La première décennie du XI
e cycle a profondément marqué les Anëdhels. Les agressions répétées des armées eldéennes dans l’
Annon — dont
la perte et
la reprise d’Eraïson sont les événements les plus funestes — ont marqué au fer blanc l’inconscient collectif des fils de Kÿria. D’importantes dissenssion politiques, notamment autour de la controversée
Halyalindë Yasairava pendant l’An 9:XI,
ont poussé Ardamir et ses alliés à couper les ponts avec le Haut-Conseil et le Trône Blanc. Plus insidieusement peut-être, le Voile a bouleversé en profondeur les modes de vie, peut-être plus encore que dans le Zagazorn où les nains recommencent à investir leurs cités. En Anaëh, la Symphonie des Arbres se fait encore l’écho du passage de Kÿria une décennie plus tôt. Nombreux sont les
taledhels qui ont spontanément quitté leurs foyers dans l’espoir de renouer avec le mode de vie ancestral de leurs ancêtres pour rejoindre une Noss. Ce mouvement de fond a profondément modifié les rapports de force entre les
taledhels et
ornedhels. Ainsi, le dépeuplement de certaines cités met en péril leur sécurité. Quant aux Noss, elles ne savent pas toujours comment accueillir ces « pèlerins » pleins de bonnes volontés, mais rarement taillés pour la vie à laquelle ils aspirent pourtant.
La destruction de Yutar en l’An 10:XI marque néanmoins un sursaut collectif d’importance et met en déroute les forces puysards qui se voient forcées de relâcher la pression sur l’
Annon. L’élection d’
Artiön Laergûl, son mariage avec l’ardamirie
Kaëlistravaë Yasairava et la réhabilitation de Halyalindë l’année suivante permettent aux Cités de renouer le dialogue à Alëandir, malgré les méfiances des uns et des autres.
Dans la foulée de l’élection d’un nouveau Roi, le Haut Conseil acte l’avènement d’une nouvelle ère pour les
taledhels, avec l’abandon de près de trois cités sur quatre et les migrations des populations concernées entre les Ans 15:XI et 17:XI. Malereg, Tethien, Daranovar, Ardamir, Eteniril, la Quatrième Saison, Holimion, Enolir et bien entendu Alëandir subissent d’importants travaux dès la décision du Haut Conseil connue, afin de pouvoir accueillir leurs nouveaux habitants. Afin d’éviter d’augmenter les tensions avec les Noss voisines, les
taledhels favorisent au maximum le transfert de matières premières des villes sacrifiées vers les cités à agrandir. Eldarinwa, Eldorien, Linaëh, Wyslena et Actellys sont quant à elles transformées en citadelles militaires dont le but est de garantir la sécurité de l’Anaëh, tant contre les menaces extérieures que pour pallier à l’infestation de gobelins débutée en l’An 14:XI. En sus de ces places fortes, Daranovar, Ardamir et Alëandir s’accordent sur la construction d’un nouveau fort dans l’
Annon pour assurer leur présence dans la région et en assurer la sécurité. Des divergences existent néanmoins entre Daranovar et Ardamir pour savoir si ce nouveau fort doit servir à verrouiller ou à ouvrir l’
Annon. Cela n’empêche pas les travaux d’aller bon train et au début de l’An 17:XI, deux murs d’enceinte sont finalisés et les fondations nécessaires à la vie (égouts, sources, puits) sont terminées grâce au concours de mages élémentaires. L’enclave extérieure est destinée à accueillir des visiteurs tandis que toutes les infrastructures stratégiques sont en bonne voie de construction dans l’enclave intérieure.
L’
Annon n’est pas la seule région qui obsède les elfes ; l’Aduram aussi accapare leur attention. Depuis le III
e cycle, la forêt maudite est comme une plaie béante dans la mémoire commune des
anëdhels et leur rappelle en permanence les heures les plus sombres de leur longue Histoire. À partir de l’An 12:XI, des rumeurs agitent les cités elfiques : l’Aduram se « calmerait ». La Dissonance, cette Symphonie des Arbres malade qui torture ceux qui peuvent l’entendre et met mal à l’aise même ceux qui en sont incapables, se retirerait toujours plus profondément dans le cœur de la forêt maudite. Certains parlent de l’action d’un petit groupe d’individus, mais beaucoup s’accordent pour dire que pareil revirement ne peut être le fait d’une poignée de Souffles, même éternels. Après la destruction de Yutar, l’apaisement d’Aduram réchauffe un peu plus le cœur des
anëdhels, qui louent Kÿria et son incarnation dans l’Estel pendant le Voile. Des expéditions timides dans l’ancien territoire perdu se montent jusqu’en l’An 17:XI, ce qui leur permet de localiser la Dross et le territoire de Porte-la-Peste.
En Verimios de l’An 16:XI, un secret séculaire de l’Académie des Mages d’Alëandir se rappelle à eux. Contrairement aux nains d’Almis, aux néerites de Diantra et aux clergés de Teiweon de Sol’Dorn, Le Chapitre Blanc — c’est-à-dire le conseil de mages dirigeant l’Académie — est depuis très longtemps au fait de la marre noire asséchée sur laquelle leur vénérable institution a été bâtie. La nature exacte de « l’artefact », comme il est souvent désigné, n’est cependant pas plus connue qu’ailleurs. Quand il se réactive en redevenant liquide, le Chapitre Blanc prend la décision de mettre dans le secret le Trône Blanc.
Dans ces tumultes territorial, sociétal et sécuritaire, le retour des dragons passe globalement inaperçu ; ni le dragon vert dans les Wandres proches ni les dragons d’or, de bronze ou d’argent de l’Île du Sanctuaire ne parviennent à attirer durablement leur attention ; il n’y a bien que le clergé de Tari d’Holimion pour chercher à percer le mystère entourant leur retour, mais leur démarche est seulement intellectuelle.