Les mauvaises rencontres... [pv Alric]

Seren se tourna vivement vers la porte alors que quelqu'un frappait avec force pour demander l'autorisation d'entrer. Alric prit l'autorisation seul et entra, découvrant la jeune enfant pétrifiée de peur. Elle écouta le chevalier et ses craintes ne firent qu'augmenter à mesure qu'il lui expliquait la raison de sa colère. Elle comprenait qu'elle n'était pas tournée contre elle mais contre son fils et le regard que l'homme lui porta la fit réagir instantanément. Seren alla se placer devant le couffin, rompant ainsi tout contact entre Alric et son neveu tout en lui opposant une barrière physique. Certes, elle ne tiendrait pas longtemps face au chevalier si l'envie lui prenait d'user de sa force mais au moins lui faisait-elle ainsi comprendre qu'elle n'aurait pas l'intention de le laisser faire.
Ce fut les dents serrées que la jeune fille entreprit de lui répondre.

Je le comprends bien mon Seigneur, mais qu'avez-vous à faire d'un enfant que son père n'a pas daigné reconnaître et de sa mère qui a tout perdu parce qu'elle a eu le malheur d'aimer ?
A la lumière de vos paroles, je comprends que votre frère s'est joué de moi... de nous.

Tout en modifiant ses propos, Seren jeta un très bref regard sur son fils. Léandre était une victime dans cette histoire, tout comme elle. Si elle avait été mise à la rue pour répondre à la bonne convenance que l'on se devait d'appliquer, l'enfant lui était orphelin de père et n'avait pas de nom.

J'ai espéré qu'il reviendrait. Je pensais que peut-être ses parents s'étaient opposé à notre union ou que l'idée d'être père l'avait effrayé mais que nous sachant dans la misère il reparaîtrait.
Je comprends désormais qu'il n'en était rien et que j'ai espéré en vain.

Naïve que j'ai été... et ce depuis le début.

Seren faisait preuve d'un grand courage pour ne pas fondre en larmes devant le chevalier. Jusque là, elle s'était trouvé une raison (fictive) d'espérer, tout en sachant qu'il n'y avait que peu de chances que cela se réalise. Mais cela lui avait permis de continuer à avancer. Alric venait de briser tous ses rêves de réintégrité. Quel espoir lui restait-il désormais ?

Quelque soit les liens qui ont pu nous lier à votre frère, il n'y en a plus aucun aujourd'hui.

Seren parut surprise tout autant que méfiante. Elle ne s'était pas attendue à cela. Etait-ce pour les antécédents qu'il entretenait avec son frère, la peur qu'il était capable de lui inspirer ou son regard sur son fils ? Elle l'ignorait mais, si elle avait pour habitude de donner (trop) aisément sa confiance, elle ne savait encore que penser d'Alric et de sa proposition. Elle prit un temps de réflexion puis finit par soumettre ce qu'elle avait sur le cœur bien que le ton de sa voix soit emprunt de naïveté.

Vous êtes un homme des plus étranges à mes yeux.
Vous avez le cœur brave puisque vous m'avez sauvée ce tantôt.
Vous pouvez également être un bien plaisant interlocuteur et vous montrer bienveillant.
Mais vous pouvez aussi perdre tout sens commun et déverser sur moi votre flot de colère sans raisons apparentes...

Si vous ne pouvez comprendre ma situation, j'ai peur de ne pas réussir à vous comprendre.
Quelles seraient vos motivations ici ? Pourquoi croirais-je que vous ferez cette démarche après de votre frère ? N'avez-vous pas dit qu'il avait tenté de vous tuer et que vous ne deviez pas lui faire savoir que vous étiez toujours en vie ?

La question suivante que posa le chevalier la déroutait tout autant. Son fils et elle le répugnait mais il demandait à pouvoir lui écrire. De plus, ces mots ne semblaient pas avoir de sens pour Seren. En tant que noble, il était évident qu'elle savait lire et écrire.

Bien sûr. Mais je préfèrerais que vous correspondiez avec mon père pour ce genre... d'affaire.

Seren sembla sonder le regard du Chevalier tandis que celui-ci s'était arrêté de errer dans la petite chambre. Etait-il sincère ? Il n'avait pas de raisons d'inventer le don fait par le Baron mais souhaitait-il réellement la mettre à l'abri en la conviant à y vivre sous son toit ? Est-ce lui aussi aurait des pensées malveillantes à son encontre ?
Elle n'avait pas de raisons de croire en un mensonge, comme elle n'avait pas eu de raisons de penser que Joshua lui voulait du mal. Et si elle se trompait encore ? Alors qu'elle venait seulement de comprendre qu'elle avait été trompée, l'idée lui était insupportable. Elle ne pouvait en prendre la responsabilité et prendre le risque de se tromper encore.

Après un long silence, Seren prit enfin une inspiration dans le but de fournir une réponse au Chevalier.

Je ne peux assumer le poids seule d'une telle décision. Je pense que vous pouvez comprendre pourquoi...
Mon frère décidera pour nous.

Maintenant, s'il vous plaît... Je voudrais être seule.
Et vous avez besoin de repos.

A présent que la peur était passée, son cœur s'emplissait lentement de tristesse. Une tristesse qu'elle ne pouvait laisser échapper en la présence du Chevalier comme le voulait les mœurs de la noblesse.
Alors que la porte se refermait à peine, Seren laissa ses larmes perler et fut prise de sanglots. Elle s'assit sur le bord de son lit, puis s'allongea pour pleurer à son aise, jusqu'à ne plus avoir aucune larme dans son corps. Épuisée, elle sombra ensuite dans un lourd sommeil loin d'être réparateur.