Meca, un an plus tôt (PV Térébantine/Azadeh) <TERMINE>

Un an auparavant...


Courir. Courir plus vite ! Non, plus doucement, si je cours trop vite, je vais suer, la sueur, ce n'est pas féminin... Haaa je ne suis pas là pour ressembler à une femme, mais à une guerrière ! Allez, accélère, court plus vite ! Allez ! Mais pas trop, il faut pas que t'ais l'air de le chercher... Plus vite, il pourrait être parti!

L'esprit d'Azadeh vagabondait alors qu'elle courrait sur les quais de Meca. Elle avait racheté de nouveaux vêtements, aiguisé ses lames, et s'était même faite elle même une petite cicatrice sur la joue... Pour avoir l'air de revenir du combat.

Bon sang ! Elle avait retrouvé sa trace ! Il était là ! Plusieurs marins lui avaient confirmé.

Le son léger de ses pas sur les pavés résonnaisent dans son esprit à côté des battements emballés de son coeur. Elle avait régressé 7 ans en arrière , même si elle ne se l'avouait pas !

Elle sortit de la ville, direction un manoir isolé sur la côte. Elle était déjà passé devant, parfois, sans le remarquer ou presque. L'élégance des bâtisses ne la touchait pas. Jamais.

Mais lorsqu'elle se retrouva en face, qu'elle n'avait plus qu'un petit pont de pierres à traverser, il lui parut soudain innaccessible... Lui... Ou ce qu'il contenait...

Elle inspira lourdement, reprenant son souffle, essayant sans succès de remettre de l'ordre dans ses cheveux indomptables.

Elle passa le pont... Essayant sans succès de mettre de l'ordre dans ses pensées indomptables.

Face à la porte, nouvelle inspiration. Repousser dans son esprit l'envie de chercher ce qu'est un cabinet de suicide...

Trois coups vifs contre le bois massif. Trop tard pour reculer. Elle avait frappé.

Azadeh posa son regard sur moignon, interloquée.

"Ha c'est pas toi..."

Commenta t'elle à haute voix. Evidence qu'elle avait besoin de s'énoncer...

Elle regarda le fauteil en prenant machinalement la brochure, interloquée. Ses yeux en mouvement perpétuel balayèrent la pièce du regard. Drôle d'endroit. Confortable. Sale endroit. Un frisson lui parcourut l'échine, cet endroit là avait quelque chose de... délicieusement étudié pour être malsain.

Elle avait connu les rades et les pillages, elle avait vu un monde parfois très laid, mais ici, c'était différent.

Elle huma l'air. Elle devait arrêter de respirer comme un animal. Mais les odeurs... C'était pire qu'une drogue. L'odeur de sa sueur ne suffisait pas à cacher les autres. Du tabac. Du... sang ? Et... D'un homme. Elle s'était emplie de son odeur lors des trop courts jours passés non loin de lui.

Elle ferma les yeux un instant. Tabac et sang prenaient trop le dessus.

Elle ouvrit machinalement le parchemin, le regardant sans le lire. Curiosité qui débute, qui ne va pas jusqu'à la lecture... Elle s'adressa à moignon comme si elle le regardait à travers le papier:
"Il est où ?"

Elle reformula sa question, qui s'était extirpée un peu vite de ses lèvres. Comme toujours, elle était trop enfoncée dans ses obsessions pour réaliser que les autres ne l'étaient pas. Trop aveuglée pour prétendre exiger une réponse parlée d'un muet :
"Un homme, deux fois mon àge, pirate ! Il est où?!"

Elle était sur le point de s'agacer. Cet homme aux allures de poupée de chiffon ratée ne pouvait il pas répondre à sa question avant même qu'elle ne la pose?!

Si la demoiselle avait pris le temps de détailler le dit menu en profondeur, elle se serait rendue compte de l'étrangeté de la carte.



Mais elle ne fit que le froisser nerveusement dans ses mains en exigeant une réponse de Moignon. Le brave assistant la regardait fixement sans une ombre d'expressivité, dans une attitude parodique de majordome. La situation avait quelque chose de macabrement comique comme un opéra-bouffe qui aurait mal tourné et dont l'héroïne avait oublié son texte, restant bloquée sur la même phrase qu'elle répétait en boucle.

Et puis soudain, le pantin désarticulé se dirigea vers une grande porte donnant sur un petit bureau cossu et décoré de manière à rendre la pièce agréable. Mais tout semblait factice, prédisposée là pour contribuer à faire perdurer l'aspect théâtrale et décalé de la situation. Le plus improbable était sans doute cette femme à la chevelure improbablement verte et aux pupille sanglante, assise au bureau d'acajou au centre de la pièce. Son air froid et détaché contredisait sa mise incroyablement bigarré. La salle embaumait un mélange de parfum de vanille, de tabac fort et plus loin, plus latent, l'odeur du sang. Elle écrasa un mégot de cigarillo dans un cendrier et sa voix grave et légèrement atone s'éleva dans l'air, brisant l'instant d'irréalité.

Spoiler:

- Entrez, je vous en prie et asseyez vous sur le sofa. Fit-elle avec une nonchalance fascinante, ses yeux rouge analysant méthodiquement sa nouvelle patiente. Alors ? Que puis-je pour vous ? Un avortement, Une trépanation peut-être pour vous détendre ... Ou bien souhaitez-vous faire le "grand saut" ?

Elle sourit de manière mécanique, sans la moindre chaleur.

Azadeh ne se fit pas prier pour changer d'interlocuteur. Elle estima que Moignon ne *voulait* pas lui parler, et était de ce fait d'une impolitesse crasse. L'homme malpoli au bras en moins qui la regardait de haut - si si - voilà qui il était devenu pour elle.

Nouvelle venue. Drôles de cheveux. Azaredh eut plusieurs images en tête... Algues, prairies, marimos... lézards. Elle entra dans le bureau sans se faire prier, observant l'intérieur avec une mine assez déconfite. Tout ça n'était pas normal. Pas du tout. Elle fronça les sourcils en détaillant un instant la pièce qui semblait...

"...Arrachée d'une page de bouquin?"

Azadeh avait fini sa réflexion à haute voix, et ne sembla pas s'en rendre compte.. Ou ne daigna pas perdre le temps de l'expliquer.

Elle regarda Térébantine en haussant un sourcil:
"Oui, quoi, m'assoir? Non... Heu... Mais c'est quoi ici? Vous... Préparez une pièce de théatre ou quelque chose comme ça, toi et ton malpoli?"

Azadeh ne s'encombrait que peu souvent de la politesse du vouvoiement... Habitude qu'elle s'était forcée à prendre pour impressionner le capitaine de deux fois son àge, et qu'elle aurait du mal à perdre... Elle fixa Térébantine dans les yeux, complétant ses remarques:
"T'as la couleur de ton odeur toi dis donc... Bref... QUoi?"

Elle réagit à retardement sur les questions posées. Trépanation, avortement, grand saut...?
"Trépanation pour se détendre? Ca va pas? Non non, on m'a dit qu'il était là, donc j'voudrais le voir!"

Elle se força à revenir sur ses propres mots... Foutus personnes qui ne comprenaient pas naturellement ses envies:
"J'veux dire, le... un capitaine, un gars, pirate, deux fois mon àge, venu là qu'on m'a dit!"

Son explication était claire et limpide, pour elle ça ne faisait aucune doute. Elle planta son regard dans celui de Térébantine, tapotant machinalement du pied au sol dans un geste d'impatience.
Ce que Térébantine lut dans le regard d'Azadeh ne lui inspira pas des promesses de fortune. Ce regard sans cesse mouvant qui peinait à s'accrocher n'était pas seulement vivant, il débordait du besoin de vivre, quitte à s'aggriper à n'importe quoi... Pas de chance, ce n'importe quoi portait une chevelure verte flamboyante qu'il était difficile d'oublier...

Azadeh resta interdite une seconde, regardant Térébantine d'un air ahurie. Mort? Comment ça, mort? Mort... Le genre de mort qui fait qu'elle ne le reverrait plus ? Qu'elle aurait tout fait... Pour rien?

Et la femme poupée à la chevelure verte qui lui annonçait ça en lui proposant quoi...De le rejoindre...?

"Mort?"

Elle avait grandement besoin de se le répéter...

"Mais.. Je... Il..."

Elle embrassa la pièce du regard, cherchant un éventuel reste de lui... En revint encore à Térébantine. Elle était perdue. On venait de lui effacer sa route juste sous ses pieds. Il lui fallait quelque chose d'autre. Vite! Quelque chose qu'on n'oublie pas... quelque chose...

Elle serra les poings et frappa du pied au sol. Geste enfantin et capricieux... Mais tout sauf désespéré. Elle jura entre ses dents:
"Non mais on rêve quel raclure de trou de balle de charogne! Comment ça mort? Et pourquoi mort ici? Oui, tiens... Tu dois le savoir, toi, pourquoi!"

Tout en vociférant, elle agrippa ses vêtements achetés pour l'occasion, et entrepris de se défaire de la chemise décolletée dans laquelle elle avait investie... Stupide, stupide achat! Elle la jeta au sol, rageuse:
"Tiens t'as qu'à garder ça, si t'en veux pas t'en f'ras des vêtements de poupée pour ta marionette malpolie, là. C'est ça hein? Une sorte de machine, non? Ou..."

Elle chercha un instant moignon du regard, se posant soudainement quelques questions à son sujet. Besoin de trouver de quoi s'occuper l'esprit. Sans prendre garde au fait qu'elle s'exposait à demi nue face à une parfaite inconnue. Elle farfouilla dans son sac en cherchant le pauvre assistant, et en retira des sortes de bandages. Il était temps de reprendre figure humaine. Elle oublia moignon alors qu'une mêche de cheveux verts attira à nouveau son regard agité. Toujours ces satanés cheveux:
"Et pourquoi verts d'abord?" Rumina t'elle en entreprendant de se tortirer la poitrine en l'emballant avec agilité dans ses bandes de tissus bien serrées.

Comme une étincelle, son cerveau lui rappela la proposition de Térébantine...:
"Le chagrin d'une telle perte t'as dit? Mais j'l'ai pas perdu, j'l'ai même jamais trouvé ! Enfin perte... Perte de temps, ha ça oui!"

Elle arracha de son sac une chemise de lin ocre, qu'elle enfila rapidement par dessus sa "momification" improvisée. Elle était visiblement bien plus à l'aise ainsi:
"Et comment ça me faire un prix?"

Azadeh n'avait toujours pas compris où elle se trouvait...

-Hum...

Quel drôle d'oiseau s'était précipitée dans sa cage dorée avec un telle promptitude décérébrée que ça en chatouillait presque son sens de l' humour ? La minute de désappointement passé , la gamine commença à se déshabiller rageusement quitte à s'en griffer la peau. Le flot d'insultes copieusement fangeuses qui déféquaient de sa bouche fit rayer à Térébantine de sa liste la possibilité que celle-là ce suicide à son tour. Trop énervée, trop tapageuse, trop vivante finalement et visiblement contente de le rester. La trépanation lui aurait fait grand bien à n'en pas douter !

La Marchande de Suicides tira une autre bouffée sereine de son cigarillo, ses yeux sanglants toujours vrillés sur l'inconnue. Les vivants l'amusaient un temps. Un temps seulement. Elle préférait la quiétude des morts. Eux au moins ne vociféraient pas et ne posaient pas de question quand on leur ouvraient le bide.
Elle frappa trois coups secs dans ses mains et Moignon s'en vint ramasser les oripeaux qui contaminaient ses tapis de bactéries infâmes. Imperturbablement égal à lui même, l'assistant muet se pencha raide comme un piquet et ramassa le chemisier de sa main unique avant de disparaitre derrière une porte de la même manière qu'il était apparu. Sans un bruit, laissant juste une odeur de viande un peu trop restés sur le comptoir du Boucher avant d'être consommée.

-Et pourquoi verts d'abord ?

-Et pourquoi êtes-vous laide ? lâcha-t-elle sur le même ton. Les desseins de Kiria sont impénétrables. Et parfois elle a mauvais goût...En l'occurrence elle devait sans doute être daltonienne.

Ses lèvres se fendirent d'un sourire carnassier qui aurait éveillé l'alarme chez l'instinct de survie de n'importe quel péquin. Mais La gueuse qu'elle avait pour interlocutrice semblait imperméable à l'évidence. Comme à l'humour noir du reste.

-Et comment ça me faire un prix? ergota-t-elle avec sa tronche de merlan frit .

Térébantine se pencha plus avant sur son bureau d'acajou précieux, posant les coudes sur le bois et joignant ses doigts pâles pour soutenir l'ovale presque parfait de son visage. Nimbés des volutes de tabac épicé, elle avait tout d'une de ces méchantes sorcières de contes de fées, à la fois envoutante et tout ce qu'il y' a de plus venimeuse.

-Vous ne savez pas où vous êtes n'est-ce pas ?

Nouveaux sourire factice. Nouvelle sensation d'être une souris prise au piège dans la patte d'un félin un peu trop joueur.

Azadeh regarda partir moignon, se mordillant la lèvre, pensive:
"Il n'est vraiment pas frais je n'irai pas nourir quelqu'un avec, même au rabais... Laide?"

Elle sautait d'un sujet à l'autre sans se soucier de la cohérence de sa conversation. Dans sa tête, tout était parfaitement emboité. Elle ne pouvait pas considérer qu'il n'en était pas de même pour les autres. Elle regarda un instant Térébantine, avant de baisser les yeux sur elle même, écartant un peu les bras comme prise en flagrant délit... Et finit par lâcher un rire franc. On lui avait déjà fait beaucoup de remarques, mais si franche, et à l'air si sincèrement désagréable, jamais.

Et le résultat était surprenant. Elle ne savait pas où se situer entre l'horreur et la comédie grossière. Térébantine lui avait presque fait l'impression d'une enfant désagréable qui vous répond toi même, piquée au vif... Tout en ayant l'air d'une démone prète à l'écorcher vive sur place. Et quelque chose en elle lui disait que c'était tout à fait dans les capacités de son interlocutrice...

Mais malgré tout, elle eut ce rire. Sincère, ni une réponse à un trait d'humour, ni une moquerie...
Elle plaqua ses mains sur ses hanches sans élégance, en haussant les épaules :
"Et bien non, je n'ai pas la moindre idée de l'endroit où je suis. C'est à ce moment là que tu me mets en charpie pour faire des tourtes avec ma viande?"

Curieusement la question ne ressemblait pas forcémment à une plaisanterie... Plus à une hypothèse qui aurait germé dans un esprit tordu trop absorbé par la cuisine et plongé dans un univers fantasmagorique...

Elle haussa un sourcil avant d'ajouter:
"J'espère pas... La fumée ça doit t'écarteler les papilles, pour goûter c'est pas l'idéal..."

Cette remarque était à considérer comme
une simple évidence énoncée, et non un conseil. Azadeh croisa les bras sous sa poitrine, observant Térébantine, en songeant qu'il serait bienvenue de répondre à son tout premier pourquoi... Chose qu'elle allait bien évidemment faire sur le champ. C'était assuré.

Azadeh écarquilla les yeux. Plusieurs informations surprenantes venaient de surgir dans son esprit, et y jeter le trouble. Elle leva l'index en l'air, prenant un air avisé, et annonça avec tout le sérieux du monde:
"Le sel de mer assoiffe voyons, il y a bien des moyens de faire sans! Enfin, ce n'est pas... Suicide?"

Une idée en bousculait une autre. Et celle ci avait bien plus d'importance qu'une considération culinaire. Elle haussa un sourcil, puis l'autre le rejoint dans un ballet étonnant. Son visage était agité, expressif... Epuisant à regarder, tout bien considéré...
"Comme... Enfin, il s'est suicidé? J'veux dire... Comme ces gars qu'on retrouve pendus dans leurs quartiers et bouffés par les vers? C'est pas logique!"

Non, c'était pas logique... Pas logique d'avoir passé les dernières années de sa vie à faire en sorte d'arriver au niveau... D'un lâche. Elle était donc arrivée au niveau de rien du tout? Elle sentait le fil ténu de son chemin obsessionnel se débiter sous ses pieds. Plus de route, plus de raison d'avancer par là, plus rien !

Et la poupée de printemps qui lui proposait des choses surprenantes... Plus rien n'avait réellement de sens. Si, une chose restait certains, le capitaine de deux fois son àge était mort, et elle n'avait pas eu la réponse à la question...
"Pourquoi?!"

Ses yeux de charbon se posèrent sur la marchande de suicide. Son regard avait changé, et avait quelque chose d'effrayant... Car il s'était soudainement fixé, cessant de passer d'une chose à l'autre en tremblottant. Fixé sur Térébantine. La solution miracle à tous ses soucis. Celle qui *savait*. Térébantine eut la désagréable impression d'être l'un de ces morceaux de ficelle avec lequel on peut faire jouer un chaton... Dont il est totalement incapable de détourner son attention, pendant des heures s'il le faut, même s'il sait pertinament qu'il ne pourra jamais l'attrapper.

Azadeh fixait Térébantine avec une passion nouvelle. Elle avait des solutions. C'était évident:
"Tu le sais bien, toi, si tu fais... ces choses là. Alors dis le moi! Pourquoi il est venu là? Qu'est ce qui lui est passé par le crâne?!"

Elle venait d'éluder la proposition d'avortement ou amputation sans s'en rendre compte, comme l'on passe devant un marchand ambulant sans lui adresser un regard...

Azadeh ouvrit de grands yeux lorsque moignon la ceintura. Elle entrepris de s'agiter pour tenter de s'en défaire... Avec une force frisant cette de la mouche anémique...:
"Attend chiffon!"

Elle l'avait déjà renommé à sa façon, cet homme poupée: "J'ai pas fini te parler à ta mère!"

Elle lui avait aussi trouvé un lien de parenté évident avec Térébantine. Pourquoi s'encombrer d'un peu plus de questions lorsqu'on peut se faire seule les réponses.

Ainsi agrippée, elle s'agrippa elle même à son obsession, en revenant à son insaisissable interlocutrice:
"Un contrat? Quel contrat? Faut signer pour mourir? Je peux voir? Ou faut s'faire avorter pour savoir ce qui est arrivé au client précédent? J'veux bien moi ! Tu me laisses deux mois j'reviens engrossée tu m'récure et tu m'dis ce que j'veux savoir?"

Elle proposait des solutions aussi vite que son esprit les apportais à ses lèvres, sans trier l'information:
"Sinon je reviens plus tard, quand t'es moins occupée."

Ce n'était pas une question... Il était évident que quoiqu'il arrive, elle reviendrait, si elle n'avait pas ce qu'elle voulait... Ses yeux avaient accroché Térébantine comme l'incarnation de cette nouvelle raison de vivre... Et rien que cette idée avait de quoi donner des envies de meurtre gratuit à tout vendeur de suicide hors de prix!

[HRP : Quand je disais que Téré me faisait penser à un poupée... Je crois que c'était une remontée inconsciente de la poupée d'origine que j'avais vue et oubliée entretemps ^^ /HRP]


Les éclats de voix de la boule de suie résonnèrent un moment avant d'échapper enfin aux tympans de la donneuse de mort...
Elle était mécontente, et le faisait savoir.

Elle épargna cependant ses coups à Moignon, bien que le pauvre homme n'en avait sûrement cure... Son esprit était tellement absorbé par Térébantine... Qu'elle en avait oublié le portier qui était presque devenu un objet à ses yeux.

Objet qui venait tout de même de la jeter à la porte, et de faire en sorte qu'elle se retrouve les fesses sur le parvis du cabinet de suicide, le prospectus toujours en main. Elle avait oublié de le lâcher, et réalisa seulement de quoi Térébantine parlait lorsqu'elle lui disait qu'elle lui laissait le dépliant...

Azadeh se releva et lâcha un soupir de mécontentement, levant les yeux vers la barraque. Quelque chose bouillonnait en elle. On l'avait déjà traitée comme ça mais... Cette poupée verte avait quelque chose de plus.

Peut être son... métier? Le suicide... Quelle idée... Cette notion n'arrivait pas à trouver une raison d'être dans l'esprit tordu de la demoiselle. Quelque chose, au fond d'elle, semblait lui crier de vivre... Comme si elle avait déjà fait, un jour, l'erreur de vouloir disparaître à tout prix, et s'en était mordue les doigts devant le fait accompli...

Pourtant, Azadeh n'avait pas souvenir d'avoir, un jour, voulu mourir... Mieux, depuis son dépucelage innatendu dans les circonstances que l'on sait... Une envie de vivre s'était accrochée à ses trippes comme une mouche qui revient à tout prix se poser sur le plat du jour, quels que soient les efforts que l'on emploie à l'en chasser...

Elle tourna le dos au cabinet de suicide... Elle reviendrait. Elle ferait autrement, mais elle reviendrait. Son capitaine s'était presque effacé de son esprit, n'y laissant qu'une question, et la vision récurrente d'une masse de cheveux verts à l'odeur de tabac épicé...