Qu'il y a t'il de pire qu'un drow ? Deux drow

Barkios, début de la VIII ennéades, an 18, cycle XI. Printemps

— Vingts souverains.
— Non mais vous plaisantez ? Quinze, pas plus.
— Vingts.

Si pour Owen l'envie de maugréer, pester ou de vociférer était fort comme tout nordien tout à fait ordinaire, il s'était retenu de prononcer quelques choses qui ne fera que rendre encore plus avare son locuteur. Autant ne plus négocier car ce n'était pas son domaine et probablement en vain. Owen rechercha alors sur le pan de sa veste en lin pour y sortir une mince bourse et le balança vers l'homme. L'homme qui sourit alors à pleine dents — même s'il ne lui restait plus que deux molaires — sautilla de frémissements à la vue de l'or. L'homme trapu après s'être assuré de la véracité d'Owen, s'accourut par la suite à l'intérieur de la bâtisse de bois et n'y ressortit que quelques minutes plus tard tonneau en main, deux autres le suivirent eux aussi tonneaux en mains.

— Maître Owen aura-t'il besoin d'autres choses ?
— Des directions, je ne serais pas contre.
— Bien ! Alors, là on est à quelques lieux d'Oësgard, vous n'aurez qu'à descendre au sud, puis là il y aura Amblère et faudra ensuite longer la rivière ! La route elle n'est pas très loin !
— Très bien, vous avez fini de charger le chariot ?

Le trapu acquescia en croisant les avants-bras. Owen rejoint l'arrière du chariot afin de vérifier qu'il y avait bien les tonneaux commandés, pour s'assurer de la véracité de l'homme. Il ne mentait pas. Suite à cela, il ne restait plus alors au jouvenceau de monter à l'avant et reprendre la route. Owen avait été recalé pour retourner travailler à l'écurie depuis son retour, l'an dernier, il n'avait pas prit la peine d'annoncer son voyage à son supérieur. Ce dernier ne l'avait pas très bien prit. Mais même sans métier, Owen en retrouva un autre temporaire le temps de convaincre le propriétaire des écuries à le reprendre. Il ne s'était pas douté que cet emploi passager allait inclure du voyage traversant le Nord. Tout cela pour récupérer des marchandises dont il ignorait le contenu. Ce n'était pas son problème, il n'était que le livreur. Owen se hissa sur le banc avant du chariot, là où gisait à ses cotés l'épée de bonne facture offert par d'anciens connaissances dans son fourreau. Il reprit les rênes alors que Ténèbre, un étalon morelle, renâcla et hennit et tapa des sabots avants, faisant presque renverser les cargaisons qui était pourtant bien rattaché à l'arrière. Il n'avait pas plus docile bête sous la main, pas même un mulet.

Owen reprit la route rapidement, se dirigeant vers le sud comme on l'avait conseillé. Il allait vers Odélian et allait sûrement s'arrêter en cours de chemin à Amblère, la nuit tombait doucement. Après quelques heures de route, les paysages étaient resté plus ou moins les mêmes malgré un changement évident d'ambiance. Parait-il que son père et son frère, dont il n'avait franchement aucune idée de qui il était, aurait combattu ici il y a quelques années. Contre les envahisseurs noirelfes ? Ou alors contre le prétendu Roi d'Oësgard ? Tout ceci le confus terriblement, la géopolitique et la guerre n'était non plus son domaine. Ils — lui et son cheval — étaient à seulement une heure de route d'Amblère. Owen avait prit son temps, ce n'était pas réellement sa faute vu que Ténèbre était récalcitrant. C'était une foutue bête, pas un cheval de trait, de quoi regretter l'avoir emmené avec lui ou ne pas l'avoir vendu au premier venue. Ou encore le donner à la dame de Fernel, elle qui avait l'air d'avoir un lien spécial avec ce cheval.

Ténèbre clopinait, ne cessait d'hennissait. Puis l'étalons se décida tout bonnement de refuser d'avancer et ne plus écouter son maître. Owen se retint encore de maugréer et cracher une volée d'insultes sur lui. Il ne voulait pas l'énerver. Le freluquet lâche les rênes du chariot et poussa un soupir.

— Velian est moins borné que toi, tu le sais ? Avance, créature de malheur !

Vous connaissez ce sentiment qui vous envahi parfois? Celui qui vous donne cette impression de danger? Celle qui vous donne la chair de poule, comme mille petites aiguilles qui vous transpercent la peau, vous avertissant d’un danger? Vous pouvez sentir le sang battre sur vos tempes, alors que la terreur vous prend en otage. Elle avait une très grande ombre cette peur. Une ombre qui semblait se répandre dans la forêt où c’était installé les ilythiiris. Si certains locaux allaient même jusqu’à dire que cette forêt était maudite depuis que la Sainte Légion avait attaqué Oesgard, ils semblaient que l’ambiance ne s’était guère améliorée ces derniers temps. D’ailleurs les vestiges des piliers issus par la créature de Kiel étaient encore visibles. Un sombre rappel de la folie qui avait pris d’assaut le Haut-Prêtre de la maîtresse des souffrances. Quelques humains, surtout les plus courageux, s’étaient engouffrés dans cette dernière, mais ceux qui en était sortie semblaient changés, comme si une noirceur avait envahi leurs cœurs et tout dernièrement, ils semblaient que la forêt ait demandé son lot d’humain. Depuis une ennéade, les hommes ou les femmes qui s’y engouffrait ne revenaient tout simplement pas. Oh, on aurait bien envoyé un message à l’autorité, mais qu’est-ce que le baron pourrait bien avoir à faire de quelques péquenauds qui était disparu dans une vaste forêt? Probablement un loup, ou une autre créature du même acabit. Qui plus est, l’empreinte mortelle que les noireselfes avaient laissés dans cet endroit, qui était auparavant était accueillante, ne rassurait personne.


Par chance que les habitants ne savaient pas ce qui se passait réellement près de chez eux. Quoiqu’une armée de pantins qui s’habitait sur un petit patelin perdu serait définitivement distrayant. Mais, bien entendu tout cela aurait augmenté leur désespoir, au grand bonheur de leur invité. L’agonie, l’extase, toute les morts, toutes les tortures qui avaient été infligés ces derniers jours avaient toutes une beauté qui leur était propre et il fallait avouer que tout semblait particulièrement attrayant pour l’Obok Yatharil lorsque tout était recouvert de la substance rougeâtre qui habitait ses victimes. La main torturée de cette dernière bougea doucement le bout de ses doigts, faisant glisser le liquide visqueux devant ses prunelles vides. Le masque cachant toute émotion, alors qu’elle élaborait un ultime scénario pour sa prochaine victime. Puis un bruit vint déranger ses pensées. Celui d’un animal apeuré, suivi d’une voix d’homme qui tentait de calmer la bête. Sans attendre, l’ombre se leva, faisant virevolter les pans de sa tunique rouge derrière elle, avant de faire un léger signe de sa griffe métallique vers Jor qui était assis non loin. L’esclave se leva d’un bond, avant de suivre sa maîtresse d’un pas discret. Les épaules basses, son regard fixant le sol, il suivit Kiel Elamshinae dans la forêt. Cela ne prit qu’une seconde avant que les deux flammes s’arrêtent… et l’ombre penche légèrement la tête sur la droite, regardant de ses yeux vides l’humain qui ne l’a toujours pas remarqué alors que sa monture refuse de faire un quelconque mouvement.


Et le chaos engloutira cette terre
Il n’aura plus peur de rien après ton départ.
Un murmure dans l'ombre de votre âme.
Il est à moi.


Sa main se crispa alors que les griffes métalliques s’entrechoquèrent. Les cliquetis semblèrent résonner dans la forêt.


Le sang du déchu l'enflammera en tant que nouveau maître.
Elle vaincra comme la flamme, tout tombera en cendres devant elle.


«Phu' dos tahta, lotha klez? »
Es-tu effrayé petite chose?



Ces yeux vides étaient fixés sur l’humain, tandis que sa main sembla se crisper sur la dague encore ensanglantée, attendant la moindre réaction alors que le rat traduisait ses paroles. Décidément il n’était pas tombé sur la bonne personne.

Que lui reste-t'il d'autre que la peur ? Une profonde peur qui l'envahit de tout part. Que lui reste-t'il qu'une angoisse incertaine? Savoir que quelque chose se produit, s'approche de lui mais sans savoir d'où elle comptait trancher. Et lorsque même Ténèbres, reconnu pour être fougueux et intempéré, se retrouve à craindre le danger, que devait-il faire ? Il devait s'enfuir c'était l'option la plus évidente, mais Ténèbres n’obtempérait toujours pas et hennissait violemment, l'étalon morelle claqua ses sabots avants et fit trembler le chariot. Owen pensait évidemment que Ténèbres en avait assez d'être attaché et voulait galopé à l'air libre, filer comme le vent. Mais il se doutait que c'était bien plus que cela, jamais auparavant n'avait-il vu Ténèbres être si agité et apeuré de cette façon. Owen agrippa la poignée de son épée.

C'était un mouvement vif, brusque. Le jeune homme avait entendu les bruissements provenant de la forêt, il avait prit facilement peur pour un rien. Malgré l'ambiance inquiétant du lieu, aucune danger n'était apparent, mais alors pourquoi était-ce difficile d'y croire ? Owen avala sa salive, son pied tapotant le bois qui supportait ses jambes, il relâcha les rênes qui menait Ténèbres et la poignée de cuir de son épée. Mettant sa tête entre ses épaules, le palefrenier reconvertit en tant que conducteur de charrette songea à que faire pour les heures à suivre, car il savait que Ténèbres ne comptait plus bouger, l'étalon se mit à remuer. Une ombre sortit des bois. On aurait cru entendre quelque chose, comme un... Un chant ? Étrange et nauséabond. Le son d'un métal tranchant crissa et fendit l'air à maintes reprises, Owen reprit fermement la poigne de son épée tandis que sa respiration se fit haletante. Il avait peur, monstrueusement peur.

Soudain, une entités sombre, encapuchonné se révéla au grand jour. Ténèbres renâcla et ses oreilles s'incurvèrent avec noblesse, comme s'il s'inclinait. Owen n'eut le temps de détacher les attaches sur l'étalon et partir au galop et s'enfuir loin, loin d'ici. La lame siffla hors du fourreau noirci, il brandit l'épée avec une poigne faible et détendu, un poil trop détendu. Qu'était cette chose ? Et puis cette voix, cette langue... On dirait qu'il avait entendu ce jargon auparavant, quelque part à Thaar... C'était le langue qu'usait les drow. Les noirelfes ! Mais que faisaient-ils en Péninsule !? Que faisait des mangeurs de bébé — car tout le monde savait que les noirelfes se nourrissaient de bébé — dans le Marquisat ? Owen glapit, pointant le bout de sa lame vers l'infâme créature venant du désert. Il ne donna aucune attention à celuiq qui traduisit les paroles, ni à la lame ensanglanté que le drow portait en sa main. Ténèbres se secoua, les tonneaux à l'arrière du chariot tremblèrent et s'entrechoquèrent.

— Partez ! Allez-vous-en ! Je ne vais pas vous donner des bambins pour vous nourrir, espèce de montre !

La peur le saisissait à la gorge, cela se trahissait au ton de sa voix et à ses mains tremblants, néanmoins, il faisait preuve d'un courage particulier. Surtout face à des abominations qu'il avait tant craint étant plus jeune.

Un léger sourire apparut derrière le masque, alors que la tête de l’Obok Yatharil se penchait légèrement vers l’avant, observant sa proie de ses prunelles vides. Car c’est ce qu’il était. Une simple proie. Il était si futile, si petit et pourtant il jouait la bravoure comme personne d’autre. Le rideau était levé, et le spectacle était sur le point de commencer. Si sa performance avait pu être crédible pour certain, elle ne le serait certainement pas pour la favorite de la maîtresse des souffrances. Elle voyait de ses yeux vides les tremblements de ses mains, pouvaient sentir son cœur battre à tout rompre. Oh oui, elle était bien là. La terreur l’envahissait peu à peu. Il était trop tard, le parfum de la peur avait envahi ses narines. Ce délicieux arôme la fit frissonner.  Tout cela, crée par sa seule présence, mais il était maintenant trop tard. Elle l’avait vu, et maintenant elle le voulait. Ce n’était surement pas les paroles bancales que l’esclave traduisit qui la ferait fuir. Un sourire carnassier se créa sous le masque alors que sa main fit crisser les griffes de métal. Sans attendre, Kha’linas remonta doucement la lame tâchée de son propre sang, la pointant vers l’humain.


« Gaer zhah ji mzil i'dollen ulu el.  Xun dos ssinssrin ulu ragar nind yallt?»
Est-ce que s’est supposé être un défi? Je suppose que je n’ai pas le choix.


Son sourire s’agrandit derrière le masque noir, alors que la prêtresse baissait légèrement le menton. Ses yeux semblaient briller d’une lumière malfaisante. L’humain l’amusait, peut-être lui résisterait-il plus longtemps que les autres? Chose est sûre, il ne pouvait reculer maintenant. Il l’avait vu, elle ne le laisserait pas partir aussi facilement.


« Gaer zhah ji mzil i'dollen ulu el.  Xun dos ssinssrin ulu ragar nind yallt?»
Il y a tellement de façons de mourir… Est-ce que tu souhaites les découvrir aujourd’hui?


L’esclave à ses côtés avala difficilement sa salive, alors que son regard se portait sur le sol, semblant analyser le moindre grain de poussière qui se trouvait sur ses pieds nus et ensanglanté. Il traduisit d’une voix terrifiée les paroles de l’Obok Yatharil. Trop apeuré pour tenir tête à l’ilythiiri, ce dernier ne serait clairement pas utile à l’humain. Il tremblait probablement plus que ce dernier de toute façon tandis que la main de la drow se crispa dans une position désagréable à nouveau.


Fais lui découvrir les abysses.
C’est trop tard pour lui.
Elle l’a vu.
Elle va le faire saigner.
Saigne!
Il va se débattre!
Tant mieux, cela nous donnera de l’action.
Le parfum de sa peur est des plus doucereux.
DONNE LE MOI.


Kha’linas fut pris d’un frisson alors qu’elle entendit la voix tonner. La maîtresse le voulait, elle l’aurait. Faisant à nouveau bouger ses griffes alors que son audience se calmait, Gul’Uss pencha sa tête vers le côté, fixant toujours l’humain.


« Ji, vel'bol phu' dos aluin ulu xun?»
Alors, que comptes-tu faire?

Les opportunités pour s'enfuir étaient mince. Il pouvait toujours essayer de détacher ou trancher les liens qui liait Ténèbres au chariot, suffirait par la suite de sauter et... Non, c'était peine perdu, le moindre agissement brusque de sa part pouvait se révéler fatal, ou pis, dommageable. La lame de l'épée luisait, mais elle perdait de son éclat car la nuit tombait et les rayons s'éteignaient à petit feu. Ce qu'Owen se rendit compte assez tard en pointant le bout de sa lame avec son bras étendu du mieux qu'il pouvait, était que cela commençait à peser et à être lourd. Il allait devoir relâcher son bras, mais rien que l'idée de baisser son arme lui remplissait l'esprit d'une image: son propre sang gicler par les griffes de métal, car il aurait laissé une fenêtre de libre à la drow. Une effusion de sang qui ne cessait de couleur au niveau de son cou. Il ne voulait pas que cela arrive. Il ne voulait souffrir. Il ne voulait pas mourir. Il voulait vivre.

— Retournez dans votre désert ! Allez ! Je vais avertir le Roy de votre présence si vous ne vous en allez pas maintenant !

Bon, le Roy était un grand mot. Probablement le seigneur local et qui sait, le baron de ces lieux. C'était bien un baron qui régnait sur ces terres ? Certainement, car c'est une baronnie. Mais là n'était pas l'important, Owen retira de sa tête ses songes qui le perturbent de la situation présente, celui dont lequel il fait face à la plus mauvaise des créatures, une drow. Son bras tomba légèrement d'un pouce sous le poids du métal, mais il le releva immédiatement après en voyant la drow. Le front en sueur, Owen gardait une respiration lente et faible, il aurait aimé être autre part. Il se tourna vers l'homme en haillon au côté de la noirelfe. Lui qui ne faisait que traduire les paroles de celle qui semblait être sa maîtresse. Il était un nordien, tout comme lui, ses traits le trahissait. Pourquoi aidait-il une foutue drow ? Owen avait peur de la réponse, car il se doutait fortement qu'il n'aidait pas par conviction ou pour un maigre salaire. Il ne devait pas être payé du tout. C'était un esclave, tout comme ses personnes qu'il avait auparavant vu enchaînés et regroupé en tas lors de son séjour à Thaar. L'esclave traduisit de nouveau les paroles de sa maîtresse, Owen répliqua en n'essayant même plus de cacher sa peur.

— Je... Ta propriétaire a pas compris ce que j'ai dis, espèce d'idiot !? Ou c'est juste toi qui sait pas transcrire ce que je dis correctement !?

Inutile de savoir que les paroles de la noirelfe l'avait profondément atteint et commençait à le tracasser. Non, il souhaitait vivre, il ne voulait pas du tout mourir. Il voulait vivre ! Passer plus de temps en ce monde, veiller sur son père et sa sœur, lorsque cette dernière serait assez âgée pour s'occuper d'elle même — après l'avoir marié évidemment à un bon parti — fonder sa propre famille. Mourir de vieillesse, ne pas subir la même chose que l'autre nordien pour le reste de ses jours, qui sont inévitablement compté. Ce pauvre humain devait subir un martyr constant, chaque instant de sa misérable vie devait être pénible et douloureux. Un malheur de plus ou de moins ne ferait rien...

Un malheur de plus ou de moins...

Cela le fit penser à une chose si horrible. Jamais il n'aurait fait quelque chose si.. Inhumain. C'était purement mauvais, jamais il ne fait cela... Mais la perspective des choses que lui réservent la noirelfe le faisait faire considérer cette chose. Comme pour montrer son désapprouvement de ce plan, Ténèbres hennit et secoua son museau. Mais Owen n'en fait cure, car il n'avait pas partagé ses pensées à haute voix. Depuis un sacré moment, le palefrenier n'avait cessé de trembler comme une feuille. Il se tourna vers l'esclave, il était prêt. Il lui suffira par la suite de courir vers l'arrière, sans s'arrêter, ne jamais s'arrêter. Owen détourna le regard, vers le côté, pour que ses lèvres ne soient pas visible par aucun des deux.

— D'accord... Ce que je compte faire... Je vais m'enfuir car je... Ne souhaite plus être votre esclave. Je suis un pathétique humain du nord qui pense que vous êtes une... Horrible catin, la cousine mal formée des elfes !

La peur laissait place à une panique. Le pauvre ne savait-il dont pas qu’aucune bonne réponse était trouvée dans l’affolement? Plus il parlait, plus ce dernier semblait s’enfoncer un peu plus dans la toile que Gul’Uss tissait autour de lui. Plus il lui répliquait et plus elle le trouvait intéressant. Elle voulait voir jusqu’où il irait pour sa pathétique vie. Serait-il simplement capable de survivre ses sévices? Lui qui avait du mal à tenir son épée pendant plus que quelques minutes. L’ilythiiri baissa sa tête sur le côté alors que sa main se crispa fixant de ses yeux vides l’humain qui semblait trembler de plus en plus. Elle venait de trouver son jouet, ne restait qu’à déterminer combien de temps ce dernier prendrait avant de se faire briser par la favorite de Kiel. Jor sembla surprit pendant un moment, avant de traduire mot pour mot ce que l’humain venait de dire. Le sourire carnassier sembla s’agrandir derrière le masque, il pouvait dire ce qu’il voulait, mais la prendre pour une sotte était probablement la pire erreur qu’il aurait pu faire. L’écoutant d’une oreille discrète, la voix murmurait des paroles étouffées par le faciès de métal. Bientôt il la sentirait. Tout commencerait par un picotement dans son pied droit, et puis ce sera sa jambe entière qui sera transpercée de douleur, suivi de sa jumelle. Une douleur vive et incontrôlable, qui le forcerait forcément à rester au sol. Qui le conduirait vers cette sensation d’extase…


Cela ne prit que quelques secondes avant que l’humain ne soit complètement tétanisé par la douleur qui avait envahi le bas de son corps. Probablement incapable de bouger, l’esclave comprit rapidement l’ordre silencieux de sa maîtresse avant de se relever d’un pour plaquer durement au sol le jeune homme. Le nordien ne perdit pas de temps, et se dépêcha de tenir laisser place à l’Obok Yatharil alors qu’elle s’agenouillait sur l’humain, le maintenant volontairement sous elle. Kha’linas posa doucement sa griffe métallique sur la joue de l’humain, son sourire carnassier sembla s’agrandir, puis elle la fit descendre tout doucement sur la chair blanchâtre, laissant une petite égratignure rougeâtre sur la joue. La crampe sembla soudainement s’estomper, alors que les prunelles vides étaient plantées dans le regard de sa victime.


«Natha kaoveh d'lil darthirii? usstan talinth dos phuul aluin ulu kreth'el vel'bol dos fridj telanthus…»
Une cousine des elfes? Je crois que tu vas regretter ce que tu viens de dire.


Ses yeux semblèrent s’illuminer d’une lueur démente, tant d’opportunité, tant de façon de le réduire à néant. Elle savait que trop bien que toutes les douleurs avaient tous un goût différent. Quel parfum aurait celui-ci? Résisterait-il longtemps? Combien de temps cela prendrait-il avant qu’elle ne prenne toute la joie de sa misérable existence? Chose était sûre; il n’était pas tombé sur la bonne sombrelfe.


«Dorn venorsh valukes lueth elgg lil' phraktos.  Xun dos talinth jalkhel shlu'ta vrine'winith uns'aa? Usstan zhahus rosin doeb de' natha szithrel ul'nusst.  Natha zhahus rosin wun zakath, nin dos phuul aluin ulu fell ol.  wun p'leik nind doerrus ulu ssinssrigg uns'aa»
Je vais taire les rois et me débarrasserais de tes dieux. Penses-tu pouvoir m’arrêter? Je suis née dans les hurlements, apparut dans l’agonie. Maintenant tu vas tomber, et tu apprendras à aimer cette souffrance.


L’ilythiiri ouvrit doucement ses doigts, caressant la peau froide de l’humain alors que ce dernier avait les poignets maintenus par Jor au-dessus de sa tête. L’esclave traduisait les paroles de sa maîtresse, les yeux fixés au sol. Son regard était vide, on aurait dit que toute la joie, tout amour de la vie l’avait quittée depuis bien longtemps, ne suffisait de voir les innombrables cicatrices que ce dernier arborait un peu partout sur son corps pour comprendre les tourments qu’il subissait. Soudainement la main de l’Obok Yatharil agrippa solidement le cou d’Owen, resserrant les griffes métalliques autour de sa chair.


«Dos ssinssrin ulu inbau doeb de' ghil? ann uns'aa ulu vrine'winith!»
Tu veux partir d’ici? Supplie-moi d’arrêter!


Elle voulait l’entendre pleurer, elle voulait l’entendre supplier pour sa misérable vie. Il n’avait qu’une seule chance, la prendrait-il? Ou tenterait-il de faire le brave une nouvelle fois? Peu importe sa décision, l’Obok Yatharil se fera un plaisir de s’occuper personnellement de cette vermine.

Il ne fallut pas longtemps pour qu'elle lui fasse regretter amèrement son mauvais tour. Il ressentit la douleur en premier sur son pied, puis sur l'autre... Et ce fut l’entièreté de ses deux jambes qui finirent par être sous l'emprise douloureuse de la noirelfe. La drow comptait le faire payer pour avoir jouer ce mauvais tour. Une force dont il ignorait la source se montra au grand jour, il glissa étant forcé de rejoindre le sol, cognant sa tempe contre l'une des roues, qui se retrouva couvert de sang coagulé. Owen heurta son dos contre la terre, il était profondément effrayé par ce qu'elle lui réservait. Au fond, il se doutait qu'il souffrira beaucoup, beaucoup trop. Son corps entier crispé, il se recroquevilla sur le sol impuissant, ses jambes le faisait atrocement mal. Owen avait envie de hurler de toute ses forces et de pleurer, mais il se retenait cruellement de proférer le moindre son, le jouvenceau poussait simplement des geignements impossible à retenir. Il était déjà faible et peureux, il ne pouvait pas se permettre en plus d'être émotif comme une bonne femme !

Owen rampa, usant de ses bras pour se pousser et essayer de fuir vainement. Ses jambes l'avaient abandonné, ne lui restait plus que la ses bras pour se déplacer. Soudain, il sentit un poids lourd l'aplatir contre le sol, l'arrêtant dans sa course. Il geignit. Owen agita affolement les épaules et le haut du corps pour faire trébucher ou brusquer l'esclave qui l'empêchait de ramper, tout en poussant de léger cri de plainte. Puis, il sentit une lame, froide et effrayante, qui le crispa et le fit hoqueter, coupant tout son qu'il comptait proférer par la suite. La griffe métallique de son assaillante. Posé contre sa joue avec une légère pression, Owen respira ébrouement, ses craintes et ses peurs l'envahirent. Ne voulant pas y assister, le freluquet ferma les yeux. Il ne vit pas la griffe s’enfoncer légèrement dans sa chair, contractant ses traits sur son doux visage luisant d'innocence, le faisant convulser. Mais il n'hurla pas au contact de la griffe. Il garda sa douleur pour lui-même. Ses épaules s'agitèrent, cognèrent la terre pour faire passer la douleur.

Ô l'homme à l’œil vert, comparé à celle-là, avait et doux et gentil avec lui. Ténèbres n'était qu'un simple taquin comparé à elle. Ses jambes n'étaient plus sous le charme d'un spasme. Étrange. Owen n'osait pas regarder les yeux de la drow, détournant le regard. Il respirait fortement, la panique et la frousse l'avait entièrement envahi l'esprit et le corps. La pauvre victime d'un concours de circonstance se tourna vers ce nordien esclave, tétanisé par sa maîtresse qui ne devait lui laissait aucun instant de répit Owen ne répondait pas aux paroles blasphématoires proféré par elle, il s'en fichait royalement de ce qu'elle comptait faire aux Divinités et les Rois, ce qui comptait pour lui c'était son propre sort. Mais, comme n'importe quel humain qui se révèle hypocrite face à la mort; il implora l'aide et la pitié de Néera. Il passerait le reste de ses jours dans le temple, se reconvertira en tant que prêtre, abandonnera l'idée de fonder sa propre famille pour une vie simple de religieux. Mais par pitié, qu'elle le sort de cette situation atroce.

Mais Néera, ni aucun autre du Panthéon ne compterait sûrement l'aidé. Il était seul, sous le joug de la vile créature ténébreuse et maléfique. La vile créature l'agrippa au cou, Owen hoqueta et se crispa, ses deux mains empoignèrent le bras de la drow par réflexe en essayant de la repousser, le faisant sentir une sensation de froideur extrême parcourant son corps tel un frisson. Jamais il n'avait touché un drow auparavant, était-ce dangereux ? Ses mains allaient elle se mettre à glacer ? Sûrement pas, car rien ne lui arriva d'autre. Owen souffla une simple parole, courageux et idiot :

— Va... Chier..!

L’Obok Yatharil sentit les petites mains de la vile créature qui tentaient de s’arracher de sa poigne d’acier. Un spectacle qui découvrit son sourire carnassier sous le masque. Décidément la vermine s’était réveillé, elle voulait vivre et tentait tant bien que mal de combattre sa mort prochaine.


Qu’est qu’on fait de celui-là?
On pourrait le brûler comme les autres?
Comment le faire craquer?
Oui j’ai une idée… On…
SILENCE!


Le murmure de la maîtresse perturba l’éternel débat qui rageait dans la tête de l’ilythiiri. Mais le visage hurlant connaissait son élue, elle savait de quoi elle était capable, après tout, elle n’était pas Kiel Elamshinae pour rien.


Elle sait exactement quoi faire.


Sans attendre la poigne se referma sur le coup de l’humain alors que les murmures s’échappèrent du masque de métal. Peu à peu la pression sur son cou sembla s’accentuer. Peu à peu sa trachée se referma, il devenait de plus en plus difficile de respirer, et son visage changeait doucement de teinte. Un spectacle en soit pour les prunelles vides qui semblaient s’illuminer alors que les yeux de l’humain se refermèrent, avant de tomber que ce dernier ne cesse de bouger.


Jor lâcha doucement les poignets de l’humain l’air inquiet. Sa respiration s’accélérait alors qu’il tentait de déterminer ce qui s’était passé pour que ce dernier arrête de bouger aussi rapidement.


« Il… Il est mort? »
« Non idiot. »


L’Obok Yatharil se releva de sa victime, alors que les prunelles vides observaient l’humain inconscient. « Ramène-le au camp. Je n’ai pas terminé avec lui. Il a une certaine énergie… Je veux le briser. » Jor avala difficilement sa salive avant de se retourner vers le cheval et la charrette remplie de marchandise. « Et je fais quoi de ça? » L’ilythiiri haussa des épaules, avant de tourner les talons se dirigeant vers leur camp temporaire ; « Fais les disparaître. »




>>> Entre Néera et Kiel