Une dette envers la DameDieu [Lucrétia]

Favriüs, troisième jour de la première ennéade
An dix-sept du onzième cycle

La promesse que je m’étais faite de garder mon oreille mutilée avait été tenue, et c’était la seule chose qui était restée de ce long moment passé avec Lucrétia. Il n’y avait plus une seule cicatrice, l’ensemble de ma peau était lisse, et seules les séquelles qu’on ne pouvait voir étaient restées. Mais je n’avais pas en tête tout ce qui était négatif en arrivant au dispensaire, je n’avais gardé que le positif, et ce ruban que je n’avais pas noué autour de mon cou, simplement mon poignet. Il était là pour lui faire comprendre que même si beaucoup d’ennéades séparaient nos deux rencontres, rien n’avait disparu. Si je n’avais par contre pas poussé jusqu’à me l’attacher autour du cou c’était parce que je n’étais pas nécessairement prête à m’abandonner à elle. Je voulais juste la revoir. Et puis, je ne m’attendais pas à ce que cet objet soit nécessairement inconnu dans le dispensaire dans lequel je m’étais rendue. La robe que j’arborais était blanche et la même que j’avais portée lors de cette soirée loin à Baaz’Hima, ou une réplique, je ne me souvenais pas de comment celle-ci avait fini.

On m’avait accueillie sans problème, et on m’avait guidée facilement jusqu’au cloître, alors que seule je m’y étais présentée, abandonnant la poignée d’hommes qui m’avaient accompagnés dans une ruelle proche. L’endroit était merveilleux, et comme en beaucoup d’endroits à Thaar la végétation allait parfaitement de paire avec un point d’eau. Ce n’était pas aussi joli que Geresh, et peut-être un peu moins entretenu, mais c’était le genre d’endroit que j’appréciais énormément. Mon regard se perdit dans l’eau, entre quelques plantes qui flottaient à la surface, alors que j’avais initialement prévu de m’adresser à la première novice que je croisais pour lui demander de m’amener à la prêtresse que je cherchais, voire de l’amener à moi. Mon intention était assez simple et cette visite n’était pas qu’une visite de courtoisie, alors que Tadeo m’avait appris comment ce genre de lieux appréciait les dons et qu’ils leur permettaient de fonctionner. Je n’avais pas vraiment de raison de ne pas vouloir que ces dispensaires existent, après tout.

En relevant la tête je posai les yeux sur une prêtresse, j’imaginais, qui ressemblait légèrement à celle que je cherchais, et de qui je semblais avoir à l’instant attiré l’attention. L’illusion de voir là Lucrétia ne tint pas jusque j’ouvre ma bouche et j’eus le temps de ne pas commettre l’erreur que je m’apprêtais à commettre. Elle n’eut pas le temps de me demander ce que je faisais là que je l’appelai en me rapprochant. « Je suis venue voir la prêtresse Lucrétia, je suis une… j’étais une de ses patientes, le mois dernier. » Y avait-il besoin de plus, à part un semblant de politesse ? La réponse était non, mais il fallait quand même que je me rattrape. Décidément, c’était compliqué d’avoir toujours tout bon. « Et bonjour… je suis désolée, mes manières… je m’appelle Aerianna… » J’ajoutai avec un petit rire nerveux, regardant le sol, montrant cette timidité qui n’existait pas nécessairement, mais qui semblait être attachante.

La tenue, minus les boucles d'oreilles et le truc sur la tête:

La jeune Amélie se retourna vers la nouvelle venue et la regarda d’un air soupçonneux. Cette femme était beaucoup trop bien habillée pour être une simple roturière et elle lui rappelait vaguement quelqu’un … Et elle était véritablement mignonne ! Encore une rivale potentielle dans sa recherche du prince charmant ! En bonne estreventienne, Amélie se flattait de connaître la moitié de Thaar au moins de vue et bizarrement, le visage de cette dame lui était à la fois familier et la mention du nom Aerianna ne faisait que renforcer cette idée. Toujours à la recherche de nouveaux amis malgré la pointe de jalousie, la jeune novice tendit la main à la dénommée Aerianna et la salua avec plaisir.

« Bienvenue au dispensaire Aerianna. Je suis Amélie, l’une des novices du temple. Ne vous inquiétez pas, je ne me formalise pas pour les formules de politesse. »

Elle croisa les mains et sourit à la jeune femme. Elle avait commis un tout petit impair. Rien de grave ceci dit, mais elle se devait de la corriger gentiment.

« La HAUTE-prêtresse Lucrétia est disponible, je vais vous amener à elle. Désolé de vous corriger Aerianna, mais ici, Lucrétia est notre haute-prêtresse, pas notre prêtresse. Suivez-moi je vous prie. »

La novice, toute guillerette, ouvrit la marche et traça son chemin dans le complexe du dispensaire. Le dispensaire s’agrandissait et Lucrétia avait déménagé dans une nouvelle aile du dispensaire, plus à l’écart du bruit et du monde. C’était certes, plus loin que ses précédents appartements, mais la haute-prêtresse avait récemment réclamé plus de tranquillité. En en discutant avec Tiphaine, Amélie avait appris que la haute-prêtresse était très fatiguée et qu’elle avait besoin de calme et de repos. Si ces derniers temps, sa santé s’était très nettement améliorée, Amélie avait remarqué qu’elle déléguait de plus en plus de tâches aux novices. C’était bon signe pour Amélie et Tiphaine … cela voulait dire que non seulement elle leur faisait confiance, mais que probablement, elles seraient bientôt prêtresses elles-mêmes. Enfin … ce devait certainement être différent pour Tiphaine vu qu’elle venait de la Péninsule …

Amélie dirigea Aerianna vers les quartiers nord, dans lesquels résidait Lucrétia. Elle occupait désormais un étage situé au dernier étage du dispensaire. Amélie avait pu jeter un coup d’œil à ses appartements : avec leurs grandes vitres s’ouvrant sur les balcons verdoyants, les appartements donnaient une vue imprenable sur la mer et sur la ville. Tout avait été aménagé avec simplicité et l’espace restait assez grand pour que la haute-prêtresse puisse aussi bien travailler que dormir ou méditer. En somme, c’était beaucoup plus grand que ses anciens appartements. Amélie était quelque peu jalouse, mais elle avait pu récupérer l’ancien bureau de la haute-prêtresse pour y loger, ce qui était beaucoup plus grand que la chambre qu’elle partageait tantôt avec Tiphaine.

« Dites-moi … Votre visage m’est familier. Ne nous serions-nous pas déjà vus quelque part ? »

La question posée par la novice était totalement innocente. Elle ne pouvait se départir de cette impression de déjà-vu. Néanmoins, sa question tourna court et elle toqua à la porte des appartements de Lucrétia et ouvrit la porte…

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Depuis quelques jours, Lucrétia se sentait largement mieux. Sa santé était désormais au beau fixe et elle pouvait enfin progressivement reprendre le travail … avec modération bien sûr. Elle reposa la plume d’oie dans l’encrier et plia la missive qu’elle destinait aux membres du temple de Naélis. Une rencontre s’imposait car ils souhaitaient ordonner leurs nouveaux prêtres avec la bénédiction de la haute-prêtresse. Lucrétia avait prévu d’ordonner Amélie à ce moment-là et attendait avec impatience les retours de la Péninsule pour pouvoir ordonner Tiphaine. Les deux jeunes filles attendraient bientôt leur majorité et elles s’étaient montrées d’une compétence rare. Elles méritaient toutes deux de devenir des prêtresses de Néera assermentées. Cela prendrait quelques temps pour pouvoir finaliser les démarches auprès des deux cultes, mais la haute-prêtresse était confiante sur les réponses.

Lucrétia s’était levée tôt aujourd’hui et avait passé de longs moments à inspecter les changements sur son corps. Si sa santé était revenue, les conséquences de l’utilisation du don de la déesse se faisaient encore sentir. Les taches scintillantes sur sa peau perduraient et il semblait à Lucrétia qu’elles changeaient chaque jour de place, faute de s’agrandir. La peau scintillante était de plus en plus sensible et il arrivait que cela la gêne au quotidien. Son œil gauche avait définitivement pris une couleur bleue vive, contrairement au droit, qui restait de couleur olive. Quant à ses cheveux, la situation ne s’était absolument pas améliorée : les mèches dorées comme les blés qu’elle parvenait à dissimuler sous sa chevelure brune il y a quelques semaines étaient désormais trop visibles pour qu’elle puisse les cacher efficacement.

Si elle pouvait facilement expliquer les cheveux, elle restait complexée par sa peau. Afin de ne pas trahir son affliction, Lucrétia avait choisi de porter une de ses robes péninsulaires en soie bleue. Le vêtement couvrait assez efficacement son corps, mais laissait apparaitre la peau de son torse de par l’échancrure du vêtement. De plus, ses mains étant visibles, quelques tâches scintillantes étaient exposées à la lumière du jour. La haute-prêtresse avait pris l’habitude de les mettre dans son dos lorsqu’elle discutait avec quelqu’un, ne voulant pas soulever des questions inutiles sur son état. Elle portait aux pieds des escarpins bleus, attachés au niveau de la cheville par une boucle de cuir bleue avec un fermoir en argent et avait noué ses cheveux en un chignon. Si le chignon laissait transparaitre les épaisses mèches dorées qui prenaient de plus en plus de place dans sa chevelure brune, elle espérait que personne ne pose de questions dessus. La jeune femme portait au cou son focaliseur, le médaillon d’argent serti d’un saphir étoilé, ainsi que deux perles blanches aux oreilles.

Lorsqu’elle entendit toquer à la porte de ses appartements, Lucrétia donna l’autorisation d’entrer à l’invitée. Amélie s’était visiblement retirée pour continuer à travailler puisqu’elle ne suivit pas l’invitée dans ses appartements. Toujours le dos tourné, elle continua de fignoler la lettre et s’adressa à la personne qui venait de franchir le seuil, au milieu des plantes vertes et des meubles.

« Entrez, je suis en train de finir une missive qui doit partir. Je suis à vous dans un instant. »

Lucrétia n’avait aucune idée de ce qui se trouvait derrière elle, mais il lui sembla que la personne s’était approchée. Pas spécialement inquiète, elle écrivit les dernières lignes de la missive et reposa à nouveau la plume dans l’encrier.

La robe de Lucrétia:

Je n’étais pas sûre de pouvoir me concentrer sur Amélie après le petit tremblement de terre qu’elle venait de causer par sa révélation. Comment avais-je fait pour ignorer que Lucrétia était la haute-prêtresse de Néera ? Et le deuxième questionnement qui venait n’était pas beaucoup plus subtil. J’avais fait ça avec la haute-prêtresse de Néera ? Et on disait qu’il fallait aller voir du côté des daedhels pour cette façon de vénérer les dieux ? En tout cas, je ne répondis pas à la novice, pas plus que je ne portai réellement mon attention sur elle pendant tout le temps qu’elle me guidait à travers le dispensaire. Jusqu’à ce qu’elle me pose une question, qu’elle me tire de ma rêverie, et qu’elle disparaisse sans me laisser le temps de lui répondre. Peut-être que je viendrais lui répondre, un peu plus tard, si on m’en laissait l’occasion. Pas parce qu’elle m’intéressait, même si remédier à ce fait n’était pas bien compliqué, juste parce que j’aimais savoir ce que ceux qui me connaissaient sans que je ne les connaisse pensaient de moi.

Mais la porte s’était ouverte, et Amélie s’était complètement évaporée de mes pensées.

J’eus peut-être le temps de douter un instant alors que je voyais beaucoup trop de blond dans cette chevelure, mais la voix ne laissa aucune confusion s’installer. Là, ma résolution de garder le ruban autour de mon poignet explosa en vol. Elle était distraite, et ça me donnait une idée idiote. Je fis quelque pas tout en l’ajustant finalement autour de mon cou, sans m’arrêter, sans parler, en laissant à peine ma présence se dévoiler au fur et à mesure que je m’approchais. J’étais au dessus d’elle quand elle reposa la plume, et à ce moment je savais qu’elle ne m’en voudrait pas d’apparaître, qu’aucune catastrophe ne serait de mon fait. Je me penchai sur son cou, le mordilla un seul instant et susurra quelques mots dans son oreille alors qu’une main passait devant elle en remontant vers son épaule pour l’emprisonner dans une étreinte douce. « Haute-prêtresse Lucrétia ? Aerianna Hiisi m’a envoyée vous chercher, elle souhaiterait vous remercier, je crois. Elle m’a même parlé de dons, mais qui suis-je pour savoir ce qu’elle veut vraiment en faire ? Je ne suis que votre servante, mais elle a eu de la chance de tomber sur moi. »

Et voilà qu’Anna se mettait à parler d’Aerianna, comme si les deux étaient dissociées.

Si Anna était celle qui avait le plus eu l’occasion et le temps de s’amuser avec Lucrétia, ce n’était pas la seule, et je n’avais pas vraiment envie de la faire revenir. Lucrétia non plus ne voulait pas d’Anna, elle me voulait moi, et quelque chose me disait que ce n’était pas uniquement parce qu’il avait été question de don, et pas uniquement parce que sa déesse la voulait avenante. Ses premières réactions étaient de celles que j’avais connues parfois, même si je jouais un rôle qu’on me voyait rarement jouer quand il était question de s’amuser avec une autre femme, et il n’y avait rien que je puisse plus apprécier dans ces conditions là. Ce n’était pas inédit pour autant, et le frémissement alors que je la mordillais, ses bras qui s’activaient et cette relaxation totale qui s’exprima à travers un soupir particulièrement tranquille étaient des délices que je reconnaissais.

Ce qui était nouveau – en plus du rejet d’Anna qui était unique du fait de notre jeu – c’était qu’elle semblait incapable de bouger, qu’elle semblait se faire la plus petite possible, comme si sa première réaction et son premier soupir avaient été des mensonges, comme si elle avait peur de moi, qu’elle attendait que ça passe, que je m’en aille. Ce que j’allais retenir ce n’était pas une éventuelle explication, j’allais simplement retenir le pouvoir que je semblais exercer sur elle. Un instant elle était sérieuse, concentrée sur sa tâche, ne se rendant pas compte que j’existais, l’instant d’après elle restait tétanisée par ma seule présence. Je la caressai un peu, doucement, alors que ses bras avaient cessé de faire de même, et vint lui embrasser le cou à plusieurs reprises, déposant de petits baisers brûlants qui n’avaient pas l’intention de changer le rapport de force, plus de m’y complaire.

Descendant mon regard sur le décolletée de sa poitrine je ne pus qu’apercevoir une tâche comme celles que j’avais vu plusieurs ennéades plus tôt, comme celle qui était visible à cet instant sur sa main, comme celle qui dépassait légèrement de sous son vêtement, à la base de son cou. Aventurière, je laissai ma main descendre à la base de cette longue ouverture, se glisser à l’intérieur, du côté droit, et remonter jusqu’à atteindre ce qu’elle cherchait. « Celle-là, c’est la mienne. » Je dis, doucement, susurrant ces mots doux dans son oreille, alors qu’un sourire illuminait mes traits. J’avais la conviction que la tâche scintillante était là, et si je ne lui demandai pas de me l’exposer, je la caressai doucement à cet endroit là, comme si elle m’appartenait, comme si c’était le segment de son corps sur lequel j’avais tous les droits, renforçant peut-être cette sensation d’avoir un pouvoir grandissant sur sa personne.

J’appréciais énormément l’instant mais il ne pouvait durer une éternité, et je me redressai doucement, forçant contre ces bras qui voulaient me retenir en même temps qu’une main glissait sur sa peau nue pour revenir jusqu’à son cou, et finalement s’échapper. « Lève-toi, s’il te plaît… » Je demandai aussi doucement que précédemment, de peur de la brusquer, même si tout mon être m’en demandait l’autorisation. Et quand elle m’obéit, peu perturbée par la réalisation qu’un de ses yeux avait finalement et intégralement changé de couleur, je n’attendis qu’un instant avant de me blottir contre elle et de simplement l’embrasser. C’était un baiser qui pouvait paraître, imposé, mais il n’y avait dedans que douceur, alors le baiser n’irait pas plus loin que ce qu’elle accepterait. Il était simplement une façon de lui confirmer que tout était encore là, il était simplement une façon de lui confirmer que même dans son propre dispensaire, même quand je n’avais aucune idée de si quelqu’un se tenait dans l’encadrement de la porte ouverte de son bureau, je n’essaierais pas de cacher quoi que ce soit.

Lucrétia ne put que se laisser faire quand elle sentit la main de la Princesse Marchande glisser le long de sa robe de soie et effleurer sa peau jusqu’à atteindre la zone inférieure de son sein droit. Elle laissa involontairement s’échapper un soupir de plaisir. Peut-être n’aurait-elle pas dû ? Mais c’était si délicieux ! La haute-prêtresse avait remarqué que la peau scintillante était beaucoup plus sensible que son teint hâlé, mais elle ne s’attendait pas à cet effet-là, sous la douceur des doigts d’Aerianna.

Les baisers dans son cou diffusaient une chaleur à laquelle elle n’était que peu habituée. Le Dogme n’encourageait pas à ce genre de rapprochements physiques et bien qu’il ne l’interdît pas, il restait désespérément muet sur les questions bassement charnelles. L’amour de la Déesse et l’amour que Lucrétia devait porter en toutes choses, cela, la haute-prêtresse pouvait le théoriser et le disserter en de multiples déclinaisons pendant des heures. Mais quand il s’agissait de sentir le contact d’un autre être humain tel qu’Aerianna, elle n’était pas spécialement plus experte qu’une autre … et peut être plus que novice en la matière.

Les yeux toujours fermés, elle laissa la jeune femme la toucher et réclamer ses droits sur son corps. Un instant, Lucrétia crut que les rôles s’étaient inversés … et pourquoi pas après tout ? Sentir la Princesse s’approprier son épiderme était un délice auquel elle se serait abandonnée tout entière. La marque qu’elle s’appliquait à caresser lui renvoyait de délicieuses vagues de plaisir, mais elle avait eu la gentillesse de ne pas l’exposer en la dénudant. Lucrétia vivait mal cette affliction et elle remercia intérieurement la jeune femme de ne pas l’exposer.

Lorsque la demande d’Aerianna se fit entendre, la jeune femme déplia les jambes et se releva. Il n’était nul besoin de résister, la Princesse Marchande était d’une douceur rare et Lucrétia ne se sentait pas de lui refuser quoi que ce soit. Les yeux toujours fermés, Lucrétia n’eut pas la possibilité de contempler Aerianna. Elle n’eut que le temps d’entrouvrir les yeux que celle-ci, lui jetant un regard furtif, se blottit contre elle et l’embrassait avec une délicatesse incomparable.

Elle ferma les yeux et saisit la Princesse par la taille, posant ses mains sur la ceinture aux feuilles dorées qui maintenaient la robe en place. Le baiser dura quelques secondes. C’était à la fois beaucoup et trop peu. Lucrétia aurait aimé que cela dure plus longtemps, mais la jeune femme n’était peut-être pas là pour ça … si ?

Après quelques instants à se réfréner de céder à la tentation de s’emparer avec fougue du corps d’Aerianna, Lucrétia se sépara de la Princesse tout en prenant ses mains dans les siennes, les tenant avec douceur, comme pour lui signifier qu’elle ne la laisserait pas partir. Il était hors de question qu’elle s’éloigne. Elle la voulait près d’elle …

C’était la première fois qu’elle la voyait complètement et surtout, en bonne santé. C’était une sensation étrange que de ne connaître quelqu’un qu’en position allongée. Une fois debout, elle prenait une toute autre dimension. Elle était plus jeune que la prêtresse certes, mais il y avait chez cet être un charisme qui ne la laissait pas indifférente. Debout sur ses talons, Lucrétia était un peu plus grande qu’Aerianna. Ses longs cheveux noirs tombaient sur ses épaules et ses yeux aussi sombres que la nuit la regardait avec curiosité et envie. Mais surtout … quelle tenue ! Il n’y avait que des gens aussi riches que les Princes Marchands pour pouvoir s’offrir pareilles tenues. Elle était comme un ange, dans sa robe de soie blanche et ses sandales dorées. Les plis de la robe laissaient discrètement se dévoiler ses cuisses blanches et le tissu enrobait sa poitrine tout en la mettant en valeur.

Elle était belle. Elle était en bonne santé. Et elle était là.

Le regard de Lucrétia finit par croiser celui d’Aerianna et la prêtresse se détourna instantanément, honteuse. Elle lâcha ses mains et réajusta le haut de sa robe, espérant que le tissu de soie bleue cacherait ses marques. Son regard se fit fuyant … Si providentielle que soit l’apparition d’Aerianna, Lucrétia ne voulait pas lui montrer les affres de la magie sur ses yeux, sa peau et ses cheveux … mais avait-elle vraiment le choix ? Quelque peu honteuse, elle ne savait pas vraiment sur quel pied danser … Son esprit hésitait entre la joie des retrouvailles et le malaise certain …

« Je … » commença-t-elle avec un trémolo dans sa voix avant de se raviser.

Il y avait quelque chose de différent dans la position que j’occupais, une position plus active, mais aussi plus dominante et de ce fait plus observatrice. Je cherchais des faiblesses, et j’en trouvai beaucoup, alors qu’elle semblait alterner entre l’envie et la peur. Cette dernière émotion prenait tellement le pas qu’elle en était incapable de garder mes mains dans les siennes, même après qu’elle m’ait communiqué qu’elle ne voulait pas que je m’en aille. Elle prenait tellement le pas qu’elle n’osait même plus me regarder dans les yeux. Elle prenait tellement le pas qu’elle cachait sa peau, pour une raison qui allait mettre beaucoup de temps à s’imposer dans mon esprit. Ma première idée était qu’elle se sentait tiraillée entre sa déesse et moi, qu’elle ne pouvait pas avoir à la fois ce qu’on avait eu et à la fois ce qu’elle avait construit ici. Après tout, son culte n’était pas Thaari à l’origine, peut-être que ses règles étaient différentes ? Et puis, le seul pratiquant du culte de Néera que je connaissais était mon père, et il ne voyait pas d’un très bon œil mon train de vie.

C’était idiot, je pensai, avant de finalement comprendre.

Ça n’avait rien à voir, ce n’était pas la question, à aucun moment Néera n’était concernée par ce malaise, cette peur. C’étaient les marques sur son corps, dont j’ignorais l’origine mais que j’avais déjà remarquées quelques instants plus tôt, quand j’étais allé cherché celle qui m’appartenait, celle dont j’avais été témoin de la naissance. Et puis, si les siennes restaient, c’était peut-être un phénomène proche de celui qui teintait de bleu ma peau quand je faisais appel à la magie. C’était la seule piste que j’avais en tout cas, alors que je me demandais si c’était lié à ses cheveux et à son œil qu’elle m’avait empêché de voir. Mais les théories, ça allait trente secondes, c’était ce que j’allais faire qui prenait une toute nouvelle importance. Que j’aie remarqué ses faiblesses ne faisait pas tout, il fallait encore que je décide. Je me rapprochai d’elle une deuxième fois alors qu’elle s’était dégagée, mais je ne m’attaquai pas à elle tout de suite, pas alors que sa voix venait de mourir dans sa gorge.

Sans que mon corps ne touche le sien, mes deux bras passèrent autour de son cou pour rejoindre sa chevelure maintenue en place par un chignon. Je le défis, petit à petit, doucement, et si la tâche n’était pas aisée avec ma débrouillardise quasi-nulle, je finis par laisser les cheveux retomber pour encadrer son visage. Une main se dirigea alors vers sa taille, l’autre vers sa joue, et alors que la première se mit à défaire l’attache de la robe bleue, l’autre se saisissait du menton de la haute-prêtresse pour la forcer à plonger son regard dans le mien. L’œil bleu était aussi joli que l’autre, et même dépareillés je pouvais m’y perdre, ce que je fis donc. Pas assez pour oublier la main affairée, qui, sa tâche remplie, remonta pour se saisir d’une mèche d’or et la maintenir entre nos deux regards. Je voulais la dénuder, en exposant ses faiblesses les unes après les autres, et si mon regard gardait son intensité il avait perdu le désir, remplacé par une émotion toute nouvelle qui cohabitait avec l’assurance que mes gestes étaient parfaitement intentionnels.

« Montre-moi. » La voix était douce mais dénuée de tremblements, et je ne pensais pas que la demande puisse être comprise de travers.

Les cheveux de Lucrétia se déployèrent hors du chignon et tombèrent en cascade sur ses épaules révélant sa crinière brune teintée de larges mèches dorées. Elle ne dit mot quand la jeune femme saisit l’une d’entre elles et la força à soutenir son regard. Lucrétia était désemparée : elle ne pouvait échapper au regard inquisiteur de la Princesse, ni à son emprise sur elle. La haute-prêtresse ne savait quoi penser de cette situation. Non seulement elle se sentait honteuse de n’être qu’une poupée de chiffon entre les mains – maladroite ? – d’Aerianna, uniquement présente pour voir ses afflictions inspectées … et en même temps, le fait de devoir s’abandonner à la Princesse était particulièrement grisant.

Une chose était sûre : elle ne la laisserait pas s’échapper si facilement. Lucrétia était coincée et elle ne pouvait décemment pas renvoyer Aerianna chez elle. Il y avait trop en jeu et elle sentit les larmes monter quand elle fut forcée de soutenir son regard. Fort heureusement, la jeune femme ne fit aucune remarque quand elle vit ses yeux aux couleurs différentes, aussi contint-elle ses larmes. Ne trouvait-elle pas ça étrange ? Repoussant ? Bizarre ?

Elle frissonna quand elle sentit sa main pale sur sa joue. Il y avait à la fois une certaine maladresse et une tendresse dans ce geste qui confirma à la prêtresse qu’elle ne risquait rien en présence de la jeune femme et qu’elle pouvait se confier et s’abandonner à elle. C’est alors qu’elle sentit la pression du tissu sur sa taille se relacher. Elle n’avait pas compris qu’Aerianna s’affairait à défaire les attaches de sa robe, mais son dernier ordre ne laissait aucun doute là-dessus.

« Promets-moi juste de ne pas me rejeter … », murmura-t-elle avec une boule dans la gorge.

Lentement, elle passa sa main sur le haut de sa robe et commença à dénuder son épaule droite jusqu’à retirer complètement le côté droit de la robe, puis continua avec le côté gauche. Le vêtement de soie n’était retenu que sur les hanches de la prêtresse et refusait de tomber sur le sol. Néanmoins, il laissait désormais le haut du corps de Lucrétia sous les yeux d’Aerianna.

Gênée, la jeune femme croisa les bras pour couvrir sa poitrine et laissa entrevoir les nombreuses marques qui mouchetaient sa peau. Le contrecoup de la magie n’avait pas été tendre avec elle et le haut de son corps était perclus de ces scintillements, comme si le haut de son corps avait été éclaboussé par de l’eau. Certaines tâches avaient disparu ces derniers jours : la prêtresse avait réussi à purger son corps des résidus magiques qu’il contenait, mais il restait encore beaucoup de travail et elle n’était pas certaine que sa méthode soit véritablement efficace. Si cela se trouvait, ses efforts n’avaient rien à voir avec la disparition des traces …

« Satisfaite ? … » lacha-t-elle avec une pointe d’amertume et de tristesse dans la voix.

Je m’attendais à une réaction, je ne m’attendais pas le moins du monde à cette réaction.

Elle était attachante et captivante quand elle s’émouvait de cette façon, je ne pouvais le lui retirer, mais je parvenais à ne pas trop me laisser affecter, ou du moins, à ne pas trop le montrer, car cela ne faisait pas partie des responsabilités du rôle que j’avais endossé. Mon rôle me demandait de ne pas répondre à sa demande, de ne pas non plus briser le masque que je gardais, mon rôle me demandait de laisser le doute festoyer dans son esprit. Je ne brisai pas le verrou qui maintenait en place nos deux regards, pas tant qu’elle obéissait à ma demande, pas tant qu’elle se trouvait affairée, car il était un indice que je lui donnais, un indice que je jugeais trop important pour qu’il puisse manquer. Je ne pouvais pas la rejeter, c’était un fait, et c’était peut-être ça que j’essayais de lui montrer, mais ça ne voulait pas dire qu’elle ne pouvait rien craindre de moi, alors que son obéissance me prouvait qu’elle était plus que jamais sous mon emprise.

Satisfaite ? La question était une alerte que je devais prendre au sérieux, forcément, mais elle ne signifiait pas pour autant que je devais m’arrêter dans mon petit jeu, et c’est le moment que je choisis pour briser le contact entre nos deux regards et reporter mon attention au reste, ce qu’elle venait de me dévoiler. Je lâchai également la mèche blonde que je tenais un instant plus tôt entre mes doigts, car j’avais déjà silencieusement commenté ce que je devais en commenter. J’essayai d’adoucir mon regard pour qu’il ne soit pas celui de celle qui s’apprête à acheter une esclave, pour qu’il soit curieux mais rien de plus. En réalité l’effet de scintillement qui n’était pas au goût de la haute-prêtresse était particulièrement agréable à l’œil, et je ne pouvais comprendre ce qui l’inquiétait. Joueuse j’en traçai certains contours distraitement du doigt, consciente de ses réactions, consciente qu’elles étaient exacerbées par le phénomène, consciente que chaque tâche était un point vulnérable qui s’affichait à moi.

Je ne la forçai pas à aller plus loin qu’elle ne le voulait, je ne la forçai pas à découvrir sa poitrine, mais un sourire aussi joueur que l’étaient mes doigts éclaira mon visage alors que mon regard revenait se fixer au sien.

« Oui, je suis satisfaite… »

C’était vrai, mais tout restait assez mystérieux pour qu’elle ne soit pas vraiment avancée, et je laissai traîner ma voix.

Une hésitation vint alors, alors que je commençai à me mordiller à nouveau la lèvre inférieure, car ce qui venait ensuite décidait tout le reste, et que je ne me sentais pas capable de jouer avec elle comme je l’avais fait avec d’autres. Il ne fallait pas que j’aille trop loin, il fallait que je la garde juste là où elle se trouvait, percluse de doutes mais toujours capable de me faire confiance. Et mine de rien, c’était la haute-prêtresse de Néera à qui je faisais tout cet effet. Mon sourire se transforma légèrement, gagnant en gêne, posant une question que j’étais certaine lui avoir déjà traversé l’esprit. « Tu penses que ça va rester longtemps comme ça ? » Une question alors qu’aucun de ses doutes n’avait réellement été levé, alors que ma promesse n’était jamais venue, c’était un peu exagéré, mais c’était amusant, alors que ma main était remontée vers ses épaules pour caresser une plaque scintillante.

La haute-prêtresse fait la moue. L’absence de promesse et la réponse « satisfaite » d’Aerianna n’étaient pas ce qu’elle attendait, mais elle saurait s’en contenter. A mesure que la jeune femme jouait avec sa peau, Lucrétia ne pouvait que se laisser-faire sans dire un mot … mais chaque délicatesse des doigts d’Aerianna sur les surfaces de peau sensibles étaient des épreuves de plus à endurer. Elle devait garder sa contenance, éviter de lui sauter dessus et de la dévorer à nouveau … Eviter de la dominer à nouveau … Seulement se laisser porter par elle. Mais c’était si bon … Pourrait-elle résister ? Lucrétia se mordit la lèvre inférieure et laissa s’échapper un léger gémissement quand par maladresse, l’index d’Aerianna dérapa sur la tache qu’elle avait revendiqué sous son sein droit. Mais était-ce vraiment de la maladresse ?

Elle n’aurait su dire ce qui se passait dans la tête d’Aerianna à ce moment-là. La jeune femme restait mystérieuse, probablement à dessein. Son sourire restait énigmatique et Lucrétia ne la connaissait pas « assez » pour savoir ce que cela signifiait. Après tout … si elle connaissait parfaitement son corps, elle n’avait eu à se mettre sous la dent que des fragments de la personnalité d’Aerianna. Etait-ce prudent de se montrer si vulnérable et obéissante à cet instant ?

Ses pensées s’estompèrent quand elle sentit sa main sur son épaule gauche. Elle frissonna de plaisir, incapable de se contenir tant la peau était sensible à cet endroit. Mais alors qu’elle sentait la main d’Aerianna se retirer, elle posa la sienne dessus, lui intimant sans mot dire de rester sur la zone sensible. Lucrétia ferma les yeux et tenta de se concentrer pour oublier ses sens qui lui envoyaient des vagues diffuses de plaisir.

« Je ne sais pas … Certaines ont disparu ces derniers jours. Mon corps reprend peu à peu le dessus sur la magie. Par contre … mes yeux et mes cheveux … aucune amélioration de ce côté. Mais si cela peut te rassurer, je n’ai rien perdu de mes dons. Je dirai même qu’ils se sont amplifiés. »

Lucrétia passa sa main dans ses cheveux, les repoussant en arrière et tenta un timide sourire à la Princesse Marchande. Elle y arriverait ! Elle reprendrait le contrôle sur la magie et deviendrait plus à même de contrôler le don de la déesse. Avec de l’entrainement et une bonne dose de pugnacité, rien n’était impossible non ?

Elle saisit la main sur son épaule et porta le doigt d’Aerianna à ses lèvres. Malicieuse, elle le mordilla quelques instants tout en maintenant son regard dans celui de la jeune femme avant de décharger un petit filet de magie dans sa main. Rien de bien méchant … uniquement pour la stimuler et titiller sa curiosité.
Reprenant quelque peu confiance en elle, la jeune femme attrapa le pan de sa robe qui pendait nonchalamment sur le côté et tenta de le remettre.

« Mon inspection est-elle terminée, mademoiselle Hiisi, ou faut-il mon humble personne vous montre le bas ? »

Elle se mordit la lèvre inférieure et lança un regard malicieux à la jeune femme. Elle accepterait de lui appartenir … mais juste pour cette fois. C’était la moindre des choses en tant qu’hôte. Cela ne répondait cependant pas à la question de la présence d'Aerianna en ces lieux ... mais chaque chose en son temps.

L'approbation d'Aerianna ne se fit pas attendre et Lucrétia s'exécuta. Elle se retourna de dos et d'un geste des hanches et d'une légère poussée de ses mains, fit tomber le reste de sa robe sur le sol. En sous-vêtements et encore chaussées de ses talons, elle se retourna et lui fit face. Les taches magiques continuaient à grêler sa peau le long de ses jambes, ce n'était pas une surprise. Le fait de se retrouver ainsi dénudée face à elle faisait survenir en elle un sentiment à la fois agréable et honteux. Aerianna ressentait-elle la même chose ?

La haute-prêtresse retourna lentement la chaise de son bureau et s'assit, à moitié dénudée, et lui sourit. Lentement, elle croisa les jambes et commença à faire des cercles avec la courbure de son pied enchâssé dans ses escarpins bleus. Reprenant sa contenance, elle repoussa une mèche de ses cheveux en arrière.

"Et bien ? Tu as perdu ta langue ?"

Ses explications ne m’intéressaient pas tellement, c’était sa façon de les exprimer qui m’intéressait, et qui me décevait un peu. Elle me confirmait que les zones scintillantes étaient des zones plus sensibles que les autres, et elle me confirmait qu’elle gagnait en assurance au fur et à mesure que je l’y touchais. Ses hésitations n’étaient pas dues à ce doute qu’elle avait exprimé, ses hésitations étaient forcées par des vagues de plaisir, comme souvent cela m’arrivait quand j’essayais de m’exprimer emplie de douleur, et ce n’était pas du tout l’effet escompté. Elle alla même jusqu’à jouer avec moi, suffisamment pour m’arracher un petit gémissement alors que mon cœur loupait un battement et que mes yeux se fermaient. C’était la magie qui lui avait fait tout ça, mais elle semblait déjà prête à en découdre à nouveau, et elle se doutait sûrement que ma situation n’avait pas changé. Elle n’avait aucun moyen de s’en douter, mais même si ce n’était pas le cas, de toute façon, elle savait à quel point c’était efficace.

Mais je tuai dans l’œuf l’idée de profiter à nouveau de ses attentions, ce n’était pas le moment.

Il fallait que je regagne mon emprise sur elle et j’eus l’impression de le faire en lui demandant de se découvrir encore plus qu’elle ne l’avait fait jusqu’à maintenant. « Vas-y. » Je lui répondis d’une voix sans émotion, d’une voix qui n’était pas censée lui montrer que je réfléchissais à quelque chose qui n’allait pas dans son sens. Elle était en quelque sorte une de mes cobayes, et je me faisais violence pour ne pas lui donner une nouvelle fois tous les droits sur mon corps, pour ne pas lui donner l’opportunité de ramener Anna alors qu’Aerianna essayait d’asseoir son pouvoir sur elle. Et j’avais toutes les raisons d’avoir ce pouvoir, alors ce ne devrait pas être plus qu’une formalité. Mais elle résistait, et elle profitait de chaque chose que je faisais pour reprendre de l’assurance, c’était presque insupportable. Elle jouait, et elle essayait de me charmer, une nouvelle fois, mais j’étais têtue.

J’écarquillai les yeux en les baissant vers les tâches qui marquaient jusqu’à ses jambes, puis en les remontant vers une poitrine qu’elle ne me dissimulait plus. Elles étaient partout, et si je n’avais rien promis, plus tôt, ce n’était pas pour rien. Je laissai un regard peiné venir se plonger dans le sien, allant à l’encontre de son sourire. « Je suis désolée, c’est de ma faute, c’est ça ? » C’était étrange de transformer en drame quelque chose qui ne faisait que m’attirer, vraiment, mais est-ce que j’avais le choix ? « D’autres les ont vues ? Amélie ? » Une de ses erreurs avait été de rompre le contact, et sans attendre de réponse je me permis de presque l’ignorer pour me placer à côté du bureau et regarder à travers la grande baie vitrée. « Tu penses que c’est une punition, de Néera ? Pour ce qu’il s’est passé ? »

A l’écoute des mots d’Aerianna, Lucrétia ne put que s’esclaffer !

« Une punition de Néera ? Allons donc, la Déesse a bien mieux à faire que de s’immiscer dans l’intimité de deux jeunes femmes. La Dame-Dieu nous encourage à faire le bien autour de nous et à prendre soin des autres, dans la mesure de nos capacités, mais ce n’est pas son genre de mettre son grain de sel dans des relations d'autrui.»

Toujours assise sur le fauteuil, Lucrétia, ramassa du bout du pied sa robe et se leva pour l’enfiler. Le vêtement cachant enfin ses marques, elle reprit, de manière évasive :

« Tu penses que je montrerai ces marques à d'autres personnes ? Peut-être ... peut-être pas ... Va savoir. »

Le ton était volontairement joueur et visait à la rendre jalouse. Après tout, si la question d'Aerianna était légitime, il n'en restait pas moins qu'il s'agissait de son corps. Elle n'était pas une propriété personnelle d'Aerianna. Elle avait encore la liberté de montrer sa peau nue à d'autres personnes. En lui signifiant à demi-mot qu'elle n'était pas à elle, Lucrétia voulut faire comprendre à la Princesse Marchande qu'elle était loin d'être une fille de joie ou encore un objet que l'on pouvait utiliser à sa guise.

S’assurant que sa robe était correctement remise, elle s’approcha d’Aerianna et l’enlaça par la taille. Elle lui murmura :

« Depuis toute petite, on m’a enseigné que le don que m’a fait la Déesse était quelque chose à cacher, à ne montrer qu’aux initiés et à n’utiliser qu’en dernier recours. Ce don reste rare chez les prêtres de Néera et les exercices auxquels nous nous soumettons nous permettent de maîtriser ce pouvoir, mais aussi de l’empêcher de nous blesser. »

Déplaçant ses mains le long de son ventre, elle massa délicatement les hanches d’Aerianna. Ses cheveux bruns et blonds se déversèrent en cascade sur les épaules de la Princesse Marchande. Lucrétia essayait tant bien que mal de ne pas s’abandonner et de ne pas s’accaparer immédiatement le corps de la jeune femme. La haute-prêtresse hésitait : devait-elle laisser Aerianna prendre le pas sur elle ou l’inverse ? Ne sachant quelle option prendre, sa seule solution était de faire monter le désir dans la jeune femme, jusqu’à ce que cela soit elle qui fasse le premier pas.

Lentement, elle remonta ses mains le long de la robe de soie blanche et caressa quelques instants la poitrine de la Princesse. Ce fut court, suffisamment pour que le geste paraisse anodin et assez pour la titiller un peu.

« Notre rencontre a brisé un carcan dans lequel mes pouvoirs étaient bridés … Ils sont plus forts qu’avant, plus libres … mais mon corps en a fait les frais. Il faut simplement que je fasse plus attention et que j’en reste maîtresse. »

Elle se recula d’un pas et s’appuya contre le dossier de la chaise de bureau pour attendre sa réaction. Il ne s’agissait pas simplement de l’exciter … mais aussi de savoir se retirer au bon moment pour rendre l’attente de ses attentions insoutenable. Aerianna ne l’avait pas repoussé. Elle acceptait, non sans curiosité, les affres de la magie sur son corps. Ceci avait l’avantage de rassurer Lucrétia et de lui redonner confiance en elle. Elle joua nonchalamment avec une de ses mèches dorées … Elle pourrait peut-être s’y faire à cette couleur, qui sait ?

Là où Lucrétia semblait voir une jalousie à exciter, je voyais seulement une cruauté que je n’osais pas amener, que je ne savais pas amener. Ce n’était même pas vraiment de la cruauté, en fait, je voulais simplement l’entraîner vers le bas, vers mon niveau, et ensuite lui laisser l’opportunité de s’exprimer et peut-être de creuser encore un peu. Et à tort, ne connaissant son culte qu’à travers un père qui ne supportait pas de tels comportements, j’avais cru que la première étape avait été franchie à ce moment là, lors de notre première rencontre. Mais elle aussi s’était trompée, donc, et elle croyait que celle qui partageait son futur époux avec une autre femme pouvait même ressentir l’émotion qu’était la jalousie quand elle concernait une femme avec laquelle elle n’avait qu’une fois partagé un lit. Je ne répondis donc pas un mot à sa tentative, et continuais d’observer l’extérieur, comme insensible à tout ce qui prenait place derrière moi.

Jusqu’à ce qu’elle m’enlace.

J’avais vu une opportunité de jouer avec elle, mais elle n’avait rien donné. Au contraire, là où elle avait semblé particulièrement complexée au début, elle me donnait l’impression d’avoir été libérée par ma réaction, et c’était frustrant. Aussi frustrant que rassurant en fait, parce qu’on me prêtait encore de bonnes intentions, même quand elles n’existaient pas, même après tout ce que j’avais fait. Je souris alors, sentant ses mains remonter le long de mon ventre, mettant de côté le reste, mettant de côté ce qui était mauvais, mettant de côté quelques tendances qui n’avaient peut-être pas lieu d’être. Tout pouvait attendre, et tout attendrait, parce que la haute-prêtresse savait ce qu’elle faisait, et ça fonctionnait. Les mains remontèrent encore un peu, et ma respiration s’arrêta un instant, juste avant qu’elle ne se retire. Ses mots furent ceux pour me séparer pour de bon de mes intentions négatives alors qu’elle exprimait à quel point notre rencontre avait été importante pour elle et pour sa magie.

Je me retournai alors en un instant, faisant le pas qui me séparait d’elle avant de l’attraper en passant un bras autour de sa taille et de légèrement la faire tourner, de façon à ce qu’elle se retrouve contre le bureau plutôt que la chaise. Mon sourire était devenu malicieux, j’en avais d’ailleurs totalement oublié pourquoi j’étais venue, et je me penchai sur elle alors qu’une main baladeuse allait trouver la marque scintillante qui m’appartenait pour la caresser de manière insistante, alors que ma bouche venait s’emparer de la sienne et que mes dents vinrent lui mordiller les lèvres. Il n’y avait à cet instant que passion, il n’y avait à cet instant qu’elle, et ça me convenait parfaitement. Prise en étau entre le bureau et mon corps appuyé contre le sien elle pouvait toujours me dégager aisément mais je doutais maintenant qu’elle en ait seulement l’envie. Même après que, trop enthousiaste, je me rendis compte sentir un léger goût salé dans sa bouche.

Je l’avais mordue un peu trop fort, je compris, avant de me dégager un instant…

« Pardon. »

… et d’y retourner.

Le goût du sang … Lucrétia l’avait oublié, de même que sa texture. Elle avait plus l’habitude de voir le sang des autres salir ses vêtements et les tables d’opération que de goûter le sien, c’était une évidence. Etrangement, cela avait plus surpris Lucrétia que cela ne lui avait fait mal. Mais déjà, Aerianna présentait des excuses. Ce n’était pas nécessaire … vraiment !

« Oh arrête, viens-là ! » dit-elle d’un ton amusé avant de l’embrasser à nouveau.

La main passée sous son sein lui fit laisser s’échapper un petit cri de surprise. Décidément, elle ne s’y faisait pas. Cette sensibilité était à la fois délicieuse et très gênante au vu de la situation. Lucrétia sentit que si Aerianna s’y mettait vraiment, elle n’aurait aucun mal à la plier à sa volonté tellement elle avait d’ouvertures … Elle ne pouvait décemment pas la laisser faire … mais en même temps … Sa première rencontre avec la jeune femme lui avait laissé deux expériences uniques en leurs genres : la possibilité d’assurer un contrôle total sur la Princesse et de l’autre, la possibilité de s’abandonner à elle. Les deux perspectives étaient plaisantes … elle ne savait pas laquelle choisir.

La haute-prêtresse recula contre le bureau, tirant la jeune femme vers elle, par la ceinture dorée. Quand elle se sentit assez proche, elle posa son postérieur sur le bureau de bois et ramena à nouveau Aerianna contre elle. La robe de Lucrétia, longue et sans ouverture, l’empêchait de se mettre correctement à l’aise avec ses jambes, qu’elle ne pouvait écarter, mais ce n’était pas ça qui allait l’arrêter.

Lucrétia maintint sa prise sur la ceinture d’Aerianna à mesure qu’elle l’embrassait. Il n’était pas question qu’elle la lâche. De son autre main, elle traça des sillons sur sa peau avec son index. Partant de sa gorge jusqu’à son nombril, elle fit affluer très légèrement la magie au travers de son doigt pour activer les « circuits » de la demoiselle aux cheveux de jais. Satisfaite, elle se détacha d’elle et se pencha légèrement en arrière, s’appuyant sur ses mains et ses bras tendus.

Son regard bleu et vert n’avait pas quitté ses yeux sombres. Elle sourit et balança ses pieds d’avant en arrière, toute guillerette. Personne ne les dérangerait, le cadre était idyllique et elle était en pleine possession de ses moyens physiques et magiques. Que rêver de mieux ?

Toujours appuyée sur son bras gauche, elle utilisa sa main droite pour rejeter ses cheveux en arrière avant de jouer machinalement avec son médaillon en souriant. Elle finit par l’embrasser à nouveau et profita de l’attention détournée de sa partenaire pour délier le ruban bleu qu’elle avait rapporté de leur première rencontre. Son larcin accomplit, elle se repencha en arrière et d’un air énigmatique, joua avec le ruban qu’elle tenait entre ses mains, tout en lançant des regards à la jeune femme.

Deux options s’offraient à elle. L’une était déjà connue et ô combien plaisante, l’autre promettait un champ que les deux jeunes femmes n’avaient pas encore exploré.

Peut-être étais-ce le goût du sang, peut-être étais-ce autre chose, dans tous les cas, si je me laissai faire jusqu’à maintenant, je ne comptais pas laisser Anna revenir, car elle ne ferait que me rendre plus passive que je ne voulais l’être. Après les quelques gémissements qu’elle parvint à tirer de moi je n’eus plus qu’une envie, recouvrer le ruban et le faire disparaître de l’équation. Je plongeai sur elle une nouvelle fois, consciente que mon mouvement aurait plus d’amplitude que le sien et qu’elle ne pourrait s’échapper. Je montai à moitié sur le bureau pour l’embrasser, y posant mes genoux alors que je poussais son corps vers une position allongée. Mes mains s’emparèrent de force du ruban pour le lancer au sol d’un seul mouvement alors que mon sourire légèrement ensanglanté n’exprimait plus que désir dès l’instant où je décollais mes lèvres des siennes. « Anna ne viendra pas, pas cette fois. »

Je la saisis au niveau des aisselles pour l’amener encore plus loin sur la table, de sorte que ses jambes ne pendent dans le vide qu’à partir des genoux, et dans le mouvement je fis glisser une partie des feuilles qui s’y trouvaient sur le sol, accompagnées par l’encrier qui se déverserait sans doute sur le tapis en contrebas. J’aurais pu m’en préoccuper, Anna s’en serait préoccupée, mais j’étais tellement prise par la passion et l’avidité que j’en étais simplement incapable. Je me penchai encore un peu plus alors que mes dents venaient mordre dans son cou. Pas de quoi être douloureux, pas de quoi tirer d’autres gouttes de sang, juste pour montrer que je n’en avais pas fini, alors que ma main retournait caresser la zone scintillante, avant de se saisir du sein sous lequel elle se trouvait. Il y avait plus de force que Lucrétia n’en avait jamais connu dans mes gestes, mais c’était le jeu, celui que je lui imposais à cet instant là, celui que j’avais décidé avant de faire disparaître le ruban.

L’autre main, elle, avait décidé de caresser les jambes couvertes de la haute-prêtresse, déçue de la trouver beaucoup trop longue.

Je cessai alors tout ce que j’étais en train de faire pour me redresser, d’abord sur les genoux, à moitié assise sur ses jambes couvertes de sa robe, puis me levant franchement, debout au dessus d’elle. Je fis un seul pas en avant, en équilibre sur le bureau, et de là je savais exactement quel spectacle elle avait sous les yeux, quel spectacle je lui offrais, alors que contrairement à elle je ne portais rien d’autre que cette robe. C’était là la moitié de l’objectif, l’autre était de lui laisser l’opportunité se débarrasser de sa robe, de ne plus la retenir contre le bureau. D’une voix chaude et finalement assez basse je tentai de clarifier ce que j’attendais d’elle. « Je ne sais pas pourquoi tu t’es revêtue… » Je me mis à me dandiner légèrement en essayant de décrocher l’ample ceinture d’or, pas certaine d’arriver au bout si Lucrétia décidait d’être plus entreprenante que je ne l’imaginais.

Si je savais que le plaisir ne viendrait pas de manière classique, j’espérais qu’il soit tout de même au bout du chemin, mais le doute était noyé dans tant d’autres émotions.

Elle s’était totalement laissée faire, surprise par la force qui habitait Aerianna. Elle qui était si faible le jour où elle l’avait rencontrée, la voilà qu’elle s’emparait du corps de la haute-prêtresse sans qu’elle ne puisse s’y opposer … non pas qu’elle ait eu cette envie. Sa partenaire avait refusé le ruban. Très bien ! Il serait toujours temps d’y revenir plus tard et cela ne gâchait en rien son plaisir.

En revanche, elle restait sceptique sur la solidité du bureau sur lequel sa partenaire avait jugé bon de se jucher. Non pas que les artisans péninsulaires fassent du mauvais travail, mais Lucrétia n’était pas certaine que le bureau ait été fabriqué pour ce genre d’activités. Il lui vint à l’esprit le fait qu’Aerianna ne comprenait peut-être rien à la solidité des objets, à leur fabrication ou à la force de son propre corps. Elle était née Princesse Marchande, dans un univers où tout lui était dû et où elle ne semblait même pas avoir à réfléchir sur la manière dont elle devait s’habiller ou sur comment se nourrir puisque d’autres étaient payés pour le faire à sa place. Du moins, c’était ce que pensait la haute-prêtresse à ce moment, ce qui ne l’empêchait pas d’apprécier la vue.

Absorbée par ce que laissait entrevoir le tissu de sa robe et encore émoustillée par les mains baladeuses d’Aerianna sur son sein droit, elle fut sortie de sa rêverie par la voix de sa partenaire, visiblement contrariée, non seulement par le fait qu’elle était encore revêtue, mais aussi par le fait que ses mains échouaient à enlever sa ceinture de lauriers d’or tressés. Finalement, l’intuition de la jeune femme était juste : Aerianna ne s’habillait visiblement pas elle-même et semblait comme une poule ayant trouvé un cure-dent. C’était à la fois drôle et charmant, mais cela atténuait du même coup la stature impérieuse qu’elle essayait de se donner.

Elle se mordit les lèvres, joueuse. Aerianna était dans une position inattendue et elle sentit qu’il était opportun d’agir. S’appuyant sur ses coudes pour se relever, elle se glissa entre les jambes d’Aerianna et se retrouva debout contre le bureau, dans le dos de sa partenaire. D’un geste, elle saisit la ceinture et en libéra les attaches. Ce n’était pas bien compliqué, mais visiblement, elle n’était pas habituée à ce genre de vêtement. La ceinture tomba lourdement sur le bureau, aux pieds de la Princesse Marchande, laissant le tissu blanc flotter légèrement sur sa peau.

D’une pression, elle commanda à la jeune femme de se tourner et lentement, elle plaça sa tête contre sa cuisse gauche et laissa ses mains courir le long de ses jambes, laissant de minces filets de magie caresser son épiderme. La soie blanche était d’une douceur incroyable, mais la peau d’Aerianna qui trésaillait sous l’afflux de la magie était beaucoup plus jouissive. Ses mains agrippées à ses cuisses finirent par écarter légèrement le tissu couvrant son entrejambe. Lentement, elle augmenta la vitesse de diffusion de la magie et approcha ses lèvres … avant de se retirer.

« Tu ne croyais tout de même pas que ça allait être aussi facile ? » dit-elle en plongeant son regard plein de malice dans celui d’Aerianna.

Elle tira légèrement sur la soie blanche et celle-ci tomba sur le bureau, laissant sa Princesse nue comme un ver. Anna ne viendrait pas ? Très bien. Mais Lucrétia ne se soumettrai pas à Aerianna avant qu’elle ait prouvé qu’elle était capable d’exercer son autorité sur elle.

« Là d’où je viens, il ne suffit pas de vouloir quelque chose pour l’avoir. Si on le veut réellement, il faut le prendre, corps et âme. »

Lucrétia sourit et déplaça ses doigts crépitants de magie sur les mollets d’Aerianna, encore enserrés dans ses sandales dorées. Elle fit mine d’enlever le haut de sa robe et se ravisa. Ce petit jeu devenait de plus en plus intéressant, mais elle ne se donnerait pas entièrement avant d’être certaine qu’Aerianna pourrait exercer son contrôle.

Elle n’essayait même pas de me prodiguer ses attentions de manière naturelle, c’était directement par la magie qu’elle avait décidé de m’atteindre, et qu’elle m’avait atteint, donc. Elle n’avait pas obéi à ma demande et elle avait plutôt décidé de m’aider à me dévêtir, quittant la table pour m’ôter cette ceinture avant de jouer avec ma peau et de finalement retirer l’ensemble de ma robe, qu’elle avait identifié de la même façon que j’avais identifié la sienne, comme un adversaire. Elle aurait pu alors aller plus loin et achever de faire tomber mes barrières, mais ce n’était pas son intention et je souris en me rendant compte qu’elle n’avait qu’une envie et que c’était que tout dure. Je n’étais pas totalement du même avis mais j’apprenais à m’en approcher et à ne pas laisser mon avidité prendre le dessus en tout instant, même si chaque gémissement qu’elle tirait de moi rendait le tout encore un peu plus compliqué.

D’un geste un peu trop puissant je poussai la ceinture au sol dans un certain fracas alors qu’elle n’était que partiellement tombée sur le tapis.

Je m’accroupis alors devant elle, consciente que si je n’avais pas encore trouvé de moyen fiable d’accéder à son corps, chaque instant pendant lequel je me montrais à elle dans toute ma nudité était un instant qui l’attirerait un peu plus à moi. Je me penchai si légèrement en avant pour saisir son bras et laisser mes doigts glisser jusqu’à sa main que j’amenai jusqu’à ma bouche pour l’embrasser, juste avant de la faire descendre vers une poitrine si menue et de l’y poser là quelques instants, lui permettant de sentir le battement d’un cœur qui ne s’était pas encore totalement emballé. Mais je la lâchai, finalement, laissant mes jambes pendre dans le vide alors que je m’étais assise sur le bureau, sur une feuille qui ne s’était pas encore retrouvée au sol. Quelques instants de plus et j’étais debout, à lui tourner autour, laissant un doigt glisser sur son cou, avant de lui saisir une épaule de la main et de la faire pivoter de façon à ce qu’une nouvelle fois elle soit dos au bureau.

« Tant pis, garde ta robe… c’est dommage pour nos yeux… mais je peux faire avec… » Une moue placée quelque part entre la malice et la déception avait envahi mes traits pour accompagner ces mots, alors qu’une idée semblait prendre place dans mon esprit. « … c’est dommage pour ta robe, aussi… »

Et comme la première fois je vins l’y plaquer en l’embrassant jusqu’à ce qu’elle s’y assoie, effleurant dans le même temps cette marque que j’avais faite mienne, jusqu’à ce que d’une nouvelle poussée de mes mains sur son corps je la force à s’allonger, jusqu’à ce que je recule de deux pas. L’idée était là, l’idée était légèrement idiote, mais elle s’était ancrée si rapidement que je ne pouvais pas réellement l’arrêter. Après avoir soulevé ses jambes je soulevai le tissu de sa robe comme pour l’enfiler après m’être penchée en avant et posé les mains sur ses mollets, et j’entrepris une avancée vers la personne de la haute-prêtresse, laissant mon corps et mes mains glisser contre les jambes avec lequel ils partageaient, à l’étroit, une robe qui n’avait pas cette fonction. Je ne fus pas surprise en sentant que partout où je la touchais la peau de Lucrétia était emplie de cette délicieuse magie, mais elles m’arrachèrent tout de même de multiples petits gémissements étouffés. Mais forcément, il fut un moment où mes épaules ne voulurent plus avancer dans une robe qui se rétrécissait, et je n’eus pas d’autre choix que de m’arrêter, un peu déçue.

Là où le reste s’était arrêté mes mains continuèrent leur progression, et si pour assurer ma stabilité l’une vint se coincer sous une fesse de mon amante en agrippant le rebord du bureau, ma main droite remonta le long de ses cuisses, la caressant amplement et pendant presque trop longtemps à mon goût. Puis, au moment où mes lèvres se posèrent sur une de ses jambes, juste au dessus de son genou, la main contourna le sous-vêtement pour s’attaquer aussi habilement qu’elle le pouvait à l’intimité de Lucrétia. Le spectacle était sûrement ridicule, mais la haute-prêtresse ne pouvait sûrement voir de moi que mon postérieur d’albâtre qui dépassait de la robe au bout de ses jambes. Par contre, elle pouvait entendre les gémissements que je retenais de moins en moins et qui venaient de l’intérieur de sa propre robe.

Lucrétia ne put qu’exprimer sa satisfaction sous la forme d’une exclamation aiguë à mesure que la jeune femme s’attaquait à ses jambes. Elle aurait presque regretté de ne pas avoir enlevé sa robe à cet instant, mais elle avait des choses plus importantes à régler en cet instant.

La prêtresse aurait bien voulu enlever sa robe, mais la position dans laquelle elle était rendait cette tâche impossible à réaliser. Le tissu limitait ses mouvements et la présence de son invitée entre ses cuisses et la main qui s’affairait à la tenir en haleine n’aidaient en rien. Lucrétia était prisonnière de la volonté de la princesse.

Elle tenta d’écarter un peu plus ses jambes, mais ces dernières se heurtèrent à la solidité de la soie bleue. Elle gémit. Tout ceci était parfaitement inconfortable et en même temps délicieux. En un mot comme en cent : un véritable délice. La haute-prêtresse releva pour la énième fois ses cheveux en arrière, sentant la chaleur monter en elle et ne pouvant supporter que sa vue soit à nouveau barrée par sa chevelure qui tombait en cascade sur ses épaules.

La magie continuait d’affluer, mais celle-ci se diffusait de plus en plus par les taches scintillantes. Lucrétia s’était aperçue qu’elle ne pouvait bloquer l’entrée et la sortie de la magie sur ces surfaces. A chaque fois qu’elle concentrait la magie, à moins qu’elle n’utilise son focalisateur ou n’incante, la magie se diffusait par ces taches, envahissant l’espace. Etant donné le nombre de ces « trous » au niveau des cuisses, de ses mollets et de ses tibias, c’était un véritable piège pour Aerianna, qui risquait de mourir de plaisir bien avant la haute-prêtresse si elle augmentait la pression des flux.

Elle se redressa, haletante et réprimant un gémissement satisfait. Sa main s’était placée sur la soie qui couvrait la tête d’Aerianna et tentait d’agripper sa chevelure au travers du tissu, mais c’était peine perdue. De même que son postérieur était trop loin pour pouvoir entamer la suite des négociations, Lucrétia se retrouvait à la merci d’Aerianna sans possibilité de répliquer autrement que par l’augmentation de la pression magique.

Désirant plus, elle saisit tant bien que mal la tête de sa partenaire et appuya fermement sur elle. Il n’était pas question de la laisser s’échapper. Elle voulait jouer avec le feu et tenter de la soumettre, mais la prêtresse n’avait pas dit son dernier mot ! Lentement, elle augmenta l’afflux magique en se concentrant et en ouvrant son corps au don de la déesse. Les flux magiques se concentrèrent sur l’épiderme de ses jambes. Lucrétia avait concentré la magie de telle sorte à trouver un équilibre parfait entre douleur et jouissance pour Aerianna. Tout était dans le subtil dosage pour qu’elle soit totalement dépendante de cette magie, tout en évitant de la blesser … ce qui n’était pas le but.

Lucrétia ne se rendit pas compte à cet instant que la concentration trop rapide de la magie continuait d’affecter son corps et plus particulièrement ses cheveux. Sa crinière brune parsemée d’or prenait de plus en plus la couleur des blés de Geresh à mesure que la magie se pressait dans son corps. Mais ça, elle ne pouvait s’en rendre compte, trop occupée à essayer de se maintenir Aerianna sous son emprise tout en se laissant porter par ses gestes délicats.

Avec n’importe quelle autre amante ma position d’abord perçue comme ridicule aurait été idéale pour l’amener à ses propres limites sans un instant craindre qu’elle ne renverse la situation. Mais ce n’était pas n’importe quelle amante, c’était la haute-prêtresse du culte de Néera. Elle connaissait mon point faible, et contrairement à la plupart de celles et ceux avec lesquels j’avais partagé ce genre de moment, il suffisait d’un seul contact entre nos deux peaux pour qu’elle en joue. Ce qui aurait pu être pensé comme un piège que je lui tendais s’était aussi facilement que ça retourné contre moi, et j’avais bien du mal à imaginer ce qu’elle me réservait maintenant. Enfin, j’en avais une bonne idée, c’était simplement que j’avais perdu les commandes, et ce n’était pas censé arriver, pas alors que le ruban bleu gisait quelque part sur le sol. Peut-être qu’il n’était plus bleu, d’ailleurs, car l’encrier ne devait pas être tombé bien loin.

Mais ces quelques réflexions avaient défilé bien vite, et elles cédèrent leur place à des réactions plus naturelles. Plus primitives, peut-être ?

L’instant d’après que sa main ait commencé à fermement appuyer ma tête contre ses jambes, la magie arriva comme une lente vague mais trop puissante pour que quoique ce soit ne l’arrête. Et avec la magie, un premier cri qui s’enfuyait à travers une porte qui n’avait jamais été close. Le cri laissa place à des gémissements à peine retenus, et au lieu d’essayer de résister, au lieu d’essayer de m’éloigner de la peau qui m’amenait tant de douleur que j’en mourrais de plaisir, je laissai ma langue s’échapper et glisser sur la cuisse de la belle prêtresse, trouvant une de ces sources de magie qui nous apportaient tant à elle comme à moi alors que ma main droite continuait son œuvre. Le moment était comme dans mes souvenirs exceptionnel, mais comme dans mes souvenirs j’allais avoir du mal à tenir, à ne pas déjà céder alors que tout n’avait qu’à peine commencé. Ce serait triste, quand même, de céder sans avoir pu atteindre le premier endroit que j’avais cherché à atteindre.

Les gémissements allaient en s’amplifiant, mais il y avait un problème auquel ni Lucrétia ni moi n’avions pensé : dans les moments de faiblesse de cette nature les positions qui demandaient trop de ressources physiques étaient particulièrement intenables. Et au lieu de faire semblant de tenir, de lutter simplement pour recevoir encore plus de cette magie qui me mettait déjà à mal, j’y vis une porte de sortie. Après un autre cri mes genoux flanchèrent et une grande partie de mon poids finit par reposer sur ses seules jambes, les amenant de force au sol. Mes genoux vinrent ensuite heurter heureusement le tapis sur lequel était disposé le bureau. La situation sous la robe de la haute-prêtresse ne changea pas énormément, alors que particulièrement inerte j’embrassais toujours la peau que j’avais à portée. La seule différence, finalement, était que ma main n’avait pas pu se saisir du sous vêtement, et qu’elle se retrouvait ainsi suspendue au bout d’un bras coincé contre le tissu de la robe.

La situation était-elle plus ou moins ridicule que celle qui l’avait précédée, je ne savais plus trop.

La haute-prêtresse se retrouva debout en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire tandis que sa partenaire se retrouvait à genoux. Déstabilisée, la jeune femme tenta de conserver son équilibre, les pieds toujours dans ses talons, tandis qu’elle sentait Aerianna de plus en plus coincée dans ce qu’elle essayait d’entreprendre. Il faut dire que la robe n’aidait absolument pas à ce qu’elle puisse se mouvoir facilement. Mais d’un côté, il était ainsi bien plus aisé de la maintenir sous son emprise.

Lucrétia tenait difficilement sur ses jambes. Ses cuisses étaient en feu, ses mollets constamment sollicités par les mains baladeuses de la jeune femme et elle se faisait force pour ne pas perdre l’équilibre dans ses escarpins. Elle tenta d’écarter un peu plus les jambes pour se stabiliser, mais le tissu de la robe rendait cette tâche impossible.

L’emprise que Lucrétia exerçait sur Aerianna était quasiment totale. La pauvre avait commis l’imprudence de penser que les règles hiérarchiques s’appliquaient de la même façon au lit comme au dehors. Elle était désormais incapable d’agir concrètement et de prendre le contrôle sur elle. Ce n’était pas décevant, loin de là : c’était même très plaisant ! Mais la haute-prêtresse ne pouvait s’empêcher de penser qu’Aerianna était capable de bien plus.

Elle augmenta la pression des flux magiques qui s’affairaient à lécher le corps de la jeune femme et fit de son mieux pour ne pas tomber à la renverse. A l’écoute des bruits étouffés, elle devait être beaucoup plus excitée que Lucrétia à ce moment-là. Elle passa à nouveau la main dans ses cheveux sans se rendre compte qu’ils avaient à nouveau changé de couleur et commença à défaire le haut de sa robe pour aider sa partenaire. Lentement, elle ramena le tissu de la robe jusqu’à ses hanches, libérant progressivement Aerianna de l’emprise de la soie bleue.

La pauvre semblait surprise de la voir … Elle était si belle quand elle était ainsi. La robe passa au-dessus de la tête de la prêtresse et tomba sur le sol, à côté du bureau, révélant Aerianna complètement. Elle passa sa main droite dans ses cheveux et appuya ses jambes contre son corps. Il fallait qu’elle continue à l’abreuver d’énergie magique. Il était hors de question qu’elle échappe à son contrôle, pas tant que la haute-prêtresse aurait l’ascendant.

Voyant que l’afflux magique commençait à être difficile à supporter pour la jeune femme, Lucrétia se décida à lui donner une nouvelle chance de reprendre la main correctement. Elle baissa la concentration de magie et caressa les joues chaudes de sa partenaire avant de s’agenouiller à son niveau et de l’embrasser. Ses mains se posèrent sur sa poitrine et caressèrent avec délicatesse sa peau claire. Il fallait y aller plus lentement … ne pas brusquer plus les choses et la laisser prendre ses marques. Lucrétia pensa que si elle exposait une trop grande résistance à Aerianna, elle risquait de ne pas harmoniser son plaisir avec le sien.

Ses lèvres toujours collées contre les siennes, elle diffusa très légèrement un peu de magie au travers du baiser. Son emprise se faisait plus douce, plus ténue, juste assez pour lui faire comprendre qu’elle allait ralentir et se mettre à son diapason. Elle lui caressa le ventre. Il était chaud … elle était déjà en nage avec toute la violence des flux magiques qu’elle avait laissé s’échapper de son corps. Elle lui mordilla le cou, joueuse, et toujours collée contre elle et agenouillée, lui massa doucement le dos en lui murmurant d’une voix sereine.

« Je vais y aller plus doucement … d’accord ? »

Je n’étais plus prisonnière et c’était une avancée importante, même si elle en avait bien profité pour jouer un peu plus avec sa magie sans jamais s’inquiéter pour moi. C’était dur de s’inquiéter pour quelqu’un dont les gémissements et les cris évoquaient tant de belles choses, certainement, mais quand on savait qu’il n’y avait à cet instant que la douleur pour me maintenir dans cette situation exquise… Je m’étais attendue à un peu plus d’inquiétude, voilà tout, et c’était peut-être la première fois que j’aurais voulu qu’on fasse un peu plus attention à ne pas me submerger totalement. Sans la robe pour me dissimuler, sans la robe pour obstruer ma vue, je levai les yeux vers le corps de ma tortionnaire, la trouvant plus belle que je ne l’avais jamais trouvée. Mais elle ne s’arrêta pas, et la magie qui affluait m’arracha un nouveau cri, un peu plus fort que le précédent.

Tout me laissa croire que ce cri était ce qui avait changé la donne.

Lucrétia vint abandonner son ascendant de taille en s’abaissant à mon niveau, Lucrétia équilibra le rapport en s’agenouillant en face de moi et en m’embrassant, Lucrétia se retint, si peu. Les caresses étaient particulièrement agréables, mais elles n’étaient pas aussi chargées en magie que le reste. J’eus donc l’occasion de mettre en œuvre ce que rarement je ne faisais avec ma propre magie, ou en tout cas, plus depuis que je n’avais pas peur d’être surprise par ceux qui avaient essayé de me l’interdire il y avait bien longtemps, quand on pensait que j’étais trop jeune pour m’exposer à autant de souffrance. Je n’étais pas sûre que cela fonctionne vraiment, car je ne pouvais avoir la même relation avec la magie d’une autre qu’avec l’énergie que je connaissais et reconnaissais entre mille. En tout cas, cela me laissait une opportunité en or de penser à la suite, et de n’écouter qu’à moitié ses mots qui venaient un peu tard.

Emportant son corps dans une rotation qui placerait le bureau à notre gauche je la plaquai contre le sol, me dégageant lentement mais avec force pour me retrouver la surplombant. Un petit ajustement de ma position et j’avais un genou qui appuyait légèrement sur son ventre et un pied posé au sol à sa gauche. C’est à ce moment là que je remarquai sa chevelure qui avait encore changé… Elle ne retenait presque rien pour moi, même si ça achevait une transformation qu’elle avait eu l’air de si mal vivre. S’il y avait toujours celle qui m’appartenait, les tâches scintillantes semblaient être encore plus nombreuses, et je ne comprenais pas pourquoi elle faisait out ça. Ce fut compliqué, du coup, de trouver un endroit qui ne scintillait pas sur ses bras pour que chacune de mes mains les maintienne au sol de façon à ce qu’elle ne puisse s’en servir sans forcer pour s’en dégager.

Je n’avais plus que mon genou en contact avec certaines de ses tâches scintillantes et j’étais par conséquent temporairement protégée de ses attaques les plus vives, le temps de m’en remettre. Je savais mon équilibre précaire et la provoqua d’abord en me penchant pour lui susurrer dans un souffle chaud quelques mots… « Tu sais ? Il n’y a pas que la douleur de la magie qui me fait de l’effet. » …puis, alors que je tendais ses bras au dessus de sa tête, ce fut ma menue poitrine qui se retrouva devant son visage. J’espérais qu’elle ait compris le message, mais j’aimais aussi les surprises.

Être sur le dos n’était pas si mal, surtout si c’était la Princesse qui menait la danse. Sentir la pression de son genou sur son ventre était quelque chose d’inattendu, mais loin d’être déplaisant, surtout que désormais, elle avait une vue directe sur ce corps si délicat qu’elle avait passé des heures à soigner. Lucrétia sourit et écouta avec attention ses demandes.

Elle sourit. Les choses prenaient une tournure plus qu’intéressante. Mais à peine eut-elle le temps de de réfléchir à ce qu’elle pourrait faire qu’elle sentit la peau d’Aerianna sur son visage … Et pas n’importe quelle partie de son corps !

Mais elle était prisonnière des mains d'Aerianna. Lucrétia tenta de bouger et de forcer le passage, mais la jeune femme la maintenait fermement. Elle gigota, tentant de se libérer, mais rien n'y fit. Une curieuse sensation monta en elle ... C'était à la fois extrêmement frustrant, mais aussi terriblement excitant de savoir que quelqu'un d'autre prenait les rennes et n'hésitait pas à affermir son contrôle sur la situation.

Elle continua de se débattre en gémissant et bougea ses jambes, espérant que cela serait suffisant pour faire comprendre à la Princesse sa frustration. Mais elle était limitée dans ses mouvements par ses talons, qui frappaient sur le tapis moelleux et l'empêchaient d'avoir une prise correcte sur le sol.

En dernier recours, la haute-prêtresse tenta de lancer une décharge de magie dans le corps de la jeune femme pour qu'elle la libère de son étreinte, mais Aerianna était disposée de telle sorte qu'une telle chose soit impossible. Lucrétia exprima sa frustration de ne pouvoir échapper à la Princesse : elle se débattit fermement, grogna, gémit, ... mais c'était peine perdue.

La seule échappatoire possible était cette poitrine qu'elle présentait à ses lèvres. Très bien ... elle jouerait selon ses règles ... Après tout, c'était elle qui l'avait poussé dans ce jeu. Il n'y avait aucun mal à suivre les règles de la Princesse pour une fois. Lucrétia était sûre qu'elle n'y prendrait pas goût ... du moins le croyait-elle.

L’avantage de partager un instant intime avec une personne qui ne ressentait la douleur comme une forme de plaisir, c’était bel et bien l’assurance de procurer du plaisir, quelle que soit la technique utilisée. Ses lèvres pincèrent lentement les mamelons de la jeune femme, désirant lui faire comprendre qu’elle était capable de lui donner du plaisir sans pour autant utiliser la magie.

Lucrétia tira doucement sur eux et approcha le corps d’Aerianna d’elle. Ses lèvres enveloppèrent l’extrémité du sein gauche de la jeune femme et établirent une nouvelle pression tandis que sa langue s’amusait à dessiner des cercles autour de l’aréole. La sensation était extrêmement plaisante pour Lucrétia et elle se doutait que cela devait l’être aussi pour Aerianna. Elle espérait qu'elle serait satisfaite.

Une fois la première étape franchie, elle tenta à nouveau de se dégager, mais la jeune femme ne la laissait pas partir ... pas tant qu'elle n'aurait pas fini son oeuvre. De bonne grâce, elle commença à travailler son sein droit pendant plusieurs minutes avant de relacher la pression.

La haute-prêtresse était en nage et sa respiration se faisait haletante. Elle n'imaginait pas un seul instant qu'être dans cette position, sous l'emprise de la Princesse, pouvait lui procurer autant de plaisir. Elle cessa de bouger et plongea son regard dans le sien, attentive à sa prochaine demande. Sa volonté n'avait pas encore cédé, mais elle commençait à apprécier d'être à sa merci.

C'est alors que la voix d'Aerianna se fit entendre. Une voix un peu ... lassée ... ?!

"Tu n'as pas de dents ?"

Lucrétia vira au rouge pivoine, à la fois honteuse et énervée. Elle se débattit à nouveau, tentant vainement de prendre l'ascendant sur la jeune femme qui la narguait de toute sa hauteur. Soufflant et rouspétant, elle s'aperçut néanmoins un peu tardivement qu'Aerianna avait gagné la partie avant même qu'elle n'ait commencé. La simple réaction de Lucrétia était la preuve qu'elle menait le jeu et que la prêtresse avait été dupée.

Elle fit une moue déconfite et reprit à nouveau les mamelons d'Aerianna entre ses lèvres. Il lui fallait à nouveau tout recommencer. Elle hésita à utiliser la magie, mais elle l'aurait sûrement fait recommencer. Obéissant à ses remarques acerbes, Lucrétia commença à mordiller sa poitrine, ajoutant à ses actions précédentes.

Malgré sa frustration et son énervement, la sensation était plaisante. Le corps d'Aerianna semblait répondre à ses sollicitations avec plus d'entrain que précédemment. Elle continua ce petit jeu pendant plusieurs minutes avant de déclarer forfait et de se remettre en position d'attente. Allait-elle enfin la laisser partir ? Que souhaitait-elle de plus ? Et pourquoi soudain l'idée de lui obéir semblait-elle de plus en plus excitante et pleine de bon sens ?

La question avait été voulu joueuse, elle était sortie légèrement caustique. Ce n’était pas complètement de ma faute, après tout de toutes ses attentions sans magie il n’y avait vraiment que ce pincement qui avait un quelconque impact, je sentais sa langue mais sans les sensations normalement merveilleuses qui venaient avec. C’était la frustration qui s’était exprimée, donc, mais je ne fis que très peu de cas de la sienne alors que je ne pouvais simplement pas la voir. J’en étais consciente, après tout elle ne faisait que se débattre depuis que j’avais repris l’ascendant et que son attaque s’était perdue dans un genou en ne provoquant que quelques picotements et un tout petit gémissement. Mais si je m’en rendais compte, c’était simplement quelque chose dont je me servais pour m’exciter de plus en plus et finalement m’aiguiller, alors que je savais être sur la bonne voie. C’était bien, aussi, d’être en contrôle.

Elle se servit de ses dents, donc, et je lui servis les gémissements les plus forts, les cris les plus hauts, plus hauts encore que tous ceux précédemment poussés. Ma voix était des plus claires, et je n’hésitais pas à la faire entendre, car finalement, cela faisait une éternité que je n’avais pas été tant mise au supplice, une éternité qui remontait à cette nuit horrible, cette nuit atroce, cette nuit qui avait tout changé. La magie, c’était quelque chose d’agréable, surtout quand elle était poussée à son maximum, mais elle n’avait rien à voir avec la douleur brute, la douleur la plus pure. Je manquai cependant de sombrer en pensant à ce qu’il s’était passé, ce que j’essayais d’oublier, et avant de perdre toute raison de garder le contrôle, avant de me laisser retourner à une passivité que je ne voulais pas et dont Lucrétia ne semblait pas vouloir entendre parler, je lui demandai plus, d’une voix brûlante de plaisir et basse.

Elle n’irait pas jusqu’au sang, comme si celle qui m’avait guéri ne voulait pas infliger à mon corps quelque chose qu’il faudrait réparer, mais elle obéit à ma demande de mordre plus fort. Et comme récompense elle eut le cri le plus pur possible, un cri qui résonna plus fort que tous les autres alors que je lui prouvais que je pouvais monter encore, que je n’avais encore trouvé ma limite, et qu’il y avait de nombreux cris d’extase là d’où celui-ci venait. Une conséquence d’une de ses morsures fut que je lâchai légèrement prise sur ses bras, lui permettant de se retirer si elle voulait se débattre, l’autre conséquence fut que je perdis un peu de ma force, de mon emprise, et que je relevai mon buste pour finalement regarder dans les yeux la belle haute-prêtresse. Un petit ajustement de ma position et j’étais maintenant assise sur son ventre. Distraitement mes mains commencèrent à jouer avec sa poitrine, alors que mon regard s’abaissa légèrement, comme si j’avais peur de lui demander ce que j’allais lui demander d’une petite voix hésitante.

« Continue… s’il te plaît… et sans magie… »

La pression sur ses bras se relâcha et Lucrétia put se libérer de l’empire de sa partenaire. S’appuyant sur ses coudes, elle tenta de se redresser, mais le poids sur son ventre l’en empêchait, ce qui n’arrangeait en rien sa frustration. L’injonction d’Aerianna était douce, hésitante. Ce n’était pas encore ça … trop doux, pas assez sec. Il en résultait la sensation que la jeune femme ne semblait pas savoir sur quel pied danser. La prêtresse en avait-elle trop fait ? Pas assez ?

Qu’à cela ne tienne, il fallait lui ôter ses derniers doutes pour que le plaisir n’en soit que plus complet. Ne pouvant accéder à ses lèvres sans la renverser mais ayant les mains dégagées, elle les pressa sur les mamelons d’Aerianna. Le pincement était fort, suffisamment pour qu’elle le sente. Elle s’appliqua à les masser consciencieusement avant de faire descendre ses mains sur les hanches et de les caresser lentement.

Ce va-et-vient continua quelques minutes avant qu’elle ne se décide à agir. Elle agrippa fermement les seins d’Aerianna et les tira vers elle pour faire basculer la jeune femme sur elle. Son corps était chaud, c’était agréable et d’une douceur infinie. Les zones en contact avec les taches scintillantes s’éveillèrent et Lucrétia sentit une vague de plaisir la submerger et elle se faisait force pour ne pas envoyer de la magie au travers du corps d’Aerianna pour la faire danser. Ses lèvres entrèrent en contact avec les siennes et elle lui massa le dos tandis que son corps se collait au sien.

Son souffle se faisait plus rapide, son cœur aussi. Elle aurait voulu dévorer tout de suite la jeune femme, mais elle se retenait pour ne pas la submerger de magie et la plier à sa volonté. Elle passa ses mains sur les fesses d’Aerianna et les pinça fortement. Ses lèvres finirent par se décoller et elle murmura dans un souffle :

« Je suis toute à toi … Si tu me fais tienne, Princesse. »

C’était une belle invitation. Il fallait la débarrasser de ses scrupules et de ses craintes. Dans ses appartements, personne ne les dérangerait ni ne les entendrait. Elle pouvait y aller sans crainte : Lucrétia s’offrait à elle.

Je gémis à trois reprises, mais elle n’allait cette fois pas entendre un seul cri car elle avait arrêté de se servir de ses dents.

Elle ne pouvait pas rivaliser avec les autres, avec ceux qui avaient eu raison de moi avec la pure douleur des griffures, des coups, et autres actes plus violents les uns que les autres. Elle était belle, sa magie efficace, ses pincements agréables, mais il me manquait quelque chose pour m’amener plus loin. On aurait pu croire que la magie allait combler ce manque mais elle envahissait les même canaux que la mienne, et plus j’apprenais à la connaître plus j’avais l’impression de ne rien faire d’autre que de me donner du plaisir seule, à cela près que je n’en contrôlais pas l’intensité. Je ne pouvais rien en dire à Lucrétia, mais elle n’avait pas besoin de le savoir non plus, car même si ce n’était pas la manière qui m’amenait au plus haut du plaisir, quand elle me menait à l’orgasme rien n’était feint. C’était une question de potentiel, en fait, et en l’état, alors que les caresses ne comptaient pas, alors qu’il n’y avait que la douleur, j’étais déçue de ne venir trouver que quelque chose que je pouvais invoquer en un instant.

Mais peut-être que ce principe duquel je partais, qu’elle ne puisse pas rivaliser avec les autres, peut-être qu’il était faux ?

Son invitation me fit réfléchir à l’incohérence de ce que je lui demandais. Les seules fois où cette douleur que je cherchais était apparue j’avais été objet aux mains de sombres qui avaient à travers leur divinité Kiel une compréhension particulièrement poussée en matière de donner ou de prendre la douleur. Là, je la voulais mon objet, et je la voulais assez curieuse pour découvrir par elle-même plus. Etais-ce seulement possible ? La réponse était probablement négative, mais elle n’allait pas m’empêcher de vérifier cette fois. Mais il fallait toujours que je la fasse mienne avant, ce qui ne semblait pas si compliqué, surtout pas avec les tâches scintillantes. « Tu sais que je ne vais pas te partager ? » Je lui demandai dans un murmure. Est-ce que ça comptait comme une prière, de s’adresser à une déesse en pensée, et de lui assurer que ce que je croyais en mes mots, et que j’éloignerais au moins temporairement d’elle sa haute-prêtresse ?

Je me décollai de Lucrétia et me relevai en poussant sur sa poitrine, veillant bien à ce qu’une partie de ma main reste toujours en contact avec la tâche scintillante, ne m’en séparant qu’au moment de déplacer mon bassin pour m’asseoir sur le côté de son corps. Je regrettais tous ces points de contact avec ses tâches scintillantes car je savais qu’elles étaient autant de clés pour posséder la prêtresse mais je n’étais pas assez souple pour réussir ce que je voulais faire de là où j’étais. D’abord j’abaissai mon corps pour poser ma bouche sur son sein droit, jouant de la langue avec son mamelon avant de la repositionner sur cette tâche qui avait progressé vers le centre de l’orbe au centre de mon attention. Puis une main vint jouer distraitement avec l’autre en le caressant plus fortement, avec plus de conviction. Mais c’était l’autre main qui avait la mission la plus importante alors qu’elle s’immisça doucement dans l’intimité de Lucrétia avant d’y remuer d’abord lentement, puis de plus en plus rapidement.

Si Lucrétia résistait, si Lucrétia n’utilisait pas sa magie, elle aurait bien du mal à m’arrêter. Mais je m’arrêterais avant qu’elle n’arrive aux portes de la libération de tout ce plaisir avec la seule intention de la frustrer.