[La Prime justice] Etape 2 : Former une équipe | Drystan, Nehril et Sirène

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Treizième jour de Karfias
An 17:XI

Aux abords de Thaar

Le lieu de rendez-vous était assez insolite, une fois encore, mais ils apprendraient à s'y habituer. Sirène était aussi mystérieuse que belle. D'elle, il ne lui avait dit que si peu de choses au final. D'eux, elle connaissait déjà leurs talents et leurs exploits, magiques ou non. L'un comme l'autre méritait de faire partie de son équipe. C'était peut-être une vision un peu orgueilleuse mais elle en avait pleinement conscience.

Debout au milieu d'une clairière, la femme masquée attendait. Les yeux fermés, son esprit était tout entier ouvert aux flux. Elle les sentait l'effleurer, s'éloigner, la traverser. Ici, elle n'était pas perturbée par le tumulte de la ville. Tumulte des pulsions magiques qui émanaient de toute part. Il suffisait qu'un mage soit à proximité ou simplement passé par là pour que toutes les voies soient modifiées. Ici, en pleine nature, les flux étaient libres et pures. C'était apaisant.
L'endroit n'était pas loin de la cité mais suffisamment à l'écart pour être tranquille. La forêt était juste assez dense pour dissimuler cette espace laissé libre de toute végétation des regards indiscrets. Il y avait suffisamment de place pour qu'un groupe de moyenne importance puis se tenir et même combattre. Sur la droite de la femme se trouvait une petite cabane en bois qui passait pour celle d'un bûcheron, mais il n'en était rien.

Contrairement à la veille, Sirène portait une tenue plus adaptée à la marche qu'à la ville, quoi que toujours aussi esthétique. A première vue, il s'agissait d'une robe stylisée mais, en un regardant de plus près, on remarquait que ce n'était qu'une illusion. Le pan de tissu qui formait le jupon était fendu en deux endroits et masquait son pantalon. Ses pieds étaient confortablement installés dans des bottes qui montaient au dessus de ses genoux. En haut, elle arborait une tunique cintrée et plutôt ouvragée qui habillait tout son buste ainsi que le haut de sa jupe. Son masque comportait moins de fioritures que celui de la veille, plus adapté aux situations à risque car mon brillant et plus solidement attaché. Enfin, ses cheveux étaient noués en une tresse qui partait de l'arrière de sa tête pour descendre jusqu'en-dessous de sa nuque.

S'adonnant à son petit exercice qui la mettait dans un état proche de la méditation, elle sentit une légère perturbation à plusieurs dizaines de mètres derrière elle. Les yeux toujours fermés, ses lèvres s'étirèrent en un sourire. Elle reconnaissait cette empreinte pour l'avoir découverte la veille au soir.

-Bonjour. Elle se retourna pour faire face au nouvel arrivant. Bien dormi ? Demanda-t-elle avec un sourire aussi doux que sincère.

Sirène était bien loin de se moquer de la réponse de Nehril et n'avait pas posé la question par pure politesse. A aux mots du demi-elfe, son sourire s'estompa et elle le regarda un peu à la manière de la veille, semblant l'étudier et voir à travers lui. Il n'avait pas besoin de lui dire ce qui perturbait ses rêves, il en avait suffisamment dévoilé la veille. Se tenait devant elle un homme d'armes qui en avait déjà trop vu et qui ne continuait que par nécessité. Il était certes alléché par la prime mais l'usure de ses bottes lui laissait entendre qu'il devait avoir du mal à rentrer dans ses frais. Avec un tel curriculum, c'était assez étrange d'ailleurs... Il n'aurait pas dû avoir de mal pour se faire embaucher où que ce soit. Cela aussi en disait bien long sur le personnage.

-Vous m'en voyez désolée. Répondit-elle sincérité et sérieux. J'aimerais être capable d'apaiser vos tourments. Mais me laisseriez-vous faire seulement ?...

Elle acheva sa phrase avec une doux sourire. Elle voudrait que la réponse soit oui mais elle en doutait fortement. Nehril lui semblait bien solitaire et il ne devait pas être homme à se confier facilement. Moins encore à une femme mystérieuse qui donnait rendez-vous dans des lieux étranges et cachait son identité sous un masque et un pseudonyme. Elle pourrait arranger ce dernier point en temps utile mais c'était trop tôt...
N'attendant aucune réponse de sa part malgré le silence qu'elle laissa flotter, elle répondit à sa seconde question.

-C'est vous qui aller travailler le plus aujourd'hui, j'en ai peur. Drystan ne manipule pas vraiment la magie et je n'ai jamais porté d'armes. Cependant, nous avons tous besoin de savoir comment les autres réfléchissent et agissent pour parvenir à former une équipe qui fonctionne. Nous allons donc nous entraîner. Acheva-t-elle dans un sourire amical.

Les yeux de Sirène brillèrent d'un éclat nouveau tandis qu'elle lisait dans la réaction de Nehril. Il n'était apparemment pas totalement fermé à l'idée qu'elle lui vienne en aide, même si ce qu'elle avait à lui offrir ne correspondait sans doute pas à ce qu'il espérait. Elle était mage mais ne manipulait pas la mémoire ou l'inconscient. Elle ne pouvait l'empêcher de rêver de sa vie passée mais peut-être alléger son présent... Dans l'esprit de la femme masquée, sa décision était prise. Elle se donnait simplement le temps nécessaire pour permettre au mercenaire de l'assimiler à une amie et non à une ennemie. Car, si elle n'en avait rien dit, elle avait noté la façon dont il avait balayé l'espace des yeux en arrivant, comme s'il redoutait une embuscade alors que personne d'autre qu'elle et Drystan ne savait qu'ils étaient là.

Lorsqu'il s'intéressa à elle, elle lui répondit d'abord par un sourire. Sirène interpellait forcément de par son attitude, son apparence et son nom, mais on ne lui posait que rarement des questions. Le fait que Nehril s'intéresse à elle alors qu'elle venait de lui offrir son aide témoignait -à ses yeux- de l'intérêt nouveau qu'il lui portait.

-Je suis ravie que vous me posiez la question. Commença-t-elle. Puis elle conserva le silence un instant avant de reprendre. Je pense que vous avez remarqué que je n'ai pas besoin de cela pour vivre.

C'était une des rares choses qu'il était facile de deviner sur elle. Quand bien même elle aurait voulu le cacher, elle portait son éducation en elle, dans sa façon de se mouvoir avec grâce, de se tenir la tête haute et de choisir ses mots avec soin. Des années passées auprès de ses collègues n'étaient pas parvenues à l'influencer comme c'était le cas de Drystan. Alors pourquoi tenter ne serait-ce qu'une seconde de dissimuler sa condition ? Elle portait donc des tenues qui reflétaient ce qu'elle était : une personne riche et de bonne famille, peut-être même de pouvoir. Mais pourquoi se donner la peine de travailler et plus encore de prendre des risques si cela n'était pas nécessaire à sa survie ?

-A plus d'une occasion, j'ai été témoin de ce que nos semblables sont capables. J'ai vu des vies brisées, au sens propre comme au figuré. Je manipulais déjà mon Art à l'époque et, même si j'étais loin de le maîtriser pleinement, j'en savais assez pour être en capacité d'intervenir face à mes pairs. Je m'en suis prise au premier uniquement parce que je pouvais faire en sorte qu'il cesse de faire du mal autour de lui. Je me suis alors aperçue que je pouvais contribuer à préserver les Souffles offerts par Néera de cette manière. J'ai le luxe de pouvoir choisir mes cibles pour ne m'en prendre qu'à ceux qui font du tort et pas pour aider quelqu'un à prendre sa revanche sur autrui. Alors j'ai continué en prenant le nom de Sirène. Elle tourna légèrement la tête sur le côté avant de continuer sur le ton de la confidence. Et j'avoue que j'adore ce que je fais.

Elle laissa à Nehril le temps de s'imprégner de son histoire. Certes, il n'avait pas appris grand chose sur son identité mais elle venait d'en dévoiler beaucoup sur sa personnalité. Son but n'était pas de gagner de l'argent, même si ce travail pouvait permettre à quiconque de subvenir à ses besoins. Stephen n'était pas un retraité malheureux... Cependant, ce n'était pas sa motivation et c'était sans doute cela qui faisait la différence. Elle avait une morale et les moyens de la respecter jusqu'au bout sans jamais en dévier pour des raisons pécuniaires.

-Ai-je répondu à votre question ?

Alors que Nehril se ravisait concernant la question qu'il venait de poser, Sirène lui adressa un signe pour lui faire savoir qu'il n'y avait pas de mal. Il était en droit de s'interroger à ce sujet et elle n'avait pas l'intention de lui cacher sa façon de fonctionner. Elle estimait d'ailleurs cela nécessaire car elle ne s'estimait pas comme son employeuse mais bien comme une partenaire.

-Je me renseigne toujours sur mes cibles afin de savoir si ce que l'on raconte sur eux est vrai et m'assurer qu'ils sont pourchassés pour les bonnes raisons. Il m'est arrivé de refuser un contrat parce que la personne était injustement mise en tort. Je ne peux faire en sorte que la prime sur sa tête disparaisse mais elle a une chance supplémentaire si je ne m'en mêle pas. Elle eut un sourire amusé. Je sais, cela fait un peu prétentieux de ma part. Vous comprendrez mieux tout à l'heure.

Si elle avait plus ou moins expliqué ses talents la veille, elle savait que les conséquences que cela engendrait n'étaient pas toujours limpides pour ses interlocuteurs. Même les mages avaient parfois du mal à comprendre le mécanisme de son Art et en faisaient les frais. L'avantage de pratiquer un domaine, si ce n'était rare, au moins peu fréquent.

-J'aurais mille questions à vous poser en retour mais je crois que le moment est assez mal choisi. Cependant, j'ose espérer que nous pourrons nous en octroyer le temps.

Sirène acheva son propos avec un sourire qui se voulait amical. S'il voulait qu'elle l'aide, ils devaient nécessairement prendre un moment pour discuter. Qu'elle comprenne ce qui le perturbait précisément afin de parvenir à lui apporter une réponse adaptée. Elle devrait trouver l'instant opportun, réunissant les conditions qui permettraient à Nehril que s'ouvrir à elle. Dans un lieu plus sécurisant peut-être. Sans masque ? Possible. Elle évaluerait tout cela dans les jours à venir.

Le mercenaire choisit de changer de sujet en évoquant le cas de Drystan, ce qui plongea la "chasseuse de mages" dans un état de réflexion. Il en avait révélé beaucoup sur lui déjà et n'hésitait pas à arborer son statut de dragonnier. Cependant, il y avait certains détails qu'il semblait passer sous silence, ce qu'elle pouvait comprendre, dans son intérêt et celui de son compagnon à écailles.

-J'ai le sentiment que c'est un homme bien. Vous avez tous deux paru soulagés que je ne souhaite pas nécessairement tuer nos cibles, ce qui est un bon indicateur. Souhaiter la mort d'un inconnu n'est pas le signe d'un homme honorable. Il a ses secrets, comme nous tous. Je me demande néanmoins comment il a pu accomplir tout ce qu'il a évoqué en Péninsule avec du sang mêlé. Un lien avec son dragon, peut-être.

Sirène n'évoqua pas plus clairement ce à quoi elle songeait en réalité. L'être qui l'accompagnait faisait partie des légendes et il y avait tant de choses qu'elle ignorait à son sujet. Drystan était-il un humain auparavant ou avait-il un parent éternel ? Sa connexion avec son dragon pouvait-elle influencer son corps à ce point ? Il portait bien des écailles après tout... Le dragonnier lui-même n'avait peut-être pas toutes les réponses, à moins que ce soit pour cette raison qu'il s'était rendu chez les elfes ? Beaucoup de questions demeuraient en suspend mais elle ne s'attendait pas à les élucider ce jour-là.

Pour le dragonnier, la nuit ne fut pas bien longue, et avant même les premières heures du jour, alors que la cité était encore recouverte de son voile nocturne, le dragon vint le récupérer sans attirer l’attention et c’est ensemble qu’ils la quittèrent. Leur destination, cette même petite plage isolée où ils s’étaient un mois durant installé en attendant de pouvoir partir pour Alëandir, cette petite plage où, au gré de ses pérégrinations, il avait prit soin d’y dissimuler une cache où se trouve une part de ses effets personnels, et tout soigneusement emballé pour la préserver des agressions extérieures, son armure de cuir, une longue brigandine descendant à mi-cuisse se fermant par l’avant - parce qu’il ne peut disposer d’aide -, des spalières, canons de bras et grèves de cuir qu’il enfila, après en avoir vérifié l’état, par-dessus sa cotte de maille et la chemise, laissant ses bras découvert, ajustant les brassards de bronze, bijoux aux motifs elfiques. Avec la dague dans le dos et Raumo, son épée courte à la taille, le voilà bon pour la parade guerrière.
Il en dissimula une bonne part sous sa pèlerine et laissant le reste de ses affaires là, il retourna auprès de son dragon.

Ce qu’ils firent du reste du temps avant de décider de retrouver ses nouveaux camarades ? Oh, ils volèrent, s’entraînèrent à leur manière et pour le plus grand plaisir du dragonnier, se laissant tomber depuis des altitudes vertigineuses, en chute libre, pour être récupéré en vol par les manœuvres du dragon ou bien soutenu et ralenti progressivement par l’air qu’il manipule.
C’est en observant la position de l’astre du jour qu’il s’arrache à ce plaisir et songe à ses “obligations”. Il est temps… Accompagnant sa pensée de l’idée de l’endroit où il est attendu, ainsi que des repères alentours pour s’y rendre. Car il a bien l’intention de s’y rendre avec Pradias, non pour épater la galerie - voyons ! - mais avec une idée en tête tout de même… Si les choses devaient mal tourner avec les deux, au point que le dragon soit contraint d’intervenir, il voulait s’épargner des camarades de retraite tout aussi en proie à la surprise que les vilains. Sans les habituer complètement, il fallait leur arracher au plus tôt la découverte.

Et c’est ainsi que la Sirène le perçut… Mais quant à savoir si elle le ressentit à travers sa magie plutôt qu’en découvrant le dragon blanc survolant la clairière avant de décrire un virage quand le dragonnier put lui confirmer qu’ils y étaient, dur à dire, et c’est finalement à une distance raisonnable que Pradias se posa, laissant Drystan démonté après avoir libéré un Monarth de sa sacoche de vol. Malgré ses mots, pour la chasseuse de mage, si le lien avec le dräke existe, celui qu’il partage avec le dragon est absent.
Le dragonnier se dirige alors vers ses nouveaux compagnons, non sans être resté quelques instants auprès de son dragon.

“Est-ce que je suis en retard ?” Dit-il en guise de salutations, un sourire amusé rayonnant sur son visage, sans sembler accorder d’importance à la scène qu’il présente à ses petits camarades. Puis, dans une attitude volontairement légère, il se figea. “Oh, suis-je bête, j’oublie l’essentiel ! Sirène, Nehril, voilà Pradias.” En désignant le dragon, et s’approchant un peu plus. “Je me suis dis qu’il valait mieux faire les présentations au plus tôt, mais il ne se joindra pas à nos exercices.” Et à l’attention plus particulièrement de Sirène. “Il pardonne le petit tour de la veille, mais je ne peux que vous dissuader d’éprouver notre capacité à nous en prémunir quand il est là.” Il n’y a pas de menace, mais une simple mise en garde légère, un coup d’oeil vers le dragon. Si il est clair qu’il ne lui tomberait pas dessus comme il le ferait en présence d’un vrai danger, il avait de quoi la secouer.

Sirène sourit à Nehril, bien heureuse de le voir si disposé à la discussion. Elle ne l'aurait pas cru aussi ouvert à l'idée de partager son vécu, au contraire. Tant mieux s'il en était autrement. Le vécu des autres était passionnant pour elle et source d'un véritable intérêt, quelque soit ce qu'on avait à lui conter.

Alors qu'elle sentait qu'il allait répondre à son avis concernant Drystan, elle leva les yeux vers le ciel. Une ombre passa peu après mais elle n'en fut pas surprise. Elle l'avait senti approcher. Contrairement au mercenaire, elle savait déjà de qui il s'agissait, reconnaissant la mince empreinte laissées sur les flux par le dragonnier. Se trouvant presque au centre de la clairière, elle s'écarta bien vite, rejoignant le côté de Nehril. Si ce dernier sortit son arme, la magicienne quant à elle laissa lui échapper sa concentration pour profiter pleinement du spectacle. Le dragon se posa à bonne distance d'eux. Elle l'avait imaginé plus grand mais elle n'était pas moins fascinée pour autant. Ces créatures avaient disparu après tout. Ou on le croyait tout du moins...

Drystan descendit de sa monture et Sirène se hasarda à avancer de quelques pas, admirant l'animal d'un regard brillant de mille étoiles. Le dragonnier s'approcha de ses nouveaux partenaires et prit une intonation -volontairement ?- désinvolte et elle ne l'entendit qu'à moitié.

-Il est magnifique. Souffla-t-elle, ébahie et admirative.

Tandis que Drystan lui faisait savoir que le dénommé Pradias ne lui tenait pas rigueur de son petit tour de la veille, elle tourna enfin le regard vers son interlocuteur qui ne tenait plus qu'à quelques pas d'elle. Elle quitta enfin son expression médusée pour reprendre sa contenance et son sourire sincère et discret.

-J'ai bien compris le message, il n'a aucune inquiétude à se faire à ce sujet. Puis, se tournant vers le dragon, elle inclina légèrement le haut du corps. Heureuse de faire votre connaissance, cher Pradias. Elle se tourna ensuite vers sa version miniature qui s'était posée non loin. La vôtre aussi, beau Monarth. Me pardonnerez-vous mon incartade si je vous assure de ne pas recommencer ?

“C’est imprudent, mais il valait mieux poser la question. Il prit un ton léger, même si ses traits pour l’occasion laisse entendre une certaine fermeté alors qu’il développe. Mais ça ne craint rien si vous ne cherchez pas à vous en approcher plus qu’il ne le permet. Il insiste bien sur le il, sur la volonté propre du dragon. Alors si il vous montre que vous avancez trop, n’insistez pas, ou n’espérez pas que je prenne un autre parti que le sien.” Le dragon n’a pas besoin, dans l’absolu, que son dragonnier se montre aussi protecteur, mais il préfère prévenir que de devoir gérer la casse. Depuis la naissance de Pradias, il s’est évertué à conserver autant que possible le caractère sauvage et libre de son compagnon, qui était finalement celui qui avait le plus déteint sur l’autre, sa venue à Thaar ne changerait pas cette vérité et ceux qui n’y voyaient qu’un animal, certes plus impressionnant et exotique que les autres, sont condamnés à de certaines et douloureuses désillusions.
Par la même, il en profite pour énoncer une simple vérité : il sera toujours du côté de son dragon, peu importe la situation et la manière dont on la présente, qu’importe qu’on suggère que la justice est de l’autre bord, qu’importe même si le bon sens y donne raison, il sera toujours du côté du dragon.

Quant à la Sirène, elle provoque chez les trois compagnons une réaction qui les surprend et détend instantanément le dragonnier qui se met à sourire, c’était bien la première fois qu’on leur parlait de la sorte. Et si comme à son habitude, le dräke complimenté prend ses plus grands airs - ce qui rend la chose un brin ridicule compte tenu de sa taille et de la distance -, roucoulant et se pavanant, le dragon est quant à lui bien plus modéré, gardant à l’oeil - presque totalement blanc mais dans lequel brille un faible et pâle éclat d’émeraude comparable à celui du dragonnier - la créature qui a brandi le fer contre lui tout en alternant entre la masquée et son dragonnier.

“Vous vouvoyez souvent les autres créatures comme ça ? Demande t-il avec amusement, avant de porter son attention sur un Nehril qui perçoit forcément les regards du dragon. Ne vous inquiétez pas, vous avez tiré le fer, il est forcément méfiant, mais ça va lui passer.”

Le dräke quant à lui se contente d’un court contact avec la Sirène pour lui transmettre l’affirmative à sa question - il est en mesure de répondre par lui-même, après tout - et l’affaire paraît entendu, tant qu’elle n’essaie pas d’avoir d’initiative et d’établir un contact qu’il rejetterait, évidemment.
Pour appuyer cette idée, le dragonnier tape dans ses mains d’un air de dire “bon, et si on passait à autre chose”. Le dragon se détournant des trois compères pour s’installer un peu plus loin, pour le moment, le dragonnier se concentre sur la Sirène.

“Les présentations faites, si vous nous expliquiez le programme ?” Il ne veut pas focaliser durablement toute l’attention, même si il se doute qu’il n’y échappera pas, mais ça ne l’empêche pas d’essayer.

A la question de Drystan, Sirène se tourna vers lui. Ses traits demeuraient amicaux mais ils y respiraient bien plus de sérieux, montrant à quel point ses paroles lui tenaient à coeur.

-Non. Mais celles-ci méritent des égards du fait de leur rareté et de leur caractère si singulier. Vous n’en méritez pas moins pour avoir ainsi su obtenir le respect et l’attachement qu’elles vous portent.

Attirée par un contact qu’elle ne pouvait que reconnaître, elle laissa le message de Monarth s’infiltrer dans son esprit et se retourna vers lui. Elle lui adressa un sourire ainsi qu’une légère inclinaison de la tête pour le remercier de sa clémence. Elle n’aurait pas voulu s’attirer les foudres de ceux deux créatures et gâcher ainsi sa chance de pouvoir les côtoyer.

Rassurée, elle put reporter toute son attention vers un Drystan fin prêt à entamer leur petite séance. Elle accueillit chaleureusement son enthousiasme puis se plaça entre ses deux nouveaux comparses de sorte à former un triangle.

-Comme je vous l’ai dit, l’objectif aujourd’hui est d’apprendre à mieux nous connaître -nos capacités tout du moins- afin de pouvoir être le plus efficace possible. Cela se décomposera donc en deux parties : magique et physique. Puis, s’adressant au dragonnier seul. Etant donné nos compétences à tous deux, nous ne sommes concernés que par un seul aspect de cet entraînement mais je pense qu’assister à son intégralité n’est pas dépourvu d’intérêt.

Alors qu’elle s’était positionnée de manière à pouvoir voir ses deux interlocuteurs, elle se tourna pour faire totalement face à Nehril. Elle lui adressa un sourire amical avant de lui soumettre un choix.

-Par quoi voulez-vous commencer ? Ou… Par qui ? Acheva-t-elle avec une regard un brin espiègle.

Puisqu’il était le seul à maîtriser ces deux domaines, elle préférait autant lui laisser la décision.

Quand Nehril le désigne pour faire la démonstration de ses supposées capacités magiques, le dragonnier est à la fois surprit et gêné. Par lui-même, il ne possède pas en la matière la moindre compétence utile et démonstrative, restreint pour l’heure à un usage purement contemplatif, il n’y a qu’à travers le lien que se développe un potentiel digne d’intérêt mais parce qu’il a exclut d’office de mêler Pradias à l’exercice autant que pour préserver des atouts dans sa manche en cas de pépin.

“Pour ce qui est de la magie d’un dragonnier, j’imagine que vous en observer déjà l’essentiel. Il fait évidemment référence à ses changements physiques, mais il décide d’ajouter pour l’humour l’un des apports d’une pareille transformation. Mais si la météo vient à changer, je me ferai une joie de vous avertir.” C’était un des effets secondaires les plus importants avec sa résistance au froid… Sa peau, approchant celle du Blanc, lui octroyait une sensibilité particulière aux vents et dans une certaine mesure, une capacité à anticiper les changements. On a vu plus utile pour chasser des gens, effectivement, mais c’est un talent comme un autre.

“Mes connaissances sont essentiellement théorique en la matière, et la pratique inutile en l’état.” Il s’est engagé auprès de son maître, en Alëandir, à la modération et à un usage limité à ce qu’il sait déjà, ne pas explorer de nouvelles choses sans le consulter préalablement. Pour ne pas risquer de mutiler un talent magique si chèrement acquis, le dragonnier a bien l’intention de respecter ces quelques règles. Il faudra donc faire sans.

“Faudra compter sur mes autres talents. Il en vint à la Sirène avec une question qui lui apparu utile dans la nuit. Ça me fait penser… Une petite idée de l’approche à employer pour ce contrat ?” C’est qu’il y a plusieurs manières d’appréhender la chose, à condition d’avoir quelques menues informations sur leur compte, l’endroit où ils opèrent et leurs éventuelles fréquentations… Voir pourquoi pas leur genre de cible favorite pour les appâter… Est-ce qu’une experte comme Sirène a déjà son idée sur le sujet ?

Sirène ne dit rien en voyant Nehril se tourner vers le dragonnier. Pourtant, elle ne pensait absolument pas à lui pour ce qui était de la magie. Elle le savait pourtant user de l'Art de l'esprit mais pas à un niveau assez avancé pour que cela leur soit utile. Elle laissa cependant à Drystan le soin de lui répondre, découvrant au passage une nouvelle caractéristique de ce personnage si intriguant à ses yeux. Tout comme certains animaux, il pouvait prévoir les changements climatiques. Cela ne leur serait évidemment pas d'un grand secours mais elle n'en était pas moins fascinée pour autant.

A la question du dragonnier, elle savait évidemment quoi répondre. Elle avait toujours procédé de la même manière. Néanmoins, quelques explications s'imposaient afin qu'ils comprennent ce qu'elle était en capacité de faire.

-Ihisca ne parviendra jamais à s'abstenir de pratiquer la magie. C'est comme une drogue pour elle. J'aurais du mal à m'en passer aussi mais j'ai un usage bien moins néfaste de mes talents. Je suis capable de reconnaître une empreinte laissée sur les flux avec autant de facilité que vous pourriez reconnaître quelqu'un que vous connaissez de longue date à sa démarche. Je peux donc facilement suivre sa piste. Mais, plutôt que de parcourir la cité entière, je vais me renseigner sur ses dernières victimes. Je trouverai peut-être un point de départ correct pour commencer mes recherches.

Errer dans les rues restait toujours une solution mais autant essayer de se montrer plus efficace et ne l'emprunter qu'en dernier recours... Après tout, c'était une méthode assez hasardeuse. Elle pouvait autant avoir de la chance et tomber rapidement sur sa piste comme elle pouvait marcher des kilomètres avant de trouver quoi que ce soit.

-Je n'aurais pas besoin de vous avant d'avoir retrouvé sa trace. En attendant, nous pourrons toujours venir ici afin de nous perfectionner. Cependant, y a-t-il un endroit où je puisse vous trouver en cas d'urgence ?

Il lui était déjà arrivé d'avoir des partenaires qui refusaient de lui dévoiler où ils vivaient ou même là où ils passaient la majeure partie de leur temps. Elle ne s'offusquerait pas s'ils devaient refuser de lui répondre. Elle-même en disait tellement peu sur elle...

C’est pas vraiment ce qu’il avait en tête, mais il comprend… Il comprend qu’on en sait davantage sur le profil de ces deux-là que sur leurs habitudes et fréquentations. Trop tôt donc pour établir une stratégie plus fine et concrète, donc. Plus tard alors, mais pour le dragonnier, ces exercices font figure de préparation au “pire des scénarios”, car il doit exister quelques moyens de se débarrasser du frère sans avoir à tirer les armes avec, et c’est ce à quoi il devra songer lorsque les contours se préciseront.
En attendant, il acquiesce, c’est elle la patronne.

Et quand elle demande si il est un lieu où on peut les trouver facilement, les deux hommes ont une nouvelle occasion de se démarquer totalement, l’un de l’autre. Là où Nehril souligne à sa manière une nouvelle fois son appartenance et sa familiarité avec le monde des mercenaires et répond franchement, l’air de dire qu’il n’a rien à cacher, pas même le moins reluisant, ou qu’il ne craint pas grand chose, Drystan choisit une autre approche.

“La Grande Bibliothèque. C’était une réponse, honnête en plus, il s’y rendait régulièrement depuis son retour à Thaar, poursuivant ses recherches avec un regard neuf, mais qui présente surtout l’avantage d’être un lieu publique, moins de risque pour lui-même ou pour sa logeuse en cas de pépins. Si vous m’y trouvez pas, c’est que je peux être à cent pas comme à cent lieues d’ici. Une façon de dire également qu’il ne veut pas qu’on le cherche ailleurs, même avec des capacités de limier magique. Et vous, où peut-on vous trouver ou vous faire passer un message, Sirène, au besoin ?” Il se doute bien qu’elle sera certainement plus secrète qu’il ne l’est lui-même, après tout, elle porte un masque, et l’homme respecte tant l’outil que sa signification, mais pouvoir la contacter - et accessoirement avoir un début de piste au besoin - ça peut s’avérer utile.

Là-dessus, il saisit l’impatience de Nehril pour détendre un brin l’atmosphère et taquiner le sombre mercenaire, d’une tape amicale sur l’épaule accompagné d’un grand sourire.

“Et maintenant mon vieux, c’est ton tour de déballer ta marchandise, fais pas ton timide ! Même si la Sirène a sûrement déjà sa petite idée, on est curieux de voir ce que tu as à proposer ! N’est-ce pas ?” conclut-il, à l’attention de la Sirène.

La réponse de Nehril était bien triste à l’oreille de Sirène. Elle connaissait le nom de cette auberge et il ne cachait pas qu’il y résidait par manque de moyens. La question qu’elle se posait, c’était de savoir si c’était temporaire ou récurrent. Dans le premier cas, alors la prime à venir suffirait à le remettre d’aplomb. Dans le second, il fallait se demander pourquoi cela revenait sans cesse. Elle pourrait imaginait toutes les théories possibles, il n’y avait que lui qui pourrait le lui dire. Elle prenait de plus en plus au sérieux l’idée de s’entretenir avec lui.

La réponse de Drystan lui arracha un sourire. La bibliothèque… Voilà qui était intéressant comme choix. Même s’il y avait des chances qu’elle parvienne à trouver plus facilement le mercenaire que le dragonnier avec de telles indications. Il ne fallait pas qu’elle tente de le chercher en pleine nuit. Mais qu’importait.
La question lui fut finalement retournée et un sourire amical se dessina sur ses lèvres. Elle leur indiqua l’emplacement d’une maison dans un quartier tranquille de Thaar, bien loin de correspondre à son statut. Ce n’était évidemment pas sa demeure. C’était là qu’elle s’entraînait et entreposait son matériel de chasseuse.

-Si je n’y suis pas, j’y passerai forcément. Il suffit de glisser un mot sous la porte arrière. Je le trouverait forcément.

Nehril reprit aussitôt la parole, visiblement impatient de commencer. Drystan accueillit sa réaction avec humour, restant toujours dans ce ton un peu vulgaire qu’il avait adopté la veille. Sirène se contenta de sourire discrètement, laissant les deux hommes à leurs échanges virils. Puisque le mercenaire avait choisi de commencer par la magie, elle s’avança vers le centre de la clairière, prenant soin de ne pas approcher trop près du dragon afin qu’il ne prenne pas son approche pour une intrusion. Puis elle se tourna vers le pyromancien, attendant qu’il la rejoigne. Lorsqu’il fut en place, elle l’invita à ouvrir le bal.

-A vous l’honneur.

Alors que Nehril se concentrait, Sirène fit de même, ses yeux brillant à nouveau de cet éclat qu'ils avaient pu apercevoir la veille. Cependant, de jour, il fallait réellement y prêter attention pour distinguer ce reflet furtif qui venait illuminer ses iris. Elle le regarda faire montre de tout son talent sans ciller. Le feu avait quelque chose d'impressionnant d'un point de vue extérieur. C'était même un peu tape à l’œil à son goût. En tant que mage de l'immatériel, elle était naturellement habituée à plus de sobriété. Mais ses talents à elle lui permettait de voir les sorts lancés avec un regard bien différent.

-Très jolie démonstration. Conclue-t-elle.

Elle était sincère. Il y avait une maîtrise indéniable et un certain style dans le choix des sorts qu'il avait souhaité leur montrer. Cependant, il s'était totalement fourvoyé sur le but de cet exercice...

-Et, pour tout à l'heure, vous comptez vous contenter de faire tournoyer vos lames dans les airs ? Ou est-ce parce que je suis une femme que vous ne songez pas à m'attaquer ?

Elle prononçait ses mots avec humour mais elle était très sérieuse. Elle ne l'avait pas fait venir au centre de cet espace et face à elle pour qu'il se contente de lui exhiber ses jolies flammes. Elle poursuivit pour expliquer sa démarches sur un ton toujours très posé.

-Comme je vous l'ai dit hier, mon Art ne me sert à rien en l'absence de la magie des autres. Je pourrais me servir de la vôtre tout de suite mais je préfère vous montrer ce que cela donne en situation réelle afin que vous en preniez toute la mesure.

Sirène sentit Nehril se refermer comme une huître sous sa petite boutade. Il se défendit ensuite par les mots, démontrant une nouvelle fois que la plaisanterie n'avait pas été à son goût. Ou ne l'avait-il pas perçue comme telle ? Il n'avait pas semblé à la mystique voir en lui quelqu'un d'orgueilleux et ne supportant pas la critique durant leurs quelques échanges. Les paroles de la femme masquée ne témoignaient d'aucun manque de respect à son égard. Elle choisit alors de ne pas lui donner la réplique sur le sujet afin qu'il soit clôturer dans le même temps. Elle avait déjà exposé son point de vue et le mercenaire l'accepta d'un hochement de tête.

Une fois encore, le demi-elfe prit la précaution de lui demander si elle était prête avant de lâcher son sort sur elle. Elle ne montra aucune réaction à ce sujet mais il était grand temps qu'elle lui montre que ses attentions étaient inutiles. En matière de magie, elle n'avait pas grand chose à craindre à partir du moment où son esprit était ouvert aux flux... Ce qui voulait dire : la majeure partie du temps.

Sirène acquiesça simplement d'un signe de tête et le jet de flamme fut projeté dans sa direction. Si Nehril avait fait une illustration assez large -bien qu'incomplète- de ses talents, elle ne se montrerait pas aussi démonstrative. Tout du moins, pas tout de suite.

Tendant une main devant elle, la femme masquée balaya l'air. Dans le même temps, le projectile suivit le mouvement indiqué et alla s'échouer dans le sol à quelques mètres d'elle. Un nuage de fumée et de poussière s'éleva dans les airs et se dissipa assez vite. Il ne restait plus du sortilège qu'un trou dans le sol. L'herbe sèche qui l'entourait avait plus que roussie au contact des flammes mais la terre éjectée avait eu tôt fait d'éteindre le maigre incendie.

Sirène releva la tête tandis que son regard fixait toujours Nehril. S'il en avait douté, elle était tout à fait capable de gérer un sort aussi simple et elle attendait de lui qu'il fasse montre d'un peu plus d'audace et d’ingéniosité. Même si tenter de surprendre une mystique avec de la magie était loin d'être chose aisée...

Sirène posa sur Nehril un regard très assuré, maintenant sa posture pleine de noblesse. Elle était fière de ses talents et fière de pouvoir lui montrer qu’elle n’était pas une jouvencelle sans défense. Il était à présent averti et elle sentit le flux se concentrer en lui. Il allait mettre les bouchées doubles…

De nouveaux traits jaillirent, d’abord aussi simples que le premier. Elle n’avait qu’à les dévier comme le précédent mais elle se doutait qu’il n’en resterait pas là. Elle se contenta de continuer sa démarche et d’attendre de voir. Lorsque les jets de flammes se mirent à éclater, laissant derrière eux une fumée noire s’échapper et envahir peu à peu son espace, elle resta imperturbable. Il eut la délicatesse de ne pas chercher à l’emprisonner à l’intérieur d’une prison de brume. Craignait-il de lui faire du mal d’une quelconque manière ? Elle appréciait la démarche qui avait pour but de la préserver, même si cela signifiait qu’il la sous-estimait encore. Mais elle le lui montrerait bien assez tôt.
Puis elle sentit une concentration de flux à ses pieds et vit les braises s’enflammer soudain. Seulement elle n’était pas visée. Il cherchait à la déconcentrer, rien de plus. Elle savait reconnaître une menace sérieuse. Une dague fusa au-dessus d’elle dans un sifflement caractéristique. Elle ne pouvait se protéger des attaques physiques et il le savait. Une légère vague de crainte mue par l’instinct de survie la traversa mais pas assez pour la tirer de sa concentration. Ce n’était pas la première fois qu’elle se trouvait en danger et celui-ci était minime.

Cependant, ce dernier geste était le signal pour Sirène. Celui qui lui fit savoir qu’il était temps qu’elle fasse à son tour démonstration de ses talents. Elle leva alors ses mains au niveau de sa taille puis, les étirant parallèlement au sol, elle poussa soudainement vers le bas. Le nuage de fumée et les flammes furent chassés dans le même temps, repoussés d’elle si violemment que le premier se dissipa presque entièrement tandis que le feu fut quasiment éteint. Mais avant que les deux sorts aient totalement disparus, elle les rassembla si bien qu’une masse de flamme et de fumée se forma peu à peu devant elle. Une masse sur laquelle le mercenaire ne saurait reprendre le contrôle. Il aurait fallu pour cela que sa maîtrise de la magie égale au moins la sienne…
Lorsqu’elle eut soutiré à son environnement la moindre parcelle de magie encore active, elle rassembla davantage de flux pour les concentrer et faire prendre de l’ampleur à ce nouveau sortilège. La masse grandit et grandit encore. Puis, bougeant les bras, elle réalisa de grands mouvements pour dessiner une forme devant elle. Flammes et fumées suivirent les directions qui leur étaient imposées et une silhouette en trois dimensions se dessina devant la femme masquée. Il avait créé une dague lors de sa première démonstration, elle créa un cheval au corps de feu et aux crins de brume noire. Loin d’être immobile, il semblait vivant et se mouvait tel un véritable animal impatient de s’élancer. Elle aurait pu le faire galoper dans la direction de Nehril mais s’en abstint. Au lieu de cela, elle maintint sa création ainsi durant quelques instants. Puis ses bras écartés se refermèrent et ses mains se joignirent. Le cheval disparut de cette manière, soit bien plus vite qu’il n’était né.

Après quelques secondes, Sirène laissa ses bras revenir le long de son corps et elle se redressa pour croiser à nouveau le regard du demi-elfe. Autour d’elle, il n’y avait plus aucune fumée ni la moindre petite étincelle. Seul le sol conservait la preuve de ce qu’il venait de se passer, tout comme ses vêtements qui avaient pris l’odeur de la suie et l’arbre derrière elle qui se retrouvait orné d’une dague en son tronc.