[MdO2019] Fin Trame de l'Hydre :: La dernière tête de l'hydre

Soulevé une nouvelle fois comme s'il n'était rien, le Haut-Prêtre de Zhak'Bar sentit ses chairs se déchirer... Et la douleur annihiler son esprit.

Une brusque inspiration. Son corps qui frémit d'être mort. Non. Ses yeux s'ouvrent, surpris de le pouvoir. Surprise, que de se découvrir, non pas au sol, gisant dans une mare de sang, mais seulement tremblant et en sueur, de la bile dans le fond de la gorge, parmi les autres sombres avec qui il est venu. Affaibli, Urgoll'Ven lutte pour se relever... Avant de réaliser que non, le coup du Feu ne lui a pas détruit la mâchoire. Ni les sorts du moucheron d'ailleurs. Par contre... La bouche pâteuse, une migraine lui vrille les sens, ses muscles protestent tandis qu'une nappe de fatigue tente de le maintenir au sol. Seul le poison demeure. Le reste... N'était qu'illusion.

Ses mires sanguines observent et il réalise, alors que des sons de pas lui parviennent : leur réalité s'est fondue dans l'illusion quand Krish a saisi la poignet de la porte. La rage qui lui tord les boyaux à la vue de cette dernière, aussi inanimée au les autres, amplifie ses symptômes. Le géant se tient la tête, bile en bouche et salive débordante, alors que ses muscles tremblent sans sa permission. Parmi les égarés, c'est la prêtresse qui montre le plus de signe d'activité. Elle lutte. Un énième coup d’œil lui révèle que la grande salle du "trône" est vide. Perte de temps. Mais les pas se font plus proches, le temps n'est plus à l'hésitation.

Avisant les ombres alentours, Urgoll'Ven ne se sent pas en état de berner qui que se soit par sa discrétion, pas alors que ses muscles ne lui répondent pas toujours comme il l'entend. Alors, le sombre dégaine l'un de ses longs couteaux, le cache sous lui et se rallonge... Émettant bientôt des sons à en faire baver n'importe quel prédateur : une respiration difficile qui le laisserait n'importe qui sans suffisamment de souffle pour se relever. Il amplifie ses spasmes, se retrouve la gueule pleine de salive dans cette position, accentue les mouvements de son torse... Qu'il paraisse en aussi mauvais état que possible. Puis, il reprend de zéro sa première réaction, et prend un temps infini pour tenter de se relever... Sans y parvenir. Accompagnant ses tentatives et son souffle laborieux de grondements de frustration.

Ils n’avaient pas obtenu du Feu d’Uriz qu’ils les rejoignent, alors qu’avaient-ils d’autre comme solution ? L’un attendait, l’autre avait fui. Les mages ne tarderaient pas à se rendre compte que leur influence s’étiolait, et dès lors que ce serait le cas, l’Etat-Major serait réduit à feu et à sang. D’ailleurs, à moins qu’elle ne s’adoucisse, les premières lances devaient déjà être en marche.

Une ombre glisse le long des murs, jusqu’à rejoindre celle de l’immense carcasse baveuse qu’elle savait jouer la comédie. L’assassin s’extirpe d’un mur proche de l’endormi à pas feutrés, l’oreille tendue vers les échos des pas d’un bataillon proche.

- Le pâlot se réveille. Si tu veux t’en sortir, dépêche-toi de te lever et suis-moi. le marchombre pose les yeux sur les autres corps endormis jonchant le sol à côté de lui Tu peux en choisir un, ses yeux se posent sur la masse qu’est Krish, encore accrochée à la poignée sauf le Feu. Uriz la protège.

Un frottement attire l’attention de l’assassin, quelques spasmes courent le long des corps des endormis. Celle qui lutte n’est pas loin de vaincre, et avec elle on dirait qu’elle ramène du monde… mais s’ils se réveillent ils ont intérêt à se réveiller vite, parce qu’il n’a pas le temps d’attendre. Disposer de la garde frontale, celle qui décore l’entrée des lieux est une chose. Les combattants surveillant les entrailles de l’Etat sont une toute autre histoire.

De mourant, le géant devient railleur, grondant d'amusement en réalisant que sa supercherie avait été éventée en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Ah, Prime Dragon, un enfant que tu apprécies peut-être. D'autant qu'il avait posé un genoux à terre devant le Feu... Se redressant avec plus de facilités que ne le laissait supposer son petit jeu, il avise les corps allongés... Et grogne, quand la possibilité d'emmener le Feu lui est refusé. Ses yeux s'attardent sur la sombre un temps, hésitant. Ô Père Destructeur... Sa prière s'arrête ainsi, indécis qu'il est : laisser ainsi inconsciente Son Vaisseau lui parait une trahison, mais remettre en question sa capacité à s'en sortir aussi...

Avec un nouveau grondement, de colère cette fois, il te tourne vers les autres. Ses mires sanguines glissent sur la fillette, l'illusionniste hérétique, l'insolente mage du sang, puis l'agaçant servant de Teiweon... Et s'arrêtent sur l'Alchimiste. Non sans un rictus amusé, le Haut-Prêtre le charge sur son épaule... Et manque s'effondrer de tout son long, quand un vertige l'assaille, alors qu'il se relève, son poids sur l'épaule. Il lui faut un instant pour que sa tête cesse de vouloir se précipiter à terre. Pas le moment. Puis, après plusieurs profondes inspirations, il emboîte le pas au sombre des ombres, à un rythme soutenu mais lourd, ignorant le poil de ses bras, hérissé par le fait qu'il laissait ses alliés derrière lui. Si proches du réveil... Je trouve ces illusionnistes, je les brûle.

"Où sont les illusionnistes... ?" souffle-t-il malgré la salive qui dégouline le long de sa mâchoire, allant se perdre dans le col de son plastron.

* Accepte. *

La douleur me vrille les nerfs, j'ai faillis tout perdre. Et la présence distante de cette lumière brûlante ne cesse de se dérober. Il est à une longueur de bras. Perpétuellement hors de ma portée. En moi et autour de moi, Sa lumière flamboyante est la seule chose qui je perçoit en dehors de mon corps brisé. Je serre les dents de plus belle.

* J'ai compris mes erreurs, mais... * Je n'articule pas vraiment. Attachée aux limites de l'inconscience, baignant dans mon propre sang, je ne suis même pas certaine de penser mot pour mot ce que j'essaie d'exprimer. C'est seulement une certitude. Totale. Et rien ne pourra la remettre en question. * Je n'ai pas céder la première fois. Je ne cèderai jamais. *

Il s'amuse. Je le sens. Mais Son regard est sur moi. Rien que sur moi. J'aime à croire qu'une once d'affection le teinte. Je ne peux rien lui caché et cela l'amuse d'autant plus. Je m'en fout. Il n'est pas temps d'avoir honte. Si je pouvais gémir ou pleurer pour tenir encore un peu, je le ferai. Il saura que je me suis battue jusqu'à la toute fin. De toutes mes forces. Peu importe la douleur, j'arracherai chaque seconde avec toutes les forces qu'il me reste. Et une de plus.

Et une de plus...

Elle avait froid. Tellement froid... La vie n'était qu'un cauchemar, une chaleur fatale emplie d'incompréhensions et d'illusions. L'envie de protéger sa mère, les yeux verts, la douleur au cou et l'agonie la noyant dans son propre sang... C'était passé, tout cela. Désormais, elle avait froid. Aussi froid que dans son rêve. De même, tout était noir et silencieux. L'enfant, tremblante, n'osait pas ouvrir les yeux. Se voir mourir, encore et encore, la paralysait. Et puis, dans le fond... avait-elle seulement envie d'ouvrir les yeux sur le royaume de Teiweon, que ce qu'elle avait rêvé devienne réalité ? De constater que son père n'était plus qu'un cadavre froid ? Non. Elle ne voulait pas. Alors elle refusait de se réveiller.

Des bruits commencèrent à se faire entendre au loin. Mais rien qui fut assez puissant pour la faire sortir de sa torpeur. Alors il y eut comme un tremblement de terre, un grondement de l'Elda. Le premier réflexe de l'enfant fut de se recroqueviller sur elle-même. Alors une voix initialement lointaine lui hurla aux oreilles, la secouant et l'obligeant par le soudain bruit à ouvrir les yeux.

"PETITE ! PETITE !"

Une bouffée d'air. Driz'na gesticula dans tous les sens, portant son unique main valide sur sa gorge brûlante. Ainsi ce n'était pas bleu autour d'elle. Ainsi ce n'était pas glacial, ni silencieux. Mais où était-elle ? C'était quoi cette pièce ? Et... elle n'était pas morte ? Elle ne comprenait pas. Tout ce qu'elle pouvait voir était que malgré la précipitation, le prêtre de Teiweon était content de la retrouver. Alors elle s'assit et regarda autour d'elle. La porte... c'était la porte que sa mère avait ouverte mais différente. En parlant de mère... elle était toujours allongée sur le sol, tout comme l'étrange dame avec sa poupée et sa soif de sang. Par contre, où étaient le grand renifleur et Kahveka ? Driz'na posa ses yeux sur celle qui se réveillait, la dame qui parle dans les têtes, Viconia... Elle eut l'envie de courir à l'opposé d'elle, de se réfugier derrière le prêtre. Elle ne voulait pas rester auprès d'elle après ce qu'elle avait fait. Et pourtant... elle était toujours vivante. Etait-ce là l'illusion, qu'il fallait mourir pour en sortir ? C'était... c'était... elle n'avait pas de mot pour qualifier cela. Elle ne s'était jamais attendue à devoir mourir pour pouvoir vivre. Elle n'était pas encore assez grande pour pleinement comprendre ce concept. Et puis sa mère lui avait fait comprendre qu'il fallait qu'elle affronte ses peurs au lieu de se sauver pour survivre. Alors elle resterait là.

"Mon enfant puisses-tu tirer quelque enseignement de ce jour si particulier... Rien n'est plus dur que de se rendre compte, que dans la vie, tout n'est souvent que vices et apparences. Vois-tu ce que nous sommes vraiment, comme tu dis, les adultes ? Je... À quel point connais-tu ta mère ? Nous devons la sauver, comprends-tu ? Nous devons la rappeler à elle... Ou bien ignores-tu la Colère du Créateur lorsque dans une prison de glace il fut enfermé ? A quel point tu connais ta mère Driz'na, parle n'ai pas peur, n'ai PLUS peur gamine... les Dieux sont, de NOTRE côté... Dépêchons, dépêchons..."

La concernée planta ses yeux dans ceux de l'adulte. Oui, elle comprenait que tout était faux chez les adultes. Même si elle espérait autrement de la part de sa mère. Son père était un maître des apparences avant sa mort, c'était son métier voire même sa vocation de se faire passer pour une personne en particulier. Alors elle savait, elle avait vécu dedans. Et pour Dren'Zess... la connaissait-elle bien ? Non. Elle venait tout juste d'apprendre qu'elle était un avatar du Père. Mais elle comprenait qu'il valait mieux pas qu'Uriz reste enfermé - s'il l'était vraiment - et ne soit plus encore en colère que ce qu'il pouvait être... Alors comment la réveiller... en tant que Feu elle n'en savait absolument rien, par contre en tant que Dren'Zess, elle avait peut-être une idée. Aussi, après qu'ils se soient réfugiés dans l'armurie vide qui s'offrait à eux, laissa-t-elle les adultes s'occuper de donner du sang à l'autre pendant qu'elle s'occupait de sa mère. Elle la regarda un moment, inquiète de n'être qu'un boulet surestimé,se demandant si c'était bien à elle de lui adresser la parole. Puis, voyant les deux s'affairer avec leurs sangs, elle se décida à serrer de sa main l'une des siennes et à se pencher à son oreille pour lui chuchoter.

"Mère... tout ce que vous vivez n'est qu'illusion. En vrai vous dormez. Pour revenir à la réalité, il faut mourir. Le Père et Elghinn vous attendent de l'autre côté, ainsi que tous ceux qui attendent que vous montriez les têtes de ceux qui osent faire tomber le Puy de l'intérieur. Si vous ne revenez pas, vous resterez bloquée... et Elghinn sera en danger."

Elle ne savait pas trop quoi dire... mais elle avait suffisamment pu voir quelle relation il y avait entre la mère et le fils pour comprendre qu'elle pouvait tirer sur cette corde. Si elle avait été mise en danger, elle était sûre que son père aurait tout fait pour la protéger, ou la retrouver. Alors elle pouvait aisément se douter qu'il en était de même pour Krish envers Elghinn.

Tout assassin qu’il fut, son rythme cardiaque s’emporta, et il finit presque par perdre son sang-froid… de colère. Il était resté là, à attendre qu’ils se réveillent, et c’était comme s’ils dormaient encore. Pris dans la folie du retour à la réalité peut-être… mais si c’était le cas, c’est que leurs Braises étaient vraiment trop aisément soufflées.
Voir s’affairer celui-qui-parle-comme-un-vieux-livre l’épuisait mentalement. Voir les autres suivre ses initiatives le désespérait plus que de raison. Et la garde qui ne tarderait pas à venir les cueillir… Pas étonnant qu’ils n’aient pas entendu le bruit étouffé des cliquetis d’armes et d’armures approchant des corridors adjacents, quand ils n’avaient même pas pris la peine de lever les yeux quelques pas plus loin pour retrouver leur gros sac à poison.

- Hh…

Le marchombre retient finalement ses mots. La sélection naturelle fera son travail. S’ils doivent vraiment survivre, les Dieux les protégeront d’une manière ou d’une autre.

- Toi, suis-moi. Ceux-là ne vont pas se sauver seuls.

Une couloir s’ouvre à travers le mur vers les ténèbres, et l’assassin plonge tête la première dedans, invitant Urgoll et son sac à patates improvisé à le suivre. Si le voyage a duré une fraction de seconde ou de longues minutes, même le mage qui en est à l’origine ne saurait plus vraiment le dire, habitué qu’il est à l’obscurité totale et infinie de ces lieux. L’important c’est simplement d’arriver à temps.
Les boyaux ténébreux crachent leurs proies dans une petite pièce à peine éclairée. La facture de l’endroit laisse comprendre qu’ils sont toujours dans l’Etat-Major, mais où exactement ? Pour le colosse, cela reste à déterminer.

- Je ne vous présente pas.

Tu fulmines, les dents serrées à l’idée d’avoir échoué. Les choses n’auraient pas dû se passer comme ça. Les choses auraient dû être plus simples. S’ils avaient été capable du moindre raisonnement logique, cette histoire serait déjà terminée, et vous n’auriez pas eu à verser la moindre goutte de sang. Mais puisqu’il fallait verser du sang…

- Dépose-le là où tu veux et bois-ça.

S’il fallait verser du sang, autant que celui d’entre vous qui était le plus à-même de le faire soit en meilleur état.

- Ça risque d’être désagréable pendant les deux premières minutes mais ça devrait te remettre sur pieds. On aura besoin de toi si on veut atteindre les illusionnistes.

Mais encore fallait-il qu’il te fasse assez confiance pour l’ingérer.

Elghinn en danger... Une conscience vague d'une conviction atroce. Pourquoi y pensait-elle maintenant ? Pourquoi mourir sauverait-il Elghinn... Et même si c'était le cas.

Elle aurait tout fait pour son fils. Tout... Ou presque. Elle se dégoûtait elle-même en y pensant. Son cœur se serrait. La vérité, c'était que même pour lui, elle ne se sacrifierait pas. Elle souffrirait. Elle se battrait. Elle réduirait le monde en un immense champ de ruine et tuerait jusqu'au dernier de ses plus anciens amis... Mais elle ne donnerait pas sa vie. Cette foutue prêtresse avait tord. Elle n'avait décidément aucun instinct maternel. Elle était une survivante avant tout.

Une créatrice, une vengeuse et une survivante.

Elle ne donnerait sa vie pour personne. JAMAIS.

- a...mai... " gargouilla sa gorge brisée dans un flot de sang.La lumière brûlante ne la lâchait pas. Ses griffes affermirent leur prise sur la trachée rigide de son ancien camarade en un sursaut que Kahve'ka et L'Renor pourraient peut-être distinguer.

La petite attendit, sa main toujours dans celle de sa mère, silencieuse. Rien. Son corps continuait à avoir un soubrsaut de temps à autres mais rien ne signifiait un quelconque retour parmi eux... pourtant elle se souvenait l'avoir vue tomber au sol. Avec un soupir elle finit par se repencher sur Krish, afin de lui adresser quelques autres mots.

"Revenez... Teiweon ne vous attend pas de l'autre côté, ce n'est pas l'heure. Je suis bien vivante. Pas auprès de papa."

Elle ne savait plus quoi dire. Elle ne connaissait pas suffisamment sa propre mère pour trouver moyen de la faire revenir plus vite. Elle se doutait juste que Dren'Zess l'aurait fustigée de trop s'attarder auprès d'elle et de ne pas s'occuper du reste. Vaerian l'aurait fait aussi. Alors elle lâcha la main de sa mère, lui caressa doucement la joue en lui remettant une mèche derrière l'oreille puis déposa un baiser sur son front. Car elle l'aimait, sa mère. Ensuite elle se releva et regarda les deux autres essayer de ramener par le sang l'autre. A pas feutrés l'enfant se rapprocha de la porte et rapprocha son oreille pour écouter. Elle resta ainsi de longues secondes avant de murmurer : "Il y du bruit derrière la porte."

Après un regard vers les deux personnes trop occupées pour avoir écouté ce qu'elle venait de raconter, elle tourna sa tête vers eux et répéta, cette fois-ci de manière plus audible.

"Il y a des bruits de personnes armées qui se rapprochent d'ici."

La petite réfléchissait à toute vitesse dans sa tête. Elle ne pouvait ni ne voulait laisser sa mère là et les adultes ne voudraient pas laisser en appat quelque autre membre de l'équipe que ce soit. Et il était peut-être trop tard pour sortir de là...

"C'est possible de faire une illusion comme ils ont fait pour nous, pour que les gens ne nous voient pas ?"

Cette fois-ci, la question était plutôt adressée à celle qui parlait dans les têtes... Si elle pouvait voir le faux, peut-être pouvait-elle en créer ? A condition qu'elle ne la tue pas, cette fois. Et puis tant pis pour l'ordre de sa mère... elle espérait que Krish comprendrait qu'il y avait nécessité à parler à ces étrangers.

Il n'a le temps ni de s'étonner, ni d'enrager. Suivre, seulement. Chercher du regard les ennemis à détruire.  Pas encore. Une surprise, c'est certains, quand ils tombent face au pâle. Les lipes du Gobelin, qui ne peuvent retenir un flot irrégulier de liquide, s'étirent en un sourire railleur, tandis qu'il dépose l'Alchimiste, qu'un nouveau spasme le fait lâcher au sol. Sans que cela ne le réveille, malheureusement.

"Le moucheron n'était peut-être pas pris dans la toile, finalement..." gronde-t-il d'amusement en s'emparant de la fiole.

Il en engloutit le contenu sans une arrière-pensée... Et frissonne à nouveau, ses paupières se fermant sur ses mires rouges tandis que son rictus se crispe. Un instant de frisson, un instant de malaise amplifié, un instant... Il rouvre les yeux.

"Montre-moi."

- Les illusionnistes sont dispersés dans les étages supérieurs. tu sors un morceau de papier et un fusain de la petite sacoche à ta ceinture, que tu tends à l’un des marchombres pour qu’il dresse un plan Le problème c’est que les étages sont non seulement bardés de pièges, mais que les meilleurs éléments de la garde protègent le rituel des mages.

Deux assassins marchombres, un élémentaliste, un physiciste. Vous devriez largement être capables de tirer votre épingle du jeu et d’interrompre le rituel, mais de là à véritablement faire plus… tu en doutes fortement. Pas moyen d’être particulièrement discret, même en passant à travers les ténèbres, lorsque la concentration de praticiens des arcanes est aussi forte, et une fois que les adversaires convergeraient vers vous… vous seriez la minorité.
Au moins de leur côté ils n’ont qu’un, ou du moins une mysticiste, et à tous les coups, elle serait la dernière à bouger. Elle avait d’autres chats à fouetter. Tu le sais, parce que si tu as autant défendu ces impies, c’est parce que derrière leur manque de foi, il y a tout de même un véritable talent.

- Donnez-moi le temps, et on devrait pouvoir se débarrasser de l’un d’entre eux. tu serres les dents par contre, ça compromet notre planque. Qu’est-ce que vous en dites ?

~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~

Le petit groupe de soldat approche d’un pas décidé de la cible du rituel des illusionnistes. Ils avaient perdu une part de leurs victimes, mais les mages maintenaient leur sortilège envers et contre tout. Le Feu d’Uriz était encore entre leurs mains. Ils possédaient encore une monnaie d’échange, alors ils ne l’abandonneraient pas de si tôt. Le reste par contre… le reste pouvait mourir.
Les deux arbalétriers marchaient canon armé, suivant de près les deux épéistes et le lancier qui ouvraient la marche. C’est avec une certaine assurance qu’ils s’approchaient de la salle fatidique.

- Ça sent le sang.

- Probablement l’un d’entre eux.

Les soldats murmurent entre eux, sous le tintement des armures contre le sol.

- Une fois à la porte pas de temps à perdre. Préparez-vous au combat et ne retenez pas vos coups. Le Feu d’Uriz est la seule vie qu’il soit important de sauvegarder.

Les épéistes bondissent à l’intérieur de la salle dans une roulade parfaitement synchronisée, rapidement suivi du lancier secondé par le premier arbalétrier. Un cri de signalement fuse quand les fantassins aperçoivent une silhouette non loin de la porte opposée, et au quart de tout l’arbalétrier engage sa cible et tire.

Le carreau se fiche dans les viscères de la pauvre victime, et les regards se dirigent vers les murs de la salle.

- Elle a essayé de nous tromper ! Les autres ne doivent pas être l…

Non, effectivement, ils ne sont pas loin.

"Auront-ils, eux, ce temps... ? souffle le Haut-Prêtre, tandis que les diverses sensations qui l'agressent se font plus pressantes, avant de s'évanouir. Une fois que tu auras frappé, nous devrons rester en mouvement. Soit. Quelles seront les prochaines cibles en ce cas ?
- Je reste ici pour vous guider, je ne frappe pas. Je vous ralentirais.
- Que prévois-tu ?
- Je repère un point névralgique. Je vous y guide. Vous faites autant de dégâts que possible parmi les mages. Le pâle se tait un bref instant. Et j'espère que Kahveka pourra me sortir d'ici après s'être réveillé."

Tandis que ses symptômes s'atténuent, le Gobelin a un sourire, tant pour ce qui lui est annoncé que par rapport aux espoirs de son allié. Compte sur l'indécis Alchimiste...

"Si les sorciers de l’État-major sont distraits par mes sortilèges, ça vous laisse de la marge de manœuvre. Mais je doute avoir encore la force de courir après un effort pareil.
- Où est Malag'Eyl ? demande abruptement Urgoll'Ven. Si nous l'atteignons, nous n'aurons plus à affronter tous les gardiens.
- On n'atteindra pas Malag'Eyl sans se faire écraser. Il est au plus profond de la forteresse, trop bien protégé."

Loin de ceux qu'il doit guider. Loin de la justice des sombres. songe le Haut-Prêtre. Le temps joue contre eux, il n'y a pas à hésiter. Il acquiesce.

"Alors ? Qui frappe-t-on en premier ?" demande-t-il sombrement.

La main baignait dans une chaleur visqueuse, alors que ses yeux accoutumés à l’obscurité clignèrent trois fois pour être tout à fait certaine. C’était à n’y rien comprendre ; et si elle eut une once de questionnements sur les gestes meurtriers – puis suicidaire – de la prêtresse, ils s’effacèrent bien vite. A dire vrai, le Feu d’Uriz ne tenait-il pas dans sa main la trachée d’un ancien comparse ? C’était tout du moins ce qu’elle en avait compris. Alors, plutôt que de demeurer à regarder le tragi-comique dénué de sens, elle préféra rouler ses billes vers le corps sous elle. Le dernier souffle emporta le malheureux dans un gargouillis ingrat. Elle jubilait, la respiration bien trop courte, le corps tendu par l’excitation malsaine. La Rose Noire était en chasse, et si la pièce retrouvait peu à peu son calme, elle n’avait guère d’attrait à le laisser s’installer durablement.

Aussi, lorsqu’elle retira ses doigts poisseux, elle lécha une fois de plus le liquide carmin. Une moue peu convaincue lui déforma la face ; il n’avait guère bon goût et elle préféra s’en essuyer la main fissa. Il faudrait à l’hémomancienne un sang meilleur pour se rassasier des massacres. Pourtant, quelque chose d’étrange pesait sur ses épaules maigrelettes de petite eldéenne. Une chape lourde qu’elle ne parvenait à définir. Puis, il y eu cette odeur. Celle du sang chaud, celle de la vie qui emplissait l’air comme autant de promesses maudites. Elle resserra son emprise sur la poupée de chiffon, cherchant parmi les ombres son ami disparu. L’autre gaillard, à plusieurs mètres d’elle, semblait lui aussi guettait l’invisible : car parmi les nuances ténébreuses se terraient un danger pire qu’il ne l’aurait cru.

Laissant là ses occupations, elle s’avança d’un pas lent alors que le poids se mis à peser plus lourd encore. Le goût lui vint après l’odeur, si bien qu’elle déglutissait dans le vide, bien incapable de contrôler ses spasmes linguaux. Qu’il était doux, ce divin liquide. Et qu’il était pur. Elle était bientôt proche du Feu d’Uriz et s’accroupit à son côté, l’observant un instant. La pauvresse s’accrochait farouchement à la vie alors qu’un mince filet d’air humide traversait la prison de ses lèvres. Agonisante, elle était magnifique. Les traits déformés par la souffrance et les coups, elle était l’apogée de la splendeur macabre, alors que son corps se faisait livide. L’Renor la sonda – une fois -, surprise qu’elle vive encore ; les os brisés, les organes déchirés, les muscles pulvérisés.

Oui, Dula il n’y avait eu dans sa longue vie pas plus beau tableau que celui-là, alors que se resserrait un poing spasmodique sur le conduit de son ennemi. Tombée pour la gloire. Avec une lenteur extrême, de crainte de ne se faire repérer par le dernier garde, elle se pencha sur le corps luttant. Si proche – oui si proche – qu’elle sentait la mort à travers son souffle de plus en plus faible. Poussée par l’envie malsaine, la Poupée Grise glissa sa langue sur le coin de ses lèvres, d’où s’échappait un filet épais du fluide vital. Moitié coagulé, ce dernier lui souleva presque le cœur. Sans goût. Et enfin l’évidence.
L’illusion.

La Rose Noire comprenait à présent, et le schéma fût limpide. Elle ne prit guère plus d’une minute, affalée sur cette viande moitié froide, pour réfléchir. Kahveka demeurait à l’abris dans les ombres et elle semblait en pleine possession de ses moyens. Les lèvres douces et tâchées de la mage glissèrent jusqu’à l’oreille de la mourante, dans un flot délicat et terriblement grave.
« Prévenez-les que nous restons ici pour maintenir l’illusion ». Sa main libre dégagea délicatement les mèches tombées sur son front et elle tissa juste assez pour libérer son cerveau de la pression hémorragique. Ainsi, sûrement, parviendrait-elle à l’entendre juste assez de temps. « Prévenez-les, Feu d’Uriz. Prévenez les autres, qu’ils protègent nos corps ».
Aertsab se redressa lâchant sa poupée au sol, tout contre son genou et tira de sa ceinture la dague souillée. Elle regarda un moment avec dégoût la longue cicatrice qui lui courrait le long du bras avant d’y plonger la lame, juste assez pour reformer le sillon. Elle retrouva presque aussitôt l’ouïe attentive de l’Agonie :
« Si mon corps est blessé au dehors d’ici, faîtes-moi prévenir ». Elle s’arrêta et répéta à nouveau jusqu’à être sûr, par un gargouillis qu’elle l’avait entendu. La petite se redressa, rangeant son coutelat puis se saisissant de sa petite poupée. Elle dominait de toute sa taille le corps convulsant à demi-conscient avant d’éclater d’un mouvement sec du pied la nuque de la drow. Elle venait de tuer le feu d’Uriz.

En vérité, elle savait à présent qu’elle reviendrait bien vite à elle. Assez vite pour transmettre les messages qu’elle venait de lui dire. « D’anthe Kah, cesse donc de faire l’enfant et achève-moi l’autre. Nous n’avons guère le temps pour ça, nous devons avancer ». Car voilà ce qu’elle savait : enfermés dans cette illusion, ils occuperaient l’attention des mages, assez au moins pour profiter aux autres. Et plus ils avanceraient dans l’illusion et plus cette dernière devra être tissée à la hâte, demandant plus de concentration et de magie à mesure de leur quête. Ils leur restaient à savoir si les sévices se répercutaient sur leur vrai corps. Là, ils leur faudraient faire confiance au plus prestigieux des coursiers.
Elle avait tué le feu d’Uriz, Vith.
Silencieusement, elle jouissait.

"Revenez... Teiweon ne vous attend pas de l'autre côté, ce n'est pas l'heure. Je suis bien vivante. Pas auprès de papa."

Des voix lointaines. Des bruits de bottes.

Elle prit une grande inspiration, sa gorge sifflant dans sa détresse à trouver le moindre souffle d'air. Puis elle se mis à tousser, roulant sur le flanc pour évacuer de ses poumons une mer de sang qui n'existait plus. Sa main se posa maladroitement près d'elle, rencontra du tissus. Par réflexe, elle se cramponna et ses griffes se plantèrent sans ménagement dans ce qui se trouvait être la cuisse de Vlos.

Elle se retrouva à genoux sans bien entendre ce qui se passait autour d'elle. Elle ne comprenait déjà pas vraiment ce qui se passer en elle. Elle tremblait des pieds à la tête tant le pic d'adrénaline la mettait à mal L’écho de son cœur résonnait dans sa boite crânienne. Le sang. La mort. Elle l'avait sentit. Elle avait les os brisés. Et la douleur. La lutte. Et Uriz qui riait. Elle tenta de se relever, tangua, se plia sur le côté pour vomir dans un coin libre de la pièce, et resta le dos rond, la bile aux lèvres et les bras appuyés contre le mur.

Elle tourna la tête, avisant L'Renor, couverte de sang contre le mur du réduit. Et merde ! Il s'était passé quoi ?!

Réalisant soudain la menace qui venait de la porte, elle fit volte face pour venir en aide aux deux survivants en vue, la respiration encore aussi saccadée que ses gestes.

Aussi facilement que l’on prive un gamin de son suçon, d’un battement de cil il aurait pu brimer la folle envie de sang de son amie en brigandant la vie de sa proie. Il aimait à la voir s’amuser, à s’épanouir dans l’aliénation de sa psyché, à manipuler ses victimes comme les petits animaux qu’ils devenaient entre ses délicates serres … Mais par-dessus tout, il avait dans la peau ce sourire inquiétant, sadique, voir même dérangeant, qui ponctuait si adorablement sa jeune bouille lorsqu’elle savourait langoureusement l’agonie de ses victimes. À sa demande, il s’était volontiers exécuté à lacérer le costaud de deux belles entailles, révélant une chaire bien juteuse et ô combien alléchante à la rose. Une fois la sale besogne exécutée, Kah préféra rester tapi dans cet univers de noirceur, un peu à la manière des arachnides qui s’y sentaient chez elles.

Plus. Belle. Décision. À. Vie.

Il se délecta de la voir si farouche, plongeant tête première dans ce vice qu’elle avait pleinement accepté. Chaque bruissements, chaque lamentations lui confirma à quel point il avait bien fait de lui livrer le souffre-douleur sur un plateau d’argent plutôt que de lui subtiliser. Enfin, la piquante rose d’ébène sortit de son champ de vision. Un étrange voile se déposa en toute délicatesse devant ses iris rougeoyants, l’empêchant de distinguer la moindre silhouette. Lui qui régnait en Roi dans ce monde d’obscurité, n’y voyait plus à mètre. Il abaissa les yeux contre sa main possédant sa chevalière, focaliseur de son pouvoir et un frisson lui secoua le rachis. Quelque chose clochait …

Un craquement sourd d’ossements broyés. Qu’avait-elle fait, encore ? Kah referma son poing aussitôt, cherchant à nouveau à se mouvoir au travers l’absence de lumière et, pour une fois, n’eut plus guère force à y parvenir. Ses dents crissèrent d’agacement, comme la situation commençait réellement à les lui casser. Ainsi il dût y aller à l’ancienne ; mollo-mollo il posa ses doigts contre la carte de son coutelas et lui fit mette tête contre le bas tandis qu’il avait commencé à se mouvoir sur la pointe des pieds. Il s’approcha à l’aveuglette jusqu’à ce qu’il puisse enfin distinguer deux fines silhouettes, l’une dominant l’autre. Il posa la pointe de son couteau sur l’épaule de l’Renor afin de capter son attention et la figure qu’elle lui dévoila avait tout pour perturber le commun des mortels. Elle souriait, non, jubilait. Et sa gueule était marbrée de sang, barbouillée par son petit jeu de tantôt : aussi bien vous dire qu’elle avait mine à faire peur. Mais c’était autre chose pour notre assassin qui la trouva tout simplement délectable …

« Mais qu’est-ce que tu as fait ? Tu l’as butée elle aussi ? J’en avais besoin! » Dit-il en haussant un brin le ton, tout en écorchant d’un mouvement du poignet le tissus qui couvrait les épaules de son amie, non sans en laisser le doux passage de sa lame en surface de sa peau. Et à elle de lui répondre du tac au tac, sans même éclairer ses lanternes.

« D’anthe Kah, cesse donc de faire l’enfant et achève-moi l’autre. Nous n’avons guère le temps pour ça, nous devons avancer » Et c’est elle qui lui disait ça, elle qui tenait à son bras une poupée torchée de sang … Enfin, elle lui demandait de tuer. C’était aussi tentant que de demander à un alcoolique de boire cul-sec l’une de ses bouteilles d’eau de vie. Kah profita une dernière fois de cet air euphorique qui planait sur le faciès de la rose, puis s’en détourna à regret pour sonder à nouveau son entourage. Il abaissa le nez contre sa chevalière, celle-ci ayant retrouvée de sa chatoyante chaleur. Il referma le poing, s’abaissa et laissa en son sillage une envolée de fumée inodore. Une poignée de seconde plus tard, une plainte étouffée et le bruit sourd d’un corps massif se fracassant tête première contre le sol.

Dans la noirceur la plus totale, le crissement de l’acier retentissait dans la pièce au fûr et à mesure que son intensité augmentait. Puis tôt, devant les yeux de la rose, il réapparut. Kah tenait entre ses cinq doigts la main inerte d’un cadavre, dont la pointe de son couteau se frottait contre le sol, fièrement fiché à travers le gorgoton du soudard. Il avait traîné le cadavre en laissant derrière lui une traînée de sang pour finalement délaisser le corps aux pieds de L’Renor.

« Si tu veux t’amuser, fais-toi plaisir. Dépêches-toi avant que ton repas ne soit trop froid, lui dit-il, le ton évident bien gausseur. Et maintenant, que fait-on ? Tu te crois capable de me donner le mort à moi aussi ? Vraiment ? »

- On frappe le premier illusionniste sur notre chemin. tu détaches ton grimoire de ta ceinture pour le tendre au mastodonte Prends ça. Et fais-y attention. tu te surprends à donner l’ordre sur le ton de la boutade plus que de l’instransigence Je te jure que si tu l’abîmes nos déboires d’aujourd’hui te paraîtront aussi insignifiants qu’une piqûre de fourmi.

Tu souris au Haut-Prêtre de Zakh’Bar comme si c’était là la dernière chose qu’il te serait donné de faire. Parce que ce serait peut-être la dernière chose qu’il te serait donné de faire. Tu n’es pas encore prêt à mourir, mais s’il le faut pour que le Feu d’Uriz prenne sa digne place et rende au Puy un peu de sa gloire… Ta science lui manquera à l’Elda, mais l’Elda ne s’en rendra certainement pas compte avant qu’un autre homme de science ne vienne te remplacer.

Tu t’assieds, appuyé contre un mur, et tu fermes les yeux. Une grande inspiration. Une grande expiration. Tu regardes. Tu t'imprègnes. Tu suis le carcan des murs de la forteresse autour de son atmosphère. Ta mâchoire se serre, entre les mains d’Urgoll ton livre semble irradier de magie. Le marque-page donne la direction.

- Trouvez-les avant qu’ils ne me trouvent.

Tu t’étends, tu t’étends, tu portes tes yeux de mage plus loin, toujours plus loin, tu suis les forces, tu suis le mouvement, tu suis les obstacles, tu longes les murs, sans bouger. Ton corps tremble, l’effort est intense, mais tu continues. Les chemins sont biscornus, mais les distances sont courtes. Tu as déjà fait témoignage de plus de puissance que ça. Tu as déjà tracé des sortilèges plus complexes que celui-ci. Tu gères. Tu tiendras. Le temps qu’il faut tu tiendras.

Les ombres jumelles emportent l’élémentaliste avec elles dans leur monde d’obscurité, et couverts par ta magie, comme le tintement d’une cloche au milieu du tintamarre d’une fête populaire ils avancent vers leur cible, en espérant que tu ne te trompes pas.

~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~

Tout va très vite, les yeux du soldat se posent sur celui qu’il reconnaît comme le nouvellement adoubé Haut-Prêtre de Teiweon, et son cœur s’emporte dans une danse macabre. L’épéiste fait un faux pas, laisse échapper un râle de douleur et combat pour reprendre possession de lui-même durant ce qui lui paraît être une éternité.

Un bruit immonde coupe court à l’affrontement. Le sang se répand sur le mur de l’armurerie vide. Le sang se répand sur le sol. Le tireur pose les yeux sur le liquide carmin avec une profonde mélancolie. Quel dommage. Quel gâchis. L’arbalétrier regarde la vie lentement quitter celui sur qui il venait de tirer, goutte à goutte. Ainsi perdre une haute autorité religieuse toute nouvellement assise, avant même d’avoir pu évaluer ce qu’elle avait à apporter à l’Elda…

- Arrête de rêvasser et tiens plutôt l'autre en joue !

Les prunelles rouges se figent dans celles du feu d'Uriz, défiant celle qu'ils ne veulent pas tuer de faire le premier pas. Le silence le plus total s’abat sur la pièce, au point que même la respiration difficile de celle qu’ils avaient fléchée non loin leur parvient. Et elle n’est pas la seule. Il y a d’autres braises qui vivent ici.

- Vous deux, immobilisez les endormis. Qu’ils ne posent pas de problème s’ils venaient à se réveiller. l’homme se retourne vers les arbalétriers Toi occupe-toi de maintenir celle-là en respect, et toi va t’occuper de la jeune femme dehors. Ne la tue pas. Ça peut toujours être utile une petite maline.

Lui, il s’occuperait de retourner chaque grain de poussière jusqu’à être sûr d’avoir mené son travail à bien.

Le sourire, le Gobelin l'a rendu à son allié de circonstances, goûtant la saveur de la menace. Par pur esprit de contradiction, il a eu la pensée de laisser le précieux grimoire vivre sa vie et d'en subir les foudres une fois tout cela fini... Une pensée qu'il a accompagné d'un grondement amusé ainsi qu'un simple mot. Vraiment simple... Mais si savoureux.

"Chiche." a grondé la voix animale.

Puis, il a laissé le mage blanc suivre le cours de son propre plan. Le géant sombre est allé de son côté.
A présent, il rôde dans les ombres.

Aussi égaré qu'un enfant, Urgoll'ven ne peut que se fier aux marchombres, filant dans un plan auquel sa magie ne lui donne pas accès. La lourde épaisseur de papier dans son giron, il en observe le marque-page qui, sous l'influence de la magie de son maître, leur indique une direction. L'ennemi. Par la grâce de l'obscur plan, les deux maîtres des ombres et leur invité peuvent observer sans être vu et prendre connaissance des lieux. Ainsi, c'est une salle circulaire à une seule entrée qu'ils découvrent, où trois mages perturbent le silence tendus de leurs marmonnements, sous la surveillance d'une quinzaine de soldats, arbalétriers, épéistes et lanciers mêlés. Les sens du Gobelin le tiraillent : la tension sur la trame est impressionnante, la force militaire est écrasante... Et pourtant, le feu dans son ventre est ravivé.

Les vertiges et les nausées ne sont pas encore un souvenir, son corps n'a pas miraculeusement retrouvé une énergie débordante... Mais le Haut-Prêtre n'en a cure. Ses yeux voient des ennemis trop longtemps demeurés hors de portée, et le temps est compté. Celui de ses alliés. A terme, le sien. Feu d'Uriz... Il a une pensée distraite pour le pâle : dans une illusion, ce dernier l'a tué. Un sens du jeu pervers pousse le géant sombre a vouloir lui rendre la pareille dans la réalité... Ce qui nécessite qu'ils demeurent tout deux en vie assez longtemps. Chiche. Et le Gobelin de prendre l'initiative.

"Restons à l'extérieur... gronde le Haut-Prêtre de Zhak'Bar. ... Quand ils attaqueront, empêchez-les de sortir."

Une fois en position, un de ses cordages arrimant le précieux livre à ses hanches, le sombre se met en mouvement. Ainsi débute son humble ballet de destruction.

Les premiers gestes partent de ses poignets. Suivent les coudes, puis les épaules. Dans un même temps, ses pieds se meuvent. Le bassin et le torse ne font que suivre. De tout son corps, le géant attire la magie à lui. Le Dragon ne prime pas la discrétion, aussi attire-t-il la magie à lui comme un torrent qu'aspirerait l'un de ces monstres aquatiques qu'évoquent les marins. A n'en pas douter, les mages en pleine incantation le percevront. Leurs gardes seront mis au courant et réagiront avec la vivacité de sombre d'élite. C'est pourquoi l'élément de surprise est vital car, avec ce petit temps, Urgoll'Ven peut changer la donne : au lieu de lacérer un rempart de chair, leurs lames et projectiles se heurteront à un mur de roche.

L'alerte est donnée et les guerriers font volt-face, les arbalétriers visent... Et l'élémentaliste, d'une nouvelle torsion, use de la magie dérobée sous le nez des incantateurs pour refermer l'entrée de la pièce.

Un fracas annonce que certains s'y sont heurtés, dont des projectiles. Deux d'entre eux parviennent à passer l'infime ouverture laissée par Urgoll'Ven : pour la suite, il a besoin de sa vue. L'un traverse le cuir et se plante dans son épaule. D'un geste agacé, il l'arrache aussitôt, les dents serrés par la concentration, rejetant la douleur. Face aux vagues ennemis, il incanta autrefois. Aujourd'hui, il n'a qu'a esquivé ce que peut déverser un petit orifice.

D'un pas, il se décale. Les marchombres veillent, leurs ennemis luttent bataillent contre la pierre. L'élémentaliste a déjà repris ses mouvements, malgré les vertiges qui se font de nouveau sentir : le poison n'est pas si loin, l'effort n'est pas négligeable... Se mouvoir, encore et encore. Des voix enragent, des corps se jettent contre la barrière, d'autres carreaux tentent de les attendre. Mais Urgoll'Ven bondit encore, de plus bel, toujours. Si ce n'est eux, le couloir où ils se trouvent s'avèrent désert. L'ennemi s'est enfermé de lui-même. Le géant est en sueur sous la fatigue de l'effort, sous la charge de l'énergie qu'il accumule... Encore... Comme ce jour où il déchaina la magie sur son "père" et lui-même... Non, car aujourd'hui, il en a parfaitement le contrôle. Avec un sourire tendu de concentration et de jubilation, le Gobelin sautille, se remet face à l'ouverture, voit les faciès déchainés et les regards haineux... Et relâche la magie.

Partie du creux de sa paume tendue, une langue rougeoyante se jette dans l'orifice... Et de l'autre côté, un brasier se déchaîne. La lumière et la chaleur explosent à la face des marchombres et de l'élémentaliste. L'intérieur de la pièce n'est plus que feu, langues rouges, oranges et blanches qui se tordent, dans lesquelles dansent en un manège ignoble des silhouettes sombres. Au rugissement des flammes se mêlent les hurlements des drows pris au piège.

Aussi brusquement que le feu s'est répandu dans la pièce, il s'évanouit. Ne demeurent que ses minuscules enfants, attaquant encore tissus, cuir et chairs. Des plaintes s'élèvent, attestent que Teiweon n'a pas emmené tous tous les enfants d'Uriz dans ses Geôles glacées... Pas encore.

Quant à lui, le Gobelin vacille. La peau luisante, le souffle rauque, la tête brusquement serrée dans un étaux, il se plie et rend le contenu de son estomac. Ce n'est pas faute d'avoir raccourci la durée de son sort afin de s'économiser, laissant le temps faire sa part du travail... Ces "éclats" à leur entrée ont peut-être été excessifs. Si Malag n'était pas caché... Songe le sombre en se redressant, essuyant d'un revers la bile qui macule sa gueule... Tout en constatant qu'un carreau d'arbalète s'est logé dans sa main, faute d'avoir atteint son visage. Avec agacement, il l'arrache. Qu'importe. Il fera ce qui doit être fait.

Quand il rouvre le grimoire de leur guide, il constate que son marque-page ne bouge plus.

Elle aimerait fermer les yeux. Ne pas croire ce qui se passe, ne pas comprendre ce qui était en train de se dérouler. D'être encore dans une illusion, tout simplement. Un bref instant, Driz'na ferma très fortement les yeux et s'imagina qu'elle allait se réveiller. Mais non. Au lieu de quoi elle tressaillit quand elle entendit le carreau d'une arbalète percuter quelqu'un, suivi du bruit d'un corps tombant sur le sol. Elle sentit ses entrailles se serrer fortement, lui faisant mal. Elle sentit la peur la prendre. Mais sa mère se réveillait. Il fallait qu'elle puisse se défendre, qu'elle reste en vie.

"Arrête de rêvasser et tiens plutôt l'autre en joue ! Vous deux, immobilisez les endormis. Qu’ils ne posent pas de problème s’ils venaient à se réveiller. Toi occupes-toi de maintenir celle-la en respect, et toi va t’occuper de la jeune femme dehors. Ne la tue pas. Ça peut toujours être utile une petite maline."

Des mots : ainsi, la personne à être tombée était le prêtre de Teiweon qui l'avait aidée à comprendre son rêve... puisse la déesse l'accueillir en son royaume. Des pas. Des soldats sortent, au moins un autre commençait à faire le tour de la salle. Le coeur de l'enfant battait à toute allure. Elle aurait très certainement essayé de fuir ou aurait perdu son sang-froid si la voix de Viconia, difficile mais emplie d'assurance, ne s'était pas élevée pour maudire les ennemis. La dame avait raison. Et cela redonna du courage à la pauvre enfant qui attendait derrière la porte que l'un des soldats pense à regarder si quelqu'un se trouvait là. Elle se rappela rapidement son rêve. Les symboles sur la glace, quels étaient-ils. La fille de l'autre côté du miroir. Le fait que ce soit son père qui ait décidé de lui parler à travers la mort, la Voilée en soit remerciée. Parce qu'il lui donnait là une réponse à son problème...

Les yeux fermés. L'esprit en alerte. La porte bougeant pour laisser un brin de lumière éclairer la gamine. Les yeux rouge violacé se rouvrirent pour se poser sur ceux ardents de celui qui venait de la découvrir. Sûre d'elle, sûre que les dieux avaient prévu cet enchainement de situations, la voix dure et monotone de l'enfant s'éleva à son tour, son visage se faisant aussi fermé que ce qu'elle avait pu apprendre au cours de sa jeune vie.

"Les voiles se lèvent dans la pénombre. La glace prend l'eau, gelant les braises de ceux qui ont osé de trop l'approcher. Ils tournent, tournent en caressant de leur froideur les flammes perdues. Sor'o'en veille. Sor'o'en n'est plus loin. Le temps s'échappe..."

Tout en terminant sa dernière phrase, elle posa lentement son index en travers de sa bouche, comme dans son rêve. Comme le faisaient les suivants de Tesso. Prophétie ? Elle n'en savait rien. Elle racontait juste par une énigme une partie de son songe, qu'elle comprenait désormais comme étant lié à cet instant. Sor'o'en, pourquoi ce nom revenait-il ? Elle n'en savait rien. Elle s'attachait à ce mot, tout simplement... il devait certainement avoir une signifiaction. Elle avait, pour le coup, laissé l'inspiration et son habitude des énigmes parler pour elle. Et bien qu'elle était très loin de s'étonner qu'elle mourrait... le coeur de Driz'na battait à un rythme particulier, témoin d'une pensée tout aussi profonde que sincère.

*Merci, papa.*

Elle avança d'un pas. Il recula d'autant.

Elle se redressa tout à fait. Il tomba à la renverse, deux carreaux enfoncés entre les premières côtes.

Driz'na était dans l'ombre de la porte. Sa mère ne posa pas un instant son regard sur elle pour ne pas y attirer l'attention de leurs bourreaux.

Les bras écartés, désarmée à l'exception de son gantelet griffu, son cœur battait à grands coups sourds et lents. Le temps semblait se distordre. Le premier ennemis entra. Se figea. Elle se retrouva à la hauteur du cadavre de L'Renor mais le regard de l'arbalétrier brusquement rappelé à l'ordre l'immobilisa. La bonne nouvelle c'était que sur les deux coups que pouvaient tirer son arbalète avant de recharger, il n'y en avait plus qu'un. Si elle soulevait suffisamment vite la dépouille de L'Renor, elle pourrait sans doute éviter le pire, mais c'était risqué.

La seconde bonne nouvelle c'est qu'il ne restait également qu'un coup à l'arbalétrier qui venait de s’éloigner puisque le corps du Haut-Prêtre en abritait deux. Ce vieux religieux avait l'air d'être tombé inconscient sur le coup. ça, c'était plutôt de l'ordre de la mauvaise nouvelle...

Les deux épéistes s'approchèrent en faisant en sorte d'être le moins possible dans l'axe de l'arbalétrier. Une fois Krish éloigné du corps d'un bon pas, l'un d'eux se pencha sur L'Renor, commençant par la faire rouler sur le ventre d'un coup de pied pour lier ses poignets dans son dos et faire de même avec ses chevilles. Une épée était prête à lui tailler des croupières et un carreaux à lui faire une deuxième bouche en plein milieu du cou. Elle n'avait pas entendu les premiers ordres et n'avait aucune conscience que les ordres des soldats pouvaient lui sauver la vie.

Elle observa plutôt le lancier s'avancer pour sonder chaque coin d'ombre. Pour éviter qu'elle ne puisse tenter quoi que ce soit, l'épéiste la poussa à reculer de la porte, revenant plus près de L'Renor et de son spécialiste en corde. Au même moment, le lancier tira la porte pour se figer face à la chose l'une des rares choses qu'il ne s'attendait certainement pas à voir en un tel lieu : une gamine déclamant de la poésie onirique.

Une seconde. C'est tout ce que la voix de Driz'na offrit à sa mère. L'épéiste agenouillé près de la C'nrosienne n'avait pas tourné la tête, mais celui qui tenait Krish en joue venait de faire un pas sur le côté pour ne pas se retrouver dos à ce qui se trouvait dans l'ombre de la porte.

Sans attendre de voir quel serait la réaction du lancier - et risquant du même coup la vie de sa fille en plus de la sienne - elle en profita pour se laisser tomber sur celui qui liait avec application les pieds de la mage de guerre. Il tenta de mettre son coude en arrière pour la cueillir au diaphragme mais les cordages ralentirent son geste. La lame la manqua de peu. La détente de l'arbalète claqua. Le bras de la forgelâme s'enroula autour de la gorge de l'homme désarmé, l'attirant à elle pour s'en faire un mur de chair et de métal alors qu'elle vrillait derrière lui. Le carreau siffla. Ses griffes ripèrent sur la mâchoire large de l'homme et s'enfoncèrent profondément dans sa carotide.

Elle se retrouva au sol, à moitié allongée sur le flanc, le dos de l'épéiste contre sa poitrine. Personne n'avait pu distinguer la victime du carreau. De toutes les disciplines guerrières, il n'y en avait qu'une qu'elle maîtrisait réellement, Uriz ou non. Le seul domaine ou elle pouvait en remontrer même à Velkyn en personne : la lutte. Le serpent qui s'était entortillé autour du guerrier regroupa ses jambes sous le dos de sa victime et tira le couteau qui pendait à sa ceinture. De toute la force de ses quadriceps, elle envoya rouler le guerrier à peine vivant dans les jambes de son compagnon d'arme et  se releva d'un bon pour foncer vers l'arbalétrier qui avait déjà replacé un carreau et remontait le mécanisme de son arme en essayant d'esquiver le coup de lance qui pouvait lui barrer la route d'un moment à l'autre et l'épéiste sur ses talons.

Son but ? Percuter le tireur suffisamment fort au niveau des jambe pour le plaquer au sol et utiliser son arme pour achever l'autre arbalétrier avant qu'il ne commence à lui faire du chantage avec la vie de Viconia... En espérant que son action donnerait le temps à Driz'na de prendre ses jambes à son cou, même si elle n'y croyait pas trop. Et si leurs trois vies étaient encore intacte d'ici là... Et bien il serait toujours temps de penser à un moyen de fuir ou de vaincre.

Le bruit sourd d’un corps que l’on traîne finit de parachevait la mélodieuse symphonie de son esprit. Et là, apparaissant de ses ombres-mères, Kahveka ramena près d’elle le dernier bourreau ; à présent il ne restait personne sinon eux, et le feu d’Uriz n’avait point encore donner de nouvelles. Insidieusement, son ventre se serra à cette nouvelle ; au dehors devait se déroulait une belle intrigue pour qu’on ne prenne plus attention à ceux piégés. Pire même, le goût du sang l’avait quitté, comme si ses comparses en avaient fini de la convaincre de quitter l’illusion. Pour sûr, il se passait quelque chose. Convaincue qu’ils étaient pour le moment bien plus utiles ici que dans le réel, elle afficha un maigre sourire en se donnant contenance. L’homme qui gisait à ses pieds n’avait pas même eu le temps de répliquer, à en croire la moue stupéfaite qui s’était figé sur son visage à jamais.

Difficile de croire qu’il n’y avait ici rien de vrai. Si les sens de la Rose Noire ne la trompaient plus, le détail était poussé et la toile tissée par les illusionnistes avait résisté aux sondages des membres de l’épopée – du moins assez longtemps. D’ailleurs combien de temps étaient-ils restés là, dans ce rêve sans fin ? Les minutes s’égrainaient-elles au même rythme que le temps-vrai ? Voilà qui l’intriguait. Posant ses yeux sur le faux-corps, elle s’avança vers son ami et se saisit de la lame qu’il trainait – et dont le malheureux quoique fictif n’avait eu le loisir d’employer. Retournant auprès de la jeune femme qu’elle avait tué, elle roula ses mirettes sur la nuque qui formait à présent un angle étrange ; c’était toujours aussi jouissif. Puis, dans un geste vif, ses muscles se tendirent et le couteau fût lancé avec la force qu’elle pouvait, mais qui aurait pu toucher le maître des Ombres aussi facilement.

Lorsqu’il évita sans mal son jet, elle éclata d’un rire terrible, faisant résonner l’écho de sa voix gelée contre les parois vides. « Il me faudra bien essayer ». Passant sa langue maudite sur ses lèvres, dans une mimique presque gourmande, elle reprit : « Pour sortir de cette illusion il faudra mourir de toute façon. Alors autant que ce soit de ma main non ? Cela fait des siècles que je rêve de savoir qui est le plus fort de nous deux ». Son air pervers s’accentua lorsqu’elle porta à son nez la poupée de chiffon qu’elle avait retiré de son ceinturon. Elle allait jouer à un jeu. Oh oui Dula, elle allait jouer à tuer Kahveka.