Entre envie et raison | Zofia & Natael

Date indéfinie
Sur le chemin du retour après cette trame

Il ne reste plus qu'eux. Zofia et Natael ont vu leur route se séparer de celle de Théodoric puis d'Andran. De leur petit groupe, il n'y a plus que les deux originaires de Chiard qui font la route ensemble pour rentrer chez eux. Leur aventure est loin derrière et, pour la première fois depuis longtemps, ils peuvent être naturels l'un envers l'autre. Cela a commencé dès la veille où, après avoir laissé le chevalier partir de son côté, ils ont fini la route qui les a mené jusqu'à cette auberge. La soirée a été agréable, comme à chaque fois qu'il n'y a plus qu'eux. Puis ils sont allés se coucher.
A présent, le jour est levé et le puiné des d'Orman se presse. Il sait que son amie n'est pas du genre à traîner au lit et il voudrait la surprendre. Alors il se lève sans tarder, se prépare rapidement et sort de sa chambre. Il se rend auprès de l'aubergiste et passe commande. Il attend avec une certaine impatience. Pourtant, le plateau ne tarde pas à arriver et c'est les bras chargé qu'il remonte à l'étage. L'odeur du pain encore chaud embauche l'escalier et le couloir sur son passage. De quoi donner l'eau à la bouche à quiconque ouvrirait sa porte. Une petite motte de beurre est sous cloche. Les couverts s'entrechoquent parfois et fond tinter la porcelaine sortie pour plaire à leur noble client. Il n'est pourtant pas aussi exigeant et ils le savent sûrement étant donné que ce n'est pas la première fois qu'il loge chez eux. Le pot de confiture est neuf et encore paré de son carré de tissu. le jus de pommes est encore frais et la carafe se couvre lentement d'un film d'eau. La théière, quant à elle, est fumante.

Arrivé devant la porte de Zofia, Natael s'arrête. C'est malin... Comment il fait pour frapper maintenant ?
Bon... Tant pis.

-Toc toc ?

Zofia pousse un soupir d’aise et se retourne dans le lit. Habituée à dormir sur le sol durant ses longs voyages, la prêtresse s’est tout de même endormi dès que son visage s’est enfoui dans l’oreiller douillet de l’auberge et, bien que maintenant réveillée depuis quelques minutes, elle veut profiter encore de la chaleur des couvertures, une rareté chez la prêtresse qui se presse habituellement hors de sa chambre dès les premiers rayons de soleil. Séparés de leurs autres compagnons depuis peu, Natael et elle ont encore un peu de route à faire avant d’arriver à Chiard, mais Zofia n’est pas impatiente de seller sa jument à nouveau. Pour la première fois depuis le retour de son ami en péninsule, ils ont pu passer du temps seuls hier soir et prendre quelques nouvelles de ce qui se trame dans leur vie respective. Elle s’assoit dans le lit et s’étire, pensive; elle sait qu’ils devront se séparer à nouveau. Seulement, ça ne l’empêche pas de vouloir repousser un peu plus longtemps...Elle secoue la tête et finit par s’extirper des couvertures, décidée à ne pas retarder davantage. Zofia s’asperge le visage d’eau et posté ensuite devant le miroir, elle tresse ses cheveux et entame une coiffure simple.

-Toc toc?

Après avoir inséré la dernière épingle dans sa chevelure, le visage de la prêtresse s’illumine dès qu’elle reconnaît la voix de Natael derrière la porte. Encore vêtue d’une simple sous robe lui faisant office de robe de nuit, elle s’empresse tout de même d’entrouvrir la porte, se disant qu’il vient seulement pour annoncer qu’il est prêt à partir. L’odeur du pain chaud lui chatouille aussitôt les narines et en voyant la porcelaine, elle écarquille un peu les yeux; Oh! Elle ne s’est pas attendue à cela. Elle voit les deux couverts et comprends que c’est une invitation pour un petit-déjeuner, leur classique bien à eux lorsqu’ils passent du temps ensemble. Surprise qu’il apporte le tout à sa chambre, elle s’écarte quand même pour le laisser entrer, souriante et avec une certaine rougeur aux joues, un autre classique, mais bien à elle celui-là.  

-Un petit-déjeuner directement apporté à ma porte? Cela commence bien une journée.

Elle referme la porte dès qu’il met les pieds dans la pièce et marche vers la petite table. Elle tasse sa cuirasse qu’elle a posée sur une des chaises et les autres parties de son armures sur la table pour laisser la place au plateau et à Natael et les pose dans un coin de la pièce. Elle retire aussi sa chemise et son pantalon accrochés au dossier d’une des chaises, rendant la table un peu plus invitante.

Natael entre puis, une fois à l'intérieur, il remarque la tenue de Zofia et hausse un sourcil.

-Tu te lèves seulement ?

On pourrait croire que c'est une façon de lui faire remarquer qu'elle n'est pas habillée mais il ne réfléchit pas aussi loin. Il est simplement surpris qu'elle n'ait pas été debout plus tôt. D'ailleurs, il ne s'inquiète pas davantage de la situation et se dirige vers la table sans attendre de réaction de la part de son amie. Là, il libère ses mains et commence à mettre le couvert. Il n'a jamais été adepte du petit déjeuner sur plateau. A part au lit mais il n'en est pas question ici puisque Zofia n'est déjà plus sous les draps.

-Nous avons passé ces derniers jours entourés en permanence. Je me suis dit qu'un peu d'intimité ne nous ferait pas de mal. Et au diable les commérages.

Le vitaliste a clairement conscience que la situation peut apporter son lot de ragots mais, comme d'habitude, il n'en a cure. Tout ce qui compte, c'est l'instant présent. Et, pour le moment, tout ce qui l'intéresse, c'est son petit déjeuner avec la prêtresse. Ce n'est pas le premier qu'ils prennent à l'abri des regards et certainement pas le dernier. Rien ne sort de l'ordinaire en somme, hormis le lieu où il se tient.

Et la tenue de la jeune femme mais, ça, ils seront les seuls à le savoir.

La table est rapidement dressée, si bien que le pain était encore croquant et suffisamment chaud lorsqu'il prend place et en coupe un morceau chacun. De la farine parsème rapidement le plateau de bois tandis que la bonne odeur se fait un peu plus forte dans la pièce.

-Bien dormi ? S'intéresse-t-il en tournant un couteau dans la direction de Zofia avant de prendre l'autre pour prélever un peu de beurre sur la motte qui trône dans une soucoupe. Le tenancier me connaît bien, et plus ma famille s'approche des hautes sphères, plus il me dorlote. D'où le petit déjeuner de roi... et la porcelaine. Et la meilleure chambre. Fait-il en désignant la pièce d'un regard.

La veille, l'aubergiste lui a donné les clefs des deux chambres et il a lui-même sélectionné celle qu'il a remis à son amie. Il est totalement détaché en lui racontant cela, comme si ce n'était que de l'ordre du détail. Il se moque bien de dormir dans un lit de qualité ou sur un matelas plus médiocre, il a un assez bon sommeil. Il a donc cédé celle-ci sans le moindre mal et ce n'est ni par galanterie ni par manipulation. Il est bien trop franc pour cela et la jeune femme le connaît suffisamment pour le savoir à présent.

C’est après le commentaire du vitaliste et tout en posant son pantalon et sa chemise sur le lit qu’elle prend conscience de la tenue qu’elle porte. Si elle n’a pas été bénie d’une svelte carrure comme la plupart des autres femmes, ses formes elles sont belles et bien féminines et se devinent facilement sous le tissu léger. Elle attrape une couverture qu’elle plie et jette sur ses épaules, cachant au moins le décolleté de sa chemise de nuit. La prêtresse n’a d’ailleurs pas senti le regard de Natael glisser sur ses hanches ni sur sa poitrine, rendant la situation moins délicate. Il s’affaire plutôt à dresser la table, tout en lui avouant vouloir passer du temps seul avec elle et en ne se gardant pas de lui avouer qu’il n’en a que faire des commérages qui subsisteront. Zofia fixe un instant le plancher avant de tirer une chaise pour prendre place en face de son ami, tentant de retrouver un air plus détendu et naturel ; elle aimerait bien avoir sa désinvolture, mais elle a du mal. Depuis qu’ils passent souvent du temps ensembles, une voix ne cesse de lui souffler que ce n’est pas ainsi qu’ils devraient agir lorsque l’un des deux est fiancé. Pourtant, ils ne font rien de mal, non? Mais cela, leur entourage ne peuvent le savoir et les rumeurs commencent à se murmurer de plus en plus. Et puis, Natael a toujours été honnête avec elle, mais les petites attentions qu’il pose à son égard sème lentement une confusion dans son cœur qu’elle n’avait point au début.

Écartant toutes ces pensées et affamée, elle s’empresse de se servir une tranche de pain et de prendre une petite motte de beurre. Natael lui demande ensuite si elle a bien dormi et lui explique qu’il connaît bien l’endroit. Le regard de la prêtresse parcours la chambre pour revenir se darder dans le siens :

-J’ai dormi à point fermé. Et comme tu as pu constater, j’ai même osé paresser ce matin. Il m’en a fallu beaucoup pour quitter la chaleur des couvertures.

Elle prend l’anse de la carafe de jus de pomme pour leur en servir à tous les deux, un léger sourire se dessinant sur ses lèvres maintenant qu’elle se rappelle de la première fois où ils ont pris un petit-déjeuner ensemble. Cette fois-ci, c’est plutôt du jus au lieu du cidre et servi dans une délicate porcelaine. Cela change de la gamelle et du verre en bois qu’elle utilise lorsqu’elle est sur les routes. Si elle n’a jamais connu la pauvreté absolue, il y a aussi certains privilèges de noble que son statut de bourgeoise ne lui permet pas lorsqu’elle prend une chambre et un repas dans une auberge.

-Non seulement j’ai eu droit à la meilleure chambre, mais j’ai aussi le privilège d’un petit-déjeuner copieux servi dans une jolie porcelaine et apporté directement à ma porte. Si tu n’étais pas fiancé, je pourrais presque croire que tu me courtises, lance-t-elle à la blague.

Elle croque ensuite dans sa tranche de pain, voulant profiter du goût des céréales et du beurre avant de tartiner le pain de confiture.

Alors que Natael a porté son verre à ses lèvres pour goûter au jus de pommes que l'on vient de lui servir, il manque de s'étrangler avec la gorgée qu'il était en train d'avaler. Il se retient de recracher ce qu'il a en bouche et déglutit avec difficulté. Puis il toussote un peu alors qu'il était à deux doigts de la fausse route.

On dit de lui qu'il est maladroit mais il a trouvé de la concurrence apparemment...

Il lui faut plusieurs secondes pour s'en remettre avant de s'adosser à nouveau à sa chaise.

-Alors... Il s'éclaircit la gorge tandis qu'il sent qu'il pourrait avoir une nouvelle quinte s'il continuait de parler en l'état. D'une, si tu ne l'as pas encore remarqué, je ne sais pas courtiser une femme. Si j'ai eu quelques compagnes, cela n'a jamais été de mon fait : ce sont elles qui ont initié notre relation. Quand leur message a été assez clair pour que je le remarque...

C'est l'une des raisons pour lesquelles il n'a pas eu des dizaines d'amantes, en dehors du fait que ce n'est pas un collectionneur. Il ne sait pas attirer une femme à lui et il ne sait pas toujours voir lorsqu'elles s'intéressent au revers du personnage. Il en a laissé passer plus d'une et en a même blessé certaines sans le vouloir ni même comprendre la raison de leur rancœur à son égard.
A l'image des deux commères de l'hospice de Merval...

-De deux, j'ai été fiancé à mes dix-sept ans. Même si j'étais résolu à me faire plus sage à l'approche du mariage, ce n'est pas cela qui m'a arrêté auparavant.

Un détail qui a son importance... Durant les dix années qu'ont duré ses fiançailles, il n'a pas été très fidèle à sa future épouse. Cela lui paraissait si loin... Presque irréel. Il savait que les deux jeunes filles n'étaient que des enfants et il les considère encore comme tel aujourd'hui d'ailleurs. Ne pas avoir pu les rencontrer y contribue sans doute. D'autant que, si elle se souvient bien, il lui a déjà dit qu'il croyait suffisamment à l'amour pour se laisser déshériter en son nom. Alors fiançailles ou pas, il s'en moque.

-Et de trois... Il marque une pause, pas tout à fait certain d'avoir raison de lui dire ce qui va suivre. Mais elle l'apprendra tôt ou tard de toute façon. J'étais fiancé. Dit-il en soulignant le passé dans l'intonation de sa voix.

Natael la fixe et observe la réaction de la jeune femme. Il a été assez clair à son sens : il n'a absolument pas prévu de séduire Zofia malgré les apparences. Cependant, il n'a pas cherché à lui faire comprendre qu'il y serait opposé. Et... s'il ne s'est jamais empêché de vivre sa vie malgré l'engagement pris par ses parents en son nom, il ne doit plus rien à personne à présent.

Elle hausse les sourcils d’étonnement après la réaction du vitaliste ; a-t-elle dit quelque chose qu’elle ne devait pas ? Sans doute, puisqu’il toussote et semble avoir de la difficulté à ravaler son jus. Elle baisse un regard coupable sur son assiette et cache la chaleur de ses joues derrière son propre verre de jus en prenant une gorgée. Natael se ressaisit et s’explique, attirant de nouveau les orbes de Zofia dans les siennes. Elle retient un sourire lorsqu’il mentionne ne pas savoir faire la cour. Pas par raillerie à son égard, mais parce qu’elle partage ce trait. C’est un langage qu’elle a du mal à déchiffrer et qui lui vaut souvent quelques moqueries de la part de son entourage. Pourtant, si elle n’a jamais collectionné les amants, sa vie amoureuse n’en a pas été un désert pour autant. Ayant des devoirs envers son ordre, ce n’est seulement pas sa priorité. Il fut certes un temps où ça aurait dû l’être, mais les années se sont écoulées depuis.

Natael marque ensuite une longue pause, attisant la curiosité de la prêtresse, qui n’ose pas croquer à nouveau dans sa tranche de pain. Elle attend la suite et dès que le vitaliste emploie le passé pour parler de ses fiançailles, elle sent son cœur faire un bond. Prise par surprise et malgré la chaleur qui prend d’assaut son visage, elle soutient tout de même le regard de son ami, qui s’est vrillé dans le siens après cette annonce. Elle sent qu’il la scrute, attendant sans doute une réaction de sa part ; peut-être qu’il dit ne pas savoir courtiser, mais ce qu’il vient d’annoncer couplé à ce petit-déjeuner copieux et cette chambre aux draps luxueux lui montre le contraire. La table étant assez étroite, elle ose avancer sa main vers la chemise de Natael, frôlant sa peau pour aller chercher l’amulette de Néera pendouillant à son cou. Elle la fixe un instant, sentant les reliefs de la déesse sous son pouce, pour ensuite retrouver les prunelles du vitaliste. Bien qu’elle veuille détourner le visage, elle ne le fait point. Au contraire, Zofia puise dans ces parcelles de courage qui lui arrive d’avoir et se permet un commentaire :

-Nouvellement sans fiancée et déjà dans une chambre seul avec une femme. Je sais que tu n’en a cure des rumeurs, mais il faut avouer que c’est un décor particulier pour profiter d’un petit-déjeuner et converser avec une simple amie.

Sa voix s’est faite douce, mais Natael peut sans doute discerner un ton joueur. Entre temps, elle s’est avancé un peu plus vers lui sans s’en rendre compte, continuant de tripoter l’amulette de son ami et les yeux plus pétillants qu’à l’ordinaire.

-Qu’allons-nous faire de cette situation maintenant ? Souffle-t-elle.

Le cœur de Natael s'est soudainement mis à battre plus fort et plus vite. Les doigts de Zofia se sont aventurés dans un endroit qui, certes, n'a rien de pudique ni de tendancieux, mais cela ne se fait guère pour une femme s'immiscer de la sorte sous la chemise d'un homme. Il a senti sa peau effleurer la sienne. Enfin, à peine... Car elle était simplement venu chercher sa chaîne pour détailler son pendentif. Il réalise alors que leur amitié n'a jamais été tout à fait normale... Certes, il n'a rien fait pour provoquer quoi que ce soit chez elle -ou pas volontairement- mais il se souvient du regard de la prêtresse qui avait glissé sur son buste nu et de l'étincelle qu'il y avait vu ce jour-là.
La même étincelle qu'aujourd'hui...

Ils se sont toujours définis comme des amis mais il ne sait plus si c'est vrai ou s'ils ne faisaient que se mentir. Ses yeux la fixent inlassablement alors qu'elle lui demande ce qu'il vont faire désormais. La situation qu'elle évoque, il n'a pas cherché à la provoquer de manière délibérée. Elle a eu l'audace de tenter un rapprochement et il lit dans son regard autant que dans ses rougeurs l'envie qui est la sienne... Depuis combien de temps se retient-elle ? Depuis Merval ? Cela fait des mois de cela... Il est sans doute normal qu'elle réagisse aussitôt avoir appris qu'il était désormais disponible.
Natael peine à réfléchir alors qu'un immense flot de pensées le submerge. Et lui ? Que veut-il ? Qu'est-ce que cela changerait pour eux s'ils se lançaient là-dedans aujourd'hui ? Est-ce que ce n'est que pour une fois ? Non, elle s'est montré bien trop patiente pour l'affaire d'une nuit... Qu'envisage-t-elle sur le long cours ? Est-il prêt à risquer leur amitié ?

Les secondes s'égrainent et il finit par le réaliser lorsqu'une vague de la Trame vient déranger son bras qu'il écarte. Dans son geste, il vient poser sa main sur celle qui tient son amulette et mêle son pouce à celui de Zofia. Il met trop de temps à répondre et il en est conscient. D'accord, il est venu la trouver dans sa chambre, chambre qu'il lui a cédé et qu'il a payé pour elle. D'accord, il a apporté le petit déjeuner mais il a pris ce qu'on lui a mis sur le plateau, ce n'est pas lui qui a choisi la porcelaine. D'accord, elle est à moitié déshabillée mais ce n'était pas comme s'il l'avait anticipé... La situation prête à confusion concernant ses intentions, malgré ce qu'elle peut penser, mais... maintenant qu'elle le met devant le fait accompli... il se sent un peu couillon de ne pas savoir comment réagir.

-Je te l'ai dit, je n'ai pas calculé tout cela... C'est pourquoi... Tu me prends un peu de court.

Il lui adresse un sourire, à la fois désolé et triste de réagir de la sorte et amusé par son propre embarras. Son pouce caresse la main de la jeune femme qu'il a posé contre son torse. Il ne sait pas quoi lui répondre mais il a soudain peur de la perdre... Tout homme normalement constitué aurait probablement sauté sur l'occasion mais sa crainte le retient. Il ne s'approche pas mais ne s'éloigne pas non plus, gardant tout contre lui cette infime part d'elle que Zofia a osé approcher. Pour le peu de fois où ils se sont touchés, elle a sans doute pu remarquer que sa peau est d'une douceur rare et assez enivrante d'après ses anciennes partenaires. C'est la première fois que leur contact dépasse les limites de leurs vêtements et les doigts de la jeune femme reposent à moitié sur une part dénudée sur ce buste qu'elle a légèrement dévoilé que cherchant le collier. Et, là aussi, c'est extrêmement doux...

Finalement, Natael vient s'accouder à la table, se rapprochant de la prêtresse, comme s'il venait de retrouver ses esprits. Sérieux et presque fébrile, il l'interroge sur le même ton qu'elle l'a fait un peu plus tôt, ses prunelles toujours vrillées dans les siennes...

-Et toi, qu'est-ce que tu souhaites faire de cet instant ?

Cela ne lui fait pas peur. Même s'il se sent comme le pire des idiots de ne pas savoir lui répondre aussitôt, il a envie de connaître son avis sur la question. Son cœur bat fortement dans sa poitrine et sa respiration lui semble difficile tandis qu'il épie la jeune femme. Il veut qu'elle lève ses doutes sur certaines questions qui le taraudent sans savoir comment il réagira si elle lui dit qu'elle veut juste tenter l'expérience avec lui. Il le ferait sans doute mais sera-t-il déçu si elle souhaitait s'arrêter-là ou soulagé au contraire ? En fait, peu importe. Pour l'instant, seul le présent compte et il veut savoir ce qu'elle veut, maintenant. Ils auront bien le temps de voir le reste plus tard.
Et il caresse toujours sa main contre lui en attendant sa réponse, son regard droit dans le sien... Quoi qu'elle dise ou fasse, il la suivra... Il le sent.

Le temps s’écoule et si Natael peine à répondre, la prêtresse peut lire les milliers de questions qui semblent lui tarauder l’esprit. Ce ne serait tout de même pas la première fois qu’elle se trompe sur les réelles intentions d’un homme à son égard, mais Zofia sent qu’elle a semé quelque chose dans l’esprit du vitaliste, qui après un étrange mouvement de bras, vient prendre la main jouant avec son amulette pour la poser sur son torse. La prêtresse peut sentir les battements rapides de son cœur à travers la chaleur de sa peau, signe qu’il n’est pas indifférent à son contact. Elle a aussi droit a un sourire embarrassé, mais au lieu de s’écarter et d’imposer une nouvelle distance entre eux, il garde sa main contre lui, son pouce caressant sa peau à elle. S’il n’a jamais été un homme de peu de mots avec elle, elle lui a décidément volé la parole aujourd’hui. C’est plutôt avec cette nouvelle étincelle qui flamboie dans les yeux de Natael qu’elle comprends qu’il ne la repousserait pas de si tôt. Elle non plus, même s’ils ne devraient peut-être pas…

Il lui renvoie sa propre question, arrachant un léger rictus à la prêtresse, alors qu’il se rapproche. Zofia sent cette confusion qui étreint le vitaliste ; elle sait très bien que leur amitié n’a jamais été tout à fait normale, mais comme il l’a dit, il n’a pas prévu ce genre de développement. Elle non plus, même si l’idée lui a frôlé l’esprit dès leur rencontre à Merval, avant qu’elle ne comprenne qu’il porte un titre. Elle ne détourne pas les yeux, bien au contraire. D’un geste suave, elle vient tracer sa mâchoire de ses doigts doux pour quelqu’un maniant l’épée. Ici, ils sont seuls et seront déjà victime de commérages lorsque les gens les verront revenir tous les deux à Chiard. Seulement, une lueur presque triste traverse son regard, alors que son pouce vient frôler les lèvres de Natael :

-J’ai bien peur que ce que je souhaite maintenant ne soit pas compatible avec ce que nous devrions plutôt faire.

Jamais elle ne demanderait quoique ce soit de Natael et elle ne voudrait pour rien au monde risquer de perdre un ami. Trop de paramètres viennent compliquer une possible relation plus sérieuse entre eux. S’il est prêt à risquer ses terres et son titre pour la femme qu’il aime, Zofia ignore si elle est prête à affronter le courroux de la famille d’Orman. Celui de Père Lambert aussi et de son supérieur, le cousin de Natael et de possiblement perdre sa chance de gravir les échelons au sein de son ordre. Toutefois, dans cette chambre et ce matin, ils ne sont que tous les deux. Il n’y a qu’eux pour s’empêcher ce rapprochement. Ce ne serait pas non plus le seul secret qu’ils auraient partagé...Elle ignore aussi si quelque chose changera vraiment après s’ils retrouvent les draps de ce lit. Sans doute. Son visage près du siens et ses doigts caressant toujours sa mâchoire, elle ajoute :

-Jamais je n’exigerai de toi que tu sacrifies quoique ce soit pour moi. Peu importe ce qui se passera ce matin.

Plus les minutes passent et plus ils se montrent tous deux désireux d'aller plus loin. Leurs corps s'expriment d'une manière bien différentes de leurs esprits. Ils se caressent, se parcourent, se regardent... Mais quelque chose semble toujours les retenir. Natael a de plus en plus envie de franchir les derniers centimètres qui les séparent et c'est un sentiment très étrange car il n'avait pas cette aspiration là en entrant dans cette chambre tout à l'heure. Les choses ont dérivé à une vitesse vertigineuse. Mais tous deux sont conscients de ne pas appartenir au même monde. Leurs chemins ne devraient pas se mêler de cette manière... C'est apparemment ce qui empêche Zofia de sauter le pas alors que le vitaliste n'en a cure. Cependant, ses propres barrières s'effondrent soudain :

-Jamais je n’exigerai de toi que tu sacrifies quoique ce soit pour moi. Peu importe ce qui se passera ce matin.

Alors... Ce n'est pas l'affaire d'une fois ? Ni de simple attirance physique ? Son intérêt pour lui est très différent et elle se projette avant même de savoir si les choses pourraient fonctionner entre eux. Le noble se moque bien de savoir si elle n'est qu'un bourgeoise ou même une mendiante, cela n'a aucune importance. Ce n'est pas à un titre de lui dire à qui s'attacher ou non. Et les mots de la jeune femme le confortent dans son envie.

-Si jamais on en arrive là, tu n'auras pas à me le demander.

La main libre de Natael vient effleurer la joue de la prêtresse dans une caresse tandis qu'il se penche. Sa paume se pose là alors qu'il approche lentement son visage du sien. Lorsqu'il s'en trouve trop près, il ferme les yeux et continue sa progression. Leurs lèvres se rencontrent finalement et il dépose un baiser d'une grande douceur pour celles de Zofia. D'une grande douceur mais aussi... d'une grande envie. Son corps tout entier est déjà fébrile, à l'idée de la suite mais aussi en attente de la réaction de la jeune femme. Le temps se suspend une seconde avant qu'il ne réitère son geste, si tant est qu'elle ne l'en empêche pas. Cette fois, il n'a pas l'intention de s'arrêter dans son élan... Surtout si elle lui répond.

Son cœur bat fort et si elle ne connaît point les détails de demain et que sa gorge se serre déjà d’appréhension, elle laisse Natael s’approcher, profitant de cette caresse sur sa joue et retenant un frisson qui n’attend plus de parcourir son échine. Le petit-déjeuner refroidit, mais c’est bien le dernier des soucis du vitaliste et de la prêtresse. Et elle qui s’attendait à reprendre la route sous peu, les voilà à proximité l’un de l’autre, à deux doigts de poser un geste qui changera sans aucun doute leur dynamique jusque-là sans arrières pensées. Du moins, c’est ce qu’elle croyait. Il lui répond qu’elle n’aura pas à lui demander si jamais ils s’attachent, même si d’entendre cette affirmation de sa bouche lui serre davantage la gorge, mais que c’est l’inévitable dénouement. Et Zofia, trop obnubilée par le présent et trop faible pour faire taire ses envies le laisse lui frôler la peau, patiente quant à la suite, mais la respiration un peu plus rapide.

Il lui vole ensuite un baiser plein de douceur et de désir, lui arrachant cette fois-ci un frisson qu’elle a du mal à retenir. Peu importe ce qui résultera de cette étreinte, Zofia ne fait rien pour arrêter le tout, oubliant les possibles et futures blessures qui pourraient les écorcher dès qu’ils auront franchi ce pas. Son corps se presse davantage sur celui du vitaliste et ses baisers se font plus incitatifs, alors que la main qui traçait sa mâchoire se glisse sur sa nuque. L’autre se retire du torse pour guider celle du vitaliste jusqu’à son épaule et faire glisser la couverture au sol. Ce moment à eux ne les engage à rien et Zofia veut seulement profiter des baisers et caresses d’un homme qu’elle apprécie et qui l’a toujours traité avec respect et chaleur.

Zofia ne le repousse pas et Natael n'a plus de raisons de se retenir, même s'il a abandonné cette idée avant même de l'embrasser. Mais il comprend qu'en cet instant, ils ont une envie mutuelle et plus rien d'autre ne compte... Au diable les conséquences, ce n'est pas le moment d'y songer.
Le corps de la jeune femme se rapproche du sien mais leur posture les empêche de se coller tout à fait l'un à l'autre. Alors le noble pivote sur son siège afin que ses jambes ne soient plus sous la table et, d'un geste, il entraîne la prêtresse vers lui pour la positionner en amazone sur ses genoux. La force dont il a fait preuve peut surprendre étant donné sa carrure qui n'est pas celle d'un guerrier mais la pratique quotidienne de la magie fusèle le corps d'une manière plus discrète. Il n'a donc pas éprouvé de mal à faire une telle chose.

A présent, il peut enlacer Zofia de ses deux bras et même caresser son corps qui l'appelle. Un corps qui a l'air bien plus féminin dans cette tenue... Et il le remarque seulement. Il la serre contre lui, avec douceur et envie. Ses attentions sont relativement chastes pour le moment mais parce qu'il n'est pas homme à se précipiter et, ce, malgré le désir soudain qui le tenaille. Il parcourt son dos, passe par son flanc libre pour aller et venir sur le côté extérieur de sa cuisse, remonte sur son ventre puis se porte jusqu'à son cou... Ses gestes sont aussi langoureux et veloutés que sa peau. Il lui témoigne ses désirs mais avec le respect qui a toujours été le sien et avec l'affection qu'il lui porte, même si cela se limitait à de l'amitié jusqu'alors. Mais cette tension entre eux a toujours existé sans quoi ils ne sauteraient pas droit dans cette histoire dès la première occasion...

Les lèvres de Natael libèrent finalement celles de la prêtresse mais c'est dans un dessein bien particulier... Sa bouche l'embrasse toujours. Sur la joue, puis dans son cou. Il n'hésite pas à tracer une courbe entre ses clavicules pour passer de l'autre côté et affubler cette zone des mêmes attentions. Il découvre ainsi le goût de sa peau mais aussi l'odeur de ses cheveux... Il a oublié le petit déjeuner, les chevaux qui doivent être sellés, le voyage qu'ils doivent achever. Son visage est totalement détendu et trahit la faim qui l'assaille à présent aussi bien que son souffle plus court que la normale et son cœur battant. Mais la Trame ne manque pas de se rappeler de nouveau à lui et la main qui caressait une fois de plus la cuisse de la jeune femme se chasse d'elle-même. Dans un geste aussi soudain qu'involontaire, elle s'écarte et frappe malencontreusement la table. Pas assez pour se faire vraiment mal mais suffisamment pour que les cuillères tintent contre la porcelaine des tasses.
Le noble interrompt son baiser et soupire dans le cou de la jeune femme. Ils n'ont jamais évoqués ces mouvements incontrôlés mais elle les a probablement déjà remarqué car ils se produisent souvent en sa présence. Un peu trop d'ailleurs... Ce qui constitue un indice supplémentaire quant à l'intérêt qu'il lui porte depuis le début, même s'il s'en rend seulement compte.

-Désolé. Dit-il en se redressant afin de plonger son regard dans celui de Zofia. Mais cela va se reproduire dans l'heure qui vient... Et je ne vais pas pouvoir me concentrer pour l'éviter. Enfin, je pourrais... Mais je ne le veux pas.

Son air est moins sévère que d'ordinaire. Son voix est elle aussi très différente... Moins rude... Un peu plus mélodieuse... Tout simplement vivante. Son attention n'est portée sur rien d'autre que ce moment et sur elle. Il pourrait faire en sorte de se contrôler, comme il l'a fait avec les femmes qu'il a fréquenté en tant que Natael, mais il n'en a pas envie ici. Il veut tout simplement se plonger dans cette matinée à cœur perdu. Et peu importe si sa main s'envole sans raison, si un frisson le parcourt ou si sa jambe est prise d'un spasme nerveux. Mais il préfère autant la prévenir pour qu'elle ne se formalise pas de son comportement étrange et vive ce moment aussi pleinement que lui...

Zofia se laisse attraper, surprise par la poigne de Natael et ne peut s’empêcher de sourire à travers leur échange de baisers. Elle le laisse parcourir son corps de ses mains, un corps à la musculature définit par ses entraînements à l’épée, mais non dénué de formes à explorer. Une certaine chaleur se loge au creux de son bas-ventre, sans doute par anticipation, car le vitaliste est patient malgré cette envie que la prêtresse sent émaner de son ami...Enfin, amant? C’est difficile pour elle de définir vraiment sa relation avec le vitaliste maintenant qu’ils sont si près de s’abandonner ainsi l’un à l’autre. Elle frissonne sous ses gestes tendres et encore plus lorsque ses lèvres frôlent son cou, le genre de baiser pour lequel elle devient vite impuissante. Jamais elle n’a goûté à la douceur de ses lèvres ni senti le vitaliste si près. Enivrée, ses mains à elle se glissent sous sa chemise, alors que les siennes touche sa cuisse, remontant le tissu de sa robe et dénudant davantage sa peau. Leur souffle court s’entremêlent, mais dès qu’elle empoigne le bas de la chemise à Natael dans le but de lui retirer, il entame un geste brusque. La porcelaine tinte et bien malgré elle, il cesse de l’embrasser, pas sans la fixer d’un regard fiévreux.

Pour la première fois, elle remarque combien ses traits se sont adoucis. Le ton qu’il a toujours employé avec elle n’a jamais été froid, mais aujourd’hui, à ce moment précis, il est différent. Ce qu’il lui avoue l’a fait sourire. Le désir lui a donné déjà des rougeurs aux joues, mais cette fois-ci, c’est autre chose qui la fait rougir : c’est cette attention particulière qu’il veut lui porter. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’elle remarque ces gestes incontrôlables chez Natael, mais n’a jamais posé de questions. Elle prend sa main, embrasse celle-ci et se lève, pas sans la lâcher. Le regard toujours ancré dans le bleu de ses yeux, elle les dirigent tout les deux lentement vers le lit. Ce n’est pas ces gestes impromptus qui l’empêcheront de profiter de leur moment.

-Ce n’est pas la première fois que ces gestes se produisent en ma présence, souffle-t-elle. J’ignorais que je nuisais autant à ta concentration.

Elle dirige ensuite la main de Natael sur le cordon de son décolleté pour qu’il lui retire son vêtement, alors que les siennes empoignent de nouveau le bas de sa chemise. Le soleil s’est déjà levé depuis quelque temps maintenant, ses rayons traversant les vitraux de la fenêtre et dessinant la silhouette invitante de Natael. Le regard de la prêtresse se pose sur son armure qui trône dans un coin. Ils devraient être en route bientôt et si une petite voix lui souffle à nouveau qu’ils ne devraient pas tarder, Zofia l’ignore, préférant de loin cette chambre et le toucher du vitaliste, en profitant comme si ce moment d’intimité à tous les deux est le dernier. Qui sait où l’emmènera sa prochaine mission à elle et quand leur route devront se séparer à nouveau? Qui sait aussi ce qui passera si ce qu’ils s’apprêtent à faire se sait au sein de leur entourag e? Elle écarte ces pensées, profitant de l’étreinte de Natael.

Natael se laisse attirer vers la destination choisie par Zofia et qu'il connaît d'avance. Pour l'instant, sa seule réaction à son petit dérapage a été de baiser sa main meurtrie par le choc. Elle la garde dans la sienne alors qu'elle les mène près du lit à peine défait. Il ne sera plus dans le même état d'ici peu...
La jeune femme lui avoue avoir déjà remarqué ses gestes étranges et ne s'en ai jamais formalisé. Ils savent maintenant tous les deux ce que cela signifie... Lui qui a passé ces vingt dernières années à maintenir une concentration quasi constante n'en a jamais été parfaitement capable en sa présence. Ainsi, depuis le début, il ne lui est pas insensible. Pourtant, il ne l'a pas rencontré sous son meilleur jour. Il y a eu ce quiproquo sur ses intentions, ce doute quant à son identité, cette gifle qui a mis la jeune femme à terre... Mais tout cela n'a rien empêcher. Alors, tout ce qu'il a à lui répondre, c'est un sourire en coin avant de revenir l'embrasser avec envie.

La vitaliste monte sa seconde main sur le nœud de la chemise de nuit. Dextre et senestre saisissent chacune un cordon et tirent dessus d'un même mouvement. Le vêtement ne s'évase pas encore mais c'est sans compter sur les doigts du d'Orman qui manœuvrent avec agilité sur le laçage afin que la robe légère devienne plus lâche... Mais au lieu de la lui retirer tout de suite, il l'enlace et plonge de nouveau la tête dans son cou pour couvrir sa peau de baisers ardents et pourtant si doux.

C'est une sensation étrange... D'être en compagnie de quelqu'un que l'on connaît si bien, d'une amie... Mais d'engager quelque chose de bien plus qu'amical avec elle. C'est naturel car ils savent rapidement repérer ce qui plaît à l'autre ou non, et en même temps ça ne l'est pas du tout... Peut-être parce que leur liaison n'a connu aucun préliminaire. La situation change de but en blanc, sans préavis d'aucune sorte. C'est bizarre et, pourtant, il ne peut pas s'en empêcher alors qu'il savoure cette peau sous ses lèvres.
Assez rapidement, Natael doit s'écarter pour laisser sa chemise le quitter. Elle le retrouve alors tel qu'elle l'a aperçu cette nuit où son intérêt pour lui s'est éveillé un peu plus encore. Il n'éprouve toujours aucune pudeur dans cette situation, et moins encore alors qu'il s'apprête à les mettre sur un pied d'égalité.

Sans attendre, le vitaliste revient tout contre Zofia et l'enlace avec toute la force de son désir. D'une pression sur son talon, il retire l'une de ses chaussures, puis la seconde, avant de les écarter du pied. Pendant ce temps, ses mains remontent le long du corps de la jeune femme. Sa bouche quitte son cou pour descendre vers son trapèze. Mais alors que sa route va être interrompue par un pan de tissu, celui-ci s'écarte. Dans le dos de la prêtresse, les doigts du noble se referment sur sa chemise de nuit, évasant le col, élargissant son décolleté, mettant à nu son corps centimètre par centimètre. Ainsi, Natael progresse lentement jusqu'à l'épaule de la jeune femme.

A présent, tout ce qui retient la robe, ce sont ses mains et leurs bustes plaqués l'un contre l'autre...

Le vitaliste se redresse et vient embrasser la prêtresse tandis que son corps s'écarte légèrement du sien. Il tire doucement sur le dos de la chemise de nuit afin qu'elle continue de descendre lentement de long de la silhouette féminine. Il ne peut pas le voir mais le décolleté de Zofia devient de plus en plus vertigineux au point que ses rondeurs commencent à apparaître. Finalement, un sein est mis à jour, bientôt suivi par le second. La robe descend toujours et c'est le ventre maintenant qui goûte à la douceur de l'air ambiant. Soudain, les mains lâchent prise et le tissu volette jusque sur le sol, rejoignant sa chemise qui a fini... il ne sait trop où.
A nouveau, Natael enlace la jeune femme et il sent sa poitrine tendue contre son torse. Ce peau à peau lui arrache un soupir au milieu de leurs baisers... Désormais, il n'y a plus aucune question. C'est lui, elle, ici et maintenant.

Le noble trouve les poignets de sa partenaire et les passe derrière sa nuque, lui suggérant de s'accrocher à lui. Puis il se baisse légèrement et pose ses mains sous ses cuisses. D'un geste, il la soulève de terre et la porte ainsi quelques secondes. Il pivote ensuite et pose un genou sur la couche. Il s'avance d'un ou deux pas avant de se pencher pour venir allonger la prêtresse sur les draps fins. Il ne se repose pas sur elle, au contraire. Il retourne dans son cou et sur ses épaules puis continue de descendre. Il veut parcourir son corps tout entier de ses mains, de ses lèvres et de sa langue à travers des attentions bien moins chastes que les précédentes. Il halète déjà de désir mais il ne veut pas y succomber tout de suite... Il veut prendre le temps d'apprendre à la connaître dans ce contexte plus charnel aussi bien qu'il la connaissait jusque là. Il veut savoir ce qui lui plaît le plus et la combler avant même de faire corps avec elle.

Elle ne peut s’empêcher de sourire elle aussi lorsqu’un rictus en coin fend les lèvres du vitaliste, une chose qu’il a souvent réservé que pour elle. Lui a-t-elle fait cet effet dès leur première rencontre ? La prêtresse l’ignore, mais une année s’est écoulée depuis, solidifiant leur amitié depuis et la transformant même, car Zofia le laisse maintenant l’embrasser et la toucher. Les lèvres de Natael se posent à nouveau dans son cou pendant qu’il défait le nœud de sa robe de nuit. Elle sourit d’aise et ferme les yeux un instant, ses mains tenant toujours les pans de sa chemise et le cœur battant d’excitation à l’idée de lui retirer. Il l’enlace contre lui et Natael peu sans doute sentir la respiration plus haletante de Zofia dans sa nuque. Il est doux, attentionné et prend son temps, sans doute désireux de prolonger cet instant. Elle ne s’en plaint point, mais dès qu’il se décolle un peu elle ne perd pas une seconde pour lui retirer sa chemise. Ses mains se promènent ensuite sur son torse dénudé, profitant enfin de la chaleur de sa peau, pendant que la sienne se découvre de plus en plus sous les baisers de son ami. Elle frissonne et si son corps aimerait que les choses se pressent, elle savoure plutôt, laissant Natael la découvrir à son rythme. Ainsi contre elle, elle peut sentir les battements de cœur effrénés du vitaliste, attisant de plus en plus son désir à elle.

Sa chemise de nuit quitte finalement ses formes et le soupir que pousse Natael alors qu’il la tient contre lui, lui donne une bouffée de chaleur. Ses doigts se glissent sur sa nuque et dans les cheveux couleur blé de son ami et c’est à son tour de lui embrasser le cou pendant qu’il la transporte jusqu’au lit. S’accrochant à son regard pétillant et pas sans quitter le contact de son torse, elle le laisse l’allonger sur le lit, à la merci de ses baisers qui descendent maintenant plus bas et qui lui arrache à son tour un soupir. Il pourrait écourter la chose, mais cela ne semble pas faire parti des plans de Natael, qui paraît déterminer à lui plaire et à prolonger le plaisir. S’il lui a souvent dit qu’il est un pied pour courtiser, il sait comment la faire frissonner avec cette suavité dont il fait preuve à son égard. Suavité qu’elle ne lui connaissait pas et qu’elle découvre et apprivoise. Rien ne sera plus comme avant après ce matin, mais cela, elle le savait déjà dès que Natael lui a volé un premier baiser. Elle n’ose pas y penser, préférant s’attarder sur la chaleur de son ami contre la sienne et ses caresses.

Ses ongles s’enfoncent légèrement dans la peau du vitaliste et sa main libre vient s’attarder sur son pantalon. Habituellement pudique, il n’en est pas question ici. Elle veut lui soutirer des gémissements de plaisir aussi, révéler ce qui le fait fondre. Sa jambe entoure ses hanches alors que sa main descend le pantalon de Natael à mi-fesse. Ses doigts se glissent ensuite devant.

Alors que Natael prévoyait de descendre toujours plus bas sur le corps de la prêtresse, Zofia le retient de sa main et de sa jambe. Sans comprendre, il ne cherche pas à se soustraire à sa volonté et s'attarde alors plus longuement qu'il ne le pensait sur sa poitrine. De ses mains, il cajole ses formes. De ses lèvres, il les suit. De sa langue, il les dessine. Et pendant ce temps, l'attache de son pantalon est défaite et élargie pour que des doigts graciles le descendent et se glissent jusqu'à ce qui s'en échappe désormais. Le vitaliste est assez surpris mais ne s'interrompt pas pour autant. Tout ce qui le trahit, c'est un gémissement accompagné d'un soupir tandis qu'elle atteint son membre pour le couvrir d'attentions.

Cela, il ne s'y attendait... Mais on ne peut pas dire que cela lui déplaît. Il a compris et, plutôt que de se tenir prêt à pouvoir se rendre plus bas sur le corps de la prêtresse, il s'installe pour rester ici. Alors qu'il se tenait au-dessus d'elle, il s'étend sur le côté, se rendant plus accessible pour elle sans pour autant délaisser ses seins qu'il commence à bien connaître. Plutôt que de se limiter à ses rondeurs, il remonte un peu pour venir embrasser ses pointes. De sa main, il serre le mamelon avec envie avant que sa langue ne vienne darder à son tour ce petit pan de chair rose et durci par le désir. Il s'attache à le faire gonfler encore davantage malgré les soupirs que Zofia lui arrache.
Mais si elle est joueuse, lui aussi. Ses doigts s'arrêtent bientôt de cajoler sa poitrine. Ils descendent sur le ventre de la jeune femme et continuent leur progression. Si sa bouche ne peut aller plus bas, il peut au moins les mettre tous deux sur un pied d'égalité. Ainsi, il atteint sa cuisse et remonte lentement, sur la face intérieure cette fois. Il remonte avec une infinie langueur, s'approchant toujours plus de l'entrejambe de son amie et donnant à la fois l'impression de ne jamais l'atteindre...

Mais tout cela doit bien prendre fin un jour et son désir à lui continue de croître tandis qu'il s'amuse à la faire languir. Ainsi, ses doigts effleurent enfin son trésor caché. Ils s'immiscent entre ses lèvres qui ne les espéraient plus et caressent cette zone intime avec douceur. Durant de longues minutes, Natael s'attache à la faire soupirer autant qu'elle l'a fait soupirer depuis qu'ils sont allongés. Une tendre revanche avant que ses phalanges n'aillent encore un peu plus loin... Entrant lentement en elle pour entamer de langoureuses allées et venues, sortant totalement d'elle avant de la pénétrer de nouveau aussi loin qu'il le peut. Il est doux langoureux à la fois. Il a envie d'elle autant qu'il veut l'entendre prendre du plaisir dans ce qu'ils font... Aussi interdit cela soit-il.

A ce stade, peut-on encore dire qu'ils ne sont que de simples amis ?...

La tête vide, les joues rouges de plaisir, Zofia ne pense plus, s’abandonnant aux mains de son nouvel amant tandis que les siennes s’attardent sur son entrejambe, massant et sentant qu’il y a de moins en moins de place. Il gémit, soupir et bientôt, ceux de la prêtresse rejoint les siens, alors qu’un brasier de désir lui brûle le bas-ventre et qu’il couvre sa poitrine de baisers. Joueur, il s’attarde sur sa cuisse et la fait languir, arrachant un sourire en coin à la jeune femme entre deux soupirs. Elle continue de lui faire plaisir, même si sa tête tourne un peu et qu’elle commence a avoir chaud malgré sa peau complètement nu. Elle ne sait pas tellement ce qu’elle fait, mais se contente de suivre le flot de leur désir, avide de Natael et de ses caresses. Son corps se raidit et s’arque dès qu’elle sent son touché plus bas. Ses ongles s’enfoncent toujours plus dans le dos du vitaliste et le visage dans son cou, elle gémit près de son oreille lorsqu’il entame des mouvements de va-et-vient avec ses doigts, lui effleurant le sexe.

Les secondes s’écoulent...ou sans doute les minutes. Zofia ne sait plus. Elle en oublie peu à peu sa main qui s’activait dans le pantalon du vitaliste. Celle-ci vient plutôt empoigner le drap et le serrer, pendant que de plus longs gémissements s’échappent d’entre ses lèvres et que ses yeux se ferment un instant. Elle se colle ensuite davantage contre lui et lui vole à nouveau des baisers, profitant des doigts habiles de son nouvel amant en elle. Et puis, elle le pousse un peu plus fiévreusement sur le dos, le souffle haletant et les yeux sans doute étincelant de plaisir. Allumée par les préliminaires de Natael et voulant plus, elle lui retire son pantalon et s’installe à califourchon sur lui. Après un premier mouvement de hanche, des mèches commencent déjà à s’échapper de sa coiffure.

Elle prend la main du vitaliste et la porte à ses lèvres un instant, croisant son regard et continuant ses mouvements de hanche, des mouvements lents, mais sensuels. Rares ont été les fois où elle a partagé ce genre d’intimité avec quelqu’un, encore moins un homme qui n’est point de son statut. Décidément, rien ne sera plus comme avant, mais Zofia est prête à accepter ce qui en suivra. Tout ce qu’elle souhaite, c’est de ne pas le perdre.

La voix de Zofia à son oreille lui provoque des frissons et l'encourage à continuer. Il ne s'en lasse d'ailleurs pas et pourrait poursuive jusqu'à ce qu'elle atteigne le bout de son plaisir. Mais sa partenaire en décide autrement. D'une pression sur son torse, elle lui demande de s'allonger. Il ne s'y oppose pas et s'exécute. Il sait où elle veut en venir et c'est sans surprise qu'il la regarde l'enfourcher après qu'il l'ait aidé à se dévêtir totalement.

C'est fois, ils y sont... Et ils ne peuvent plus se définir comme des amis. Ils sont amants, pour le meilleur et pour le pire. Et, en cet instant, c'est surtout pour le meilleur. Les mains de Natael tiennent les hanches de la jeune femme et accompagnent ses mouvements. Elle ondule sur lui avec langueur et il se délecte du plaisir qu'elle provoque en lui. Il semble chasser une mouche qui n'existe pas sur son bras et revient aussitôt étreindre les formes de la prêtresse. La Trame l'avait laissé tranquille jusque là, cela aurait été trop beau qu'ils parviennent à aller jusqu'au bout sans être dérangé.
Le noble détaille ce corps qu'il n'a pas vraiment eu l'occasion de regarder jusque là mais il se plonge aussi dans les prunelles de Zofia. Il veut y lire ce qu'elle doit lire dans ses propres yeux : le plaisir.

Le temps s'écoule et leurs respirations se font de plus en plus difficiles. Leurs cœurs battent à un rythme effréné et pourtant tout est loin d'être fini. Finalement, Natael se redresse et vient enlacer son amante. Il la couvre de baisers et l'embrasse. Sa peau de velours frôlent la sienne tandis qu'elle se déhanche toujours sur lui. Les mains du vitaliste parcourent le corps de la jeune femme et, bientôt, une sensation vient s'ajouter à celle de ses caresses. Il a chargé ses mains de magie... Il n'en fait rien et n'a pas l'intention de lancer le moindre sort, surtout dans cet état. Il veut seulement lui faire ressentir tout ce qu'elle provoque en lui... L'homme, mais aussi le mage. Cela ne dure pas longtemps, juste quelques minutes... Ce serait trop risquer de faire durer cela trop longtemps.

Le noble interrompt ses caresses et étreint Zofia. Puis il roule avec elle pour intervertir leurs positions. Non pas que la situation lui déplaise, bien au contraire, mais elle est en droit de simplement profiter, elle aussi. Une fois allongé sur elle, il plie ses jambes en dessous des siennes et s'installe avant de reprendre leurs ébats là où il les a interrompu. Ses allées et venues sont à l'image de celles de la prêtresse : lentes et langoureuses, à ceci près qu'il est désormais en mesure de leur donner bien plus d'ampleur. Il sort presque d'elle avant de s'avancer de nouveau jusqu'à ce que leurs bassins se plaquent l'un contre l'autre. C'est doux... et intense à la fois. Natael lui-même aurait du mal à décrire cette sensation. La passion est là mais il y a autre chose qui rend ce moment si différent...
De la façon dont il s'est installé, le noble a les mains libres pour parcourir le corps de son amante de multiples attentions. Il peut aussi embrasser le haut de son buste tout autant que ses lèvres et ne s'en prive pas. Il a du mal à respirer mais cela ne semble pas le déranger le moins du monde. Ce n'est que la manifestation de son plaisir qui grandit et il s'attache à mettre Zofia dans le même état... D'ailleurs, une de ses mains se glisse entre eux jusqu'à ce petit bourgeon si sensible. Il est gorgé de plaisir et Natael se met à le caresser à l'aide de son pouce pour le solliciter plus encore que ne le faisaient ses va-et-vient.

Elle le laisse observer son corps qui s’offre pleinement à sa vue, un corps à la musculature découpée et comportant une seule cicatrice, vestige de ce qui aurait pu la tuer. Si elle a une relation compliquée avec celui-ci, la prêtresse se sent tout de même désiré dans les yeux de Natael, aidant beaucoup à faire taire cette pudeur qui l’habite souvent. Elle se cambre dès qu’une étrange sensation de picotement lui parcours la peau après que Natael se soit redressé. Elle reconnaît peu à peu la magie de la vie qui lui parcours l’échine. Seulement, ce n’est pas la sienne, mais celle du vitaliste, qui vient la réchauffer davantage et l’enivrée. Jamais le peu d’amants qu’elle a eu savait maîtriser les arcanes, ce qui apporte un lot de nouvelles sensations pour la prêtresse et la fait gémir encore. Leur moment n’est point dénué de passion, mais autre chose motive les gestes de Zofia. Peut-être ceux du vitaliste aussi puisqu’elle croît pouvoir le lire à travers sa magie et ses gestes d’une douceur que de simples amants ne partageraient sans doute pas. Du moins, pas comme ça. Elle sent l’emprise de Natael se refermer de plus en plus sur son cœur, mais ce n’est pas ce qui l’arrêtera de si tôt. Elle lui fait confiance ; jamais il ne le lui piétinera. Si elle lui offre son corps aujourd’hui, c’est qu’elle veut partager ce moment avec lui. Lui aussi d’ailleurs.

La prêtresse le laisse s’agenouiller au-dessus d’elle et les mouvements de bassin de Natael se font plus fermes et puissants, sans perdre de leur lascivité. Ses jambes lui entourent le bas du dos, comme si elle veut le retenir à elle et serre davantage les draps. Avec le souffle rapide de son amant contre son cou, ce pouce qui s’affaire plus bas, le nom de celui-ci finit par s’échapper d’entre ses lèvres, comme un appel à ce qu’il continue. Les minutes s’écoulent jusqu’à ce qu’elle sente son plaisir atteindre presque son paroxysme. Seulement, attentive à celui de Natael, elle ne l’arrête pas, pas tant que leurs gémissements ne montent pas d’Octave à l’unisson. Ses doigts se glissent à nouveau dans la chevelure de son amant et l’empoigne, à la fois avec passion, mais aussi avec douceur et amour.

Son prénom susurré entre deux gémissement agit comme un signal pour le vitaliste. Il retire sa main et étreint Zofia, plaquant son corps contre le sien tout en continuant d'aller et venir en elle. Ses gestes se sont fait plus fiévreux au fur et à mesure que le plaisir montait en lui. Il reste cependant égal à lui-même car la volupté demeure malgré la passion qui les embrase. L'issue de leurs ébats est proche et il n'a pas l'intention de la repousser. Et il sait déjà que la prêtresse l'attend...

-Laisse-toi aller... Souffle-t-il à l'oreille de la jeune femme qu'il n'est plus en état d'embrasser depuis un moment déjà...

Les secondes s'égrainent encore avant que le corps de Natael ne se raidisse au-dessus de celui de son amante. Il continue néanmoins pour ne pas interrompre la jouissance de sa partenaire. Peu à peu, leurs voix et leurs muscles s'apaisent et le vitaliste ralentit jusqu'à s'arrêter. A l'aide de ses coudes, il s'empêche de s'écrouler sur Zofia afin de ne pas l'écraser. La tête plongée dans son cou, il reprend son souffle tant bien que mal. Sa peau dorée est couverte d'une fine pellicule de sueur. C'était doux mais... intense.
Finalement, les lèvres succombent à la tentation de la peau de son amante si proche et il dépose quelques baisers dans son cou, langoureux mais moins passionnés. Puis il se redresse et vient trouver sa bouche pour l'embrasser avec la force des émotions qu'ils viennent de vivre. Le désir est passé. Le plaisir les habite encore. Mais autre chose demeure...

Toutes ces questions et tous ces doutes reviendront bientôt, tout comme la notion d'interdit qui entoure ce qu'ils viennent de faire. Mais pas tout de suite. Ils sont encore dans l'instant présent.

Le visage de Natael est encore tout près de celui de Zofia alors qu'il vient de cesser ses baisers.

-Ce n'est pas comme ça que j'imaginais cette matinée... Confia-t-il à mi-voix.

Il n'y a pas de regret dans la voix. Il ne réalise pas non plus ce qu'il s'est passé. Pas encore tout à fait. Il y a une heure à peine, il était simplement venu apporter le petit déjeuner à une amie. Maintenant, il est au lit avec la femme à qui il vient juste de faire l'amour... Il est troublé par ce soudain revirement de situation. Il se redresse un peu, juste assez pour pouvoir plonger son regard dans le sien. De la voir étendue sous lui, de détailler sa coiffure à moitié faite, de sentir son corps brûlant contre le sien et sa respiration contre sa peau, il ne peut en douter : ils l'ont vraiment fait...

-Pour une fois... Les rumeurs à mon sujet diront vrai.

Il circule tant de mensonges sur son compte... Savoir que tout ne sera pas à jeter serait presque une consolation. Même s'il n'a pas l'intention de les exposer à ce tapage public. Lui s'en moque mais la situation sera bien plus difficile pour Zofia. Dans son intérêt, il vaut mieux que personne ne sache la vérité. Mais ils auront bien l'occasion d'en reparler avant leur arrivée. Pour l'heure, il peut encore profiter de tout ceci un petit moment.
Effleurant sa joue, Natael l'embrasse de nouveau avec plus de douceur. Puis il descend légèrement dans le lit, quittant les reins de son amante par la même occasion, pour venir poser sa tête contre elle. Sans le savoir, il s'est installé sur cette cicatrice au milieu de son buste. Il est apaisé et étreint la jeune femme avec tendresse. Ses yeux se ferment tandis qu'il écoute son cœur ralentir peu à peu.

Un énorme frisson lui court dans le dos et son corps se raidit dès que Natael lui souffle de se laisser aller. Le plaisir monte et après une sensation qui lui électrifie le bas-ventre, elle ne tient plus et un long gémissement d'orgasme résonne dans la chambre, lui faisant voir des étoiles. Le souffle court et encore sonnée, elle s'accroche toujours au cou du vitaliste, pendant que ses mouvements de bassin ralentissent et qu'elle s'enfonce dans le matelas. Elle sent ses jambes trembler et ses bras aussi après toute cette tension dans ses muscles, mais garde Natael encore contre elle, comme s'il allait disparaître si elle le lâchait et voulant profiter encore de sa chaleur rassurante.

Essoufflé lui aussi, il lui embrasse le cou quelques secondes et vient lui voler un autre baiser, celui-là plein de tendresse. Elle lui caresse à nouveau la mâchoire, tout en reprenant son souffle, les joues rouges d'effort et sa chevelure en bataille pendant qu'il la regarde. Ce qu'il lui avoue la fait sourire doucement : 

-Et je ne m'attendais pas à ce que tu répondes de la sorte à mes avances, réplique-t-elle, les yeux encore brillants.

Elle n'a pas l'impression qu'il regrette cet ébat, mais peu sentir que des milliers de questions lui traversent l'esprit. Il paraît déboussolé, alors qu’elle est sereine malgré tout ce qu’impliquera ce qui vient de se passer. Elle ne veut point de soucis pour l’instant, même si elle sait que cet interdit devrait peut-être être le dernier. Auront-ils la force nécessaire pour que ce le soit ? Ça, elle ne peut l’affirmer. Du moins, pour elle ce sera difficile. Ce qu’elle désir toutefois pour le moment, c’est qu’il profite tout les deux de cet accalmie ensemble, avant d’affronter la tempête de regards accusateurs et les questions qui seront sans doute trop personnelles.

-Pour une fois... Les rumeurs à mon sujet diront vrai.

Cette affirmation l’a fait déglutir et l’a ramène à l’ordre, transformant cette sérénité qui l’habitait en inquiétude ; elle non plus ne regrette pas du tout ce rapprochement physique, mais ça ne l’empêche pas d’appréhender les réactions des autres. Le vitaliste l’embrasse avec une affection tout nouvelle et se love contre elle. Silencieuse, elle se demande comment aborder la question qu’ils devraient mettre au clair avant de partir, tout en caressant de sa main la chevelure de Natael. Les secondes de silences s’éternisent ; elle n’a pas envie que ça se termine, car elle est bien ici. Pourtant, elle se lance, passant toujours sa main dans les cheveux de son nouvel amant avec tendresse.

-Que devrions-nous faire maintenant de ce qui vient de se passer? Ce ne serait pas le premier secret que nous partageons.

Elle veut seulement qu’il comprenne qu’elle le suivra, peu importe ce qu’il désire faire de ce tout nouveau chemin qu’ils viennent de tracer, sans le vouloir, ensemble. Choisiront-ils de continuer et d’écouter leur désir ou de mettre un terme à ces étreintes qui pourraient risquer de détruire cette amitié qu’ils se sont construite et compliquer les choses ? Ce qui s’est passé témoigne tout de même d’une attirance l’un pour l’autre qui était peut-être là depuis le début et qui allait tôt ou tard se manifester. Zofia est patiente et ne s’attend pas nécessairement à une réponse dès ce matin de la part de Natael. Elle-même doit encore se familiariser à la situation. Elle ne fait que lancer la chose, peut-être pour se rassurer que tout ira bien.

Elle peut entendre les gens s’activer dehors, signe que le temps s’est écoulé trop vite et qu’ils devront reprendre la route sous peu bien malgré elle. Elle ignore quand elle aura la force de se lever d’ailleurs.

Natael pourrait bien s'endormir ainsi. Il n'est pas de ses hommes qui ont besoin de manifester leur virilité à tout bout de champ et apprécie aussi de se laisser cajoler parfois. La main de Zofia sur ses cheveux chasse les questions qu'il se posait mais aussi ce sentiment étrange qui l'habite alors que deux amis viennent de devenir des amants. Il se sent bien et sa respiration est proche de celle du sommeil. Cependant, c'est sans compter sur la Trame et il a un mouvement un peu brusque de la jambe alors que son esprit s'éloignait lentement de la réalité... Il grogne doucement, pestant contre la magie qui n'a pas voulu le laisser profiter de cette plénitude jusqu'au bout.

C'est cet instant que la prêtresse choisit pour aborder deux des dizaines de questions épineuses qui s'opposent à eux désormais. Toujours allongé sur le buste de cette dernière, le vitaliste ouvre les yeux et regarde le vide devant lui. Il n'a pas envie de quitter ses bras, pas plus qu'il ne veut se confronter à cette situation nouvelle qui ne fera que leur apporter des ennuis... Mais les ennuis, il en a toujours eu et s'en moque. Il refuse qu'ils contrôlent sa vie et préfère suivre ses envies. Le problème c'est que, pour le moment, il ne sait même pas ce qu'il veut...

-Non, en effet. Répond-il dans un soupir de résignation.

Puisqu'il faudra bien se pencher là-dessus tôt ou tard... Autant s'en débarrasser tout de suite.
Bien malgré lui, Natael quitte cette position qui lui plaît tant et se redresse. Il remonte légèrement au-dessus de Zofia pour plonger son regard dans le sien. Si elle évoque le secret, c'est qu'elle n'envisage pas d'en parler à qui que ce soit et il le comprend. Si ce qu'on peut penser de lui lui est égal, il sait que ce n'est pas le cas pour elle et ne fera jamais rien pour la mettre dans l'embarras. Pas sans son aval.

-Tout à l'heure... Tu as répondu à une de mes questions en évoquant les sacrifices que je pourrais être amené à faire. Donc tu vois les choses bien au-delà de ce matin. Quant à moi... Je suis incapable de me projeter pour l'instant. Nous pas parce que "nous" ne me tente pas mais... Il a un sourire nerveux et désolé alors qu'il reprend avec une note d'humour. Sois indulgente avec moi, j'ai réalisé seulement tout à l'heure que tu ne m'étais pas indifférente.

Tout s'était enchaîné si vite... Son esprit n'avait pas eu le temps de traiter toutes ces informations et il se retrouvait submerger, sans savoir quoi en faire. Cependant, il avait malgré tout quelques réponses à apporter à la jeune femme.

-Mais je ne suis pas du genre à vivre dans le regret et il semble évident que j'en avais envie. Et puis, même si je ne sais pas encore ce que je veux, je sais au moins que le fait que tu espères plus qu'une simple folie d'un jour m'a conforté dans l'idée de me lancer plutôt que d'empêcher que tout cela ne se produise.

Il marque une pause alors qu'il espère lui avoir fait comprendre le fond de sa pensée. Il est prêt à tenter le coup, lui aussi. Même s'il n'a pas la moindre idée de ce que cela pourrait donner. Peut-être qu'au bout d'un mois, elle le trouvera insupportable. Ou peut-être qu'il sera de nouveau contraint de se marier sans qu'il ait eu le temps de savoir s'il l'aime ou non... Il peut se passer tellement de choses...

-Personne n'a besoin de le savoir et les rumeurs courent déjà de toute manière. Ce qui sera le plus compliqué, ce sera d'arriver à nous trouver du temps. On ne se croise pas aussi souvent que je le voudrais... Mais... J'ai envie de voir où tout cela peut nous mener... Conclue-t-il en effleurant sa joue. Maintenant, il ne manque plus que sa réponse... Si elle dit oui, les ennuis ne feront que commencer. Mais il serait dommage de s'en priver lorsqu'on voit ce que cela peut donner au vu de l'état du lit sur lequel ils reposaient. La dernière heure sera à jamais inoubliable pour lui.
Jamais passion et tendresse n'ont fait aussi bon ménage...

Zofia s’accroche au regard de son amant, un regard toujours un peu sonné, mais dans lequel elle peut discerner une lueur de plénitude. Elle vient tracer la courbe de son dos, attendant sa réponse. Il lui rappel ce qu’elle lui a dit une heure plus tôt, avant qu’ils ne fassent l’amour et l’air désolé, il lui sourit, expliquant que cette attirance qu’il a à son égard est une toute nouvelle chose pour lui. Elle comprend et jamais elle ne le poussera pour quoi que ce soit. Si elle savait qu’elle n’était pas indifférente au vitaliste depuis un moment déjà, elle doit encore s’accommoder des changements que cela impliquera. Rares sont le très peu d’hommes avec qui c’est allé aussi loin qui on su la combler autant que Natael a su le faire ce matin. Elle s’est sentie désirée et écoutée. Si la passion les a bel et bien motivé, leurs caresses et leurs baisers n’en n’ont pas moins été dénué de tendresse l’un envers l’autre, rendant cet échange charnel encore plus particulier. Peut-être que cette amitié qu’ils ont su entretenir malgré le peu de temps qu’ils ont passé ensemble y est pour beaucoup. Ils ne peuvent d’ailleurs nier qu’un lien indéniable et fort les a toujours lier. C’est sans aucun doute ce qui a contribué à nourrir davantage son attachement pour Natael.
Elle lui caresse la joue, alors qu’il lui avoue que ce qu’elle a dit à fait en sorte qu’il ne mette pas fin à leurs baisers. C’est à son tour de sourire doucement. C’est entre autre ce pourquoi elle s’est attaché à Natael : son respect pour elle et l’attention qu’il porte à ce que rien ne vienne entacher sa réputation à elle. Il pourrait très bien profiter de sa vulnérabilité, la laissant subir les conséquences, mais ça ne semble pas être le cas. Elle le connaît et lui fait confiance. Lui-même s’est montré plus vulnérable dans ses bras, effaçant un doute sur la réelle nature de leur relation qu’elle n’arrivait point à écarter.

Elle pose une main sur son torse et se relève elle aussi pour retrouver ses lèvres et le gratifier d’un baiser plein d’amour. Elle pose son front contre le siens, la gorge un peu serrée, mais consciente qu’ils ne peuvent revenir en arrière et qu’au fond d’elle, cette matinée est un peu ce qu’elle a toujours voulu. Elle est prête à affronter l’incertain et vivre cette relation dans le secret pour goûter toujours plus au même bonheur dont ils ont joui ce matin.

-J’en ai envie aussi.

Elle finit par se décoller pour retrouver son regard.

-Seulement, j’aimerais que tu me promettes quelque chose. Peu importe ce qui se passera, je ne veux pas te perdre.

Il a des devoirs et elle sait très bien qu’on lui trouvera une nouvelle fiancée sous peu. Si leurs petits-déjeuners et leur temps passé ensemble a toujours été plutôt chaste, ce matin a changé les choses. Cependant, s’ils ne peuvent s’échanger des caresses à nouveau, elle veut préserver cette amitié qui les a toujours unis. Cela, elle y tient. Est-ce trop demandé? Elle l’ignore, mais c’est son souhait le plus cher. Elle veut le garder d’une quelconque façon dans sa vie, peu importe leur type de relation et où la vie les mèneront.

Après avoir explicité avec elle le souhait de Zofia, Natael scelle sa promesse d'un baiser tendre et langoureux, bien plus long que les précédents. Lui aussi tient à elle et n'a pas envie que certaines choses viennent entacher ce qu'il y a entre eux depuis le premier jour. Il reste aussi longtemps qu'il le peut mais ils auraient déjà dû partir depuis une heure et demie... Leur étreinte prend donc fin et ils partent chacun en quête de leurs vêtements respectifs. Puis ils avalent ce qu'il leur faut pour tenir jusqu'à midi et le noble quitte prestement la chambre. Dans retour dans la sienne, il achève de faire son sac, un peu étourdi. Il ne réalise pas encore complètement... Et lorsqu'il retrouve la jeune femme à l'écurie, il se sent penaud et ne sait plus comment se comporter avec elle. Il se rend rapidement compte que la réciproque est toute aussi vraie...

De toute la journée, les deux nouveaux amants se parlent à peine. Eux qui avaient toujours de longues discussions, parlant librement de tout et de rien, ils ne semblent plus rien avoir à se dire après avoir couché ensemble. Le peu de conversation qu'ils ont concerne leur voyage et cela s'arrête là.
Le soir venu, ils s'arrêtent dans une nouvelle auberge. Ce n'est pas celle qu'ils s'étaient fixé d'atteindre la veille mais leur planning a été quelque peu chamboulé... Entre la grasse matinée de la prêtresse et leurs débuts amoureux, ils ont plusieurs heures de retard. Ils dînent ensemble dans un silence presque gênant. Leurs mains se frôlent alors qu'il lui tend le verre qu'il vient de remplir. Le contact est fugace mais c'est le premier depuis qu'il a quitté son lit alors il ne passe pas inaperçu à ses yeux.
Lorsqu'ils ont terminé, ils se lèvent et gagnent les chambres que l'on vient de préparer à leur attention. Une fois encore, elles sont mitoyennes.
Un nœud se forme au niveau de l'estomac de Natael alors qu'il souhaite une bonne nuit Zofia. Après avoir refermé la porte derrière lui, il lance négligemment son sac sur sa couche puis s'assoit pour s'y laisser tomber sur le dos, le visage dans ses mains. La journée avait commencé d'une manière, certes surprenante mais... bonne malgré tout. Il se réjouissait de ce voyage mais tout semble si bizarre entre eux maintenant. Ils n'arrivent plus à se parler, c'est à peine s'ils se regardent, le moindre contact les trouble. Ils ne sont plus amis, ça c'est évident, mais ils forment un très mauvais couple pour l'instant.

Après quelques minutes, le vitaliste soupire et se lève d'un bond. Il connaît cette auberge et a déjà occupé cette chambre à quelques reprises. Il se dirige droit vers la porte fenêtre qui donne sur un balcon surplombant la cour arrière. Dehors, il fait déjà nuit et tout est silencieux. Tous les balcons sont en enfilades, simplement séparés que par une balustrade pour des raisons économiques. Il n'a donc aucun mal à passer par-dessus et il s'avance sans attendre. Il s'arrête devant la porte fenêtre et frappe quelques coups, pas trop forts pour ne pas attirer l'attention sur lui mais juste assez pour qu'elle entende. Lorsque la prêtresse vient lui ouvrir, il esquisse un sourire sans joie en coin.

-Bonsoir. Fait-il comme si sa venue n'avait rien d'impromptue. Je peux entrer ?

La promesse maintenant scellée, elle se sent soulagé et profite du long baiser de Natael, avant qu’il ne mange un morceau et s’éclipse. Cela fait un moment qu’ils auraient dû partir, ce qui retardera vraisemblablement leur arrivée à bon port. Les questions fuseront sans doute, mais Zofia sait déjà comment éviter les projectiles, même si elle n’a jamais été un excellente menteuse. Et la voilà qui a maintenant un amant secret...Non, elle est certaine qu’elle s’en fait pour rien et que tout ira bien. Ce ne sont pas les premiers à risquer cela.
Après avoir enfilé son armure et fait le lit, elle descends donc à l’écurie préparer Crin blanc, qui l’accueille d’un reniflement bruyant, comme si sa jument la grondait de l’avoir fait attendre aussi longtemps. « Ne me regarde pas comme ça »  murmure la prêtresse, en attachant sa selle. Elle aperçoit la silhouette de Natael dans l’embrasure de la porte et sourit d’emblée. Cependant, celui-ci s’estompe dès qu’elle remarque l’air déconfit et grave qu’il affiche. Et ce n’est pas le sérieux qu’elle à l’habitude d’apercevoir chez lui. Quelque chose le trouble beaucoup et elle le sent dans toutes les fibres de son corps. Si elle ignore comment s’exprimer, elle franchit tout de même les quelques mètres qui les séparent et le sert dans ses bras, désireuse de lui montrer qu’elle est là. Elle lui caresse à nouveau la joue d’un geste plus chaste, mais pas sans affection et retourne près de sa jument pour la brider.

La route se fait ensuite dans un silence surprenant et qui pèse de plus en plus sur le cœur de la prêtresse ; elle sent déjà les répercussions de leur ébat et ce changement peut-être trop soudain de leur relation. Les pensées virevoltent dans sa tête, mais les mots restent coincés dans sa gorge. Natael lui semble si loin à présent et une certaine panique commence tranquillement à s’installer dans le creux de son ventre. Un ajustement ne devrait pas être aussi difficile, non? Et pourtant, les voilà tous les deux l’air abattu, comme s’ils venaient de commettre le pire des crimes. Elle passe sa main dans la crinière de sa jument comme à chaque fois qu’elle se sent un peu nerveuse sur les routes. Sauf que cette fois-ci, ce n’est pas parce qu’elle se sent en danger.

Arrivés à l’auberge, ils mangent toujours dans un silence pesant et bien malgré elle, Natael finit par lui souhaiter bonne nuit. La prêtresse fait de même, ayant eu tout de même espoir qu’ils puissent au moins partager à nouveau un lit et dormir l’un contre l’autre. Elle referme sa porte et un poids dans la gorge, elle pose son sac de voyage sur le lit, qui retrouve bien vite le sol et laisse s’échapper tout son contenu sur le plancher. Elle pousse une exclamation et se penche pour tout ramasser, dont sa chemise de nuit et un petit ensemble à couture qu’elle trimbale lorsqu’elle voyage. Elle ignore pourquoi, mais en tenant cela dans ses mains, elle se souvient du carnet à Natael, peut-être parce qu’elle l’a vu le consulter en route, et une idée germe dans son esprit. Elle commence par retirer son armure et ses bottes, ne gardant que son pantalon et sa chemise et attrape ensuite des ciseaux pour découper un morceau de tissu de sa chemise de nuit.

À la lueur d’une chandelle, Zofia est en train de broder le début d'une rose lorsqu’elle entend des coups à sa porte-fenêtre. Elle lève les yeux et voyant la silhouette de Natael, elle ne se fait pas prier pour lui ouvrir, pas sans surprise puisqu’elle comprends qu’il a passé par la balustrade.

-Je vois que comme un amant l’aurait fait, tu es passé par dehors, lance-t-elle, à la blague et parce qu’elle est trop soulagée de le voir ici pour être silencieuse à nouveau.

Elle lui prend la main pour l’amener dans la chambre, mais pas nécessairement dans l’intention qu’ils retrouvent les draps à nouveau. Du moins, pas maintenant. Elle veut s’expliquer pour aujourd’hui et essayer de reprendre sur une meilleure note. Elle s’assit sur le lit et le regarde, bien plus sereine qu’elle ne l’a été depuis leur départ.

-Je suis heureuse que tu sois venu me retrouver Natael. Je…

Elle soupire et secoue la tête. Elle retrouve ensuite son regard :

-Je suis désolé si j'ai semblé distante aujourd'hui. Je m’ajusterai. Et puis, je ne sais pas quand nous nous reverrons après ce voyage. J'aimerais que nous puissions profiter de ces quelques jours qu'il nous reste tout les deux. Comme avant...Enfin, pas tout à fait comme avant.

Elle ferme un instant les yeux, se rendant compte qu'elle s'empêtre dans ses mots.

Alors que Zofia a les yeux fermés, elle peut sentir la caresse d'une main désormais connue sur sa joue et une légère pression lui faire tourner la tête. Aussitôt des lèvres au goût familier viennent lui voler quelques doux baisers. Natael s'était assis prêt d'elle, une jambe pliée sur le lit et un pied par terre. Il a haussé un sourcil en l'entendant s'excuser. Il n'est pas commun que ce soit un autre que lui qui demande pardon pour quelque chose qui a cafouillé. Il est incapable de cacher le fait qu'il soit maladroit avec les autres. C'est d'ailleurs un miracle qu'il n'ait jamais froissé un temps soit peu la jeune femme.
Alors qu'il garde le visage de la prêtresse dans la paume de sa main et le sien à un souffle d'elle, il lui répond enfin.

-Et dire que tu es la plus douée de nous deux pour les mots...

Il se redresse pour trouver le regard de Zofia. Il caresse sa joue du pouce.

-Si tu ne sais plus quoi dire, j'ai peur de ne pas être mieux lotis. Je ne sais pas comment gérer ce revirement de situation. Sans doute parce qu'il n'a connu aucune transition. Nous ne nous sommes pas fait la cour, nous n'avons pas cherché à nous séduire, nous n'avons pas pris le temps de nous apprivoiser... Nous sommes passés directement de francs amis à amants et c'est ce qui rend cette situation aussi... étrange.

Étrange, oui, c'est le mot. Leur rapprochement a été très soudain. Ce n'est pas comme une rencontre fortuite qui s'est finie au lit le jour-même alors que le couple a été emporté par une passion soudaine. Relation qui s'avère le plus souvent sans lendemain ou essentiellement physique. Ils ont commencé par créer des liens durables sous la forme d'une amitié aussi improbable que solide. Et, sans crier gare, ils ont balayé tout cela après un an et se sont glissés ensemble sous les draps.

-C'est sans doute la raison pour laquelle nous ne savons plus quoi nous dire pour le moment. On ne se connaît plus en tant qu'amants... On s'est déjà dit tout ce qu'un nouveau couple a à se dire. C'est... troublant de se connaître aussi bien et à la fois pas du tout...

S'ils avaient pris le temps de faire savoir à l'autre qu'ils étaient intéressés, s'ils avaient pris le temps de se tourner autour avant de succomber au désir qui se seraient fait de plus en plus fort en eux, les choses auraient certainement été différentes. Mais ce n'est pas de qu'ils ont décidé de faire. Une occasion s'est présentée et ils ont cédé tout de suite à leur envie plus ou moins nouvelle au lieu de prendre le temps de laisser les choses évoluer entre eux en sachant qu'ils étaient tous deux intéressés. Et voilà où ils en étaient maintenant. Natael ne donne pas l'impression de vouloir renoncer. Il constate simplement les choses et ne sait pas encore comment les arranger. Ils ne peuvent plus revenir en arrière de toute façon et il lui en faut plus pour renoncer. C'est une tête de mule après tout.