Sort de ma tête! [Uthred]

Les ongles de la wandraise se plantèrent dans ses épaules et le visage de la jeune femme se crispa de douleur lorsque l'hymen céda. Ses yeux plantaient dans ceux de Sorsha, Uthred avait envie de la dévorer de baisers et de caresses, mais en plus du frisson qui hérissait la peau de sa compagne, elle souffla.

Vänta lite.

Ses mains se décrispèrent sous les fesses de la jeune femme et se muèrent en de tendres caresses qui effleuraient sa peau. Unis, fusionnés, il n'osa pas bouger plus, laissant l'inconfort de sa partenaire s'estomper derrière le désir qui ne manquerait pas de la gagner à nouveau. Les lèvres du wandrais capturèrent celles de Sorsha à nouveau, tandis que ses mains épousaient les courbes de son dos avec sensualité. Puis, au bout d'un instant, elle remua lentement le bassin, lentement. Une décharge sembla parcourirent son corps, comme si le tonnerre l'avait frappé. Il replaca ses mains sur les hanches de la guérisseuse, accompagnant le mouvement délicatement qu'elle avait décidé d'imprimer. Il savait qu'elle découvrait tout ceci et encore une fois, il ne désirait rien d'autre que la combler et restait attentif au moindre signe de douleur ou de désapprobation qu'elle pouvait émettre pour ne pas se précipiter.

Il plaqua le corps de la wandraise contre le sien, leurs peaux se découvrant au même titre que leurs mains et leurs yeux. Il sentit la fermeté de sa poitrine contre ses pectoraux, la douceur de son ventre contre le sien, les cuisses de la jeune femme qui enserrait sa taille en se crispant légèrement alors qu'elle instaurait un rythme régulier dans ses va-et-vient. Les baisers s'intensifièrent et coururent sur les peaux, les mains voyagèrent en de douces caresses, les souffles s'accélérèrent et se mêlèrent, ses lèvres se crispèrent, grogées de sang et de luxure. Puis, après plusieurs minutes, les corps se cambrèrent en gémissant et la communion de leur corps rejoint la communion de leur coeur et le corps essouflé de la wandraise retomba sur celui, large, musclé et en sueur de son compagnon, cherchant à reprendre son souffle.

Les battements du coeur d'Uthred avaient atteint une vitesse qu'il n'avait jamais cru possible. Ses mains tremblaient encore d'excitation et d'extase lorsqu'il sera le petit corps de Sorsha contre lui, avant de déposer un baiser sur le front de sa belle. Le feu en lui l'avait entièrement embrasé et consumé, il n'était plus que les braises que seul le vent soufflé par la wandraise pouvait attiser. Il la tenait contre lui, la serrant tendrement, peau contre peau, s'accrochant à elle comme à la plus précieuse des choses vivantes dans ce monde. Pas comme, elle l'était devenu à ses yeux. Ils restèrent ainsi, nus et allongés l'un contre l'autre, reprenant leur souffle après ce premier corps-à-corps, intense. Ses doigts se perdirent dans ses cheveux lorsqu'elle redressa la tête légèrement vers lui et il l'embrassa, tendrement, longuement, amoureusement.

Il n’y avait pas vraiment de mots pour décrire ce que ressentit Sorsha dans les derniers instants de leur étreinte. Elle fut, en quelque sorte, emportée par une vague. C’est le corps tremblant qu’elle se laissât aller contre Uthred, vidée de son énergie. Elle se sentait presque aussi fébrile que lorsqu’elle abusait de sa magie, mais la sensation était bien plus agréable. Sorsha resta sans bouger pendant un long moment, écoutant le cœur d’Uthred qui se calmait enfin dans sa poitrine. Elle se serait probablement endormie si elle n’avait pas repris tranquillement conscience de l’environnement qui l’entourait. Ils étaient à l’extérieur, près de la source, cachés des regards indiscrets par seulement quelques buissons. Elle entendait les insectes bourdonner autour de leur corps dénudé, attiré sans doute par l’abondance de chair. Sorsha releva la tête vers Uthred, mais avant qu’elle ait pu dire quelque chose, il prenait ses lèvres pour un autre long et tendre baiser. Le wandrais avait-il réussi l’impossible en l’amadouant? Peut-être, mais il découvrira bien assez tôt qu’elle ne sera jamais une grande tendre et que ses idées étaient bien arrêtées. Mais pour maintenant, elle pouvait bien faire une exception.

Une éternité plus tard, elle se redressa enfin. Si Sorsha n’était plus aussi gênée, elle avait à nouveau conscience de sa nudité et du regard de son compagnon posé sur elle. La jeune femme avait vu des hommes la fixer avec convoitise, mais personne ne l’avait regardé comme Uthred le faisait. Il la désirait sans lui donner l’impression d’être un objet que l’on peut disposer à volonté.

«Jag måste tvätta mig själv lite.»
J’ai besoin de me laver un peu.

Elle se leva pour constater qu’elle avait les jambes comme du coton à cause de l’effort et son genou lui faisait toujours mal. Il avait même recommencé à saigner. Elle s’accroupit près de l’eau et commença à s’asperger le visage et le corps. Sorsha ne savait pas quoi faire. Elle se demandait si Uthred avait aimé ça. Il en avait tout l’air, mais bon, elle se trompait peut-être. En tout cas, elle avait aimé ça, plus qu’elle ne l’aurait imaginé. Ensuite, qu’est-ce que ça signifiait pour eux? Sorsha n’aimait pas trop l’idée que ce soit une fois comme ça et qu’il y en aurait plus d’autres après. Pas qu’elle pensait déjà à le refaire, mais elle aimait bien Uthred. L’imaginer avec une autre femme ne lui faisait pas du tout plaisir. Finalement, le seul moyen de savoir, c’était de demander.

«Vad vill du nu?»
Que veux-tu, maintenant?

Elle tourna la tête vers lui. Sorsha ne souriait pas, mais la curiosité était clairement visible dans son regard. Elle était même un peu inquiète d’entendre la réponse. Elle n’avait rien pour essuyer l’eau et attendait que l’air ambiant fasse le travail sans vraiment chercher à cacher sa nudité.

Le temps semblait suspendu, les tracas envolés, le serment mit de côté pendant ces quelques instants de douceur, blottis l'un contre l'autre. Du bout des doigts, Uthred caressait la peau pâle et douce de Sorsha, observant le ciel et le Grand Esprit du jour, seuls témoins de leurs ébats sur les bords de cette petite mare ensoleillée. Il fallut quelques temps avant que Sorsha ne se redresse, avec moins de pudeur qu'auparavant envers le regard du wandrais, lui révélant son corps sans un frisson, avant de lui confier.

Jag måste tvätta mig själv lite.

Il la regarda se lever et se diriger dans l'eau, tel une nymphe des sagas héroïques qu'on lui contait lorsqu'il était enfant. Sauvages et farouches, leur peau pour seul vêtement, qui vivaient dans les lacs du Sigolsheim, leurs yeux pouvant transpercer l'âme des plus valeureux combattants. Et tandis qu'il ne déviait pas son regard de la jeune femme qui entrait dans l'eau, il ne put s'empêcher de penser qu'elle était sûrement une de leurs descendantes, ayant atteint son coeur et son âme, bien plus profondément qu'il ne l'aurait jamais imaginé. Il se leva pour la rejoindre, tandis qu'elle commençait à faire perler l'eau le long de son dos, les gouttes roulant le long de sa cambrure et épousant les formes de la belle wandraise. Il la rejoignit, s'asseyant à ses côtés alors qu'elle se tournait vers lui, une lueur de curiosité dans les yeux.

Vad vill du nu?

Un petit sourire malicieux étira les lèvres du wandrais qui plongea son regard dans celui de la guérisseuse en levant les sourcils.

Börja om ?
Recommencer ?

Il émit un petit rire, à la fois amusé et coquin, laissant entendre le double sens de cette réponse. Il avait envie de reprendre ce corps-à-corps avec elle, maintenant, tout à l'heure, demain, mais il ne voulait pas lui donner pour autant la sensation qu'elle était devenu sa catin. Il resentait déjà comme un manque. Le manque de sa peau, de ses mains, de ses lèvres, alors qu'elle était encore là, tout près de lui. Il s'aspergea le torse à son tour et les épaules, lançant un regard amusé vers sa compagne. Il ajouta, en haussant les épaules d'un air presque ingénu.

Eller annars kan vi äta något, jag börjar bli hungrig, eller hur?
Ou alors, on peut aller manger quelque chose, je commence à avoir faim, pas toi ?

La jeune femme le regarda en s'avançant dans l'eau, la bouche légèrement entr'ouverte, les yeux de la wandraise rivés dans ceux du wandrais.

Sorsha suivait Uthred alors qu’ils retournaient tous les deux vers l’abri. Lorsque le Wandrais lui proposa de recommencer, il l’avait dit sur le ton de la blague, mais la guérisseuse l’avait pris au mot. Sans hésiter, elle était retournée vers lui, amusée par son regard médusé en la voyant faire. Il lui suffisait de poser les yeux sur lui pour éveiller en elle une foule de délicieuses sensations. Elle en voulait plus, beaucoup plus. Sorsha n’allait pas se contenter de cette seule et unique fois. Après ce deuxième échange, elle se sentait beaucoup plus sereine. Elle avait surtout vraiment faim. Sorsha ne l’avait pas remarqué avant, mais cette fois son estomac menaçait de se faire entendre bruyamment si elle ne mangeait bientôt. Uthred lui avait assuré qu’ils trouveraient de la nourriture dans la cabane, mais Sorsha ne voulait pas non plus abuser de leur ressource. Elle savait que nourrir ces gens n’était pas chose aisée. Ils devaient voler et chaque escapade était risquée.

Leur retour ne se passa pas dans l’indifférence. Après tout, plusieurs les avaient vu partir ensemble et ils avaient été absents longtemps. Sorsha affichait un air impassible, mais évitait autant que possible de croiser les regards d’Eiki et Moamar. Elle retourna s’assoir près du feu où elle retrouva son panier qu’elle avait apporté un peu plus tôt. Avec tout ça, elle n’avait rien fait de plus que de préparer de la tisane pour les gens d’Uthred. Du coup, elle était à peine installée que quelques curieux s’approchaient dans l’espoir de recevoir des soins pour soulager des maux qui les affligeaient. L’un d’eux était un homme d’un âge assez avancé avec une infection à la jambe. La vue était peu ragoutante et suffit à lui couper l’appétit.

« Mettez-vous là. Il faut nettoyer. Pourquoi ne pas m’avoir dit la dernière fois? »

Elle le reconnaissait. Sorsha l’avait soigné pour une fièvre, mais la magie n’avait pas suffi à venir à bout de l’infection. Il fallait crever l’abcès et le nettoyer avant tout. Elle trempa un linge dans l’eau et pendant un instant, elle leva les yeux vers Uthred qui se trouvait de l’autre côté de la pièce. Le coin de ses lèvres se souleva dans un bref sourire avant qu’elle ne rapporte son attention au pauvre homme et à sa jambe.

Même si la proposition de remettre le couvert pour un second tour avait été lancé par Uthred sur le ton de la plaisanterie, Sorsha le prit au mot. Et quel mot ! Les Esprits du Plaisir avaient ensorcelés leurs corps une fois de plus, laissant le wandrais un peu pantois et le souffle court. Ce petit étang avait été le témoin de leur luxure une seconde fois, mais l'effort de l'acte avait creusé leurs estomacs et après leur batifollage, le couple de wandrais finit par se rhabiller et rejoindre l'assemblée des anciens esclaves que l'Ours désignait comme sa Compagnie.

Ils regagnèrent le coin du feu sous quelques regards incrédules, voir curieux, après leur si longue absence. Comme si rien ne s'était passé, Sorsha reprit son oeuvre auprès des frères et soeurs les plus affaiblis, qui l'avaient attendus près de son chaudron de tisane. Un homme un peu plus âgé que la moyenne dévoila sa jambe à la guérisseuse qui fronça légèrement les sourcils avant de le gronder gentillement.

Mettez-vous là. Il faut nettoyer. Pourquoi ne pas m’avoir dit la dernière fois ?

L'homme s'exécuta et Sorsha se mit à passer un linge gorgé d'eau chaude sur les plaies. Elle leva un instant les yeux vers son amant pour lui offrir un léger sourire avant de se reconcentrer sur sa tâche. Une grosse voix, parlant le dialecte de son clan, et une large main s'abattant sur son épaule fit détourner le regard d'Uthred de sa belle.

Veljeni ! Tulit takaisin !
Mon frère ! Tu es revenu !
Minä ... kyllä.
Je ... Oui.
Ja yhtäkkiä olit kadonnut ... Te molemmat?
Et du coup, vous aviez disparus ... Tous les deux ?

Uthred lança un regard en coin vers Sorsha, s'assurant qu'elle n'était pas trop attiré par les réflexions d'Eiki, qui arborait un sourire radieux sur le visage et un regard taquin. Le colosse semblait d'humeur provocatrice, lorsqu'il passa soudain au wandrais des chefs, celui que Sorsha comprenait.

Så vaaaaaaaaaaaad ?
Alooooooooors ?
Så ... jag är inte sjuk.
Alors ... Je ne suis pas malade.

Eiki observa intensément Uthred, puis tourna son regard vers Sorsha, de nouveau Uthred, puis Sorsha, puis Uthred, puis Sorsha et fini par émettre un rire tonitruant. Il frappa un grand coup dans le dos d'Uthred entre deux éclats de rire et observa celle qu'il avait pris pour une sorcière lors de leur première rencontre.

Jag sa det !
Je l'avais dit !

Il l'avait, effectivement dit, et il ne manquerait pas de le rappeler au bon souvenir d'Uthred dès qu'il parlerait de femme. Et il en parlait souvent.

Sorsha arrivait plus ou moins à se concentrer sur sa tâche. Déjà, elle avait faim. Ensuite, crever un abcès purulent n’était pas la chose la plus agréable à faire. Finalement, elle pouvait voir Uthred du coin de l’œil en compagnie d’Eiki. Ce dernier était beaucoup trop de bonne humeur. Elle tendit distraitement l’oreille pour essayer de les écouter, mais ils parlaient dans la langue de leur clan qu’elle ne comprenait pas. Elle parvenait peut-être à saisir un mot ou deux, mais pas assez pour que ça ait du sens. Ça l’agaçait, car Sorsha était convaincu qu’on parlait d’elle. Frustrée, ses gestes étaient beaucoup moins doux et elle fit mal au vieil homme.

« Désolée. »

Elle versa de l’eau sur la jambe. La plaie devait être la plus propre possible pour guérir correctement. Sorsha avait vu mourir des hommes parce qu’ils avaient négligé une coupure en apparence bénigne. Elle épongea la peau. Au même moment, Uthred changeait de langue. Il avait probablement remarqué l’agacement de la Wandraise. Elle tourna la tête dans leur direction juste à temps pour croiser le regard d’Eiki qui ne tarda pas à éclater de rire. Sorsha sentit le feu lui monter aux joues. Elle décida de les ignorer et termina sa tâche. La plaie nettoyée, elle fit le bandage et le laissa retourner avec les autres. En cet instant, Sorsha avait autant envie de partir que de rester. Eiki semblait avoir deviné ce qui s’était passé entre elle et Uthred, c’est du moins ce qu’elle en déduisait. Elle n’avait pas envie d’entendre ses remarques stupides. Pourquoi les hommes ressentaient-ils le besoin de rire de ces choses-là? C’était la même chose avec les hommes de son clan. Elle se souvenaint de conversation très colorées tenues autour du feu. Elle commença à ranger ses choses. Lorsque ce fut fait, elle se dirigea vers Uthred en faisant son possible pour ignorer Eiki.

« Jag ska åka hem. Människor behöver inte mig och jag blir hungrig. »
Je vais rentrer chez moi. Les gens n’ont pas besoin de moi et je commence à avoir faim.

Se tenir aussi près d’Uthred ravivait le souvenir de ce qu’ils avaient fait un peu plus tôt. Elle n’avait pas vraiment envie de partir, mais elle n’avait pas non plus envie de supporter les remarques grivoises de ses compagnons.

Alors que la guérisseuse poursuivait son office sur la jambe de l'homme âgé, Eiki arborait un regard ravi et riait de bon coeur. Le wandrais n'avait pas manqué les regards agacés de sa belle à l'intention de son ami le colosse, ni le rouge qui colorait ses joues. Elle se mit à ranger ses affaires dans sa sacoche lorsqu'elle eut achevé sa tâche, avant de se planter devant Uthred.

Jag ska åka hem. Människor behöver inte mig och jag blir hungrig.

Eiki regarda Sorsha, puis tourna son regard vers Uthred, attendant avec un sourire béat la réponse que pourrait apporter le wandrais à la déclaration de la guérisseuse. L'Ours posa sa main sur le visage d'Eiki qu'il trouvait beaucoup trop proche du sien et écarta de quelques pas son camarade.

Är du säker ? Vi har mat här.
Tu es sûre ? Nous avons à manger ici.

Il fit encore un pas pour se retrouver un peu plus près de Sorsha avant de se pencher vers son oreille.

Jag skulle vilja att du stannar hos mig.
J'aimerai que tu restes avec moi.

Eiki s'était penché vers eux également et son rire résonna dans l'oreille du wandrais. Le colosse nota les deux paires d'yeux qui se tournèrent vers lui avec une certaine fureur. Il leva les mains en signe de paix, puis, sans se départir de son sourire, il s'exclama, tentant de calmer le jeu.

Jag tog upp snarorna i morse. Vi har kanin och patridge. Sorsha är kvar. Jag ska visa dig mina matlagningsförmågor !
J'ai relevé les collets ce matin. Nous avons du lapin et de la perdrix. Restes Sorsha. Je vais te montrer mes talents de cuisinier !

Uthred fronça légèrement les sourcils, se doutant qu'Eiki n'en avait pas terminé. Son camarade ne tarda pas à lui donner raison.

Och sedan kommer det att glädja Uthred.
Et puis, ça fera plaisir à Uthred.

Eiki donna une tape sur l'épaule de son frère qui répondit par une bourrade dans celui du colosse, qui eut un nouveau rire avant de se retourner vers l'assemblée et de détacher les petits gibiers qui pendaient à sa ceinture.

Ce soir, on fait la fête, mes amis !

Sorsha avait amplement à manger au bordel, elle n’avait pas besoin d’abuser des maigres ressources du groupe. Toutefois, il suffisait qu’Uthred se penche vers elle pour la faire hésiter. Les souvenirs de leur échange étaient encore très vifs à son esprit. Elle pouvait encore sentir son souffle contre sa peau et le contact de ses mains rugueuses… Le sourire béat d’Eiki suffit à la sortir de ses rêveries. Elle n’aurait probablement pas hésité à le frapper si Uthred n’avait pas été là. Pour compenser, Sorsha lui adressa son regard le plus menaçant avant de s’adresser à l’autre colosse.

« Okej, jag är villig att stanna ... »
D’accord, je veux bien rester…

Des lièvres et de la perdrix… Il en faudra plusieurs pour satisfaire l’appétit de tout le monde, surtout de ces deux grands garçons, mais ces gens n’avaient probablement pas manger quelque chose de semblable depuis longtemps.

« Jag stannar under förutsättning att det är jag som lagar mat. Du kan förstöra köttet, men du kan plocka patridgesna dock. »
Je reste à condition que ce soit moi qui cuisine. Tu risques de gâcher la viande, mais tu peux déplumer les perdrix, cependant.

Uthred éclata de rire et Sorsha se permit un de ses rares sourires en retour.

C’est ainsi qu’elle se retrouva responsable du repas. Ici, elle ne pourrait pas faire de miracle. La viande était bien maigre et Sorsha aurait aimé avoir un énorme cerf sous la main. Elle s’imaginait sans peine le débiter, retirant de la carcasse de délicieux morceaux de viande à faire griller sur le feu. Un jour ça arrivera et plus tôt que tard, idéalement. Avec les ressources qu’ils avaient déjà à disposition, elle réussit à préparer un repas assez consistant pour tout le monde. En tout cas, ça sentait divinement bon. Quand ce fut prêt, elle remplit une écuelle qu’elle alla porter à Uthred. Sorsha en prit aussi une portion et s’assit ses côtés pour manger. Elle ne le montrait pas, mais la jeune femme était contente. Évidemment, elle pourrait se passer du sourire niais d’Eiki, mais bon, il lui faudra apprendre à vivre avec…

« Så är det bra? »
Alors, c’est bon?

Et pour leur santé à tous, ils avaient intérêt à dire oui. En vérité, c’était très bon. Rustique, mais délicieux.

Uthred observait Sorsha avec une légère inquiétude. Eiki n'était pas méchant, mais sa bonhommie pouvait déstabiliser la wandraise et gâcher le délicieux moment qu'ils avaient partagés quelques instants plus tôt. La parole de la guérisseuse lui ôta un poids des entrailles.

Okej, jag är villig att stanna ... Jag stannar under förutsättning att det är jag som lagar mat. Du kan förstöra köttet, men du kan plocka patridgesna dock.

L'aplomb de la réponse et la mine incrédule d'Eiki firent exploser de rire Uthred. Il reçut un beau cadeau en retour, un sourire, trop rare, de cette jeune femme sauvage qui faisait battre son coeur un peu plus vite à chaque fois qu'elle le regardait. Eiki accompagna l'éclat de rire de son frère et laissa se diriger vers le feu avant de tourner son visage rieur vers Uthred, lui glissant dans la langue de leur clan.

Hän on hauska. Pidän hänestä.
Elle est drôle. Je l'aime bien.

Un nouveau sourire illumina le visage de l'Ours avant de hocher la tête et de regarder l'immense wandrais servir de commis pour la wandraise menue. Un duo peu commun, pour sûr, mais qui oeuvra à préparer le repas de fête qu'Eiki avait promis. Le groupe d'esclave retrouvait ses forces, et un repas à base de gibier ne ferait qu'accélérer le renforcement de chacun.

Les Esprits de la Nuit commençèrent à étendre leurs longues capes sombres sur le ciel lorsqu'il fut l'heure de manger le repas. Uthred vint s'asseoir aux côtés de Sorsha et se délecta de l'odeur de viande braisée avant même d'avoir mordu dedans. Il croqua à peine une bouchée que la wandraise se tournait vers lui.

Så är det bra ?
Det är väldigt bra! Du är full av talang.
C'est très bon ! Tu es pleine de talent.

En effet, c'était délicieux. L'oeil d'Uthred frisait légèrement en regardant sa compagne, laissant sous-entendre qu'il évoquait des talents plus intimes, que seul lui connaissait dans l'assemblée. Un petit sourire coquin étirait sa bouche sur le côté, alors que les autres wandrais acquiesçaient. Plusieurs esclaves lançèrent des compliments au duo de cuisiniers qui avaient préparés une si bonne pitance. C'est à cet instant qu'Uthred se sentit obligé de révéler à Sorsha, ses futures activités au sein de la ville, sous l'étendard de Telchar. Il s'approcha d'elle un peu plus près avant de lui chuchoter

Sorsha, jag måste berätta något ... Jag kommer snart att slåss igen på arenan.
Sorsha, je dois te dire quelques chose ... Je vais bientôt combattre à nouveau dans l'arène.

Pleine de talents… Pas tant que ça. Quand on vient d’un monde où les ressources sont rares, apprendre à les préparer c’est une notion de base. Impossible de survivre sinon. Sorsha mettait simplement à profit se qu’elle savait, tant mieux s’ils appréciaient. En vérité, elle aurait quand même été vexée s’ils n’avaient pas aimé. Elle avait cuisiné pour Uthred, pour lui faire plaisir. Finalement, ils eurent tous droit à un bon repas, peut-être le meilleur et le plus consistant depuis un bon moment.

Rassasiée, Sorsha posa son écuelle au sol. Elle se sentait bien, peut-être encore un peu embarrassée par les regards en coin d’Eiki et d’Uthred, mais que pouvait-elle y faire. Ce sont des hommes et les hommes sont comme ça. Certes, s’ils devaient se montrer trop insistants, elle n’hésiterait pas à leur mettre un poing sur la figure, mais pour l’instant, ils respectaient les limites. Rien n’aurait pu venir assombrir ce sentiment de plénitude ou presque.

L’aveu d’Uthred avait de quoi surprendre et fâcher la wandraise.

«Vad? Du är dum! Varför accepterade du? Du kommer att bli dödad på en arena. De kommer att använda dig som ett djur. De är jävlar som inte kommer att slänga en tår över din död, bara över förlusten av deras dumma pengar. Jag gjorde inte det ... så att du skulle dö senare. Vägra. Gör det inte.»
Quoi? Tu es stupide! Pourquoi avoir accepté? Tu vas aller te faire tuer dans une arène. Ils vont t'utiliser comme une bête. Ce sont des bâtards qui ne verseront pas une larme sur ta mort, juste sur la perte de leur stupide argent. Je n'ai pas fait... ça... pour que tu meures après. Refuse. Ne le fais pas.

Sorsha était très sérieuse. N’avait-il pas dit qu’il avait quitté ce monde, parce qu’il ne voulait plus le faire. Pourquoi y retourner de son plein gré. Ça ne faisait aucun sens. Il s’en était sorti vivant, ce n’était pas le cas de tous. Il devait profiter de sa chance pour aller le plus loin possible, pas pour y retourner tête baissée. Où était sa fierté?

«Eller låt mig komma och slåss med dig. Det krävs någon för att hålla dig från att dö dumt.»
Ou laisse-moi venir me battre avec toi. Ça prend quelqu’un pour t’empêcher de crever stupidement.

Elle pouvait se battre. Sorsha faisait peut-être le tiers de leur poids, sans doute moins, mais ça ne semblait pas particulièrement l’impressionner. Elle était violente, brutale et si quelqu’un s’en prenait à une personne qu’elle appréciait, Sorsha lui fera passer l’envie de recommencer.

Uthred appréhendait la réaction de la wandraise et la réponse qu'elle lui offrit cingla dans l'air.

Vad? Du är dum! Varför accepterade du? Du kommer att bli dödad på en arena. De kommer att använda dig som ett djur. De är jävlar som inte kommer att slänga en tår över din död, bara över förlusten av deras dumma pengar. Jag gjorde inte det ... så att du skulle dö senare. Vägra. Gör det inte.

Le wandrais fronça les sourcils, peu habitué à subir ce genre de remontrance appuyée. Il comprenait l'inquiétude de la jeune femme mais elle semblait oublier à qui elle s'adressait. Il avait été l'Ours du Bae'd, un des meilleurs combattants que Sol Dorn ait connu, pas le premier esclave venu qu'on avait jeté en pâture aux lions. Sorsha surenchérit, toujours déterminée, ses yeux bleus rivés dans ceux d'Uthred.

Eller låt mig komma och slåss med dig. Det krävs någon för att hålla dig från att dö dumt.

Une vraie wandraise, assurément. Farouche et intrépide, prête à combattre et à mourir pour ce qu'elle voulait protéger. Uthred passa ses bras épais autour de la taille de la guérisseuse et l'invita à se rapprocher encore un peu de lui. Il secoua la tête, poursuivant leur discussion à mi-voix, tandis qu'autour d'eux, des chants et des rires s'intensifiaient sous l'impulsion d'Eiki et Caspian.

Nej. Du kan inte komma för att slåss. Jag kunde inte koncentrera mig om jag vet att du är i arenan.
Non. Tu ne peux pas venir combattre avec moi. Je ne pourrais pas me concentré si je sais que tu es dans l'arène.

Il posa son front contre celui de Sorsha, leurs yeux avec intensité. L'Ours poursuivait.

Jag accepterade av flera skäl, Sorsha. Först för guld. Vi behöver det för att återvända hem. Sedan är det på en arena som jag kunde hitta bra krigare att gå med oss. Det är på arenorna att det finns flest slavar som ska befrias. Jag tänker inte stanna kvar så länge, bara tillräckligt länge för att få förtroende för gladiatorerna och se vem som kan gå med oss. När jag kunde vidta åtgärder, tänker jag bränna detta fördömda colosseum.
J'ai accepté pour plusieurs raisons, Sorsha. D'abord, pour l'or. Nous en avons besoin pour retourner chez nous. Ensuite c'est dans une arène que je pourrais trouver de bons combattants pour nous rejoindre. C'est dans les arènes qu'il y a le plus d'esclaves à libérer. Je ne compte pas y rester très longtemps, juste le temps de gagner la confiance des gladiateurs et de voir lesquels pourront nous rejoindre. Lorsque je pourrais passer à l'action, je compte bien faire bruler ce maudit colisée.

Il se redressa, souriant, les yeux tout aussi déterminés que ceux de Sorsha. Il posa sa main sur la joue de la wandraise, dans un geste doux et rassurant.

Jag skulle inte dö. Jag behöver bara tid för att bevisa mitt värde i mästarnas ögon, men jag kommer inte att dö, jag lovar dig. Jag har en ed att hedra och ett land som jag måste hitta. Med dig.
Je ne mourrais pas. J'ai juste besoin de temps pour prouver ma valeur aux yeux des maîtres, mais je ne mourrais pas, je te le promets. J'ai un serment à honorer et un pays que je dois retrouver. Avec toi.

Il resta un instant, son regard plongé dans celui de sa compagne, espérant qu'elle comprendrait son choix et les raisons de celui-ci. Uthred retournerait sur le sable de l'arène, quoiqu'elle en dise, il préférait juste qu'elle lui donnerait sa bénédiction.

« Du dog inte första gången, men det betyder inte att du inte kommer att dö den här gången. Varför ta risken? Är guld så viktigt? Vi behöver det inte. Jag gjorde resan utan guld. Jag ska bara jaga och jag kan göra det. »
Tu n’es pas mort la première fois, mais ça ne veut pas dire que tu ne mourras pas cette fois. Pourquoi prendre le risque? Est-ce que l’or est si important? On n’en a pas besoin. J’ai fait le voyage sans or. Il suffit de chasser et je peux le faire.

Aux yeux de Sorsha, les raisons avancées par Uthred n’étaient pas suffisantes. Il y avait toujours d’autres solutions, mais comme les habitants de cette ville, il était devenu obsédé par l’or, comme s’il était impossible de vivre sans. C’était possible pour les plus débrouillards et les plus forts. À l’évidence, les arguments de Sorsha n’avaient pas l’effet escompté sur le gaillard. Il devait tenir sa parole, peu importe le prix a payer. Elle grimaça, réalisant qu’elle ne pourrait pas lui faire entendre son point de toute façon.

« Även om jag kan försvara mig mycket bra kommer jag inte slåss på arenan. Jag är irriterad över att du tycker att jag är så svag ... Jag kommer fortfarande att följa dig. Någon behöver läka dina sår. Men om du skulle dö, kommer jag hitta ett sätt att föra dig tillbaka bara för att döda dig från mina händer senare, förstår det? »
Même si je peux très bien me défendre tout seul, je ne vais pas me battre dans l’arène. Je suis vexée que tu me croies si faible... Je vais quand même t’accompagner. Il faut quelqu’un pour soigner tes blessures. Toutefois, si tu devais mourir, je vais trouver le moyen de te ramener simplement pour te tuer de mes mains par la suite, c’est compris?

Du dog inte första gången, men det betyder inte att du inte kommer att dö den här gången. Varför ta risken? Är guld så viktigt? Vi behöver det inte. Jag gjorde resan utan guld. Jag ska bara jaga och jag kan göra det.

Les mots étaient durs, mais Uthred comprenait bien qu'il résultait de l'inquiétude qu'il avait suscité chez Sorsha. Il s'approcha encore un peu plus d'elle, soufflant.

Jag behöver guld så att alla mina bröder och systrar kan äta och skydda sig. Jag kan inte lämna mig ensam och förlita mig på andarna välsignelse. Att resa ensam eller par är en sak, jag ansvarar för dessa människor.
J'ai besoin d'or pour que tous mes frères et soeurs puissent manger et se protéger. Je ne peux pas partir seul et en me remettant à la bénédiction des Esprits. Voyager seul ou à deux est un chose, je suis responsable de ces gens.

La réponse de la jeune femme ne tarda pas, résignée mais gardant quand même cet éclat sauvage dans les yeux.

Även om jag kan försvara mig mycket bra kommer jag inte slåss på arenan. Jag är irriterad över att du tycker att jag är så svag ... Jag kommer fortfarande att följa dig. Någon behöver läka dina sår. Men om du skulle dö, kommer jag hitta ett sätt att föra dig tillbaka bara för att döda dig från mina händer senare, förstår det? 

Uthred rit doucement, enlassant sa compagne avec douceur, il enfouit son visage sous la chevelure indompté de la guérisseuse et lui chuchota, comme un secret.

Var inte rädd. Jag är björns björn. En arenamästare. Jag kommer inte att överge dig. Den som kan besegra mig är ännu inte född. Till och med Eiki lyckades aldrig. Och om du tar hand om att klä mina sår är jag oövervinnlig ... Bor du hos mig ikväll? Vänligen.
N'aies pas peur. Je suis l'Ours du Bae'd. Un champion de l'arène. Je ne t'abandonnerai pas. Celui qui pourra me vaincre n'est pas encore né. Même Eiki n'a jamais réussi. Et si tu prends soin de panser mes blessures, je suis invincible ... Tu restes avec moi cette nuit ? S'il te plaît.

Il déposa un petit baiser dans le cou de sa douce sauvageonne, espérant qu'elle accepterait de rester encore un peu à ses côtés. La perdre, même pour quelques heures, le rendrait fou, il en était persuadé.

En prenant tous ces gens sous son aile, Uthred était devenu leur chef. Certes, il n’aimait pas trop ce mot et préférait les voir comme ses égaux, mais le wandrais devait se rendre à l’évidence, il l’était. En les libérant de leur calvaire, il avait aussi pris la responsabilité de veiller sur eux et de s’assurer qu’ils ne connaissent plus la misère liée à leur condition d’esclave. Il s’en mettait peut-être beaucoup sur les épaules, mais s’il y avait quelqu’un capable de supporter tout ce poids, c’était sans doute lui.

« Eiki har nävar som klubbar. » Eiki a des poings comme des massues. Fit remarquer la wandraise tout en parlant à voix basse pour qu’il n’ait qu’Uthred qui puisse l’entendre. Elle ne souhaitait pas faire réagir le géant en lui servant un compliment qui lui ferait certainement trop plaisir. Sorsha ne le détestait pas, mais il était un peu trop exubérant selon ses goûts. Elle comptait sur lui pour protéger les arrières d’Uthred lorsqu’ils seront dans l’arène. La wandraise aurait préféré pouvoir le faire elle-même, mais l’Ours préférait la savoir en sûreté. Et il se montrait particulièrement câlin avec elle, ce à quoi Sorsha n’était pas habitué. On ne lui avait jamais démontré autant d’affection par le passé. Même sa mère lui avait imposé une distance dès son plus jeune âge. C’était déstabilisant, mais pas désagréable. Elle était simplement incertaine si elle devait faire la même chose ou pas. Est-ce qu’il attendait ce genre d’attention de sa part? Sorsha n’était pas très affectueuse et elle ne savait pas comment s’y prendre. Elle pourrait imiter les mêmes gestes qu’Uthred, mais ils ne seront probablement pas très naturels. Après un moment, elle finit par prendre une main du Wandrais. Elle tourna la paume vers le haut. Elle était rugueuse et pas très jolie, mais puissante. Sorsha se souvenait surtout de tous les endroits que cette main avait touchés sur son corps. « Okej. Jag är villig att tillbringa natten här. » D’accord. Je veux bien passer la nuit ici. Elle déposa un baiser au creux de sa main avant de se blottir un peu plus contre le Wandrais. La fatigue alourdissait ses paupières. Elle pourrait bien s’endormir là, dans les bras d’Uthred, malgré les éclats de rire et la bonne humeur générale. C’est ce qu’elle fit sans s’en rendre compte. Elle glissa doucement dans un sommeil paisible, bercé par la chaleur du corps d’Uthred et les battements lents de son cœur.