La nuit tombe autour du Caran, lorsque les zurthans émergent de leur cachette. Leur plan est simple : s’infiltrer sur le navire à la faveur de la nuit, se mouvoir dans les ombres pour éviter les regards vigilants des marins afin d’enquêter sur l’endroit où se cacherait Ceralyn. Les informations qu’ont obtenues Noul et ses hommes sont formelles : la jeune Soryngar se cache bel et bien derrière les planches branlantes du Caran. Les zurthans s’en ouvrirent à Yvar, qui avec leur autorisation, prévint le Rat de leur découverte. Ce dernier n’envoya pas d’hommes leur prêter main forte, mais boucla le Port à grand renfort de menaces et de pot-de-vin. Néanmoins, Noul ne put s’empêcher de penser que cette dernière mesure lui était davantage destinée qu’à Ceralyn…
Après une après-midi à observer les signes d’activité du navire, les zurthans se rendent à l’évidence que celui-ci est prêt à prendre le large au moindre signe de danger extérieur. Leur infiltration doit donc être d’une grande précision afin de ne pas alerter son capitaine. Qui plus est, la fuite de Ceralyn dans les rues du Port est aussi à craindre. Il est même fort probable qu’elle se soit déguisée ou qu’elle est maquillée son apparence afin de se rendre méconnaissable aux yeux de ceux qui la recherchent.
Les préparatifs achevés, les mercenaires zurthans progressent lentement vers le navire, soigneusement camouflé dans les ombres. La brume qui flotte en provenance de la mer n’est pas assez épaisse pour dissimuler complètement leur approche, mais l’un des mages zurthans en invoque davantage par magie. La zone est ainsi plongée dans un brouillard épais, rien d’étrange pour les marins du Caran qui sont habitués à de telles manifestations.
Profitant du couvert des ombres et du brouillard, Noul et quelques-uns de ses hommes s’infiltrent précautionneusement sur le navire. Les autres zurthans se cachent dans l’obscurité, tentant de surveiller les différentes voies d’extraction si d’aventure Ceralyn tentait de fuir le Caran.
À bord du navire, Noul et ses hommes observent que les marins, bien que vigilants, semblent las par cette longue journée de labeur. Le capitaine demeure néanmoins à la barre, et les voiles sont prêtes à être dressées. Lors de leur enquête, les zurthans avaient observé que plusieurs femmes résidaient sur le navire, mais aucune ne correspondant avec le signalement de Ceralyn. L’idée que la jeune femme se cachait parmi elles n’était pas à exclure. Celles-ci résidaient sous le pont, dans les quartiers de l’équipage. Néanmoins, quelque chose d’autre avait attiré l’attention de Noul. La seconde cabine privée du Caran, avec celle du capitaine, avait été octroyée à un jeune homme à l’aspect guerrier, le visage noirci et les cheveux attachés serrés pour former plusieurs tresses qui battaient dans son dos. Plusieurs pistes s’offraient donc aux hommes de Noul : fouiller cette cabine privée, essayer de prendre le contrôle du navire ou enquêter dans les quartiers de l’équipage…
Dernière édition par Nehril le Mer 25 Aoû 2021 - 12:47, édité 4 fois
Zohael
Humain
Nombre de messages : 48 Âge : 35 Date d'inscription : 17/08/2020
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 28 ans Taille : 1m79 Niveau Magique : Arcaniste.
Sujet: Re: L’Œil frémit mais jamais ne se ferme | Rien n’échappe aux yeux du désert Sam 14 Aoû 2021 - 19:35
An 18 du Cycle XI, Bàrkios, Arkuisa de la quatrième ennéadePort de Thaar
Les investigations ont porté leurs fruits bien plus vite qu'espéré. Grâce aux informations données par les hommes du Rat, recoupées avec celles obtenues des divers autres sources, les mercenaires zurthans ont fini par trouver la piste de la dénommée Ceralyn. Selon leurs informations, la rouquine se trouverait à bord d'un navire mouillant au port : le Caran. Il fallut ensuite aux turbans ocres quelques heures d'observations afin de confirmer ces informations, puis un plan a été préparé par les hommes du désert. Si les actions du Rat restent suspectes, le chef zurthan ne s'en laisse pas surprendre. Ayant confirmé la nature on ne peut plus douteuse des intention de cette mystérieuse personne au nom de rongeur depuis la traduction du mot transmis à son acolyte, l'home du désert n'a pas manqué de se préparer diverses voies de retrait lorsque les rongeurs montreront leur vrai visage.
- Le moment approche, es-tu prêt ? - Celui-ci est assez capricieux, j'ignore s'il répondra à mon appel. Toutefois, oui, tout est prêt. La nuit est tombé, et le port n'est plus occupé que par des marins retournant à leur bateau, des ivrognes dormant à même le sol, et de pauvres ères égarés. Les turbans-ocres, vêtus de sombres tenues recouvrant tout leur corps, se cachent dans les ombres et les recoins invisibles du port. Leur chef converse une dernière fois avec l'un de ses compagnons, une dernière fois avant que les siens ne se mettent en action. - Alors que les Djîins nous soient favorables. Vous deux, restez et protégez le. Deux mercenaires équipés de larges boucliers zurthans acquiescent d'un même mouvement de tête à cet ordre, se postant de part et d'autre du sorcier. - Que la fortune vous accompagne. Après ces mots le mystique zurthan allume un encensoir tout en débutant à psalmodier d'étranges mots, tandis que le chef zurthan s'éloigne pour rejoindre d'autres de ses compagnons.
En cette nuit douce de Bàrkios, la brume se lève sur le port de Thaar. Venant du large des côtes, elle s'intensifie peu à peu, offrant aux navires un aspect de plus en plus lugubre. Bientôt la brume se densifie au point qu'il devient difficile de voir à plus de quelques mètres de soit, n'enlevant rien au calme et au silence environnant. Caché dans la brume, une barque s'approche lentement de la coque du Caran. Une agitation soudaine distrait sommairement les marins du navire, offrant l'espace d'un instant aux occupants de la barque une occasion de l'aborder avec discrétion. L'agitation des quais s'efface rapidement, permettant aux marins du Caran de reprendre leurs postes, mais déjà un intrus s'est glissé sur le navire. Le furtif est rapidement suivi par les siens, et ce sont plusieurs discrets personnages qui grimpent sur le navire à l'aide d'une corde. Dans un silence les plus total, les zurthans sécurisent un échappatoire tandis que deux d'entre eux visitent les lieux. Faisant preuve d'une incroyable discrétion se cachant et esquivant tout contact avec l'équipage, le chef zurthan se glisse à l'intérieur du navire, jusqu'à atteindre la cabine recherchée. Selon les informations recueillies cette cabine privée aurait été attribuée à un jeune guerrier, mais un doute demeurait quant à l'identité de cette personne. Quant à l'autre zurthan infiltré, il se dirige vers les quartiers de l'équipage, où il se disait que plusieurs femmes s'y cachaient. Si la jeune Ceralyn se trouve sur ce navire, l'un d'eux la trouvera forcément. Dans le pire des cas, les guerriers embusqués non loin du Caran devront s'emparer du navire, bien que leur chef ne préfère régler les choses avec discrétion pour ainsi éviter d'en arriver à une telle extrémité.
Nehril
Sang-mêlé
Nombre de messages : 522 Âge : 130 Date d'inscription : 08/08/2018
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 248 ans Taille : 1m98 Niveau Magique : Arcaniste.
Sujet: Re: L’Œil frémit mais jamais ne se ferme | Rien n’échappe aux yeux du désert Sam 14 Aoû 2021 - 20:29
Le zurthan s’approche à pas feutré de la cabine privée qui jouxte le pont et tente d’y apercevoir quelqu’un à travers les fenêtres closes. Néanmoins, un épais tissu rouge les macule, entravant grandement la vision de l'infiltré et lui permettant de ne distinguer qu’une ombre flânant d’une extrémité à l’autre de la pièce. Tâchant de trouver une faille où se glisser, le zurthan se rend rapidement compte qu’il n’en existe pas. Tel l’oiseau enfermé dans sa cage, seule la porte située sur le pont principal permettrait au renard de s’y infiltrer.
Le second zurthan quant à lui, éprouve de vives difficultés à s’infiltrer dans les quartiers de l’équipage. La cause étant due aux nombreux passages des marins qui malgré l’heure tardive, préfèrent échanger des blagues vaseuses dans les couloirs étriqués du Caran plutôt que de regagner leur couche. Guettant un moment de distraction de la part des matelots, le zurthan parvint finalement à se frayer un chemin parmi les ombres, lui permettant de passer outre leur vigilance afin d’accéder aux quartiers de l’équipage. Après quelques instants à fouiller et à masquer sa présence grâce à la pénombre ambiante, le zurthan infiltré parvint à distinguer une femme à la chevelure rousse abondante non loin des pièces d’artillerie. Quelques hommes discutent avec elle avec passion, posant leur main sur ses épaules avec une insistance qui ne trompe guère l’homme du désert.
Zohael:
Tu observes le pont et tu ne vois que plusieurs marins qui effectuent des rondes de manière régulières devant la porte de la cabine privée du Caran. À l’intérieur tu ne distingues nulle voix, nul visage, simplement une présence. Sa gestuelle laisse supposer un guerrier ou du moins quelqu’un qui serait fort habile à manier une lame. Un sentiment étrange t’étreint à cette pensée, mais tu n’en saisis guère la cause. Mais une question te taraude : Ceralyn se cacherait-elle derrière ces rideaux pourpres ?
De l’autre côté, le quartier de l’équipage est vaste et l’humidité y est forte. Tu inhales plusieurs fois le vent salé et tes vêtements se froissent sous la fine brise provenant des fenêtres ouvertes. La houle est calme, mais elle t’apaise. Tu observes la configuration des lieux : note que les lits sont sommaires et sont parqués dans un coin de la large pièce. À quelques mètres sont rangées les pièces d’artillerie et tu t'étonnes de leur proximité avec les couchettes. À leur côté, une grande rousse, le regard bleuté minaude en compagnie des deux hommes d’âges murs qui ont apparemment une forte envie de partager sa couche. Ton regard glisse autour de toi, mais tu ne vois personne d’autre. Où est passé le reste de l’équipage ? Des ronflements sonores te répondent et ne tardent pas à s’élever en direction des lits.
Zohael
Humain
Nombre de messages : 48 Âge : 35 Date d'inscription : 17/08/2020
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 28 ans Taille : 1m79 Niveau Magique : Arcaniste.
Sujet: Re: L’Œil frémit mais jamais ne se ferme | Rien n’échappe aux yeux du désert Dim 12 Sep 2021 - 20:04
Le plancher grince légèrement, la porte émet à peine un bruit alors qu'elle se referme derrière le zurthan au turban couleur de sable. - Ne fais pas un bruit, garde ton calme. La voix qui murmure est grave, et le ton utilisé est posé. Aucune menace ne s'y cache, et pourtant quelque chose laisse indiquer que le détenteur de ce message est prêt à rapidement réagir si le conseil n'est pas suivi. - Ceralyn Soryngar, ce nom t'est-il familier ? Le risque est certain, alors que l'intrus annonce très clairement la raison de son infiltration. Qu'il s'agisse d'inconscience, d'assurance ou d'une raison plus obscure, rien dans son comportement ne permet de le déceler.
Face au mercenaire venu du désert, une personne vêtue tel un simple marin sort légèrement de l'ombre. Rien que ce fait confirme les suspicions du fils du désert, car un simple marin, si cette personne en était un, ne bénéficierait normalement pas d'une cabine semblable à celle du capitaine. Des cheveux coupés et ramenés en arrière lui confèrent un air sauvage, deux yeux d'un vert rare en ces contrées observent l'intrus. La chevelure du marin est d'un noir profond, et son visage est assombrit d'un lourd maquillage autour de ses yeux et de ses lèvres. Un choix étrange aux yeux du zurthan, et pourtant pas si surprenant lorsque l'on voit les individus parfois très excentriques que la mer peut emmener à Thaar et dans les cités côtières de l'Ithri'Vaan. - Qui êtes-vous ? La voix du marin a un timbre féminin, ne laissant que peu de doute sur le genre réel de sa propriétaire. Sa nature de femme en est ainsi révélée, confirmant un peu plus le zurthan quant à ce dont il semble déjà se douter. Avec calme et retenu, l'homme du désert frappe cinq fois sur sa poitrine, révélant au son du cuir contre le cuir l'armure cachée sous ses amples vêtements. L'homme attend une seconde puis frappe à nouveau cinq fois sa poitrine avant de prendre la parole, toujours avec un ton calme. - Ici, pas de feu éteint, et la nuit est tombée. Le jour a changé, pourtant nous sommes là. Lentement, certainement pour se montrer le moins menaçant possible, le zurthan sort de sous sa cape un parchemin. Si le marin qui n'est pas un "il" est bien la personne que pense être le zurthan, le parchemin pourrait être reconnu comme la lettre de la dite Cerlayn, sans même que le mercenaire n'ait à l'ouvrir. - Reconnais-tu ceci ? Les yeux de la jeune femme s’écarquillent et sa bouche s’entrouvre légèrement en réponse aux mots du zurthan. - Les Turbans-Ocres. Souffle le faux marin. Avec un soupçon de surprise dans son ton, la jeune femme abaisse légèrement son épée. - Co... Comment ? Cela veut dire que vous avez reçu ma lettre ! Et Lyad ? Qu’est-il arrivé au messager qui devait vous apporter cette lettre ? Et où est Noul'Hessi ? Ces derniers mots, accompagnés d'un sourire plein d'espoirs, provoquent un léger affaissement de la tête du zurthan. - L'homme qui portait cette lettre n'est plus. Répond le mercenaire, d'un ton slennel. - Il a donné sa vie pour contacter Hessi, le moins que nous puissions faire était d'écouter la personne pour qui il l'a fait. Mais la mort est encore tapie dans les ombres. Pour celui qui a donné sa vie, Noul'Hessi écoutera Ceralyn Soryngar. Si ce qu'elle a à dire en vaut la peine, Hessi l’emmènera à lui. Nous sommes Hessi, nous venons chercher la femme de la lettre. Alors parle, je t'écoute. Une triste expression traverse le regard de la jeune femme, trahissant une douleur silencieuse tandis qu'un sillon argenté s'écoule le long de ses joues. Le mercenaire redresse la tête, son regard restant imperturbable. - Non… La travestie baisse la tête, laissant ses cheveux noircis recouvrir le haut de son front. - Pourquoi disparaissent-ils tous ? Nehril, Lyad, Dante… Ces mots, murmurés, ne semblent pas s'adresser au mercenaire. Aussi celui-ci reste silencieux, l'esprit toujours alerte. La jeune femme secoue soudain la tête, comme pour chasser les tristes pensées qui viennent de lui parvenir, et reporte son regard sur le zurthan. Une fragilité qui ne s'était pas montrer jusque là semble exhaler de sa personne, comme si une partie de son monde venait de disparaître. Si cette sensation éveillait le moindre sentiment pour le mercenaire, que ce soit de la compassion ou de la pitié, il n'en montre rien.
- Nous nous sommes déjà vus il y a bien longtemps, lors de l’inauguration de la boutique de Modeste. Reprend la jeune femme, avec un triste sourire. Modeste, un nom que le mercenaire n'a pas oublié. Non seulement parce qu'il n'oublie jamais un client, mais aussi car cette artisane et son échoppe ont piqué son intérêt. Suffisamment, en tout cas, pour qu'il demande à l'un de ses compagnons de garder un oeil sur la boutique. Les clients, cependant, ont été trop nombreux pour que l'on retienne tous leurs visages. Peu s'étaient assez démarqués pour que le chef des Turbans-Ocres ne se souvienne d'eux. - Nehril ne m’avait dit que du bien sur votre groupe et je… Je souhaitais vous recruter pour me protéger d’une organisation qui me pourchasse. Elle se fait appeler l’Œil Décharné. Je voulais juste que ceux que j’aime ne soient plus blessés par ma faute. Je… Je voulais les protéger. Je ne voulais… Je ne voulais pas qu’ils meurent tous… Les éléments s'assemblent, enfin. Et pourtant le mystère persiste, du moins en partie. L'implication infortunée du groupe de mercenaires zurthan vient de trouver sa raison, qui s'avère si simple qu'elle en serait presque ridicule : leur réputation grandissante a fait parler d'eux. Quant aux indices rassemblés, le zurthan ne peut que supposer que ce "Nehril" dont la jeune femme parle comme d'un proche n'est autre que protecteur aux cheveux argentés, dont ceux-qui-voient souhaitent la mort. Cela expliquerait pourquoi il s'en prend à eux, et pourquoi ils ont tenté d'engager Hessi pour l'arrêter. A moins qu'il ne s'agisse de deux affaires totalement sans rapport. Une jeune femme aux cheveux rouges et un homme aux cheveux d'argent, oui... A bien y penser, le mercenaire bien aperçu un tel couple atypique à l'inauguration du Sans Modestie. - Mais je pense qu’il ne sert plus à rien de fuir à présent. Se reprend la jeune femme, son regard pétillant de colère, après avoir passé une main sur son visage. - Je ne souhaite plus être protégé. Je veux vous recruter afin que nous allions tuer le chef de cet Œil.
Le mercenaire laisse échapper un souffle audible, semblable à un soupire de réflexion. Le chef des Hommes de l'Ombre a engagé son groupe de mercenaire afin qu'il lui ramènent l'enfant rousse, et voilà qu'elle veut elle-même les engager pour le tuer lui. C'est aussi ce que veulent les hommes du Rat, une autre organisation de l'ombre. Des deux organisations, aucune n'est moins suspecte que l'autre, et il est impossible pour le zurthan, au moment actuel, de savoir si elles vont respecter leur accord. Pas plus que la dénommée Ceralyn, d'ailleurs. Et pourtant, rien de tout cela ne concerne directement les mercenaires de Hessi, qui ont leur propre objectif à atteindre. - Hessi a rencontré ceux qui voient. Ils ont tué le garçon parce qu'ils veulent la fille. Noul'Hessi a un plan, mais la fille doit être prête. Si Ceralyn Soryngar veut rencontrer ceux-qui-voient, elle doit venir pour rencontrer Noul'Hessi. Il lui dira le prix et elle choisira : accepter son offre, ou revenir sur le navire. La jeune fille se fait de nouveau plus méfiante, ce qui n'est pas une surprise après les révélations qu'elle vient d'entendre. - Je... La voix de la jeunne fille devient plus ferme. - Écoutez, je ne sais pas comment vous m’avez retrouvé, mais j’ai moi aussi été mercenaire pendant plusieurs mois et si j’ai compris quelque chose, c’est qu’on ne dépense pas des moyens financiers et du temps juste pour retrouver un potentiel employeur, surtout quand on est un groupe de mercenaire aussi célèbre que vous. Le faux marin se penche en avant en se frottant pensivement le bras, semblant plus inquiète que véritablement méfiante. A juste titre, d'ailleurs, et cela révèle qu'elle n'est pas aussi naïve qu'il n'y parraît. - Comprenez-moi, je ne peux pas prendre le risque de tomber dans un piège si je vous suis. Ne pouvez-vous pas faire venir Noul'Hessi ici ? Je suis à l’abri des hommes de l'Œil ici ainsi que de ceux du Rat. Le zurthan penche légèrement la tête sur le coté, ses yeux examinant Ceralyn avec attention. La confiance est une denrée rare chez les mercenaires, encore plus dans ce pays de richesses matérielles qu'est l'Ithri'Vaan. - Si Hessi a trouvé Ceralyn Soryngar, alors eux aussi la trouveront. Et si Hessi le voulait... Le zurthan lâche un soupire, suivi d'un léger rire amusé. - Noul'Hessi est ici, et Ceralyn Soryngar est en train de lui parler. Tu dis que nous sommes connus, et pourtant tu sembles sous-estimer l'honneur des enfants du désert que nous sommes. Nous avons rencontré ceux-qui-voient, et nous avons rencontré ceux du Rat. Qu'ils se déchirent entre eux, cela ne concerne pas Hessi. Ce messager a donné sa vie pour nous contacter, et par respect pour son acte je t'ai rencontré. Si tu ne crois pas en notre honneur, crois en ceci : nous pouvons t'aider à rencontrer celui parmi ceux qui voient. Que nous parvenions à un accord ou non, cela dépend de toi.
Noul'HessiNon sans avoir pris un temps de réflexion, la jeune fille hoche finalement de la tête. Sans doute prend-t-elle consciente de son impuissance. Sans doute comprend-t-elle que, seule, elle ne serait pas de taille face à ceux-qui-voient. Face à cette réalité, la jeune Ceralyn ne pourait alors que se résigner à abandonner, ou à se trouver des alliers. Et pas n'importe quels alliers. Des mercenaires tels que les Turbans-Ocres, dont elle a déjà reçu l'éloge, seraient alors des alliers de choix. C'est en tout cas le raisonnement qu'espère le mercenaire zurthan. Après tout, ses dires sont avéré : Si eux sont parvenu à la trouver, alors la cachette de la rouquine est compromise. La preuve en est que les gens du Rat attendent non loin, sur les quais, bien que la jeune femme ne le sache pas encore. - Je comprends. Admet-elle en cherchant le regard du mercenaire, qu'elle trouve sans difficulté puisqu'il ne cesse de l'observer. - Alors que dois-je faire pour que vous acceptiez de mettre vos épées à mon service ? De combien voulez-vous ? La réponse ne se fait pas attendre, d'une voix claire et calme. - D'abord, dis moi tout ce que tu sais à propos de ceux-qui-voient et du Rat. Qui ils sont, pourquoi se font-ils la guerre, et ce que tu as à voir avec cela. La seconde chose : tu connais cette cité, et tu dis avoir été mercenaire. Mon instinct me dis que tu as des contacts et des accès auxquels Hessi ne peut prétendre, ou au moins que tu peux connaître des gens qui en ont. Un jour nous te demanderont un service, et cela soldera ta dette envers nous. Voilà ce que Hessi te demande pour te prêter sa force. Et si tu désires toujours avoir notre protection, le prix est de cinq souverains par jour. Compte tenu des organisations qui te recherchent, cela est un prix raisonnable. Raisonnable étant un bien faible mot, tant le prix seul serait dérisoire considérant le risque encouru pour la tache demandée. La raison s'en trouve peut-être dans la nature du service que demanderont les zurthans, plus tard. Un service qui pourrait s'avérer plus ardu que la mission elle-même, mais qui pour l'heure reste inconnu de la jeune Ceralyn. Cette dernière, craignant sans doute de ne pouvoir honorer un paiement trop élevé, se détend en entendant les conditions du mercenaire. Peut-être parce qu'elle a déjà une idée de comme honorer ses engagements, comme le pense le zurthan, peut-être ne songe-t-elle pas à le faire, ou peut-être n'a-t-elle simplement pas conscience de ces engagements pourraient être. Quoi qu'il en soit, la "fillette" sort de sa bourse cinq souverains, signifiant par ce paiement son acceptation des conditions du mercenaire. - Nous avons donc un accord ! Confirme-t-elle en forçant quelque peu son sourire, peut-être plus pour mettre de côté ses émotions présentes que par amertume envers l'accord. - Concernant ce que je sais sur cette organisation… Pas grand-chose en vérité. Je sais seulement que celle-ci a vu le jour il y a une dizaine d’années et qu’elle s’est confrontée à mon protecteur, un mercenaire semi-elfe du nom de Nehril. Je ne sais pas si vous le connaissez. Voilà qui confirme les doutes du mercenaires quand à la corrélation entre l'identité de ce Nehril et celle du tueur aux cheveux argentés. S'asseyant nonchalamment sur le lit, la rouquine aux cheveux noircis continue, balançant ses pieds d'avant en arrière comme le ferait une petite fille. - Il n’a pas voulu me révéler le conflit qui les opposait, grommelle-t-elle d'un air visiblement contrarié, mais ce que je sais, c’est que l’Œil a été démantelé par lui. Pourtant plusieurs années après, alors que je revenais d’une mission dans la cité, j’ai été poursuivie par des hommes arborant le tatouage de l’Œil qui voulait me conduire auprès de leur chef. Ils n’ont pas hésité à me blesser, ajoute-t-elle en levant sa chemise pour révélé de nombreuses ecchymoses et pansements, et à me traîner par les cheveux, mais j'ai réussi à m'échapper. Lorsque je m’en suis ouvert à Nehril, il a blêmi et à disparu aussitôt en me disant qu’il s’en occuperait. Je n’ai plus eu de nouvelles de lui depuis. Et c'est sans doute depuis cela que "l'homme aux cheveux argentés" met des bâtons dans le roues de ceux-qui-voient, éliminant ceux d'entre eux qu'il parvient à trouver et alimentant leur colère à son égard. Le visage de la jeune fille s'assombrit autant que son ton se fait moins enjoué tandis qu'elle poursuit son récit. - J’en ai appelé à un ami de Nehril et on a réussi jusqu’ici à nous tenir hors de portée des griffes de l’Œil. La jeune fille balaye la cabine d’un geste ample de la main, comme pour présenter quelque chose. - C’est lui qui a eu l’idée de se réfugier ici. J’ai été capturée par le Rat durant un temps et nous avons appris là-bas où se trouvait le campement de l’Œil. Toutefois, Dante, l’ami de Nehril, n’a pas voulu que je l’accompagne et est allé seul en repérage. Ceralyn se mord les lèvres, une certaine angoisse se lisant dans ses expressions. - Je n’ai plus de nouvelles de lui non plus. Ainsi deux de ses protecteurs ont disparu. Il est probable qu'ils soient déjà morts, eux aussi, à moins qu'autre chose ne leur soit arrivé. Quelque chose de peut-être pire. La fausse brune se gratte le cuire chevelu, peut-être par nervosité ou parce que la teinture la démange, ou les deux à la fois. - De ce que j’ai compris, marmonne-t-elle, l’Œil et le Rat sont en conflit depuis des années. L’Œil plonge son nez dans les affaires du Rat et lui vole sous le nez ses hommes et sa marchandise ! Ce qui fait que le Rat est en position de faiblesse. Quand il a appris qu’il recherchait Ceralyn Soryngar, déclare-t-elle en pointant ses deux pouces vers son propre visage avec une grimace sardonique, il a voulu m’utiliser comme monnaie d’échange afin de reprendre l'ascendant. Mais quant à savoir ce qu’il me veut, je n’en ai aucune idée. Mais vu les cadavres qu’il sème autour de moi, je ne pense pas que ce soit pour partager une tisane ! Voic donc l'histoire de la jeune Ceralyn, celle qui l'a menée jusque dans cette cabine, dans cet accoutrement qui la démange. - Alors c'est ce qu'il en est ? Demande le zurthan, d'un ton déçu, sans pour autant attendre de réponse, avant d'exposer à son interlocutrice le plan qu'il a en tête. Du moins, la partie qui concerne la jeune Ceralyn. - Celui parmi ceux-qui-voient veut te retrouver, et le Rat veut le trouver lui. Nous leur donneront ce qu'ils veulent. Leur conflit les affaiblira, et cela te donnera une occasion d'obtenir ce que tu souhaite. Ainsi chacun obtiendra ce qu'il recherche. Si les choses sont tel que je pense, nous trouverons également l'homme aux cheveux argenté. Peut-être même que celui qui t'a fourni cet abri y sera aussi. "S'ils sont encore en vie", s'abstient de préciser le mercenaire. Son regard, emprunt d'une imperceptible tristesse, fixe alors la jeune fille. - Nous pouvons provoquer cela, mais tu vas devoir nous faire confiance. Es-tu prête à prendre le risque, Ceralyn Soryngar ? La mine résolue, la jeune femme répond aussitôt tout en se levant. - Oui. Je le ferais. Avec votre aide. Mais laissez-moi me démaquiller d'abord ! Une requête quelque peu superflue, du point de vue du zurthan, qu'il concède néamoins malgré le risque encouru de rester plus longtemps sur le navire. Après quoi, la dénommée Ceralyn Soryngar étant prête, les zurthans quittent le navire en sa compagnie aussi discrètement qu'ils s'y sont infiltré. La brume quant à elle ne se dissipera que bien plus tard, repoussée par le vent léger de la nuit.
Port de Thaar
Après avoir quitté le Caran, et avant de rejoindre le Port, le groupe des Turban-Ocres s'est séparé en plusieurs groupes plus discrets. Couverte des mêmes vêtements que les mercenaires depuis sa sortie de la cabine, Ceralyn est emmenée avec quelques uns des mercenaires pour se cacher, évitant ainsi un possible piège. Pendant ce temps, le chef des mercenaires ainsi que deux de ses compagnons et une femme aux cheveux roux grossièrement dissimulés se dirigent vers la sortie du port, retrouvant au passage des hommes du Rat. Les mercenaires zurthans les informe avoir retrouvé la fille recherchée, qu'elle se trouve désormais sous leur garde et qu'ils contacteront leurs partenaires lorsque la suite du plan serait confirmée. Ceci fait les Turbans-Ocres s'apprètent à quitter le port quand, tels la vermine dont leur chef s'est affublé du nom, les malandrins thaaris se multiplient pour les arrêter. Ces derniers revendiquent de prendre la relève à la fois pour la garde de la jeune Ceralyn et pour contacter l'organisation désignée sous le nom de l'Oeil. Leurs ordres paraissent alors clairs pour les zurthans, qui ne se laissent pourtant pas perturber par ce retournement de situation pas aussi imprévisible qu'il ne devrait l'être. - Ce ne sont pas les termes de notre accord. Rappelle alors le chef des Turbans-Ocres, maintenant une attitude calme malgré la situation. Le zurthan figure alors que l'accord était son groupe lui-même aurait la garde de la rousse et qu'ils contacteraient eux-mêmes ceux-qui-voient, affirmant que la présence de leurs concurrents nuirait à la bonne marche de leur plan commun. Si les hommes du Rat rétorquent bel et bien que détenir la fille n'est pas un prérequis pour contacter l'Oeil, le zurtan insiste alors sur les termes de l'accord passé avec le Rat : à savoir que Hessi disposerait de la fillet et qu'Yvar ainsi que quelques un des sous-fifres du Rat pourraient les accompagner au camp Zurthan. A cela les hommes du Rat ne purent qu'accepter, sans doute conscients qu'un affrontement ne leur serait pas favorable et préparant certainement quelque chose de leur côté.
Dernière édition par Zohael le Lun 13 Sep 2021 - 11:38, édité 3 fois
Nehril
Sang-mêlé
Nombre de messages : 522 Âge : 130 Date d'inscription : 08/08/2018
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 248 ans Taille : 1m98 Niveau Magique : Arcaniste.
Sujet: Re: L’Œil frémit mais jamais ne se ferme | Rien n’échappe aux yeux du désert Dim 12 Sep 2021 - 20:15
De retour au campement des Turbans-Ocres, trois hommes de l’Œil attendent les zurthans dans l’ombre, leur visage encapuchonné orienté vers le bas et les mains dissimulées dans leur ample manche. Par leur présence en ces lieux, l’Œil cherche à démontrer que personne n’est à l’abri de son Regard et se gausse des efforts des zurthans à demeurer dans l'ombre. L’un des hommes, que Noul reconnaît immédiatement comme étant l’un de ceux qu’il avait rencontrés à la taverne quelques jours plus tôt, s’approche d’eux avec un sourire suffisant.
— Remettez-nous Ceralyn Soryngar, zurthan, crache-t-il sans masquer son mépris envers les hommes du désert.
À ses côtés, ses acolytes demeurent aussi immobiles que des statues de grès. Cela ne décontenance pas Noul qui réplique d’une voix grave :
— Nous avons trouvé Ceralyn Soryngar, il est temps de respecter votre part de notre accord. Il y a deux mois, un marchand doeb a vendu des esclaves zurthans en provenance d’Esion. Nous voulons savoir qui est ce marchand, à qui il les a vendus, et où se trouve chacun d’entre eux actuellement. À un jour de marche à l’Est de la porte Sud de Thaar, il y a une ancienne carrière de pierres abandonnée. Dans trois jours, vous nous y donnerez toutes les informations concernant ces transactions, et vous y trouverez la fillette.
L’homme de l’Œil écarte ses lèvres davantage. Les mains de ses compagnons se resserrent autour de leurs longues épées. Des sourires déments éclairent leur visage.
— Votre arrogance vous pousse à croire que vous tirez les ficelles de ce jeu, homme aveugle, réplique-t-il d’une voix écorchée. Mais vous ne voyez pas. Vous allez rencontrer Celui-qui-voit en son sanctuaire, c’est un honneur que peu d’hommes qui ne voient pas ont reçu. L’œil ne bouge pas, ce sont ses cils qui vont jusqu’à lui.
Les deux autres ponctuent à l’unisson.
— Voient.
— Si c’est la crainte qui vous habite, suivez-nous avec les vôtres. Deux aveugles ne voient pas davantage qu’un seul. Ainsi, vous aurez les réponses que vous cherchez.
Aveuglés par les dogmes qui les habitent, les hommes de l’Œil ne font guère de brillants messagers et semblent encore plus dépourvus d’esprit d’initiative. Il semble donc que la seule option qu’ils puissent proposer est celle qui amènerait les zurthans dans la tanière de leur chef et que tout autre passerait inévitablement par le chant des lames et le crissement de l’acier.
Le zurthan secoue légèrement la tête de droite à gauche.
— La nuit est claire, le désert s’endort. Revenez lorsque celui-qui-voit aura recueilli les informations, alors nous vous suivrons jusqu’à lui.
Derrière lui, les turbans ocres portent également la main vers leurs armes. Leur interlocuteur découvre ses dents et penche légèrement sa tête sur le côté. Ses pupilles, dilatés sous l’effet d’une drogue quelconque, papillonnent lentement derrière Noul et les zurthans, comme s’il cherchait à repérer Ceralyn parmi eux.
— Nous reviendrons dans l’après-midi, lâche le fanatique. Si votre réponse demeure la même…
Le sourire s’élargit une dernière fois avant qu’il ne fasse claquer sa cape pour faire demi-tour. Ses deux hommes observent les Turbans-Ocre avec un certain dédain avant de lui emboîter le pas.
Aussitôt leur départ, les zurthans se mettent en branle. La nuit est bien courte pour tisser la toile qui emprisonnera le chef de l’Œil, mais les hommes du désert sont méthodiques et organisés. Noul ordonne immédiatement d’avertir les hommes du Rat que la rencontre aura lieu dès le lendemain et lui accorde la possibilité de glisser quelques-uns de ses fripouilles parmi ses propres troupes. Il lui demande également de se tenir prêt aux alentours du campement de l’Œil au cas où un affrontement éclaterait et qu’ils auraient besoin d’un soutien extérieur. Mémorisant ces ordres tout en fronçant ses faux sourcils, Yvar hoche la tête avant de s’éclipser pour aller avertir son maître. Profitant de son absence, Noul s’assure que les Joyeux-Danseurs dont il a la garde soient suffisamment protégés afin d’éviter les éventuelles frictions qui pourraient naître eu égard à la future présence des hommes du Rat dans le campement.
Quelques heures plus tard, plusieurs coupe-jarrets du Rat émergent de l’horizon, le visage humide, mais un sourire féroce aux lèvres. Conformément aux instructions, ils se mêlent parmi les mercenaires zurthans et tentent même de faire connaissance avec eux. Néanmoins, Yvar rapporte à Noul que le Rat a décidé de décliner son offre de prendre part au combat et lui transmet le commandement de ses troupes.
Elenwënas,
Lorsque l’après-midi vint, plusieurs silhouettes sombres émergent de l’horizon, soulevant de lourdes mottes de terre sous les sabots puissants de leur monture. Une dizaine d’hommes de l’Œil, le visage encapuchonné et le corps drapés dans une large cape noire, observe un moment l’attroupement des hommes du désert en silence avant que l’un d’entre eux ne descende de son cheval. Il rejette sa capuche en arrière, révélant un visage brûlé et un tatouage irisé en forme d’œil sur son cou. Avide, son regard se pose sur toutes les femmes rousses qui font partie de la suite. Un sourire victorieux étire ses lèvres boursouflées alors qu’il lève une main pour leur fait signe de le suivre. Derrière lui, aucun homme n’émet le moindre son, si ce n’est le renâclement plaintif de leur destrier.
La route jusqu’au manoir Soryngar est longue. Plusieurs heures les séparent de leur destination et Ceralyn ne peut s’empêcher de trépigner d’impatience. Allait-elle finalement rencontrer le chef de l’Œil ? Les Turbans-Ocres seraient-ils à même de mettre à bas cette organisation tentaculaire ? En constatant l’assurance du mercenaire et ayant connaissance de son plan, elle sait que cela demeure sa meilleure chance. Les hommes du désert étaient efficaces et redoutables une lame à la main. Elle avait même songé à demander à Noul de lui enseigner quelques passes d’armes avant l'arrivé des hommes de l’Œil ! Mais cela suffirait-il ? Les doutes se mirent à la tarauder et elle préféra les mettre rapidement de côté pour se concentrer sur la tâche qui leur incombait. Elle ne souhaitait pas gâcher tout le plan de Noul.
À mesure que le soleil déclinait, la terre qu’ils foulaient se fit plus boueuse. Ceralyn ne put s’empêcher de jurer et frappa plusieurs fois du talon afin de faire tomber cette argile nauséabonde du cuir de ses bottes. Quelques dizaines de minutes plus tard, ils arrivèrent en vue d’un imposant manoir. Ressemblant davantage à une forteresse qu’à une maison bourgeoise, Ceralyn constata les imposants murs qui entourait la battisse ainsi que la lourde porte sous laquelle ils passaient. Dans un grondement sourd, les battants se refermèrent. Plusieurs hommes encapuchonnés demeuraient dans l’enceinte, complètement immobile, les mains jointes comme s’ils priaient. Se rapprochant de Noul afin de se sentir plus en sécurité, Ceralyn s’humecta les lèvres avant de déglutir avec difficulté.
Le manoir Soryngar était une vaste demeure en pierre noire, élevée sur plusieurs étages et d’une élégance toute relative. Ceralyn repéra des écuries à l’odeur du fumier qui gisait non loin, de même que le fracas de plusieurs coups de marteau, comme si quelqu’un s’échinait à planter un clou récalcitrant dans un panneau de bois. Les portes du manoir s’ouvrirent et Noul et ses hommes furent emmenés directement au dernier étage. L’intérieur de la bâtisse était épuré et dépourvu de la moindre fioriture, se contentant du strict mobilier nécessaire. Gravissant les marches menant aux étages, Ceralyn ne put s’empêcher de poser son regard autour d’elle et sur Noul qui demeurait imperturbable. Arrivant dans un large couloir orné de nombreux tableaux, la jeune femme eut la surprise de voir le sien parmi de nombreux autres. Toutefois son visage était différent, comme si le peintre avait souhaitait la rendre plus mature, plus âgée. Elle n’eut pas le loisir de le contempler davantage, car ils entrèrent aussitôt dans une nouvelle pièce.
Très vaste, la salle devait être auparavant une pièce dédiée aux bals ou à des festivités fort importantes. Ceralyn nota la présence de nombreux hommes de l’Œil, tous silencieusement immobiles, légèrement plus nombreux qu’eux, mais nullement vindicatif. Son regard émeraude s’éleva vers les balustrades hors d’atteinte où d’autres fanatiques les observaient. Quelques bougies placées près des fenêtres crevaient l’obscurité des lieux, comme si le maître des céans craignait les vives lumières.
Assis sur une large chaise faisant presque office de trône, les attendait un homme à la chevelure rousse flamboyante. Ses traits semblaient maladifs et ses yeux étaient d’un bleu si clairs qu’ils semblaient jalouser un ciel d’été.
— Bienvenue au manoir Soryngar, Noul'Hessi, lance le chef de l’Œil que Noul identifie immédiatement comme étant la quatrième voix élégante qu’il avait rencontrée dans l’auberge. Bienvenue à toi...Ceralyn Soryngar.
Zohael:
L’endroit est vaste et cela te plaît. En cas d’affrontement, tu serais capable de déployer tes hommes et de manier ta lame avec efficacité. Néanmoins, l’homme à la chevelure rousse te met mal à l’aise. Qui est-il ? Tu notes qu’il est le seul à ne pas porter d’arme et que son teint est aussi blême que le tien est bronzé. De plus, tu ne comprends pas pourquoi cet homme n’a pas ordonné que l’on confisque tes armes à ton arrivée dans le manoir. Tu jettes un œil en direction des balustrades et tu parviens à distinguer un éclat argenté qui te laisse croire que des archers peuvent y être embusqués. Lorsque le chef de l’Œil s’exprime, un certain soulagement te gagne : contrairement à ses hommes, celui-ci semble exempt de toute folie. Du moins apparente.
Alors qu’il s’apprêtait à poursuivre, un cri d’alarme retentit aussitôt à l’extérieur. L’homme à la chevelure rougeoyante fronce les sourcils et darde son regard brûlant sur les zurthans, comme s’il les pensait derrière ce méfait. Les bruits au-dehors s’intensifiant de plus en plus, Ceralyn jette un regard inquiet à Noul. Avant qu’elle ne puisse lui glisser un mot, les portes derrière eux s’ouvrent en grand fracas et l’un des hommes de l’Œil en extirpe un assassin au visage familier…