elda, un messager serait envoyé au Camp Sud.

Aux dernières nouvelles, Kyorlin, le Haut Prêtre de Meingal avait été assassiné et Ssasha, la Haute Prêtresse de Teiweon représentant le dernier bastion de résistance par pur orgueil, s'était réfugier dans son temple sans faire parvenir son accord pour l'ouverture des portes. La population était totalement divisée et certains groupes armés commençaient à échapper totalement au contrôle des milices fanatisées des différents cultes. Le rapport datait du matin du 5e jour et l'état major n'en avait pas fait un mystère. Les soldats avaient hâte de voir la fin de cette mascarade guerrière, mais rien ne dégénèrerait avant le bon moment car cela faisait plusieurs ennéades qu'ils étaient honorablement occupés. Si le Ier Ost n'avait pas participé à l'éradication des despotes félons lors du siège de Fort Malbork, depuis cette victoire, les force du Ier et du IInd s'étaient organisés entre eux pour sécuriser les Seigneuries Morcelées et se défendre contre les mouvements de guérilla de ceux qu'ils n'avaient pas pu détruire. La zone de siège autour de Sol'Dorn fonctionnait donc à effectifs réduits par rapport à la profusion d'hommes qu'ils avaient jusque là. Les rondes et les zones de surveillances avaient été réorganisées en conséquences et les armes de siège du IIe Ost, replacées autour de la cité.

La veille, le matin du 6e jour, la délégation des hauts pontes d'Elda venus assisté à la chute de Sol'Dorn était arrivée en grande pompe accompagnée de la garde d'ébène et de soldats du Ve Ost. Une grande cérémonie avait eu lieu la veille pour honorer les dieux, mais le banquet était gardé sous le coude pour fêter l'ouverture des portes.

Ce matin du 7e jour, aux matines, une grande cérémonie rassemble le camp pour prier les dieux avant le début de la journée et des entrainements quotidiens. le Senger Kerath'Elghinn, La Ditrown'dare L'Renor, le Haut Prêtre de Tesso Ssol'riss Ulnen, La Triumvir Krish accompagnée d'une Garde Silencieuse encapuchonnée,  La Triumvir Viconia, Valsrik'Hrae que tous murmuraient en passe de devenir Prime Sorcier, le Senger Zaurahel et tous les membres prestigieux du camps sont assemblés au plus près des prêtres présidant les prières.

A la fin des dévotions, alors que les militaires et les membres des différents cultes s'éparpillent, deux sentinelles s'avancent vers le groupe d’influents personnages avant qu'ils ne commencent à se séparer.

- Pardonnez-moi. " lance la première en effectuant un salut impeccable " Le Maître Façonneur Ranaghar viens d'arriver et souhaite s'entretenir avec vous. "

Sur leur talons, un drow sec et râblais aux oreilles tombantes darde ses yeux luisants sur vous. La plupart des eldéens pourraient sans soucis le qualifier de laid et dans tous les cas, il est très très loin des cannons physiques imposés par Natha.

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Le Maître du jeu s'adressant aux membres de la délégation eldéenne... Vous avez été bien reçu malgré l’ambiance guerrière. Le fait qu'une part non négligeable des soldats soient déployés vous permet à tous d'avoir une tente individuelle bien qu'elle ne soit pas nécessairement des mieux placées dans le camp. On vous a expliqué le fonctionnement du camp, les horaires et les façons de vous adresser à l'intendance si vous désiré quelque chose de particulier. Les Hauts Prêtres présents ont été invité à diriger les prière à leur dieu tutélaire à partir de leur arrivé, pour valorisé les troupes qui avaient pris part à cette période d'attente si complexe pour un eldéen qui se respecte.

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Le Maître du jeu s'adressant à Lucretia, Nehril et Ranaghar... Lorsque vous êtes arrivés à Frontière pour retrouver le passeur sensé vous faire pénétrer à l'intérieur de Sol'Dorn, vous avez retrouvé la Concierge qui avait aidé Nehril et Lyad à en sortir. La camaraderie dont elle fait preuve à leur égare l'a poussée à les prévenir que la surveillance des drows autour de Sol'Dorn avait beaucoup changée récemment et qu'elle avait besoin de quelques jours pour éviter un voyage aussi mouvementé qu'à l’aller.

Après quelques jours d'attentes, peu avant l'aube du 7e jour, c'est sans grande difficulté cette fois - et grâce au concours d'un mage supplémentaire - que vous êtes arrivés devant la bouche d’égout... Dans laquelle Ranaghar n'a jamais voulu mettre un pied. Après un débat houleux qui ne pouvait s’éterniser au risque de se faire prendre, la Concierge ramena Ranaghar a Frontière pendant que Nehril et Lucretia entrait dans la cité assiégée avec Lyad, le jeune homme que le mercenaire devait protégé jusqu'à son retour à la case départ.

A peine les trois compères eurent émergé à la surface qu'ils se rendirent compte de l'effrayante réalité de la ville...

Pour le moment, vous n'avez pas besoin de poster dans ce RP. L'organisation de vos découvertes sera discuté via MP !

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Le Maître du jeu s'adressant à Ranaghar... Après avoir tenté de t'infiltrer illégalement dans la cité assiégée, c'est avec ta superbe habituelle que tu t'es présenté au Camps Sud pour obtenir le droit d'entrer en grandes pompes dans la cité. Malheureusement, si aucune sentinelle n'aurait osé te refuser l'entrée du camps, les membres de l'état major et la très grande majorité des eldéens du campement étaient rassemblés pour rendre hommage aux dieux avant de commencer les entrainements matinaux. Tu assistes donc aux dernières minutes de l'assemblée et aux dernières prières avant que les deux sentinelles qui t'accompagnent te guident jusqu'au groupe de personnes si importantes qui ne se sont pas encore éparpillées au milieu des militaires retournant à leur ouvrage.

Libre à toi d'interrompre et de te positionné face à toute cette smala de gens importants. Les sentinelles t'ont sans doute regardé arrivé avec un certain mépris, mais à partir du moment où ils ont entendu ton nom, ils t'ont obéit au doigt et à l’œil et se sont montrés particulièrement courtois. Tu peux jouer les deux sentinelles comme tu l'entends.

Avec sa superbe habituelle, ouais… Le très-haut se moque des ignorants qui vont s’imaginer une entrée triomphale et grandiose, le faste et la splendeur du conquérant en visite… Alors que non ! Point de tout cela dans la caboche de l’Excentrique ! Oh que non ! Il est arrivé dans une carriole tirée par une mule aussi buté que lui.

Mais on va revenir un tout petit peu avant parce qu’il faut expliquer sinon après on va croire que… que quoi d’ailleurs, on sait pas et ça n’a pas grand intérêt ce que peut gamberger un esprit d’ignorant, alors voilà. Parce que non content de le trainer en territoire hostile – il ne garde pas un bon souvenir de Sol’Dorn et l’a quitté sans trop de regrets, honnêtement parce qu’on a voulu le mêler à des querelles qui le concerne absolument pas, mais c’est encore une autre histoire et on a pas le temps avec ces conneries, alors on passe – voilà que ces pontes qui veulent sa présence ont l’outrecuidance de vouloir le faire passer par des égouts sales dont il en sortira poursuivi par l’odeur d’un millier de culs de gobelins qu’une centaine de bains n’effaceront pas et qui condamneront son précieux manteau au bucher, irrécupérable et contraint à porter autres choses.
Alors merci mais non merci les petits amis, mais il va faire autrement, hein, il est important, lui, c’est – ou était mais si en réalité, ça ne change pas ça – un élément précieux pour les eldéens… On le veut, c’est lui qui repousse les avances, vous voyez le tableau.

Donc à choisir entre les égouts dans ce bourbier qu’est Sol’Dorn de façon officieuse et une entrée par la grande porte, son choix est arrêté, son nez à le dernier mot – oui, c’est quelqu’un qui a comme assistant un gobelin et qui dissèque probablement des kobolds dans son atelier qui pense ça – mais à vrai dire, il aurait p’t’être mieux fait de se trancher le nez…

Non parce que le Façonneur dans une cérémonie religieuse et militaire, c’est du plus mauvais effet et ça peut vous mettre le mauvais sort pour le compte. C’est une sorte d’outrage, un peu comme convié femmes et enfants à des cérémonies rituelles guerrières et masculine… C’est un coup à vous attirer l’hostilité de quelques dieux du mauvais goût qui ne sait apprécier la splendeur de l’Excentrique.
Et pour lui… C’est emmerdant à souhait, d’abord il y connait plus grand monde parmi les puissants depuis que le ménage a été fait des années plus tôt, et puis merde, ce n’est vraiment pas son truc… Alors voilà, ça évite les égouts, mais ça pue quand même cette histoire… D’autant que celle qui l’a envoyé cherché, elle est de quel côté ? Il n’y a pas trop songé parce que la politique, hormis les bases, il s’en soucie nullement, mais maintenant qu’il est entré, ça commence à faire son petit bonhomme de chemin… Le nom de Krish est un passe-partout mais au bout d’un moment, il va falloir qu’il explique sa venue et qu’il y préserve ses fesses et sa peau face à des fous furieux fanatique aux yeux desquelles il parait comme l’ignominie suprême, un déserteur – il ne s’est pas engagé mais c’est un détail futile pour eux, surement -, lâche et en plus difforme – et un hérétique, mais chut, faut pas leur dire… Mais talentueux dans un domaine et d’une manière qu’on comprend peu voir pas.

Bref, le côté festif, ça n’a pas grand emprise, il est pas exalté, le bougre, comme les autres, tandis qu’on le conduit au gratin de la société eldéenne. Mais qu’est-ce qu’il fout là, hein ?

Et pour les petits nouveaux qui connaissent pas le truculent personnage, Ranaghar, c’est un drow unique en son genre, qui hormis la peau et la haute taille ne partage rien avec ses semblables, mais alors, vraiment rien.
Grand mais courbé, il dissimule une maigreur sèche sous un épais et ample manteau colorés trainant jusqu’au sol, aux motifs étranges au sein desquels circulent des dragons longiligne et qui couvre presque l’intégralité de son corps.
Ses avant-bras sont alourdis et couvert par toute une panoplie de bracelets d’or serti de gemmes variés, une véritable fortune – et pour qui connait les capacités du mage, un arsenal potentiel dissimulé… non, je plaisante… ou pas, qui sait – et seul ses mains bien visibles suggèrent et trahissent sa maigreur générale qui accentue d’autant la longueur de ses doigts fins. Mais s’il n’y avait que ça… C’est surtout plus haut que se marque sa plus grossière difformité, des oreilles tombantes depuis longtemps alourdies par d’autres bijoux.
Et puis, y a ce grotesque familier, un assistant-gobelin à l’air renfrogné, qui le suit partout… Ça, ça n’aide pas à s’en faire une bonne opinion.

Et ça, c’est juste pour le physique. Il ne vaut mieux pas trop se pencher pour ce qu’il y a dans son crâne et chercher à jouer au jeu des sept différences.

Le torse nu, ton manteau gisant au sol. Profitant de la douceur de la luminosité matinale pour exposer ta peau fragile, sous la guidance des Hauts-Prêtres tu offres tes Braises en prières. Le torse nu, dévoilant le chimérique dragon dessiné par ta peau naturellement bicolore, dansant entre les runes tracées à l’encre et au couteau dans tes chairs, tu témoignes silencieusement la profondeur de ta dévotion. Choisi par la Chimère en personne, tu considères ta seule présence, ta seule apparence, suffisantes à exprimer les souhaits et les promesses faites à ta divinité tutélaire. Alors après que le Père des Batailles ait été loué, après que La Voilée ait été remerciée, après que Le Menteur se soit laissé aller à ses sibyllines comptines, quand est venu le moment de se tourner vers Le Gardien, tu t’es tu. Tes lèvres se refusèrent à partager les mots de la prêtresse faisant serment, et ne se séparèrent pas non plus quand l’occasion te fut offerte d’ajouter ton témoignage au sien. Ce que ton silence ne disait pas, et que tes yeux de verre violacé peinaient à exprimer, le regard rageusement flamboyant du colossal nécromancien dans ton dos le communiquait bien assez puissamment.

Tu étais arrivé il y a peu, poussé à quitter l’Erekd’Fe’Nor par l’absence en Elda de toutes les autres pontes de vos institutions magiques. Ça et le Siège de Sol’Dorn que l’on disait arriver à son terme. Loin de la Ditronw Da’re, de la « Haute-Prêtresse » de Valas, et te refusant à partir fêter la première victoire des nouveaux Triumvirs – s’il on peut appeler un Triumvirat ce qu’il reste – tu aurais fait un bien étrange Ust Meld’Zar. D’autant plus que loin de tes yeux, bien que ceux-ci ne te servent pas à grand-chose, s’étaient joués en parallèle du drôle de siège, de bien tristes théâtres.
De tristes théâtres que tu n’avais encore pour l’heure pas le pouvoir de diriger, mais au sein desquels sous peine de manquer à ta tâche, il te faudrait probablement instaurer un semblant de discipline une fois le moment venu.

Mais l’heure n’était pas à ce genre de pensées. L’heure était à la dégustation des crépitements encore palpables des Braises des pieux. Le regard de vos maîtres était encore sur vous à l’instant, et la sensation en était jouissive… si bien que l’intrusion du cancrelat aux cerques de diamant ne t’en fut que plus pénible.

- Quelques ennéades de retard, Ran’Lyn te murmure, l’air amusé  ce n’est pas grand-chose Valsrik’Chev !

- Pas comme si la liste n’était pas déjà assez longue.

Le temps et l’énergie que tu aurais pu économiser si seulement cet imbécile de façonneur n’avait pas disparu de la circulation ! Seulement tu ne t’en agaceras pas. Pas cette fois. Pas quand malgré leurs systématiques échecs, vos expériences vous avait permis de confirmer que la décharge d’une pierre d’âme provoquait effectivement à son niveau des phénomènes de déplacement d’éther similaires à ceux que l’on peut observer dans un nœud endogène. Pas quand l’absence de la voie royale vous avait obligé à être d’autant plus créatifs dans vos expériences. À vrai dire, tu pourrais presque remercier ton ancien collègue de la Zho’Us Raghar d’être à ce point une ordure. Rien de tel que l’odeur de déchets pour motiver d’autres à être propres sur eux. Le problème, c’était que le déchet en question était trop précieux pour que vous ne finissiez par le jeter, et qu’avec le temps, il ne ferait jamais que plus se putréfier.

- Enfin décidé à te rendre utile de nouveau Ranaghar ? tu lances, envoyant par la même occasion un manteau que tu venais de ramasser sur ton épaule

Ton ton n’était pas le moins du monde moqueur. Plutôt, il s’y glissait la même frustration que celle que tu as pu rencontrer face à certains de tes élèves. Brillants, mais se reposant sur leurs lauriers, aux aguets de la moindre excuse pour ne pas mettre d’efforts en des lieux où ils étaient pourtant nécessaires. Sauf qu’aujourd’hui, ton regard aveugle rendait ta colère plus sinistre qu’oppressante.

Ah, ça lui avait manqué, d’une certaine façon… Ce soupçon de sel qu’il décèle chez ceux qui ne le supportent pas sans toutefois pouvoir y remédier comme ils le souhaitent. Une saveur subtile et amer qu'il goûte depuis que son talent a éclot et l’a rendu précieux malgré ses défauts.
Mais tout de même, quel jeune con insolent ! Comme s’il était utile, lui, à barboter dans son bourbier, avec ses ambitions terre à terre pour le freiner ! Ce n’est pas parce que tu piges pas l’intérêt ou que ça sert pas le grand dessein des fanatiques et des bourrins que c’est pas utile, oh !

« Et toi, enfin décider à cesser de feindre l’être ? Quoi, vous pensiez sérieusement qu’il allait s’aplatir comme une crotte devant ce gosse ? C’est mal le connaître. Eh non petit père, t’es pas assez haut pour faire naître le plus petit soupçon de retenue chez l’Excentrique ! Tu devrais demander à la Triumvir El’Serat ce qu’elle pense de mon utilité, possible que même à des centaines de lieues, j’me sois montré plus utile que toi malgré tes efforts ces dernières années ! »

Et toc ! Remonte ton slibard, Lothar ! Bon certes, c’est à son insu, mais le déchet, il a sauvé la vie d’un Prime Feu et de son gosse, rien de moins que cela ! Bon, il s’en vantera pas lui-même, car il est pas dans cette démarche de séduction, hein, mais voilà un truc que l’insolent n’a sans doute pas accompli alors qu’il léchait des bottes pour se placer au sein du merdier qui secouait le Puy.

Bon, il aurait pu s’en abstenir, car c’est jouer le jeu et participer à ce concours de quequettes à celui qui c’est qui est le plus utile… Alors que c’est pas ça l’important ! On s’en fout d’être utile ! On s’en fout de servir ! Ce sont des activités accessoires, un indispensable nécessaire pour permettre les recherches et les études, de se fournir les outils et les moyens d’avancer ! Mais bon, suggérer à ce blanc-bec que lui, Ranaghar, de la lointaine Thaar, a éventuellement été plus utile à au moins une des plus hautes figures que lui, à son insu… C’est plaisant alors tant pis ! Que l'autre fasse l'étalage de ses vaines réalisations, lui, il progresse dans les sujets qui l'intéresse - mais qui n'intéresse probablement que lui... quoique... même si ça servait à rien quand il l'a imaginé, contrôler des gobelins, de nos jours, ça se vendrait bien ! C'est un précurseur ! Vous verrez, dans cinq siècles, le marché du kobold explose !

Les prières communes n’étaient pas particulièrement appréciées de Kerath, il préférait honorer les dieux seul mais ça n’empêchait pas qu’il n’en ratait pas une seule. Ce matin, levé avant le soleil, comme d’ordinaire, Kerath enfila son habituelle armure de plate rouge, non pas qu’il la revêtait pour prier mais, après les prières matinales, il devait partir pour rejoindre une des bases d’opération profondément ancrée dans les seigneuries morcelées qui osaient encore résister. Ses esclaves reculèrent alors qu’il attrapa son ceinturon d’arme et le mit en bandoulière pour avoir son épée à deux mains dans le dos. Alors certes ses drows sur place n’avaient pas forcément besoin de lui, probablement pas d’ailleurs, mais comme c’était souvent le cas, Kerath préférait déléguer les tâches administratives de son ost, bien trop nombreuse à son goût, pour se concentrer davantage sur les tâches guerrières. Si le rapport qu’il avait reçu il y a peu était juste, et c’était entre autres pour le vérifier qu’il partait, il aurait le loisir de tuer d’autres traîtres avec son épée qui était dédiée à cette tâche ô combien importante. Mais pour le moment il ne pouvait pas encore partir, pas tout de suite, il devait rester autour de Sol’Dorn, notamment au camp sud pour la prière commune, surtout avec l’arrivée des notables civils la veille.

Kerath s’avança ensuite vers la table principale où reposait un écrin qu’il ouvrit pour récupérer son collier au bout duquel pendait l’anneau symbole de sa fonction qu’il passa autour de son cou ; dans l’écrin, à côté de l’anneau, reposait un autre pendentif : un petit soleil en bois, usé par le temps et l’usage, reposait là et le Senger s’arrêta quelques instants pour une brève prière au Père avant de passer le collier autour du cou. Il entendit un cheval renâcler dehors et sortit rapidement, Ria’las, la commandante de la Garde Draconnique nouvellement formée, attendait sur sa monture, à côté de Murrpau, déjà harnaché. Ils se mirent donc en route pour le camp sud, Tiu’kor voletant devant les deux drows. Le bagron resta toujours en l’air, vaguement au-dessus de son maître lors de la prière mais personne n’entendait ses couinement durant la prière, noyés qu’ils étaient par les prières scandées ; quant à Murrpau il resta assis, il se coucha vers le milieu de la cérémonie, à gauche de Kerath, un mètre derrière lui et sur sa droite se tenait Ria’las, qui, elle, à l’instar de son supérieur, priait bel et bien et ce avec une ferveur exemplaire.

Une fois les dévotions terminées, le Senger se retourna vers sa garde.

« Il faut que je parle à quelqu’un avant de partir. » Elle hocha la tête et emboîta le pas à Kerath qui se dirigea de sa démarche pesante vers Valsrik’Hrae mais il s’arrêta lorsqu’un soldat les interpella. Toutefois Kerath n’en avait pas grand-chose à faire de ce Ranaghar alors il poursuivit sa marche jusqu’à la personne qui l’intéressait mais il fut arrêté une fois de plus, cette fois par Valrsik. Il regarda le début de joute en levant ses yeux rouges cerclés d’or au ciel. « C’est bon, vous avez fini vos gamineries? » Sa voix rauque portait loin, habitué qu’il était à aboyer des ordres, et, à l’extrémité du rassemblement, deux soldats se mirent au garde-à-vous avant de se rendre compte que le Senger ne s’adressait pas à eux. « Valsrik il faut que je te parle, j’ai une idée nécessitant l’Erkd’Fe Renor. »

- Al'Serat. " rectifia Krish avec un sourire, parfaitement amusée par le démarrage au quart de tour des deux divas de la magie et le plantage que d'autres auraient certainement pu trouvé des plus insultants. Le corset métallique qui chuintait autour de son buste, cliqueta plus franchement lorsque les griffes argentés s'y posèrent. L'agacement de Kerath tranchait avec la nonchalance de la Triumvir flanquée de sa garde. " Et en ce qui me concerne, vous m'avez sauvé la vie une fois chacun, donc c'est un statut quo. Il faudra faire mieux pour vous départager, mes chers princes. "

Laissant l'Obok Senger interpeler Valsrik pour se concentrer sur le nouveau venu avec curiosité, elle fit rouler un peu son épaule endolorie. Mauvaise position de sommeil, même les Avatar connaissaient ce genre de désagrément. Et même le Grand Architecte - qui avait pourtant fait l'effort de sortir du lit à l'aube pour être présent - n'avait pu faire passer la douleur. Elle avait su l'ignorer sans soucis pendant l'office et présider à la prière tout à fait normalement, mais son bras s'agitait maintenant de léger mouvements en tâche de fond.

- Viconia, je te présente un vieux collaborateur. Vous savez quand je vous ai dit que j'avais profité de mon passage à Thaar pour prendre des nouvelles de notre plus éminent Façonneur, et bien vous l'avez sous les yeux." Parlant plus généralement aux membres importants présents depuis longtemps lors de ce siège, elle se tourna finalement vers le dit façonneur " Et je suis sûre que c'est très exactement pour prouver ta supérieur utilité que tu es là aujourd'hui. "

Le Silencieux n’apprécie que peu d’être vénéré par des mots qui ne sont enveloppés d’ombres, et tu me le confirmes, mais il est certaines circonstances que tu acceptes, et celle-là en fait partie. Ils oublient facilement ton rôle, ils oublient facilement ton importance, surtout dans un camp militaire, mais je leur rappelle, à ceux qui ne sont déjà pas à tes ordres, que Tesso est. Tu es plus visible depuis que j’ai pris le relais, depuis que Ssol’riss Ulnen est prisonnier, et ça a payé, alors que certains multiplient les dons et sont prêts à quérir ton aide plus facilement. C’est un équilibre à garder, et parfois, depuis plusieurs ennéades, tu me reproches d’oublier les mensonges. Mais ce n’est pas Ssol’riss Ulnen que tu as sous ton joug, et celui à sa place est prêt à te déplaire, surtout quand il pense suivre les suggestions de celle qu’il connaît depuis plus longtemps qu’il ne te vénère.

Ranaghar, un nom que j’ai connu, quelqu’un que certains de ton culte n’ont sûrement pas cessé de suivre, une apparence que j’avais oubliée, mais surtout de la curiosité, de la curiosité à laquelle tu fais écho. C’est sa rareté qui l’a protégé à bien des reprises, et c’est sûrement sur cette rareté qu’il mise quand il se présente dans un camp militaire eldéen, mais il ne peut sûrement pas ignorer le risque qu’il prend… Là où tous semblent être intéressés par autre chose, je ne suis qu’intéressé par l’entrevue qu’il recherche. Ce qu’il se passe autour, je l’entends mais l’ignore, retenant simplement un rire aux mots de Krish Al’Serat. Combien de fois ? Elle pourrait me rétorquer que c’était toujours moins qu’elle, mais cette discussion n’aurait que lieu dans mon esprit, et la pointe d’une émotion qui n’était pas une émotion très eldéenne vint me taquiner. Un jour, peut-être, cela changerait.

Partant d’une position toujours un peu en retrait, pour être sûr d’entendre ce qui vient de l’intérieur comme ce qui pourrait venir de l’extérieur, je m’avance vers lui, frappant une seule fois de mon bâton sur le sol, au moment de faire le cinquième pas de huit, restant voûté pendant les huit. Ma cage thoracique dénudée s’ouvre alors que je me redresse, écartant le manteau qui reste sur mes épaules. A travers le masque noir, les deux fentes presque invisibles laissent passer les scintillements mauves qui viennent se visser dans son regard. « Supérieure utilité dont tu peux nous entretenir tout de suite si tu le souhaites. » Un regard circulaire alors que je semble découvrir tous ceux qui m’entourent, avec un petit sursaut alors que mon visage se tourne vers la très proche Krish Al’Serat. « Tu ne trouveras pas meilleur auditoire que celui qui te fait face. »

A côté de la très haute Viconia et de ses vêtements lourds de pierres et d'or, Krish ressemble étonnamment à... une eldéenne de taille modeste parmi tant d'autres. Laissant à sa consœur, les masques et les grandes robes de cérémonies, elle a officié avec la même simplicité respectueuse que depuis les premières prières qu'elle a présidé pendant le siège. Son corset de métal, ses griffes d'acier aiguisées à la main droite et un simple pantalon de cuir noir enfoncé dans ses bottes confortables et usées. Ses cheveux tressés serrés de la façon la plus pragmatique qui soit. Autour de son cou, un collier de prière. A sa ceinture une épée et deux dagues. Seul une tiare ornée d'un soleil incrusté de verre rouge et d'un rubis rappelait son appartenance au clergé et son statut.

Les soldats, les officiers et les prêtres présents, elle les connait aussi bien qu'ils la connaissent. Toute proportion gardé, les effets de manche ne sont que de l’esbroufe inutile après tant de temps passé dans le cadre pratique d'un camp militaire, pied nus dans la poussière. Elle commence à expérimenté la séparation entre le temps de guerre et les moments de fêtes fantasques, simplement liées par son attitude féline. Cela fait un an qu'elle s'entraine avec les militaires chaque matin. Pendant les affrontements qui les ont mis face aux despotes, elle a combattue avec les Repentis selon les ordre stratégiques de Kerath et L'Renor, démontrant enfin qu'elle se battait au côté des siens. Une fois de plus le fanatisme aveugle de son ordre avait payé et elle avait prouvé également que la Prime Flamme, si elle n'avait pas été défaite, pouvait être blessée. Avec la mise en place de la Garde Draconique et les propositions de Kerath, elle avait bien du se résigner à endosser sérieusement son rôle de chef de culte... Enfin d'un point de vue symbolique parce que l'administration lui était toujours parfaitement inconnue.

L'intervention de Ssol'riss l'avait rendue curieuse et elle lui avait adressé un rapide sourire en coin. Celle de Viconia en revanche, lui donnait une perspective trèèèèèèès longue dans une journée déjà chargée. Avec Ranaghar, elle s'était toujours contenté d'aller droit au but.

- Tout a fait, je n'aurais pas dis mieux. Par contre je suis pas mal occupé aujourd'hui. L'Obok Senger du Ier Ost et moi allons au Camp Ouest. D'ailleurs si tu peux venir ça nous faciliterais les choses, Ssol'riss. Une affaire au sujet des insectes qui harcèlent nos convois avec la nouvelle répartition des effectifs. Puis il y aura aussi Valsrik et cette histoire de Prime Sorcier. Bref... " Se tournant de sa consœur vers le façonneur son sourire était d'autant plus sarcastique, bien qu'il luise d'une complicité unilatérale qui le vivait parfaitement bien. " Donc si tu veux toute la panoplie de ronds de jambes avant la discussion, je laisse les premières passes à Viconia, nous autres rattraperont l'affaire plus tard si nécessaire. Je demanderai aussi à un esclave de t'amener les différents contrats que je t'ai trouvé chez les fournisseurs eldéens. "

Eh, toi, là-haut, avec ta plume, tu peux te la sortir du fondement et ne pas faire des bêtises ! Cette faute, c’est la tienne, pas la sienne ! Il veut bien faire, à sa manière, et toi, tu fais n’importe quoi ! Ressaisis-toi, bordel !

Al’Serat, ouais… Pourquoi cette confusion ? Bof, une parmi d’autres qu’on ne peut pas considérer volontaire, imputable qu’à l’entité parmi les très-haut qui lui souffle les mots qu’il prononce, le Ranaghar, il sait, c’est certain, aussi sûrement qu’un nom écorché l’indiffère.
L’important, il n’est pas là, non… L’important, c’est que des gros poissons se mêlent aux joyeuses retrouvailles des deux mages qui s’entendent comme larron en foire, faut bien l’admettre. Mais ça n’est pas du goût du gratin qui se dit certainement qu’une telle querelle, ça va plus emmerder les dieux qu’autre chose – et eux avec -, alors après une si belle cérémonie – sarcasme -, faut pas les laisser faire !

Bon, sinon… Egalité… L’autre est aussi utile qu’un déchet, qu’on se le dise !

Bref, une grosse brute emmène l’eldéen d’un côté tandis que Krish Al’Serat – cette fois, c’est bon ! – exhibe le façonneur avec lequel elle s’entend si bien à ses copains-copines. Sauf que ça, c’est une connerie… Parce que le Ranaghar, il est doué, très doué, et dans sa caboche, oui, effectivement, il survole la quasi-intégralité des mages, en tout cas, tout ceux qui ne sont capable d’appréhender qu’une infime partie du spectre… Mais ça, c’est dedans que ça se passe. Au dehors, il n’affiche pas une telle prétention sauf quand des crétins – comme l’autre, là, qui remet en question son utilité alors qu’il pige quedalle à ce que cherche à faire le Façonneur ! – l’y invite… Il a beau le nier, y a un drow dans ses entrailles, et il a l’esprit revanchard alimenté par neuf siècles de mépris, alors quand un de ses semblables – entendre un mage – le provoque, bien évidemment qu’il répond ! Mais voilà qu’on veut l’entendre se pavaner sur son utilité supérieure alors qu’être utile à des eldéens en guerre, ça l’intéresse mais alors carrément pas ! Et en plus, on l’assaille… Il déconne déjà avec une seule personne à gérer, imaginez avec trois… Ranaghar c’est la diva introverti, l’ermite dans son antre qui s’enorgueillie qu’on vienne quérir sa sagesse jusque dans son trou, non celle qui recherche et s’accapare l’attention et la lumière.

Mais il va s’en sortir, il faut s’en convaincre ! Alors, il disait quoi ton manuel des façonneurs juniors, à la section relation publique ? Cherche, cherche, dépêche, ça presse ! Bon, ça vient ? Comment ça, tu ne trouves pas ? Quoi, les pages arrachées ? Mais… Qu’est-ce que tu marmonnes là ? C’est quoi cette histoire de t’être torché avec ? Bordel ! Bon, bah débrouille toi, qu’est-ce que tu veux que je te dise hein ! Quant à nous, on reprend le fil !

L’Excentrique s’interroge, forcément, sur ce qui se cache derrière l’utilité qu’on attend, espère ou imagine de lui, surtout que pour l’heure, il ne sait toujours pas s’il est du bon côté pour trouver celle qui l’a invité – ne me demandez pas qui, il m’a fait promettre de garder ça pour moi – mais il en doute fort alors mieux vaut se garder d’en dire trop à ce sujet. Bon, bref, à ce stade, il va mentir, ou en tout cas, cacher des trucs, et comment on ment à un serviteur du plus élevé d’entre eux ? En étant soi-même, pardi !
Et là-dessus, il peut remercier l’attention – qu’il soupçonne n’être pas gratuite, rien ne l’est – aimable de la Grande Prêtresse, qui va lui permettre de réfléchir plus avant dans ce qu’il va devoir produire comme bobard pour expliquer sa présence. Mais pour l’heure, il est silencieux… Ils ont planté notre Façonneur qui a trop de requêtes à gérer… Alors il les écoute sans vraiment saisir tout ce qui se dit ou se décide, se focalisant sur son propre cas, ce qui est déjà pas mal.

« Euh… Ouais, d’accord. Un peu d’intimité, ça m’dit bien. » Décevant, n’est-ce pas ? Vous espériez après tout cela une grande sortie de sa part, non ? C’est votre faute, à le prendre d’assaut de la sorte ! Et il dit cela en observant les alentours et les très – trop – nombreuses fourmis qui s’y épanouissent, sans vraiment cacher le malaise qui le rend muet.

À toi la grande originalité dont fait preuve le façonneur dans son discours arrache un sourire carnassier. À Ran’Lyn cependant elle inspire une moue coléreuse. Lui qui par plusieurs fois à cause du service que tu fais à l’Elda a failli te perdre. D’abord à cause d’un Nœud, puis de la Doth’Ka, puis d’une rebellion, puis d’un attentat, et finalement, devant une épreuve divine… et tu étais toujours là. Non, Ran’Lyn détestait que l’on s’attaque à ta valeur, parce que s’attaquer à ta valeur quand tu étais la plus belle de ses conquêtes, c’était s’attaquer à la sienne. Dominer sur un faible ne vaut rien… et c’est la seule raison pour laquelle il se refusait à s’abaisser à réduire en bouillie d’hérétique votre ancien collègue. De ton côté, la joute verbale est plus dans tes cordes que les échanges de phalanges… et tu es presque heureux que Krish vienne à son secours.

- Toujours fidèle fils à maman ! un pouffement s’étouffe dans tes nasaux C’est déjà ça.

Tu enfiles ton manteau d’un geste d’une fluidité surnaturelle, et redevient à ce moment le Valsrik’Hrae habituel. Le mage au regard étrange, flottant à travers les couloirs du Puy dans ses longues et obscures robes. À ceux cependant qui auront eu l’occasion de t’observer au cours de ta vie, la tendresse avec laquelle ta main se pose sur l’épaule de Ran’Lyn, une timidité motivée par la peur de perdre de l’affection plutôt que par la crainte de subir châtiment, elle est toute nouvelle.

- Je te confies ceux-là Ran’Lyn, ton oreille se tourne vers le Senger, sans que ton visage ne la suive complètement Je suis tout à toi… tu réfléchis quelques courts instants… beaucoup trop longs à ton goût Kerath, si je ne m’abuse ?

Tu te portes sur la pointe des pieds, le grimoire à ta gauche frémit, ta main quitte l’épaule du colosse, et ton attention se reporte sur le titan. Tes orteils perdent contact avec le sol, et tu glisses en direction du soldat, le dépasse, t’écartant par la même occasion légèrement de lieux de rassemblement où l’hérésie cultivait l’hérésie droit sous les regards de dieux qui attendaient sagement leur heure. Toi… toi tu n’es pas aussi patient.

- Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?

Qui te connait s’étonnera de te voir demander une telle chose de manière aussi sincère. Sans la moindre condescendance, et sans la moindre pointe de jalousie, face à un fantassin… comme quoi lorsque tu disais à Sel’Drin prendre extrêmement au sérieux ta tâche de Prime-Sorcier, tu ne mentais pas le moins du monde. Un fantassin réalisant que l’Etude Noire pouvait… non… lui était précieuse, c’était non seulement une denrée rare, mais le fait que ce soit un Senger rendait cette petite victoire encore plus délicieuse.

Le pauvre nécromancien, de son côté, devant tant de mièvreries en avaient déjà les dents qui claquaient, et par la même occasion le focaliseur qui s'excitait. Lui non plus n'était pas patient. Lui aussi avait dû supporter des années durant les frasques du façonneur. Lui non plus ne comprenait pas pourquoi aussi précieux que puisse être ses talents, la détestable personne de Ranaghar était à ce point choyée. Et il aurait voulu pouvoir se contenter de penser que cela n'était pas bien étonnant venant de personnes tout aussi détestable, s'il n'y avait pas eu son respect pour le feu d'Uriz, et son désir de la conquérir un jour... elle aussi. Un regard qui en disait long sur ses pensées. Un sourire malicieux en direction de Krish, dévoilant des dents aux pointes étrangement taillées. C'est tout ce que Ran'Lyn avait pour se distraire et oublier ceux-là.

Murrpau et Ria’las se tenaient derrière Kerath et ce dernier hocha la tête, le mage ne se trompait pas et si c’eut été le cas le Senger l’aurait brièvement corrigé avant de passer au sujet qui l’intéressait. Alors le général se tourna vers sa monture adorée pour y chercher deux feuilles un peu froissées, il tendit une à Valsrik. Sur la première était dessiné un croquis d’une tour de quelques mètres possédant à son sommet un mat auquel étaient attachés des bras articulés.

« Ça fait un peu plus d’un mois que l’idée me trotte dans la tête alors j’ai demandé à mes ingénieurs de se pencher sur le sujet et ils ont fait ça. » Du menton il désigna la feuille que le mage tenait dans ses mains. L’idée était simple : une suite de tours partant de Sol’Dorn jusqu’au Puy permettrait de transmettre des messages bien plus vite qu’avec une estafette ; et pour cause, passer d’une dizaine de jours à environ un seul d’après les calculs rapides des ingénieurs du second ost, était quelque chose qui pouvait éviter bien des soucis. « Toutefois l’un d’eux m’a aussi proposé une alternative et c’est là que l’Etude Noire entre en jeu. »

Il donna la seconde feuille qui, bien que le schémas griffonné dessus ressemblait au premier, avant la différence de marcher à la magie. Du moins grâce aux mages en remplaçant les bras mécaniques par des miroirs, l’idée était tout aussi simple que la première cela dit : un mage de lumière prendrait les rayons qui transportaient l’image d’un texte pour le faire passer d’un miroir à l’autre, remontant ainsi le dispositifs de tours jusqu’à arriver au Puy, ou partir du Puy jusqu'à Sol'Dorn ; permettant ainsi de transmettre, du moins virtuellement, des messages à la vitesse de la lumière.

« Je te laisse juger de la faisabilité du projet, d’après mes ingénieurs le plus gros soucis serait de paramétrer correctement l’inclinaison des miroirs sur une telle distance. »

Mais lesdits ingénieurs n’étaient pas des mages et c’était pour ça que Kerath avait voulu profiter de ce moment informel pour parler à Valrisk de cette idée. De plus l’alignement des miroirs était un problème parmi tant d’autre et le général ne doutait pas qu’il y en aurait d’autres que ses drows n’avaient pas encore anticipé.

C’est ça qui a tant de valeur aux yeux du Puy ? Le questionnement est commun à tous en moi, et il est aussi le tien. Celui qui est venu s’entretenir avec nous veut de l’intimité et laisser passer une occasion si rare d’avoir tant de membres importants d’une société qu’il a préféré fuir, si rare que je n’étais pas sûr d’avoir jamais vu tous ces gens au même endroit. Il veut de l’intimité, et il se pointe au beau milieu d’un camp militaire au moment le plus important de la journée. Je secoue la tête, je me détourne, si une triumvir veut céder aux caprices de celui qui ne fera qu’étirer la patience de bien de ceux qui voyaient une utilité en lui avant qu’elle ne finisse par rompre, libre à elle. Libre à elle, mais tes yeux et tes oreilles ne les quitteront pas, pas si c’est possible. Et alors que mon masque s’oriente vers le vide, plus loin, entre deux têtes, le signal est lancé. Quand à sa réception, je ne peux en être sûr, et j’abaisse ma capuche d’un geste lent, pour laisser à des oreilles rarement libérées la possibilité d’entendre une confirmation.

Avec satisfaction j’entends alors Krish Al’Serat confirmer une démarche qui n’accordera pas plus d’importance qu’il n’en mérite à Ranaghar alors qu’elle ne cède pas aux attentions que lui porte son homologue. Je hausse un sourcil en portant mon attention sur la porte de sortie qu’on vient de m’offrir, notant tout de même ce sourire qui change tout et qui ramène loin en arrière, ou qui l’aurait fait, si tu n’avais pas été si prompt à intervenir. Peut-être que tu es le plus à même de communiquer à la reine l’emplacement des essaims à écraser, peut-être ne trouveras-tu que des insectes isolés, peut-être même as-tu déjà fait ce que le Père attendait de toi sans m’en prévenir. C’était si simple parfois de te vénérer, car le mensonge pouvait aussi dissimuler les bonnes nouvelles qui devenaient de savoureuses surprises. La tête s’abaisse brièvement avant de remonter. « Le Silencieux et ses masqués feront leur possible pour vous assister vous et l’Obok Senger du Premier Ost, Vaisseau d’Uriz. » Puis, alors que je semblais grandir encore un peu, je changeai d'orientation pour orienter mes prochains pas vers la sortie du camp. « Ne perdons pas de temps alors, si je dois être informé de quoique ce soit avant de trouver Ses serviteurs du camp ouest, nous pouvons nous en préoccuper sur le chemin. »

Mais parce que tu es contradiction je ne peux m’en tenir à aller dans le sens de l’ordre, un peu de chaos se doit de compenser. « Et nous sommes encore plusieurs à être convaincus d’une certaine supérieure utilité, l’idéal serait de terminer nos affaires avant que la perplexité ne gagne nos rangs, non ? » Satisfait, mes prochains pas commencent enfin à se faire entendre.

Une feuille de papier… un dessin… c’est que notre cher Ook Senger ne tenait pas à te faciliter la vie. Mais c’était aussi la preuve que malgré ta condition, tu évoluais avec assez d’aisance dans ton milieu pour que l’on oublie ton handicap. Et surtout, c’était la preuve que tes efforts d’engager le « contact visuel » malgré ta cécité étaient moins futiles que tu ne le pensais.

Par contre !

Par contre là n’était pas une situation où tu pouvais te permettre de feindre la vision. Au contraire, que Kerath te force à te concentrer sur des surfaces dont il est aussi difficile de déceler le grain que des feuilles à dessin, pour peu que tu acceptes d’y participer, risquerait de beaucoup ralentir l’avancée de ses projets. C’est donc tes yeux de nacre morte flanqués dans ceux du guerrier, et l’esprit voguant à travers les arcanes que tu t’es intéressé aux croquis. Des bras mécaniques… des miroirs… des tours… ton passif de physicien s’en voyait à la fois fortement interpelé et fortement interloqué. Transmettre un message d’une tour à une autre, jusqu’à ce qu’il arrive à Sol’Dorn, un défi, mais un défi qui s’il était relevé et remporté représenterait une immense victoire. Seulement…

- Avec la diffraction naturelle, même les meilleurs mages de lumière auraient du mal à transmettre quoi que ce soit sur une distance assez longue pour rendre la chose praticable. À ce moment-là, ce qu’en renvoient les miroirs serait presque indistinct de la lumière du Soleil de jour tu réfléchis un instant avant d’ajouter ou de l’Œil d’Elda la nuit.

Tu réfléchis au terrain, tu réfléchis à la physique, tu réfléchis aux ressources, tu réfléchis à la main d’œuvre, et plus tu y penses, plus l’idée de paraît un inextricable chantier.

- Au moins dans les terres stériles il y a peu d’obstacles, donc en optimisant autant qu’on peut le nombre de tour relai, la chose devrait être possible. Le souci à ce moment c’est que même sans parler de construction, entre la garde et l’entretien de pareilles structures, pour l’instant, on risquerait de démobiliser de chantiers plus urgents bien trop de Sombres. sans éloigner ton regard de celui du titan, tu pointes du doigt le miroir du schéma Quant à s’il on voulait quelque chose de précis, il faudrait poster des mages dans le circuit pour reconstituer le message avant qu’il ne soit rendu trop difforme, et pas n’importe quelles mages, des mages assez puissants pour transmettre à leur tour une lumière assez puissante pour arriver jusqu’au prochain relai. Beaucoup trop de gens précieux mobilisés pour une tâche ingrate donc. tu te retiens de pointer du pouce en direction du reste de l’attroupement Mais pour peu que l‘Ousomös se montre un peu coopératif, en remplaçant les mages-relai par des pierres imprégnées, le chantier deviendrait peut-être réalisable.

Tes oreilles se soulèvent, tes doigts jouent contre la baguette à ta ceinture, et une bulle vous entoure, le Senger et toi. Aucun son ne vous parvient, aucun son ne vous échappe.

- Enfin, à condition que quelqu’un soit enfin prêt à le mettre à contribution. Si tu vois ce que je veux dire.

Tes oreilles reprennent leur place habituelle, et lentement votre espace clos se reconnecte au reste du monde. Premier pion déplacé.

Dans le soleil encore pâle de ce début de mâtiné, la foule s'est déjà bien dispersée. Des éminents drows qui se trouvaient là, la dernière poignée de hautes autorités se fractionnent en petits groupes autour du Façonneur. Le Grand-Prêtre de Teiweon fronce les sourcils et tourne de suite la tête vers le blafard en train de jouer avec son environnement lorsque ce dernier offre ouvertement une a parte à Kerath. Tout semble paisible. Pourtant, une rumeur se propageait à travers le le camp. Deux cavaliers n'étaient pas descendus de monture à la porte Nord, celle donnant sur Sol'Dorn.

- Senger Kerath'Elghinn ! " rugit une voix féminine.

Le militaire massif ne réagit pas. Visiblement, il n'avait pas entendu. Entre les tentes, sur l'axe principal, une brume de poussière entourait le galop des deux sentinelles que les gardes des portes avaient laissé passer. Les deux coursiers déboulèrent au centre du camp et freinèrent des quatre fers. Deux uniforme du IIe Ost. Une Kyorl et un simple soldat. Avant même de s'être tout à fait arrêtés, voyant les membres de l'assemblée qui se trouvait autour de leur supérieur libéré de sa surdité, la Kyorl repris de sa voix forte.

- Un messager de Sol'Dorn. "

Sur la selle de son subalterne, tenu à bras le corps, un drow entre deux âges tremblait si fort que le soldat avait du mal à le contenir. Recroquevillé et pétrifié, sur le côté de sa bure, le symbole de Kiran apparaissait malgré les tâches de terre et de sang imbibant le tissus. La moitié droite de son visage était couverte d'une cloque inégale, noirâtre et cartonnée à certains endroits. Seul l'un de ses bras émergeait des manches amples de sa tenue pour présenter au monde une main gonflée et violacée. Ses yeux roulaient dans leurs orbites, tentant par tous les moyens de rester ouverts. Enfin, ses lèvres semblaient répéter inlassablement le même schéma sans qu'un son ne soit audible à plus de deux pas.

- Il est dans un état critique. Il répète la même chose depuis qu'on l'a ramassé : La Gardienne nous pardonne. Pitié. Nous combattrons. "

Elle clôtura son premier rapport d'un rapide salut, attendant les ordres immédiats. Le murmure hésitant et répétitif de l'étranger roulait toujours en arrière plan.

PS:

Kerath le laissa parler, sans comprendre son explication, celle avant son petit temps de réflexion, mis à part que ce n’était pas faisable. Chose qu’il confirma quelques instants plus tard ; le Senger sentit une pointe de colère en se demandant si Valsrik ne lui disait pas ça justement parce que la tâche était ingrate et que bien peu accepterait. Les mages et leur orgueil commençait à sérieusement lui taper sur les nerfs. Sans tourner la tête le général tenta de trouver celui à qui le futur Prime Sorcier faisait allusion, ce qui n’était pas bien difficile à comprendre même si le parasite en question se trouvait hors de son champ de vision, même périphérique. La suite le fit sourire et Kerath se demanda si Valsrik ne disait pas ça pour obtenir l’aide du Senger. C’était probablement le cas mais comme celui-ci n’avait pas le moyen de vérifier la véracité de ce qui lui était expliqué il ne préféra pas se prononcer. De toute façon est-ce que le savoir avait un quelconque intérêt ? Il décida bien vite que non, après tout si c’était là le prix de l’Etude Noire ce n’était pas bien cher payé même si ça l’agaçait. Il hocha donc la tête alors qu’ils retournaient avec le reste du monde.

Le reste du monde qui semblait, pour le coup, bien agité. Plus qu’il ne l’avait prévu pour le coup.

« On ne salue plus ses supérieurs? » Demanda Kerath dans un grognement. La guerrière corrigea son erreur après un rapide rapport qui suffit amplement au général qui ne mit pas longtemps à faire le lien avec le peu de chose qu’il savait. « Descendez, posez le au sol, reculez! » Il n’attendit pas de réaction, certain qu’il était qu’il serait obéi, il se tourna alors vers Murrpau, détacha son heaume jusque-là accroché à la selle de sa monture pour l’enfiler puis il fit signe au félin à pointe de s’éloigner et avança en direction du messager. Durant le pas qui l'en rapprocha il leva sa main droite et fit jouer son épaule pour que son fourreau dans son dos s’aligne avec sa main, il attrapa la poignée de son épée et la dégaina en se penchant en avant d'un geste qu'il prolongea pour frapper le prêtre tremblant au sol.

Ce n'est pas tout le monde qui est à l'aise… Ce n'est pas tout le monde qui aime étaler ses sous-vêtements en public. Viconia la première. Le mettre en confiance aidera sûrement pour la suite. S'avancant élégamment, la triumvir se place à droite de Ranaghar tandis que Varg se place à sa gauche à elle. Le molosse s'il n'a pas bougé de son coin depuis le début de la cérémonie, vient reprendre sa place de gardien sans faille ir, fidèle compagnon.  Le but de la triumvir n'est pas gratuit. Plus qu'une simple question de politesse, c'est une façon de mettre en confiance le maître façonneur, de faire connaissance avec l'individu pour le cerner un peu. La voix mélodieuse de la mage s'élève dans l'air.

Veuillez me suivre je vous prie.  

Le galop des deux sentinelles interrompent alors les gens qui étaient en train de s’égailler tout azimuts. Mine de rien les Phoenixs prennent place parmis la garde affectée aux Hauts-Prêtres d'Elda, se plaçant entre ces derniers et la poussière s'élevant de la porte Nord.  Varg, fidèle chien-ours, se place d’instinct devant Ranaghar et Viconia qui, droite et altière, plisse les yeux pour essayer de savoir ce qui se passe.

Oh, un messager de Sol'Dorn? Non, un prêtre de Kiran de Sol'Dorn… Et salement amoché avec ça… Et ce qu'il dit… Appelant la miséricorde de la Voilée.

La Gardienne nous pardonne. Pitié. Nous combattrons…. La Gardienne nous pardonne. Pitié. Nous combattrons… La Gardienne nous pardonne. Pitié. Nous combattrons...  

Les oreilles de Viconia se couchent subitement, repoussant et laissant tomber sa capuche de cérémonie. La mélodie du messager, lancinante et répétitive trahit un état de choc, souligné par les propos qu'ils répète inlassablement comme une boite à musique remontée à fond. Elle s'avance en apparence tranquillement, se détachant du groupe doucement. Elle ordonne à son protecteur canin qui fait mine de la suivre de rester en place d’un claquement de langue.

 De couchées, les oreilles de la daedhelle frémissent avant de prendre une position d'écoute intense. La jeune drow écoute distraitement le rapport de la guerrière, se demandant plutôt ce qui a bien pu causer de telles blessures. Elle n'est pas experte, loin de là de ce genre de situation, mais bon… Pour ce qui est des fractures de l'esprit, elle a de l'avance et une sensation d’urgence monte en elle. Continuant d'avancer, attentive, elle tend sa volontée, arpentant la mélodie du prêtre de Sol'Dorn sans y toucher. En jouant sur les bonnes notes, elle pourrait le débloquer, savoir ce qui est arrivé. Pour perturber un Sombre de la sorte, ca ne doit pas être de la rigolade.  Il faut avancer avec précaution mais avec célérité, chaque seconde peut compter.

Son avancée change, se fait féline, gracieuse tandis qu’elle initie  le contact. La thaumaturge s’arrête à trois pas seulement du blessé. Balançant doucementdes hanches.

« Descendez, posez le au sol, reculez! »  

Et tandis qu’ils obéissent, une main s’élève dans les airs gracieusement tandis que, avec des ondulations reptiliennes autant de corps que d’esprit, la triumvir instille des ondes de calme chez le traumatisé. Tout en tendant ses énergies pour se saisir de ses souvenirs récents, les remontant tel un fil d’Ariane pour trouver ceux qui leur seront utiles.

Si elle avait vu ce que Kerath a l’intention de faire, Viconia aurait agit différemment, cependant elle lui tourne le dos et est plutôt concentrée sur le prêtre au sol.

Sur une musique qu’elle est seule à entendre l’Enchanteresse danse.

Parmi les prêtres de Kiran du second ost, l'une faisait profil bas. En effet, de par son rattachement à l'escouade de commandement du second Ost, elle devait bientôt battre la campagne. Ce n'est pas qu'elle ne voulait pas y aller, mais elle compatissait pour ceux qui devait rester au camp.
La prière collective avait toujours un peu quelque chose de captivant, d'euphorisant. Voir ainsi les daedhels quels qu'ils soient, du plus simple soldat au plus puissant des Triumvirs communiant ensemble, et honorant les dieux,  faisait parti des expériences que la prêtresse aimait vivre. Elle en ressortait galvaniser.
Alors que les dévotions étaient finis, Na'ri resta encore un peu pour finir les siennes. Elle avait encore quelques prières à formuler. Deux autres prêtres également habillés de pied en cape, l'attendaient en discutant pour qu'ensemble, ils rejoignissent la délégation. Ils n'étaient pas encore en retard : Kerath était encore là avec des dignitaires.

Enfin, ils se mirent en route quand ils virent passer deux cavaliers avec un sombre mal en point.
- " Il est mal en point… Faut prévenir pour que quelqu'un s'en charge au temple. Na'ri grimaça.
- Sa tête ne me dit pas grand-chose… Tu sais qui ça peut être ?
- Pas la moindre idée. Je vais voir ce qui peut être fait. A ces mots, le prêtre partit à la recherche de civière et de renfort pour ce pauvre hère.
- Fait vite. Je doute que l'Obok Sender t'attende… " Mais déjà la robe noire flottait dans le vent du matin.

En bon curieux, les corbeaux avaient ralentit le pas, tout en se tenant à une distance suffisamment respectable pour qu'ils ne puissent pas entendre les échanges. Ils étaient derrière Murrpau, quand ils virent avec effrois leur Obock Senger se saisir de son épée.

- " Non ! "

La prêtresse s'élança en courant vers le colosse. Mais trop tard… Elle ne pu que constater que la lame avait créé une auréole rouge autour du visage et l'abominable sourire du funeste prêtre. Sans plus réfléchir, Na'ri se jeta à terre, n'ayant aucune pitié pour ses genoux. Bien qu'elle n'eut que peu d'espoir pour cette pauvre hère, elle tenta quand même, dessinant des courbes sur la peau cloquée de ce qui fut un temps une joue.

- "Il est mort" lâcha t'elle d'une voix atone.

Comment avait il pu en être autrement ? Pourtant, elle continua de tisser son sort.

A quelque pas, le second prêtre s'était accroupi auprès de la Triumvir Viconia tandis que quatre gardes de l'insigne des Phénix s'y déployait, vigilants.

Le Maître du jeu s'adressant à Viconia... Dans l'esprit de l'homme, tu trouves la douleur de ses muscles. Ce qu'il te semble être des kilomètres et des kilomètres de terre plate et poussiéreuse sous tes pieds. La fatigue de tes muscles raides te fait trébucher sur du vide.

Tu remontes, de souvenir en souvenir, jusqu'à un froid mordant. La terreur te glace jusqu'à la moelle des os.

- Cours ! " rugit une voix vieillie. Un timbres oppressant. Cet ordre simple actionne tes jambes et te fais courir plus vite sur un pavé de pierre. Toujours plus vite.

Lorsque l'épée s'abat une première fois sur l'homme que tu inspectes, un hoquet agite son corps malmené. Un ultime hoquet. Enfoncée dans cet esprit brisé tu te sens happée par la nuit. Le paysage se fissure et craque. La douleur submerge tout le reste. Toutes les émotions. Toutes les pensées. Toutes ? Hélas, non. Il n'en reste qu'une. Une peur plus atroce que n'importe quelle douleur. Une peur qui se mêle à l'esprit de la téméraire triumvir que tu es. Entrer dans l'esprit d'un mourant et en état de choc est risqué. Cette peur viscérale te touche et se traduit par un hurlement. Mental ou physique ? Seuls les spectateurs peuvent en avoir la certitude.

Pas les P'leiks.

Cette certitude de les mériter, ce refus de les rejoindre. Le mourant s'accroche de toutes ses forces à toi. Tu étouffe. Il t'entraine avec lui dans l'après vie. Si tu ne parviens pas à lui faire lâcher prise, tu risques gros.

Pas les P'leiks.

Le visage d'une enfant aux grands yeux rouges et au sourire fier. Ses cheveux blonds comme les blés luisent sous la lumière du soleil. Elle se tient droite, la poitrine bombée. Aucune larme ne marque ses joues. Une fierté immense et un amour indicible t'emplissent le cœur et la Flamme. Le bras de la fillette est couvert de sang. Quelques symboles à vif y ont été gravés à la pointe d'un couteau. Un hommage rendu à Kiel. Son tout premier.

Sa fille.

Ces bras si fins, poisseux de sang, entourent tes épaules solides.

Ta fille.

Une peur d'autant plus grande. Une douleur d'autant plus grande. Et une raison de plus de te débattre.

Pas les P'leiks.

La mage que tu es parvient enfin à faire lâcher prise à l'homme qui se noie. Quelque chose de fort et vibrant glisse sur toi pour disparaitre. La porte te claque au nez. Tu reprend une inspiration désespérée après plusieurs secondes d'une immobilité totale. Tu viens de sentir le souffle de Teiweon sur ta nuque. La douceur de son Voile sur ton visage. Et la peur du cadavre près de toi est désormais tienne, tout comme ses derniers souvenirs.

Tu te sens légère. Ta tête tourne un peu. Aucune douleur physique mais tes mouvements manque cruellement de précision, comme si tu était plus soudain plus grande que d'habitude. Durant les prochaines minutes tu auras du mal à trouver tes mots et tu ne pourras t'empêcher de parler de toi au masculin.

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Le Maître du Jeu s'adressant à l'assemblée... Au moment ou l'épée s'est abattue, Viconia est tombée, comme foudroyée. Elle est restée inconsciente quelques secondes, le cœur arrêter, avant de reprendre conscience. Vous pouvez tout à fait vous êtes approcher et vous occuper d'elle. Si personne ne l'en empêche, un prêtre de Kiran se penche le plus rapidement possible sur elle pour s'assurer qu'elle va bien et lui rendre un peu d'énergie pour palier à la perte qu'elle vient de subir, lui évitant d'être comateuse.

De son côté, le messager est bel et bien mort. Ses muscles restent tétanisés en position fœtale. Son sang coule doucement sur le sol. Na'ri est à son chevet, Viconia étendue assez proche et Kerath le surplombe, sa carrure créant un paravent entre le petit groupe et le cadavre.

Je ne me sens pas très suivi, au début, mais ce n’est pas très grave, alors que volontairement je suis lent, volontairement je m’appuie beaucoup trop sur ce bâton à chaque pas, volontairement je vais vers le monde plus lentement qu’il ne vient vers moi. Les deux cavaliers semblent être ce monde, et j’attends qu’ils passent à mes côtés pour me figer, et éventuellement me retourner. Si je ne poursuis pas ma route et que je pense cette interruption digne de mon attention, c’est parce que parmi les pas des montures j’ai entendu les mots du déformé, ou au moins un. Tant que personne n’en sait plus l’affaire est religieuse, et que ce soit pour surveiller des faiblesses de la Gardienne ou pour l’aider à surmonter des épreuves, Tesso se doit d’être là et d’écouter. Le pas est plus rapide quand je reviens vers le groupe de hauts-placés, le martellement du bâton plus fréquent, et j’arrive à leur niveau pour voir Kerath dégainer une arme.

Par réflexe plus qu’autre chose, un réflexe que je pensais avoir oublié, un réflexe cyclique, je me glisse près de Krish Al’Serat.

Je regarde de là la violence de l’Obok Senger se déchaîner sur le cou du malheureux fou sans sourciller. Je sais qu’il n’est pas qu’une vulgaire brute, malgré tous ses efforts pour m’en convaincre, et je suis curieux à cet instant, curieux de ses motivations, curieux de ce qui l’a fait prendre une décision aussi rapide, plus que je n’étais curieux de ce que la Triumvir avait pu voir dans cet esprit d’un drow dont la mort semblait avoir eu raison de sa volonté alors qu’elle tombait au sol. Mon attention toute portée sur Kerath, je continue de théoriser alors que mon regard suit la tête du nouvellement macchabée. Entre son aspect et celui de sa main… une maladie magique ? Un risque pour nous tous dont le colosse veut nous prémunir, et c’est pour ça que le heaume était nécessaire alors que le sang ne pouvait que gicler, pour ça qu’il a fait éloigner les plus proches ?

Je théorise mais ne pose pas de question, je suis aussi curieux de ses réponses que de qui ira poser les premières questions, et comment.

Dans tous les cas, que l’expédition vers le camp ouest ait lieu ou non, que des réponses soient données à cet instant là ou non, il suffirait qu’on me laisse seul un instant et tes yeux et tes oreilles iraient enquêter sur une maladie mystérieuse, à moins qu’ils n’aient déjà entendu quelque chose. Il reste le fait que le tombé a été présenté comme un messager de Sol’Dorn, et je pense à une tentative de destruction de notre camp par l’intérieur, alors que ma main vient s’élever jusqu’à mon menton et que je deviens particulièrement pensif. Toi, tu n’as toujours rien dit, et ton silence ne m’aide pas à oublier qui j’étais, alors que devant moi, l’épaule de Krish Al’Serat semble me protéger de quelque chose que je n’ai toujours pas compris en s’attendant sûrement à ce que je le fasse. Un instant où je me perds, un instant que tu n’interromps pas.

Lorsque le cahot des sabots s'approche, Dyvir se place discrètement dans l'ombre de celle qu'elle accompagne. Les Repentis sont tous dans les Seigneuries, offrant leur tribu à Uriz et la garde d'ébène est dans le camp depuis moins d'un jour. Pour ne pas créer de vide durant la transition, la Garde Silencieuse à été désignée volontaire par la Triumvir en personne. Un choix qui avait étonné certains étant donné la méfiance affichée avec laquelle elle considérait la Doth'Ka depuis toujours.

Plutôt à l'arrière du petit groupe par rapport à l'arrivée des coursiers, elle avait tout juste plisser les yeux et écouté le rapport. Ça n'a pas de sens. Aucune des initiatives de la Doth'Ka n'aurait du donner un chamboulement suffisant dans le culte de Kiran pour qu'un de ses prêtres en arrive à de telles extrémités... Ou alors la situation avait dangereusement déparée ces derniers jours. Une ruse ? Peut-être. Son sang bouillonne à cette idée. Ils en sont arrivé à ce point ? Si c'est le cas, ils se démènent vraiment jusqu'au bout et c'est un plaisir de voir ce qu'ils ont encore inventer...

La lame se lève.

L'eldéenne frémit soudain dans le flot de ses pensées.

Un cri. Un refus. Ses oreilles se dressent. Elle se tourne d'instinct vers l'origine du bruit sans perdre de vue la trajectoire de la lourde lame.

Avant qu'elle n'ait pu esquisser plus qu'un vague geste, le tranchant s'abat. Le bruit métallique contre le sol de terre la fait grincer des dents. Ce grand imbécile prend aussi soin de ses armes que Murrpau pourrait le faire ! C'est encore un miracle que son rat volant n'ait pas fait de trou dedans en crachant dessus. Mais plus pressant que sa compassion pour l'épée mal équilibrée qui vient de heurter la terre avec la puissant d'un marteau sur une enclume, c'est le cri que Viconia qui la fait frémir.

Un pas réflexe la porte à s'approcher de sa consœur dont la magnifique cape et les cheveux piqués de diamants gisent à présent dans la poussière, mais l'approche miraculeusement rapide d'un prêtre de Kiran l'en dissuade. Une autre, une prêtresse du IInd Ost lui semble-t-il, est courbée sur le messager annonçant officiellement une mort dont tous pouvaient déjà se douter. Elle se tourne vers le Haut-Prêtre de Teiweon pour lui demander de saisir la Flamme du malheureux avant que celle-ci ne soit définitivement ramenée dans le monde des morts... Mais sa première inspiration n'arrive même pas à son terme. Elle ne peut pas.

Plus calme, elle pose de nouveau le regard sur le corps étendu là. Bafouer la Flamme d'un traitre pour assurer la sécurité des eldéens est une chose déjà répugnante. Mais elle aurait été capable de la demander, quitte à le payer d'une livre de chair à la Voilée et au Père. Mais bafouer la Flamme d'un prêtre, même séparatiste, n'était pas envisageable. Cela ne devait pas être envisageable.

Le poing de la Triumvir s'abattit sur son cœur dans un son de bouclier encaissant un coup, à cause de son corset métallique. D'une voix soudain respectueuse, ce ton si différent de son naturel joueur qu'elle utilisait lors des offices, elle laissa tomber deux phrases traditionnelles.

- Xal lil' S'argt mrimm dos kissa::
Puisse la Gardienne te guider sans heurt.
Xal lil' Ilharn kyorl dosst seke z'ress::
Puisse le Père juger de ta vrai force. "

Deux secondes de silences s'écoulèrent pour la Triumvir avant qu'elle ne se tourne discrètement vers Ssol'riss sans quitter des yeux le cadavre et la scène qui se jouait autour.

- Tu as connaissance de quelque chose ? " lui souffla-t-elle laconiquement pour qu'il n'ai qu'un mot à dire ou qu'un hochement de tête à faire s'il ne voulait pas en parler devant tous.

Quel bordel !

On est chez les eldéens, certes, mais quand même ! Pour ne pas en ajouter et ne pas prendre le moindre risque parce qu’on sait jamais, le Façonneur ne pipe mot, pas un son ! Il observe… Les corps en mouvement autant que l’agitation de la Trame. Il observe, en se gardant bien la moindre intervention, en se gardant bien de la moindre intrusion. Il observe, tout en incitant discrètement son gobelin à se dissimuler à la vue de ses brutes, derrière son large manteau.

Il observe l’attitude de Viconia et sa fouille de l’esprit tourmenté, comme un spectateur de l’autre côté de la rive, il voit, ou plutôt devine, discrètement, subtilement, dans un fourré ce qui s’y joue. Alors oui, il se retient, il s’y serait bien mêlé, mais non… Reste à distance, ça vaut mieux… Les caractères étranges sont mal accueillis. Il reste à distance même quand il voit venir le coup… Il aurait pu arracher Viconia à sa recherche avant qu’il ne soit trop tard, lui offrir une rupture plus douce mais comment l’aurait-elle reçu ? C’est que les mages apprécient peu ceux qui peuvent ainsi se mêler de leurs histoires. Alors non, il s’abstient, se retient… Il s’interroge.

Le comportement de ce prêtre a-t-il à voir avec la raison de sa venue ? Cette curiosité découverte qui serait là, quelque part dans Sol’Dorn, inconnue, incomprise mais dangereuse peut-elle être en cause ?
Bon, dans les faits, y a mille explications plus simples… D’abord parce qu’il ignore ce que font les eldéens à Sol’Dorn, mais ça ne doit certainement pas se résumer à une merguez-party sous les murs, ça non. Il les connait un peu, les lascars, et si ça ne bombarde pas à l’arme de siège, nul doute qu’une partie se joue dans l’ombre. Donc voilà, entre le siège et les sales coups qui se trament, entre Elda et Sol’Dorn, mais aussi entre eldéen, tient ! Et si cette exécution sommaire et précipitée, ce n’était pas une façon d’effacer complètement les traces ? Bref, on n’a pas besoin d’un phénomène magique inconnu… Mais bon… Aucun moyen d’en être certain, et ce n’est pas sur un cadavre fraîchement décapité qu’il trouvera les traces d’un sort.

C’est après un petit moment qu’il sort de son silence, s’approchant de Viconia en lui posant la main sur l’épaule, l’attitude ne suggérant aucune intention malveillante, non sans attiser la vigilance des escortes, qui l’empêche de faire complètement preuve de bienveillance à l’égard d’une « collègue » par la proposition de quelques breuvages, remontants pour mages éprouvés mais qu’un de ces imbéciles pourraient soupçonner d’être une espèce de poison.
N’empêche qu’il s’approche et offre malgré tout un geste de réconfort, le bougre.

« Est-ce que tu peux me montrer cette tente ? Après ça, j’en ai davantage besoin. Qu’importe la façon dont on jugera la faiblesse apparente du façonneur à la vue d’un décapité, d’une part parce qu’il s’en fout, d’autre part parce qu’il ne fait pas ça juste pour lui. Aussi ajoute t-il plus bas à la seule discrétion de Viconia, sur un ton neutre, comme plus indifférent au spectacle qu’il ne le parait. T’as besoin d’un remontant et tu tireras plus rien de lui. » Tout en jetant un coup d’œil au cadavre sans vie.

Non, c’est un cri qu’il a entendu poussé de nombreuses fois, dans bien des circonstances, parfois il en était la source, mais le plus souvent ça lui était adressé et cette fois ne fit pas exception. Alors certes il avait l’habitude de l’entendre sur un champ de bataille, le plus souvent il s’agissait de la réaction d’un proche de la victime qui assistait à la scène ou qui venait de regarder, le temps que la personne en question réalise ce qui venait de se passer. Ce cri du cœur, aussi inutile qu’il pouvait paraître, avait pourtant déjà au moins sauvé quelqu’un. En effet Kerath, en bon soldat discipliné qu’il était, se tendait et tentait de suspendre son geste, par habitude plus qu’autre chose. Mais là ça ne fut pas possible, le temps que l’information remonte au cerveau du guerrier le coup était déjà presque arrivé à terme, retenir une épée n’était déjà pas chose aisée mais lorsque le poignet était verrouillé c’était impossible ; sans compter le fait qu’il s’agissait d’un espadon, bien que Kerath s’en servait comme d’une épée bâtarde, et que même s’il avait eu les réflexes nécessaires il n’aurait pas pu empêcher l’arme de s’abattre.

Alors il resta immobile, une statue d’acier rouge figée dans la position qui fut fatale au prêtre. Le sang dudit prêtre se dépêcha de remplir le sillon creusé par la lame et il se rependit, formant une flaque autour de la tête, imbibant les vêtements et la terre. Puis le cri cessa de résonner dans son heaume et la statue colossale reprit vie, en prenant appui sur le cadavre via son pied il tira d’un coup sec pour déloger son épée, aussi bien du corps que de la terre ; ce qui provoqua une brève effusion de sang ainsi qu’un son de déchirement désagréable mais Kerath n’était pas vraiment à ça près. Lorsque Na’ri confirma que le prêtre était bel et bien mort, au cas où quelqu’un en doutait encore, le général se baissa pour déchira un bout de la robe sacerdotale et s’en servit pour nettoyer sa lame avant de la rengainer.

« Xal lil' Ilharn kyorl dosst seke z'ress. » Répéta-t-il après la triumvir après quoi il se tourna vers Na’ri, hésitant à dire quelque chose il se ravisa puis recula, il avait une expédition à mener et en voyant le cadavre entre les mains du clergé des Jumelles tout cela ne relevait plus de son champ de compétence.

Le sable… Du sable et un ciel… Camaieu de gris… un gris sans couleur et sans saveur. Dans ce gris, une drow s'avance, grande, vêtue d'une robe grise informe, se faisant et se défaisant au fil de son avancée. Elle risque gros, elle le sait. La jeune drow par contre suit son intuition les jambes raides, trébuchant parfois dans le sable carrément. Des bras aux orteils, ses muscles protestent. En temps normal, elle prendrait le temps de le soulager temporairement, mais l'urgence la fait continuer son chemin, se contentant d'émettre des ondes de calme. Les fenêtres des souvenirs s'offrent mais elle ne fait que prendre la porte de un pour mieux se retrouver dans l'autre. Le repoussant sans délicatesse contrairement à son habitude pour se ménager une retraite facile.

Un vrai travail de boucher comme elle les déteste tant. Mais Viconia n'a pas le temps… Et encore moins de temps qu'elle pense. Si elle avait su que dans un camp militaire on occit les traumatisés sans poser de question, elle auait agit autrement… Mais elle n'a pas le temps d'y voir. Elle continue son avancée, se rapprochant d'un point crucial.

Sa danse s'est faite imperceptiblement hésitante… La terreur pure. Viconia hésite un moment… Il serait si simple de reculer et de sortir. Est ce que Krish reculerait, elle? Jamais! Se redressant, droite et altière, Viconia franchit le Seuil… Et encore, la Terreur pure lui tombe dessus à bras raccourcit.  

- Cours ! " rugit une voix vieillie. Un timbres oppressant.

Instinctivement, pressentant sa destruction, la drow tourne les talons et se met à courir, de toutes ses jambes, le pavé de plus en plus froid sous ses pieds… Elle remonte le long du souvenir, oubliant de regarder ce qu'elle fuit, suivant la silhouette du prêtre qui fuit quelque chose… Mais Viconia a la certitude que si elle s'arrête de courir, elle aussi y passera… Aussi talonne t'elle l'esprit du prêtre qui reste inconscient de sa présence.

Un froid, une brûlure, une lame… Une coupure… Un souffle coupé, Une Flamme coupée tel un des épis de blés de l'esclave Grayle sous sa faux lorsqu'il était plus jeune… Un hoquet. Le noir tombe sur le gris, le dallage se dissout proprement sous ses pieds… Elle sent des mains la tirer vers le bas. Se débattant, Viconia s'efforce de ne pas paniquer… Voyons.. Mais c'est effrayant, ces mains qui s'enfoncent en elle… Cette peur qui suinte de cette empoignade… Non, elle est trop près de l'esprit de l'homme… Non… Ca fait mal… Non… Il a peur, il a mal… Tellement mal… Mais par dessus cette peut, il y a la Peur... et par dessus cette Peur… La Terreur revient et la happe de plein fouet, balayant tout. Echo de la psychée du prêtre.

Elle n'a même pas l'espace pour penser, la Terreur envahit tout.  

Pas les P'leiks.

L'arcaniste n'a pas à rougir, ni à avoir honte. Elle s'est toujours battu comme une démone. Si elle finit dans les Pleiks, et bien, elle y finira la tête haute, comme tout le reste Mais hors de question qu'elle y aille sans combattre, ça non. Viconia se sent aspirée par le bas, trainée par le mourant qui continue d'entrer en elle de la plus ignoble des façons. Tout son être se révulse. Avec un hurlement de colère, l'Enchanteresse pousse et pousse encore, ses propres mains pâlissantes agrippant et déchiquetant l'esprit de l'individu qui s'accroche désespérément…  

Avec une méthodologie confinant à l'obsession, mais impossible à décrire ici, Viconia défait les liens qui la relie au prêtre. Un à un, note par note. Le plus rapidement qu'elle ose et même prenant de risques inconsidérés.

Pas les P'leiks.

Se tournant, elle se sent plus massive, plus petite… Son visage s'éclaire d'un grand sourire en la voyant, elle et son sourire fier, ses cheveux blonds comme ceux de sa mère, luisant au soleil étincelant de cette magnifique journée. Droite, sa frêle poitrine bombée de fiertée, de l'amour envahit la poitrine de Viconia. Tendant des bras musculeux, elle se porte au devant de l'enfant qui courts vers lui pour lui montrer sa toute première ode à Kiel. Ensemble le père et la fillette s'asseyent pour contempler avec amour les symboles à vifs.

Sa fille.

Alors, la fillette lui enserre le coude ses bras graciles, tachant ton cou d'un peu de sang et tu ris… Tu ris tendrement, avant de frotter le bout de ton nez sur le sien. Les bras entourent tes épaules avec confiance tandis que tu lui rend son étreinte…

Ta fille

Le ciel s'assombrit, la fillette te coule entre les doigts… Où est-elle? Non… tu ne dois pas la perdre… Tu la cherche, amis elle n'est plus là… Une douleur indicible étreint alors ton coeur de père. Un cri de rage traverse l'espace de ton esprit en pleine déliquescence… Non… Pas elle, elle ne mérite pas ça. Elle n'a même pas eu l'occasion de vivre encore. Tes muscles se tétanisent, ton thorax, ta poitrine se fait de plus en plus douloureux, respirer devient de plus en plus difficile. Tu coule, mais ta fille… Elle ne mérite pas ça! Tu en appelle à tout ceux qui pourraient t'entendre. Puisse Teiweon te pardonner…

Pas les P'leiks.

Il faut combattre…

La dernière note de la partition de l'homme est arrachée, dissoute dans la conscience qui n'est plus qu'un fin écho. Dans un dernier appel, il glisse sur Viconia qui tremble de tout son esprit. Il résiste, mais tout juste. Alors peut il enfin se sentir ramenée vers la porte de sortie… Vers son corp... Dans lequel il reprend place abruptement. Elle se sent soudainement coincée comme dans un étau, allongée, étirée, allégée… Les dernières traces de douleur pulsent en lui avant de s'évanouir partiellement. Sa tête, d'ordinairement si bien rangée, est devenue un fouilli total.

Une inspiration longue, douloureuse… La Voilée n'a pas jugée ton heure venue… Qui est tu? C'est une étrange question… Où est ta fille? Ta fille? Non tu n'as pas de Fille mon grand. Tu as un fils… .

Toi, Fils X'Ianxin? Tu n'a jamais eu peur à ce point… Tu essaye de ramener ta main à toi pour te frotter la barbe, mais tu réussit juste à te meurtrir les lèvres. Le souffle de Teiweon a passé sur ta nuque… tandis que son Voile a caressé ton visage en une… bénédiction? Tu veux bien le croire... Ceux qui ont une deuxième chances sont rares… Techniquement, avec ce désastre, tu aurais dû y passer. Tu le sais pertinemment…  Putain, tu as plus de vies qu'un chat…. tu en est rendu à la combientième? Mais d'ailleurs, que s'est t'il passé exactement?

Tes yeux s'ouvrent, s'ouvrent sur le prêtre de Kiran qui te surplombe… Pendant un instant, tu pense y voir Na'Ri… Tu aurait tellement aimé voir la figure abîmée mais rassurante de la prêtresse. Celle qui a mis le moucheron au monde et qui t'a sauvé la vie… Une autre de tes vies… Es-tu au Nid? Non… Tes yeux se posent sur les silhouettes rassurantes autour de toi. Ca tourne et ça tangue… Un infime instant, tu ferme les yeux. Ton sort a tourné à la catastrophe… Mais au moins tu as des informations importantes qui pourraient être utiles.

Tu ouvre la bouche avant de la refermer, pour te redresser, appuyé sur le prêtre. A ton habitude, tu regarde qui te porte assistance et tu grave son visage dans ta mémoire. Tranquillement, te sentant léger, tu tourne la tête pour y découvrir d'abord que tes gardes ont fait leur boulot conformément aux ordres, et ensuite Mortath.

Est-ce que tu peux me montrer cette tente ? Après ça, j’en ai davantage besoin.

Tu plisse les yeux en essayant de comprendre ce qu'il te dit. Il baisse le ton et murmure.

T’as besoin d’un remontant et tu tireras plus rien de lui. »

une pensée fugace te disant que beaucoup d'Eldéens devraient en prendre de la graine. Désintéressé ou non, son acte est un véritable camouflet aux Sombres dignitaires présents.  Tu aurais tant à dire… Mais les mots se refusent à traverser tes lèvres. Tu les cherches.

-… Non… Pas … temps… Besoin… toi…  

L'émeraude rougeoyant de tes prunelles luisent de milles feux, plus  tandis que tu les plonges dans celles de Ranaghar . Tu as quelque chose d'important à dire et ca presse… Ranaghar te cache par son corp, la profanation de la dépouille par Kerath, ce sacrilège ne devrait même pas  se produire. Ce sombre ne méritait pas un tel sort... Il voulait nous avertir. Chercher de l'aide... La haute silhouette de l'obok se redresse et se recule, Viconia fronce les sourcils. Tu bute sur les mots mais te force. C'est d'une voix haute et claire, rauque... Que tu les force à sortir.

-Je ne suis.... pas encore... mort!

Tes yeux verts cherchent et trouvent ceux de Krish, que tu fixe avec un air grave un court instant, ton esprit faisant passer par les yeux ce que tes lèvres refusent. Puis un mouvement à la périphérie de ton champ de vision te fait reporter ton attention sur celui qui semble vouloir s'en aller. Ton coeur bat à deux cents à l'heure. Ils faut qu'ils sachent, qu'ils comprennent… La voix de Teiweon. La déesse ne t'a pas encore permis de vivre  sans une bonne raison. Ils DOIVENT savoir… Mais savoir quoi? C'est flou, même pour toi.

On t'aide à te relever, et tu tangue un peu sur tes longues jambes, comme si soudainement tu ne savait pas trop quoi faire de ces échasses. Une main délicate se pose sur le bras de Ranaghar et le serre délicatement en un signe de gratitude tandis que tu lui sourit brièvement avec gentillesse et détermination Tu ne le relâche pas tout de suite cependant, te solidifiant sur tes jambes. Certains y verront un message. D'autres non, et tu t'en fout un peu en fait. Dans ce grand corp que tu maitrise mal, tu te redresse et l'emplit de ton esprit de ta prestance, en une posture régalienne, le menton haut et fier.

La Déesse t'a jugée digne de survivre pour témoigner et pouvoir continuer ton oeuvre, là où tant de tes confrères seraient morts, tu sens tes cheveux te hérisser sous l'énergie qui coule en toi… Tu mérite de vivre… Peu importe ce que les autres puissent bien penser. La Flamme en toi brûle intensément.  Kerath recule, va s'en aller. Tu as la certitude que s'il quitte maintenant, il y aura un deuxième Ost de perdu. Teiweon est en colère… Tu es en colère pour une raison que tu ignore encore et que tu ne veux pas analyser tout de suite par manque de temps. Tu as peur, une frousse… une terreur de la colère des dieux. Terreur que tu canalise et transforme pour aiguiller ta volonté sur le droit chemin. Tu prends cette tereur et la transforme en courage.

Ta voix si policée et mélodieuse en temps normal sonne étrangement, malgré tes hésitations de linguistique, elle est étonnamment ferme et dure. Tu essaye de faire passer  l'urgence de la situation dans le ton plutôt que dans les mots.  Ca donne un ordre étrangement militaire que n'aurait pas renié Urgoll'Ven. Maintenant, tu as un message à délivrer. Tu n'auras pas de repos tant que cela ne sera fait.

-Toi... Tu RESTE ... ICI!

Un peu plus et tu lui dirait au pied mon grand… Bravo, Où sont tes bonnes manières? Etrangement, penser au Haut-Prêtre de Zhak'Bar en cet instant précis te donne de la force et de la détermination. Il aurait trouvé ça marrant... Il se serait carrément foutu de ta gueule oui! Tu te l'imagine d'ailleurs, rigolard… Et ca te fait du bien.  

Sous ses doigts, la prêtresse sentait la peau du visage de son pair calcinée, brûlée. Sous ses doigts, les motifs de son Art prenaient vie. Sous ses doigts le froid de la mort l'envahissait déjà.

La cause du décès ne l'intéressait pas, c'était bien trop simple. Elle aurait pu s'arrêter là. Impuissante devant le fils de l'épée de son Obok. Encore et toujours inopérante. Elle aurait pu relâcher sa magie. Si seulement, il n'y avait pas cette sensation étrange de quelque chose qui n'allait pas. De quelque chose de destructeur.

Sous ses doigts, elle chercha à retracer une histoire. Cependant, l'allée du camp n'était pas confortable, pas adaptée, pas assez chaude, pas assez intimiste. Sous ses doigts, elle n'en savait pas assez, mais déjà trop pour les ignorer.
La sombre sursauta en entendant le bruit si caractéristique du tissus qui se déchire. Instinctivement elle tourna la tête, surprise, mais ce qu'elle y vit ne fut pas à son goût.

Pourquoi ?

Tandis que ses ongles s'enfonçaient dans la chaire de son pouce, la daedhelle sentait le froid remontait en elle. Le froid du mort, le froid du contre coup de sa magie et le froid de sa colère.

Xal lil' S'argt mrimm dos kissa::
Xal lil' Ilharn kyorl dosst seke z'ress::

La voix respectueuse de la Prime Flamme résonna. Ces deux courtes phrases, pleine de sens et de respect fut reprit de part et d'autres dans l'assistance. Na'ri se détendit et se concentra à nouveau sur son patient. Il était encore complètement recroquevillé sur lui-même, alors avant que la dépouille ne se rigidifie et pour que les prêtres de la Voilée puisse l'enlever efficacement, la medecin l'allongea sur le dos, plaçant l'unique main sur le ventre. Ses gestes étaient terriblement efficaces et empreint d’une certaine tendresse. Quand elle arriva au bas de la robe déchirée, elle fit un ourlet pour cacher ce qu'elle considérait comme une marque d'irrespect.  
Enfin, elle défit son turban de jais, et s'en servit comme d'un premier linceul.

Xal lil' S'argt mrimm dos kissa::
Xal lil' Ilharn kyorl dosst seke z'ress::

La prêtresse se releva enfin.
Ses cheveux mi-long ivoirins cascadaient sur ses épaules, une mèche barra le visage déjà recouvert du traditionnel masque noir. Elle n'était pas bien grande, sa robe sombre trop large masquait ses éventuelles rondeurs. A son flanc, elle ne portait qu'une sacoche au ventre rebondit par les remèdes et les pansements. Il n'y avait nul trace d'armes.

Pendant ce temps, la Triumvir X'Ianxin s'était relevée grâce à un sombre inconnu de la médecin. A bien y réfléchir, elle était entourée par beaucoup plus de civils que de guerriers dont seul la moitié lui était connu. Dans ce paysage, elle se sentit de trop, et choisit donc de ne plus bouger mis à part ses oreilles qui oscillaient entre Viconia et Kerath. L'air matinal lui sembla être aussi glacial que son frère.