[ Jardin ] Les Fleurs du Mal [ PV ]

C'était facile... Oh oui , c'était tellement facile... Tellement facile de garder la tête froide , de porter un masque , de faire comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes...Et tout allait bien , non ? Elle était séparée de Trystan , cloitrée dans les appartements d'Astéride , alors qu'ils cherchaient une solution. Son père était enfermé , on veillait à l'endormir le plus possible pour qu'il ne parle pas , pas qu'il ne dise pas tout haut que sa fille avait été déshonorée par le Conseiller du Roi. Et Ariane restait elle aussi tout simplement enfermée , pour qu'on ne lui pose pas de questions. Ah ! Mais comment cela pourrait-il être pire ? Et elle ne savait pas quels étaient les plans Trystan quant à son père. Il lui demandait de lui faire confiance... Evidemment qu'elle lui faisait confiance ! Mais ne rien savoir , c'était... Frustrant au possible ! Mais voilà , encore une fois , Lilianna ne lui demandait pas... Et quand aurait-elle pu de toute façon ? C'était bien beau de devoir loger chez Astéride , mais elle peinait à le voir... Le voir en toute décence. Eh oui , s'il voulait , comme Astéride le disait si bien , lui faire la cour , il fallait oublier leurs nuits de tendresse et leurs moments de solitude. Et franchement , il lui manquait bien plus qu'elle ne l'aurait pensé. Idiote comme elle était , elle s'était dit qu'il ne serait jamais bien loin , qu'elle pourrait lui voler un baiser de temps à autre... Ah , la belle affaire ! Finalement , le voir était franchement plus compliqué qu'elle ne le pensait au premier abord ! Mais quelle idiote !

Là , Lilianna tuerait pour un baiser. Cruelle vérité , il lui manquait. Et en plus , la jeune femme s'était découvert un train de caractère jusque là inconnu. La jalousie... Eh oui , à force d'errer dans le palais en compagnie de la petite soeur de Trystan , elle avait entendu quelques discussions... Maudites vipères ! Elles parlaient de Trystan comme... Eh bien , comme toute femme intéressée. Par moment , Lilianna se retenait de leur hurler qu'il était... A elle ?! Oh , maudite jalousie ! Et elle avait une de ces envie de rire par moment... Vraiment , certaines avaient de fausses idées sur Trystan. A les écouter , Trystan était l'archétype parfait du jeune homme ténébreux et grand romantique au fond et qui , évidemment , avait besoin d'une femme comme elles. Il avait besoin d'une vipère experte dans l'art de répandre toutes sortes de rumeurs ? Comme s'il n'avait pas assez de sa vipère de mère... Et plus Lilianna écoutait Astéride parler de sa mère , et plus elle considérait cette femme comme folle et dangereuse. Une folle dangereuse. Eh bien , elle était bien tombée... Si Edward serait un beau père arrogant et violent , Mélisandre serait une belle mère des plus horripilantes. Comme elle l'avait déjà dit , un côté de chaque famille était pourri...Quoique l'avantage pour Trystan , c'est que lui , il ne prendrait pas le risque de tenter de le faire assassiner. Oui , le fier et , anciennement , parfait Edward ne s'approcherait plus de Trystan. Plus directement , disons. Alors que Mélisandre...

D'après Trystan , elle n'hésiterait pas à se débarrasser de l'obstacle qu'était Lilianna... Enfin , oublions ces sales pensées là. Intéressons nous à d'autres pensées cruelles. Il lui avait fait peur... Il lui avait fait mal , l'avait blessé avec ses mots. Il les avait dit en étant en colère... Ne les pensait-il pas pour autant ? Elle n'en savait rien... Mais repenser à ces mots lui faisait tellement mal... Elle avait l'impression qu'il lui avait dit tout ce qu'il n'avait pas osé lui dire pendant ces longues semaines passées ensemble. Pourtant , elle ne tentait pas de le changer... Si elle l'aimait à ce point , c'était pour ce qu'il était... Et s'il changeait à cause d'elle , ce n'était pas volontaire... Elle ne cherchait pas à l'influencer en quoi que ce soit , elle n'aspirait qu'à avoir son amour et sa tendresse... Et elle le lui avait dit , qu'il lui fasse encore si peur et il risquait fort de la perdre... Oh , mais non , bien sûr que non ! Aucun risque qu'elle ne le quitte... Cela reviendrait à s'arracher le coeur et à le laisser avec lui... Mais il ne lui referait plus jamais aussi peur , n'est-ce pas ? Rien n'était , hélas , moins sûr...

Lilianna soupira , assise sur un banc de marbre , dans les jardins royaux. Derrière elle , un massif de roses rouges. Entre ses mains une rose dont elle arrachait un à un les pétales. La jeune femme s'était isolée , cherchant à fuir cette cour étouffante. Elle aurait aussi bien pu se confier à Astéride , à sa mère... Mais là , elle avait besoin de solitude. Pour pouvoir pleurer tranquillement , sans personne pour la juger , sans personne pour lui donner des conseils. Elle avait juste besoin d'évacuer ses larmes. Une bonne fois pour toute. Après , elle ne pleurerait plus , elle s'en faisait la promesse. Juste le temps de réduire cette fleur en miettes et elle s'en retournerait... Brusquemment , elle sursauta. Elle avait perçu un mouvement à sa gauche , à un craquement. elle se releva aussi vite qu'elle avait sursauté.

Le château... c'était bien la première fois qu'il l'avait approché aujourd'hui. Un grand bâtiment tès impressionant par sa stature imposante, il dominait la ville et les alentours comme les aigles dominent la terre du ciel qui les porte. C'était le bâtiment le pus remarquable de la ville, il n'y faisait aucun doute. L'épéiste était arrivé à Diantra il y a déjà quelques temps dans l'unique but de pouvoir accéder à la bibliothèque du château. Mais depuis qu'il était en ville, c'était véritablement la première fois qu'il avait osé venir vers ce bâtiment. Il avait eu le temps d'observer des nobles, des convois entrant et sortant des remparts. A moins d'être autorisé à les outrepasser, on ne pouvait deviner ce qui ce dressait réellement derrière les hauts murs. Des tours aussi s'élançaient vers le ciel pour mieux observer la ville. La vue de là haut devait être superbe et stratégiquement, très importante pour voir l'ennemi. Ceux qui avaient bâti le château avaient vraiment pensés à tout. En clair, le château avait quelque chose qui était attrayant et lui donnait cet aspect unique et détaché du reste de Diantra.

Pour en revenir à la situation, l'épéiste vêtu de noir s'approchait des grilles et des gardes bien sûr qui veillaient à la sécurité de la partie la plus importante de la cité. Des hommes braves qui n'avaient pas le droit de faire des erreurs de jugements quand ils laissaient passer certaines personnes. En même temps, il y avait de la fièreté à avoir une telle responsabilité, à avoir été valorisé, à avoir eu la confiance des supérieurs pour les laisser ainsi aux portes. Tout le monde sait que si on choisissait des gardes médiocres ou abrutis devant les grilles, on pourrait alors voir n'importe qui entrer. Peut-être quand même pas un régiment de drows mais des infiltrés, des espions, des assassins et autres nuisances. C'est souvent de ces personnes qu'il faut se méfier. En tout cas, il y avait peu de chance qu'on laisse un personnage comme l'épéiste et au physique dérangeant passer en disant qu'il voulait voir la bibliothèque. C'était incensé pour beaucoup de personnes car il faut le dire, le combattant à l'épée était quelqu'un d'assez particulier. Sans compter évidement que c'était la guerre et donc la vigilance, la méfiance même, était encore plus grande.

Il y avait pensé l'épéiste à comment rentrer. Il savait que son physique peu commun et son air impassible arrangeait pas les choses mais que voulez vous... l'espèce humaine était bien la dernière chose à laquelle il accordait de l'importance. Son plaisir dans la vie c'était de lire les livres et les plus rares et anciens étaient comme le paroxysme du bonheur pour lui. Autant confesser sa particularité. Cependant, il pouvait compter sur ses capacités au combat à l'épée. Il était un guerrier exceptionnel, bien que être humain, il était bien plus agile, plus rapide que le commun des mortels. C'était dû aux origines de sa famille, sa famille nécromancienne qui a force de cotoyer et exploiter les morts avait un peu changé de nature, devant comme l'épéiste maintenant. C'était ça son point fort. Comme tous bon gardes, les hommes empêchèrent le combattant de s'avancer plus.

"Je suis un nouveau maître d'armes."

Taciturne, c'était aussi l'un de ces traits. A l'image de son visage, sa voix avait été neutre. Il ne s'était pas montré méprisant alors qui s'avait que ses capacités le laissait dans un état plus que rassuré. Les gardes ne changèrent pas d'expression eux-aussi. Maintenant, s'il devait faire ses preuves, c'était volontier qu'il le ferait.

"Je me dois d'apprendre aux gens de la cour à se battre. Le temps est compté en temps de guerre et je ne peux me permettre de rester plus longtemps ici."

L'épéiste découvrit son épée pour appuyer ses propos quant à son poste dans l'armée. Après s'être concertés dans le silence, les gardes l'autorisèrent à passer au-delà des remparts et ainsi l'homme sans nom pu enfin poser les yeux sur ce qui était invisible derrière les remparts. Il ne connaissait rien du château. Les parents des parents de ses parents et tout les ancêtres de la famille s'étaient tus sur les détails de l'édifice, sans doute pour laisser le passé au passé et vivre dans le présent. Maintenant qu'il était là, il devait trouver un moyen d'accéder à la bibliothèque. Il aurait été bien difficile de trouver la bibliothèque en essayant de deviner se qui se cachait derrière les fortifications. Des gardes, des gens de la noblesse se tenaient debout ou marchaient devant les bâtiment, rentraient ou sortaient aussi, sans prêter la moindre attention au nouveau visage introduit par le mensonge en ces lieux. En même temps, si il était là c'était bien parce qu'il en avait le droit et donc ça ne les concernait pas. L'épéiste ne prêta pas non plus une grande attention car aucun de ces êtres, quelque soit leur rang, n'en avait le mérite.

Continuant son chemin, il arrivera peu de temps après dans un jardin de fleurs. Il fallait avouer que les fleurs aussi pouvait être admirées sans discontinu par le combattant mais elles n'étaient pas aussi importantes que les livres car elles ne recèlent pas d'histoires et de savoir comme dans les pages des ouvrages. Des banc de marbre ponctuaient les chemins entre les plantes. Les odeurs étaient agréables et la sollitude qu'on y trouvait l'était aussi. C'est sans doute pour celà que l'homme en noir vit une jeune femme assise sur un banc avec ce qui fut une rose un peu avant. Les pétales d'un magnifique rouge, des fleurs comme l'on ne doit trouve que dans les jardins royaux, s'étaient déposées aux pieds en petit nid végétal et parfait pour contenir des larmes de tristesse. Elle semblait très occupée à penser ou peut-être tourmentée par des pensées horribles. La jeune femme sursauta sur son banc comme si une main invisible avait pris en étau son épaule et arrachée de ses pensées. Elle se releva très rapidement comme si elle appréhendait un danger incertain. Il l'observait et constatait simplement les faits et gestes. Il n'y avait aucun intérêt. Hormis peut-être celui de s'informer sur qui voir pour être maître d'arme. Elle devait être noble ou du moins connaître un minimum de chose sur le château. Il s'approcha de la frêle créature dans l'espoir qu'elle puisse l'aider.

"Je m'excuse de vous importuner ainsi, je suis un nouveau maitre d'arme et tente de trouver où m'adresser pour informer de ma présence au château."

Dans ses mots, il avait employé le strict minimum de politesse. Pour ce qui est des gestes, pas de baisemain, pas de révérence car c'était loin d'être quelque chose que le pseudo maitre d'arme appréciait et pratiquait. Maintenant, il pouvait très bien être tombé sur une femme qui derrière cette apparence était une personne fort désagréable et qui pouvait simplement l'ignorer en guise de réponse.

Lilianna avait sursauté , c'était relevée aussi vite que possible , pour faire face à l'homme qui se tenait devant elle. N'avait-elle vraiment aucune chance de se retrouver seule dans cet château ? Il fallait qu'elle s'enferme dans la salle de bain d'Astéride pour enfin pouvoir trouver la paix. Elle aurait volontiers soupiré , mais là , il fallait qu'elle ressemble à une de ces nobles pincées. Quoique là , ce n'était relativement pas le cas. Ses yeux violets étaient rougis et ses joues trempées par ses larmes. Sans oublier la pauvre rose complètement détruite entre ses doigts. Lilianna prit soudain conscience de la fleur et la laissa soudain tomber au sol dans un bruit étouffé. Pour la préstence , c'était... raté , pour ce coup ci. Heureusement , sa joue était presque guérie et on ne voyait presque plus qu'elle avait été meurtrie. Allez , Lilianna... remet ce masque de froideur , deviens celle que tu n'es pas. Juste un instant , juste le temps que cet homme s'en aille. La jeune femme se redressa de tout son mieux et ses traits se durcirent. Elle ne devait pas avoir l'air faible. Ca allait là ? Nous dirons que oui... Elle ne préférait pas savoir de quoi elle avait l'air. Mieux valait ne pas trop y songer. Ce qui était certain , c'était qu'elle ne ressemblait pas à ces pestes de la cour. Aurait-elle voulu qu'elle n'y serait pas arrivée. Elle avait beau essayer , jamais elle ne parvenait à avoir cet air suffisant , fier... Arrogant.

Quoiqu'il en soit , Lilianna détailla l'inconnu brièvement. Voilà un physique plutôt singulier. Pourtant , elle ne s'y attarda guère. Malgré les dires de son père , elle avait toujours été assez sensée pour ne pas considérer une personne seulement en fonction de son physique. On pouvait être un Dieu vivant et avoir un fond des plus pourris. Tout comme on pouvait ne pas avoir d'immense beauté et avoir un coeur en or. Tout comme on pouvait avoir les deux... Beau et parfait intérieurement. Elle faillit encore soupirer , songeant à Trystan. Peut-être avait-il ses défauts , mais il n'en était pas moins parfait à ses yeux. Oui elle était très influencée par ses sentiments. Et où était le problème ? Et puis maintenant elle connaissait son côté sombre... Enfin , ce n'était pas le sujet , elle chassa... non , elle tenta de chasser Trystan de ses pensées et reporta de nouveau son attention sur le mystérieux inconnu. Combien de temps resta-t-elle muette ? Eh bien.... Pas très longtemps en fait. Oui oui , le cerveau d'une femme peut fonctionner très vite , je vous assure. Elle fronça légèrement les sourcils quand il se présenta comme maître d'arme.

« Un maître d'arme ? »

Et voilà , son masque de froideur avait sauté aussi vite qu'il était apparut. Elle posa une main sur sa hanche. Non , qu'elle sache , le château n'avait pas besoin d'un nouveau maître d'arme... Quoiqu'en même temps , elle n'était pas au courant de tout... Mais désormais , elle savait pas mal de choses , puisque Trystan lui racontait souvent ses journées. Elle soupira pour de bon , cette fois là. Elle ne savait pas vraiment quoi répondre.

« Il ne me semble pas que nous ayons besoin d'un autre maître d'arme. Maître Conrad remplit très bien ses fonctions. On vous a demandé , ou vous êtes venu de vous même ? »

Certes , Lilianna était un peu méfiante. A croire que Trystan déteignait sur elle pour certaines choses. Quoiqu'en même temps , Lilianna était rarement confrontée à des hommes. Et quand elle y était confrontée , elle était souvent très très mal à l'aise , à cause de leurs regards , leurs mots... Mots pas très courtois d'ailleurs. Mais en y repensant , Lilianna n'était pas souvent confrontée aux femmes non plus... On lui en présentait certaines , toutes plus détestables les unes que les autres. Autant dire que la jeune femme les oubliait plutôt vite. Elle était une solitaire au fond... Et puis les gens ne lui laissaient pas le choix.

« Vous semblez être ici pour autre chose. »

Le visage de la jeune femme faisait enfin face aux yeux de l'épéiste. Son visage était d'une beauté assez peu ordinaire. Si elle n'avait pas été humaine, sans doute qu'il se serait plus attardé sur ce physique à part entière. Mais les créatures de son espèce ne l'intéressait guère au fond. Alors ne fit que la constatation de la douleur exprimée a travers des larmes qui s'effaçaient d'elles mêmes et des yeux rougis par le chagrin. Chagrin d'amour, de tristesse ou d'amertume? L'épéiste ne le savait point. De toute évidence, il dérangeait la femme esseulée car nul être humain n'aime à être vu dans un moment de faiblesse. Seulement la faiblesse est humaine et la voir dans cet état ne fit pas changer le masque neutre de l'homme en noir. Autant dire qu'il n'était que très peu affecté par les états d'âme et sentiments en tout genre. Serait-il sans coeur alors? Peut-être que oui pour beaucoup et non pour les personnes qui arrivent à s'identifier à lui -si c'est possible-.

Maintenant qu'il se tenait devant elle et son visage transformé par la tristesse, il ne pouvait plus reculer. Que ferait un bon noble dans cette situation? C'est une question que l'on peut se poser quand on veut vraiment s'intégrer à la vie du château, à son décor et ses personnages. Le château était un théâtre avec ses bonnes et mauvaises figures qui se cachent elles aussi derrière d'autres personnages. En tout cas, cette noble - il en était persuadé vu les apparences - changea vite de masque quand elle lui fit face. Est-ce le masque habituel qu'on porte dans ce théâtre grandiose ou était-ce le physique de l'homme qui dérangeait? Peut-être un peu des deux. Et qu'allait faire ce nouveau personnage qui venait de se mettre en scène en si peu de temps? Allait-il réprimander l'épéiste? Le chasser? Le faire arrêter? Il faut dire qu'en général, un homme comme lui, ça se remarque et comme il venait d'arriver, on avait le droit de douter de ses origines et ses objectifs en ce lieu. Mais il était difficile de penser qu'il pouvait être un misérable venu grapiller de l'argent car, il faut être honnête, il était bien vêtu. Il avait adopté le style vestimentaire de sa famille qui fut autrefois une famille parallèle à la famille royale.

Le nouveau personnage, ce nouveau masque apparut quelques instants plus tôt tomba aussi vite qu'il était venu. Le personnage ne correspondait peut-être pas à la situation et la demoiselle parut fort étonnée de la conversation engagée.

« Un maître d'arme ? Il ne me semble pas que nous ayons besoin d'un autre maître d'arme. Maître Conrad remplit très bien ses fonctions. On vous a demandé , ou vous êtes venu de vous même ? Vous semblez être ici pour autre chose. »

La belle se montrait bien méfiante à l'égard du nouveau venu. C'était tout à son honneur. Et devant de telles questions, qu'allait-il bien répondre? Il se devait de réfléchir avant de répondre, réfléchir rapidement pour ne pas paraître trop suspect mais ne pas aller trop vite comme si l'on répétait machinalement un texte apprit. Il se tut un instant, sans changer la neutralité de son visage.

"Vous me paraissez au courant de bien des choses ici. Certes je suis venu de moi-même. Je ne doute point de la qualité du maitre d'arme de ces lieux mais est-il raisonnable de laisser un homme tout seul à apprendre le maniement des armes en temps de guerre? Je ne cherche à le remplacer mais à venir l'appuyer dans ses fonctions. Bien sûr, je n'aurai jamais eu l'audace de venir si mes capacités au combat ne me paraissaient loin d'être suffisantes. Pour être totalement franc avec vous, j'ai une autre motivation qui m'a poussé à venir jusqu'ici."

L'épéiste ne savait si sa franchise suffirait à la convaincre de lui indiquer une personne. Aussi près de son but, il ne pouvait se laisser à mentir car il savait qu'un jour la vérité éclaterai et la punition serait bien trop dur pour lui. Encore faudrait-il supposer qu'il arrive à rester au château. Tout reposait sur le caractère de cette femme qu'il dérangeait dans un moment où il n'aurait jamais dû intervenir.

Quoiqu'elle réponde, quoique qu'elle fasse, l'épéiste n'était pas du genre à forcer les gens pour avoir ce qu'il voulait. Si jamais elle voulait bien l'aider, alors peut-être la chance d'entrevoir la bibliothèque royale deviendrai une certitude. C'était le seul but de ce voyage en territoire humain: pénétrer dans la capitale et son château afin d'assouvir sa soif de connaissance dans les livres de la pièce sans doute la plus importante du château et même de ce monde, évidemment aux yeux de cet homme si singulier. Maintenant, si elle choisissait de ne pas l'aider alors tant pis, il irait se renseigner ailleurs jusqu'à ce que quelqu'un veuille bien l'aider ou jusqu'à ce qu'il ne puissent plus avoir accès au château. Malgré sa nature taciturne, il serait prêt à employer la diplomatie afin d'obtenir le privilège d'approcher les précieux manuscrit. Serait-il capable d'aller jusqu'à lever le voile sur sa personne tout entière pour parvenir à ses fins? Sans doute car sa détermination n'a pas de limites quand il s'agit de son voeu le plus cher.

La jeune femme s'était éloignée, non pas physiquement mais mentalement. Celà se voyait dans son regard perdu quelque part, noyé par les vagues de pensées qui devaient déferler en elle. C'est comme ça que le ressentait, ou plutôt c'est la raison aux constations faites. Sentiment est un mot bien particulier qui ne fait pas vraiment partit du vocabulaire de cet homme, tout comme tous les dérivés du mot tel que ressentir. Difficile à croire si on le disait comme ça mais face à l'individu, on ne manque pas de douter de la véracité de ces propos. Un grand homme à l'apparence presque cadavérique qui vient se proposer en mettre d'arme. C'est assez humoristique et pourtant c'est ce qu'il se passait ici dans cette cour pleine de belles fleurs.

L'interlocutrice revint à elle quelques instants après, un sourire désagréable affiché sur les lèvres. Le prenait-elle de haut ou était sa façon habituelle de sourire? En tout cas, celà ne changeait en rien l'attitude déjà impassible de l'épéiste.

« Mais je n'ai jamais dit que Maître Conrad était seul... Il ne l'est pas. Puis-je savoir ce qui vous ammène ici dans ce cas ? Peut-être pourrai-je vous aider ? En espérant que vous ne me prennez pas pour une idiote de la cour... Dans ce cas , vous pouvez passer votre chemin tout de suite. »

A force de continuer cette conversation - sans doute la plus longue depuis des mois pour l'homme en noir -, la belle créature semblait se lasser d'attendre des réponses, exaspérée même et certainement dérangée de le voir encore là. Son attitude fort déplaisante en était la preuve. Mais elle lui apprit tout de même des informations intéressantes. Maitre d'arme était sans doute le meilleur poste auquel il pouvait postuler mais c'était aussi très risqué de se faire passer pour l'un d'eux. Il n'arrivait pas à savoir si elle voulait se débarasser au plus vite de lui ou si elle comptait réellement l'aider s'il venait à lui parler de sa motivation. Avec le ton qu'elle avait employé, il était dur de croire qu'elle veuille bien l'aider.

"Je me permettrai de vous manquer de respect si je pouvais éviter de vous prendre pour une idiote. Celà va sans dire que je ne passerai pas mon chemin si vous pouvez m'aider. Certes, je suis venu proposer mes services en maitre d'armes mais je suis venu aussi pour avoir le privilège d'accéder à la bibliothèque royale. Que celà vous amuse, je n'en ai que faire. J'espère qu'à présent vous vouliez bien m'aider."

Peut-être que oui, il lui avait manqué de respect et son visage était devenu grave mais son intonation toujours aussi neutre. Pour lui il n'était pas froid et distant mais franc et réfléchi. Après tout dépendait du point de vue. Mais là il avait été franc et maintenant, il fallait savoir si elle allait lui faire confiance et ne pas prendre ses propos pour des mensonges grotesques car ils n'en étaient pas.

Lilianna jaugeait l'inconnue du regard , les bras toujours croisés. C'était véritablement la première fois qu'elle avait à faire à un homme qui ne voulait pas s'octroyer ses charmes , ni ne voulait lui débiter des poèmes lus et entendus mille fois , simplement pour la séduire , avant de s'intéresser à une autre si celle ci le rejetait. Bon évidemment , il y avat aussi ceux qui s'acharnaient. Oui , ceux qui "chassent". Ceux qui ont décidé que « c'était celle là qu'il voulait ». Les plus coriaces et les plus durs à dégoûter , hélas. C'était la dure réalité de la cour. Les hommes courtisent , les femmes subissent. Certaines avaient la "chance" d'être déjà mariées , et on les laissait un peu tranquilles... Avec un peu de chance , cela finirait par être le cas de Lilianna , d'ici quelques semaines. Quelques mois. Elle soupira. Se marier trop vite , ce serait tendre la perche aux commérages.Parfois , elle regrettait de ne pas être sourde. Enfin , ne nous attardons pas là dessus , car comme bien des dames , elle avait fini par s'habituer à ce genre de choses désagréables. Son éducation ne lui avait de toute façon pas laissé le choix...

Elle entendit les paroles de l'homme et haussa un sourcil. Il cherchait à lui faire croire qu'il était maître d'arme pour... Avoir accès à la bibliothèque ? Ca , c'était bien la dernière chose à laquelle elle s'attendait. D'après Trystan , lorsque quelqu'un cherchait à entrer au palais , c'était pour voler , re,contrer des gens influents , séduire les femme.... Mais le coup de la bibliothèque , c'était une première , et elle en était certaine. Son visage témoignait de son interrogation. Elle secoua doucement la tête de droite à gauche. Que faire de cet homme , maintenant ? Devait-elle l'aider ou pas ? Et s'il lui mentait ? C'était possible après tout. Elle était très bien placée pour savoir qu'on pouvait mentir sans en avoir l'air.

« La bibliothèque , vous dites ? C'est bien la première fois que quelqu'un s'introduit au palais seulement pour des livres. Non pas qu'ils ne soient pas intéressants , bien au contraire. »

Nombreux des livres de cet endroit convoité étaient plus qu'intéressant. Lilianna en avait lu un nombre considérable , en étant cloitrée chez Trystan. Cela lui faisait passer le temps. Tous ces ouvrages étaient vraiment magnifiques , souvent travaillés et entretenus avec soin. Mais pour de nombreuses personnes , les livres n'étaient pas intéressant et n'avaient aucune valeur. Elle même avait beau s'y intéresser , ses pensées étaient plus qu'occupées par autre chose , par quelqu'un. Bien sûr , elle appréciait grandement ces lectures mais dès qu'elle pouvait passer son temps à autre chose , dès qu'elle pouvait passer son temps avec lui , elle avait vite fait d'abandonner le livre en question sur un coin de table pour se jeter au cou de Trystan. Elle trouvait dans cet acte une lecture plus belle que toutes les autres. il la laissait lire en lui et cela , ça valait bien tous les livres de la bibliothèque royale...

« Pourquoi prendrai-je le risque de vous aider ? Qui me dit que vos intentions sont louables ? Peut-être n'en avez vous rien à faire de cette montagne d'ouvrages. Qui chercherait à s'introduire au palais pour des livres ? »

C'était une très bonne question , en effet. Question qu'elle se posait. Elle se demandait bien s'il lui mentait ou pas. Vraimet , si elle avait su , elle ne serait une fois de plus pas sortie. A chaque fois , il y avait un problème !