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 Amours de jeunesse

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Sauveur Hadjaoui
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeMer 3 Avr 2019 - 9:23


La proposition de Sanaa fut très spontanée et trahissait son impatience à l’égard du gladiateur qui était plus qu’heureux de voir cette soirée s’achever enfin autant que de constater que son empressement était partagé. Sauveur se leva et invita son frère à faire de même. Aimé se plia à ses instructions mais il n’était qu’à demi redressé lorsqu’il perdit l’équilibre. Cela faisait un petit moment qu’il était plus que mûr et tenait des propos à peine cohérents. Le gladiateur le rattrapa aussitôt et plaça l’avant-bras sous son épaule pour l’aider à se mettre correctement debout. Dès qu’il lui sembla suffisamment stable, il passa le bras qu’il tenait derrière sa tête. Une main à son poignet et l’autre à sa taille, il fit signe à Sanaa de lui indiquer le chemin. Sauveur dut assister son aîné pour marcher plus qu’il ne l’aurait cru et il découvrit le poids de ce corps si impression en le portant dans une position assez inconfortable. Fort heureusement, la maison n’était pas aussi immense que le palais de Maralina et la chambre fut rapidement trouvée. Le gladiateur traînait presque son frère alors qu’il approchait du lit. Il l’allongea aussi délicatement que la masse d’Aimé et ses muscles ankylosés par le trajet le lui permirent. Puis il l’installa plus confortablement, mettant ses jambes bien droites, le couchant sur le côté (au cas où) et le recouvrant d’une couverture. Regardant autour de lui, il débusqua une bassine et vint la poser près de lui sur le sol. Aimé n’était pas du genre à vomir quand il avait trop bu mais savait-on jamais…

Alors qu’il venait de faire demi-tour, prenant la direction de la sortie, un bruit fort et sourd l’arrêta. Il se retourna vers Aimé puis sourit, amusé, alors que le bruit se répétait. Le géant dormait déjà à poings fermés et ronflait… Ne s’attardant pas davantage, il quitta la pièce.

-J’aurais presque des scrupules.

Il ferma la porte et lâcha la poignée avant de se retourner vers Sanaa. La trouvant seule dans ce couloir, les ronflements de son frère lui assurant qu’il dormait, il sentit tout ce désir qui le tenaillait depuis des heures remonter d’un seul bloc. Après une seconde interminable durant laquelle leurs regards explicites se mêlèrent, il franchit subitement la faible distance qui les séparait et vint goûter ces lèvres qui l’appelaient avec force. Il vola à la belle un baiser des plus passionnés avant même que ses mains n’aient le temps de se poser sur elle. La sentant lui répondre avec une maladresse qu’il mit sur le dos de la surprise, il l’enlaça, ses épais bras venant plaquer le corps de la jeune femme contre lui.

-En fait non, j’en n’ai aucun. S’interrompit-il dans un souffle avant de poursuivre leur baiser.

Enfin, il pouvait laisser libre court à tous ses désirs, toutes ses envies qui lui obscurcissaient l’esprit depuis trop longtemps déjà. Son petit jeu de la frustration était terminé, il était plus que temps de passer du rêve à la réalité. Sanaa lui sembla peu à peu plus confortable dans leur échange et lui répondit bien vite avec la même ardeur. Les mains sur les hanches de la belle, il la fit reculer de quelques pas et la plaqua contre le mur, collant son corps au sien avec une force mesurée. Il ne voulait pas lui faire mal, simplement la sentir contre lui le plus intensément possible. Il entreprit ensuite de combler tous les manques dont il souffrait depuis des heures… Alors qu’il l’embrassait toujours, ses mains vinrent explorer le peu de peau qui leur était d’ores et déjà accessible. Elles se glissèrent sur les joues de Sanaa, descendirent dans son cou puis sur le haut de son dos et ses épaules. L’une d’elle s’aventura même sur son bien maigre décolleté. Son grain de peau était doux et ensorcelant. Il rêvait de voir le vêtement choir lentement pour découvrir peu à peu le corps de la belle et en goûter chaque parcelle au passage mais il ne ferait pas cela ici…
Après ce long échange passionné, ses lèvres quittèrent celles de la rousse pour se rendre dans son cou et goûter à sa peau avec de langoureux baisers. Ses mains tirèrent sur la robe en espérant obtenir plus de surface à découvrir mais sans vraiment chercher à lui retirer. Il ne voulait gagner que quelques centimètre, rien de plus. Alors qu’il s’évertuait à parcourir de sa bouche le corps hâlée de la vaanie, de profondes inspirations lui permirent de s’imprégner de son odeur. Son parfum naturel était enivrant et décupla son désir. Après plusieurs minutes, sa curiosité fut suffisamment assouvie pour lui permettre de se montrer un peu plus patient mais il avait plus que jamais envie d’elle. Il retira la tête de son cou et de ses épaules et plongea son regard dans celui de la jeune femme.

-Ne restons pas là.


~~~~~~~~~~~~



Cette étreinte était si douce que Digne la laissa durer aussi longtemps que la musique et sa compagne le lui permettaient. Aislinn semblait l’apprécier elle aussi car elle n’essaya à aucun moment de se détacher de lui. De ses regards transpiraient un bien-être qui réchauffa le coeur du vaani après l’avoir sentie si mal à l’aise dans cet environnement inconnu et inhospitalier à ses yeux. Mieux encore, s’il faisait mine de retirer sa main pour changer de pas de danse ou simplement pour mieux remonter le long de sa colonne vertébrale ensuite, elle l’en empêchait. Après un moment, il finit par associer ses dix phalanges aux caresses qu’il prodiguait dans le dos de la belle mais il s’arrêta soudain.

-Je t’aime, Digne Hadjaoui.

Le jeune affranchi resta pantois devant l’héritière. Elle l’avait dit ? Vraiment ? Elle… ? La façon dont elle avait formulé sa phrase, semblable au serment du mariage, donnait une importance à son contenu qui le laissait sans voix.
Après une seconde, la joie se dessina sur son visage et, d’une main sur la joue, il retint Aislinn alors qu’elle s’approchait pour l’embrasser. Toisant le regard de la jeune femme, il souffla quelques mots à sa seule attention.

-Je t’aime, Aislinn Noblegriffon.

Il observa son visage un instant encore, son regard étincelant d’un bonheur nouveau. Puis, de sa main toujours posée sur sa joue, il attira son visage à lui pour reprendre là où il l’avait interrompue. Ses lèvres rencontrèrent les siennes dans un baiser qui témoignait des sentiments qu’ils venaient enfin de s’avouer. La déclaration d’Aislinn avait-elle était inspirée par la remarque de Sauveur ? Peut-être bien et peu importait à son jeune frère. Il connaissait l’intensité de l’affection qu’elle lui portait et n’avait pas manqué de lui en témoigner tout autant. Ils n’avaient pas eu besoin de se le dire pour le savoir. Le gladiateur les avait simplement mis devant l’évidence : tant qu’ils ne le formulaient pas autrement que par des gestes et des regards, cela donnait à leur amour un caractère presque irréel…
A présent, il existait bel et bien. Il n’y avait plus aucune ambiguïté possible.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeVen 5 Avr 2019 - 6:03

Sanaa

Tout allait très vite.

Sanaa était complètement dépassée par la fougue de Sauveur ; elle ne s’en plaignait pas, c’était même tout le contraire, mais elle avait du mal à savoir quoi faire, comment se comporter ou quand agir. C’était donc le gladiateur qui, pour l’heure, prenait la plupart des initiatives et elle espérait juste qu’il ne prît pas ombrage de son manque d’audace à elle.

Son cœur battait si vite.

Tandis qu’il explorait son cou avec ses lèvres et sa langue, elle emmêla ses doigts dans ses cheveux et quand elle sentit ses mains tirer sur sa robe, une puissante décharge d’adrénaline fouetta son sang. Elle était un magma bouillonnant de tant et tant d’émotions qu’elle n’essayait même plus d’en faire le tri.

« Ne restons pas là, » dit le jeune homme et sa voix agit comme la plus érotique des caresses.

Elle darda sur lui des prunelles brûlantes, muette et agitée du seul mouvement de sa poitrine qui se soulevait et s’abaissait au rythme de son souffle court.

« Viens, » finit-elle par lui intimer en mêlant ses doigts aux siens ; sa voix était rendue légèrement rauque par le désir qui lui serrait la gorge et chauffait le bas-ventre.

Son plus hésiter le moins du monde, elle le conduit comme elle l’avait prévu dans la chambre de Varlar, qui était à l’image du personnage et de sa demeure. Guidant toujours Sauveur, elle le plaça dos au matelas et l’y poussa sans douceur pour qu’il s’y allongeât. Elle défit une à une les attaches de sa robe, puis laissa glisser les étoffes sur sa peau hâlée, le regard brillant de ce désir qu’elle ne comprenait pas totalement, mais ne craignait pas ni ne cherchait à réprimer. Elle se débarrassa des dernières pièces de tissu qui la couvrait encore, avant de le rejoindre.

Elle se pencha sur lui, un bras de chaque côté de son corps, puis l’embrassa avec une fougue alimentée par sa propre nudité ; elle se redressa ensuite juste assez pour pouvoir l’aider à retirer sa tunique.

Enfin, elle alla mordiller son oreille droite, pour lui murmurer : « Prends-moi. Maintenant. »

Elle avait entendu sa première maîtresse dire cela à son amant, une fois ; il lui avait semblé que le concerné y avait été plutôt réceptif…



Varlar

Varlar était beaucoup de choses, mais un exubérant ça, jamais. Il suffisait de visiter sa demeure une seule fois pour s’en convaincre. Le vieux Langecin se satisfaisait bien assez de vivre bien, ce qui voulait dire dans sa bouche à l’écart du besoin. Pour le reste, il mesurait son succès à l’or qu’il parvenait à amasser, non aux babioles qu’ils pouvaient se procurer en le dépensant ; l’expérience lui avait par ailleurs appris que la monnaie restait bien plus efficace pour solder des dettes. À Thaar, cette manière d’être ne vous menait jamais très loin ; les marchands des principautés se moquaient bien de vos coffres remplis d’espèces sonnantes et trébuchantes, s’ils ne pouvaient pas les jauger du premier regard en vous détailler de pied en cape.

Même à Ys, où il avait surtout commercé avec des petits bourgeois sans beaucoup d’envergure, le Langecin avait dû sacrifier aux coutumes locales ; depuis qu’il était à Thaar, les simagrées auxquelles il devait se livrer atteignaient des proportions inimaginables. Il avait par exemple était contraint d’investir dans une large garde-robe quand il avait compris que le voir vêtu de son éternel pourpoint sombre — fût-il toujours impeccablement lavé — dégoûtait ses partenaires.

Pour l’heure, il se pliait à ces règles et ces coutumes absurdes parce qu’elles le servaient bien ; cependant, ce n’était pas un hasard si, quelques mois plus tôt, son regard s’était tourné à nouveau vers la Péninsule. Quand la Noblegriffon lui avait refourgué sa prétendue progéniture, il n’avait pas prévu de s’occuper d’elle au-delà du strict minimum… et son bonheur matrimonial était bien au-delà de ses considérations initiales. Le mal du pays l’ayant finalement rattrapé, il avait décidé de s’enrichir le plus et le plus rapidement possible, de sécuriser ses gains, puis de quitter ces fous sans l’ombre d’un regret.

« Avec les grands jeux, les mires de nos amis estréventins seront rivées sur leur foutue arène, expliquait-il à la personne à côté de lui dans sa langue maternelle. C’est le moment de faire des affaires. »

Il avait bien pris soin d’expliquer à son interlocuteur, il fallait toujours partir du principe que les thaaris parlaient tous tous les dialectes. La plus grande ville du monde n’avait pas usurpé son surnom et on ne concentrait pas une telle population simplement en y semant sa progéniture.

« Bien sûr, une fois que vous aurez épousé Aislinn… voulut-il continuer avant d’être coupé.

Si j’épouse votre pupille, précisa le Péninsulaire et son accent trahissait ses origines Nordiennes.

Évidemment, » en convint le Langecin en dardant sur Eloi du Vertbois un regard aussi placide que faire se pût.

Le chevalier, qui venait de Serramire, était jeune, tout du moins du point de vue de Varlar ; cela ne l’empêchait pas, du haut de sa trentaine, d’être déjà veuf de sa première épouse, morte en couche trois années plus tôt. Le Langecin avait longtemps hésité, avant de décider où jeter ses filets ; il avait finalement choisi le duché des marches du Royaume plutôt que Langehack dans l’espoir de se rapprocher ainsi des quelques « comptoirs Noblegriffon » qui subsistaient toujours dans le Nord. Si on lui avait posé la question, quelques jours après la disparition de Katalina, jamais Varlar n’aurait désigné la terre natale de la Noblegriffon pour fomenter son retour, car Aislinn n’avait pas les traits de sa prétendue mère et moins encore ceux d’une Nordienne. Cependant, le Langecin avait en sa possession des documents qui attestaient que la gardienne l’avait reconnue comme telle et depuis que ses agissements en Barkios des Ans 11 et 12, il avait le sentiment que personne ne prendrait le risque de l’accuser de parjure.

« Elle va avoir seize ans, vous dites, continua Eloi sans se départir de son air austère.

Pas tout à fait, mais ça ne saurait tarder.

Elle a déjà vécu sa première floraison ? » demanda-t-il encore sans sourciller.

Varlar n’en avait aucune idée ; il employait une femme de chambre presque exclusivement pour ne pas avoir à se soucier de ce genre de questions. Il allait improviser une réponse qui, il l’espérait, embobinerait son indélicat interlocuteur juste ce qu’il fallait pour lui permettre de changer de sujet, mais ce dernier se figea avant de darder sur son aîné un regard indéchiffrable.

« Elle est encore intacte, bien entendu ? »

Cette fois, le Langecin s’empourpra tout à fait, moins pour s’offusquer du peu de cas qu’Eloi faisait de l’honneur de sa protégée que pour ce que cela sous-entendait de l’éducation qu’il lui prodiguait, lui.

Qu’elle fut pratiquement inexistante, en tout cas sur ces aspects en particulier, était hors de propos.

« Ce n’est pas la peine de me regarder avec ces yeux-là, Varlar, s’agaça le Nordien avant de tendre le bras pour désigner quelque chose dans son dos, car sauf erreur de ma part, votre protégée est arrivée… et elle semble profiter de sa soirée, contrairement à nous. »

Et le Langecin de manquer faire une crise d’apoplexie quand, se retournant, il découvrit la timide — et un peu gourde, de son point de vue — Aislinn en train de bécoter un Vaani par trop jeune et séduisant à son goût.

« Par le con de Tyra, s’étrangla-t-il avant de planter là le Vertbois qui lui emboîta tout naturellement le pas. Aislinn ! Veux-tu bien t’éloigner de ce… »

Il retint l’insulte qui lui chatouillait la gorge de justesse ; pour ce qu’il en savait, ce jeune homme pouvait très bien être l’amant d’un prince ou l’héritier d’une princesse. Avec leur sexualité débridée et leur mauvaise manie de tous être plus riches les unes que les autres, il devenait dangereux de simplement se fier aux apparences. Or, d’apparence, le cavalier aventureux de la Rivoise ne payait pas forcément de mine.

« Varlar, » l’accueillit froidement Aislinn après avoir rapidement remis un peu d’ordre dans sa tenue.

Non seulement la garce restait aux côtés de son gigolo, mais en plus elle le défiait ; il pouvait voir dans son regard une détermination qu’il ne lui connaissait pas.

« Sire, enchaîna-t-elle sans laisser à son tuteur le loisir de lui répondre. Vous devez être l’homme qui souhaite m’épouser. » Elle se fendit d’une révérence tout à fait appropriée — contrairement à son attitude et à sa tenue —, avant de tourner son visage vers son partenaire de danse. « Je vous présente Digne Hadjaoui.

Et qui est-il pour vous, ma dame ? demanda Eloi sans se départir de son calme. Si vous m’autorisez l’audace de vous poser la question. »

Sa mâchoire carrée était crispée et ses prunelles glaciales, mais au moins savait-il se comporter en société ; il était d’une politesse irréprochable.

« Sire, répondit l’insolente en coulant subrepticement un regard au concerné avant d’esquisser un  doux sourire, il est bien des choses en vérité ; un ami, un confident… et le compagnon pour qui mon cœur bat chaque jour un peu plus. »

C’en était trop pour Varlar, qui — et c’était là un événement rare — perdit patience ; la gourgandine était d’une impudence crasse et son attitude était une bien vile manière de le remercier de tout le mal qu’il s’était donné pour elle. Telle mère, telle fille, songea-t-il tandis qu’une bouffée de haine lui serrait la gorge. Des ingrates, toutes les deux. Il était hors de question que cette petite crise adolescente ruinât tous ses efforts.

Il devait montrer à Eloi qu’elle lui obéissait.

Il devait effacer cet affront.

Aislinn s’était naturellement placée entre lui et Digne, mais ce n’était pas sur le fameux Hadjaoui qu’il portait son attention. Il leva la main, avec la ferme intention de la gifler. Le Vertbois s’en rendit compte un battement de cœur trop tard et ne put retenir son poignet.



Dernière édition par Katalina Noblegriffon le Sam 6 Avr 2019 - 14:31, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeVen 5 Avr 2019 - 13:10


Sauveur sourit à Sanaa alors que leurs doigts se mêlaient et il la suivit sans un mot. Ils n'eurent pas à aller bien loin mais il lui tardait tant d'arriver qu'il voulut reprendre là où il s'était arrêté dès que la porte fut fermée derrière eux. Alors qu'il l'embrassait avec passion, elle reculait lentement et il l'accompagna sans chercher à résister, pressé lui aussi d'atteindre le lit. Lorsqu'elle le poussa, il se laissa faire et tomba pour rebondir sur le matelas. Il l'attendit, mais elle ne le rejoignit pas. La découvrant en train de se défaire les liens de sa robe, il se redressa sur ses coudes pour mieux la regarder avec une délectation non dissimulée et un désir qui n'en finissait plus de grandir tandis qu'elle se mettait à nu devant lui. Il dut se retenir pour ne pas s'asseoir et l'aider à se défaire de ces morceaux de tissus.
Il lécha du regard ses courbes qui se dévoilaient peu à peu avec la ferme envie d'en prendre rapidement possession. Sanaa n'avait pas encore totalement atteint l'âge adulte et cela se voyait mais elle n'était plus une enfant pour autant. Sa silhouette était cintrée à la taille. Ses fesses étaient fines et sa poitrine presque à maturité. De la voir ainsi, prête à s'offrir à lui, il n'eut qu'une pensée qu'il exprima aussitôt dans un soupir.

-Tu es magnifique.

Alors que ses yeux brûlaient de désir, sa voix était plus que sincère. Si elle avait été la première à avoir ressenti l'envie de coucher avec lui, son charme exotique avait eu raison de sa volonté depuis longtemps déjà. Elle le rejoignit enfin et il cueillit ses lèvres dès qu'elles furent à sa portée. Puis il s'allongea complètement afin de libérer ses bras. Il posa ses mains sur les genoux de la belle puis remonta le long de ses cuisses en une lente caresse. Arrivé à son bassin, il l'invita à venir s'asseoir sur lui, son intimité venant au contact de son entrejambe où fleurissait déjà l'expression de son désir toujours contenue par son pantalon de toile. De quelques pressions sur les hanches de Sanaa associées à une ondulation de son propre bassin, il appuya son sexe contre le sien en une danse discrète et lascive qui n'était pas sans rappeler celle des ébats amoureux. Si elle était prête, lui aussi. Mais ce n'était pas pour autant qu'il se montrerait indigne de ce désir qu'elle lui témoignait en allait trop vite.
Il délaissa ainsi ses hanches pour remonter le long de son corps mais il n'eut pas le temps d'atteindre l'objet de son désir qu'il sentit les doigts de la rousse contre la peau, tirant sur sa tunique et cherchant à la lui retirer. Soucieux de l'aider -et pour son plus grand plaisir aussi-, il se redressa et l'aida à lui ôter cet encombrant vêtement. Il lâcha un soupir alors que leurs torses nus se rencontraient enfin et qu'elle venait lui mordiller l'oreille.

-Prends-moi. Maintenant.

Sauveur sentit une vague de désir le submerger. Il sourit de joie, d'excitation et de désir tout à la fois. Ses lèvres vinrent retrouver celles de Sanaa, faisant preuve d'une ardeur nouvelle. D'un mouvement expert, il la fit basculer sur le côté, roulant avec elle pour venir se placer au-dessus de Sanaa, son bassin entre ses cuisses. Oh oui, il avait envie d'elle et il lui tardait d'assouvir enfin ses pulsions, mais c'était mal le connaître que de croire qu'il ne savait pas se maîtriser. Enfin, dans une certaine mesure...

-Patience. Souffla-t-il. Je te l'ai pas fait languir pendant des heures pour te sauter dessus comme un sauvage.

Ses lèvres revinrent se poser sur les siennes dans un nouvel échange passionné tandis que ses mains entraient en scène. Appuyé sur l'un de ses coudes, ses doigts de l'autre côté descendirent pour retrouver sa cuisse qu'il releva pour la mettre à la perpendiculaire et ainsi mieux coller son bassin au sien. Puis il remonta et, rehaussant le torse, il vint cueillir l'un de ses seins qu'il caressa quelques instants avant de le saisir à pleine main, coinçant sa pointe entre deux de ses phalanges. Il la mignona ainsi quelques minutes avant d'abandonner ses lèvres pour redescendre le long de sa mâchoire et de son cou. Lorsqu'il rencontra sa clavicule, il en suivit le fil du bout de la langue avant de suivre son sternum en appliquant des baisers passionnés sur toute sa longueur. Puisque sa main se chargeait déjà d'un sein, sa bouche prit soin du second qu'il embrassa avec avidité. Il en suivit d'abord les contours, faisant mine de vouloir continuer à descendre avant de remonter soudain pour prendre la pointe entre ses lèvres. Il le titilla ainsi de sa bouche et de sa langue, usant parfois de ses dents, non pour faire mal mais juste pour faire sentir leur présence. Sa main continuait pendant ce temps de s'occuper de son jumeau en miroir. Il joua avec son désir ainsi quelques minutes supplémentaires avant de reprendre sa route.
Tandis qu'il atteignait son ventre, ses doigts lâchèrent enfin prise sur son sein et elle eut droit à quelques instants de répit, le temps pour lui de continuer à descendre toujours plus loin. Après des secondes interminables qui le conduisirent au bas de son ventre et dont il joua un peu, il marqua une courte pause... Puis il appliqua un baiser humide sur l'intimité de Sanaa, goûtant pour la première fois à son nectar. De sa bouche et de sa langue, il commença à lui prodiguer un peu de plaisir, avant goût de ce qui devait encore l'attendre. Il se refusa à insérer quoi que ce soit en elle. Pas encore. Mais, à la façon dont elle se montrait réceptive à ses attentions, cela ne saurait tarder.

~~~~~~~~~~~~



A la façon dont la voix gronda derrière la jeune femme, Digne n'eut aucun doute sur l'identité que celui qui les interrompait dans leur étreinte et il ne fut pas surpris d'entendre son nom lorsqu'Aislinn l'accueillit. Libérant sa bien-aimée, il la laissant se redonner contenance tandis qu'il se redressait pour faire à la menace qui planait sur eux depuis tant de jours.
C'était vrai, le jeune Hadjaoui ne payait pas de mine, malgré ses beaux habits. Si son père était loin d'être pauvre, il n'était pas pour autant né dans l'opulence et la servitude l'avait bien vite fauché. Contrairement à ses frères, il n'avait que très peu de souvenirs de sa vie avant l'Aile Blanche. Il se tenait droit et regardait Varlar et le chevalier dans les yeux mais il ne transpirait pas non plus la richesse ni le pouvoir. Le vénal tuteur avait raison de vouloir le prendre de haut mais ce n'était pas pour autant qu'il impressionnerait le jeune homme formé à combattre bien plus effrayant qu'un nobliaux de pénéinsule.
Alors qu'on le présentait, Digne observa le fameux prétendant que l'on destinait à sa bien-aimé. Ils étaient sérieux ? Non seulement il était moins raffiné qu'Aislinn mais en plus il devait avoir le double de son âge ! L'écart était loin de ce qu'il avait pu entendre sur les mariages arrangés des péninsulaires mais le fait que cela touche une personne qui lui était si proche rendait la chose plus inacceptable encore à ses yeux.

Le chevalier montra bien plus de maîtrise que son voisin qui sembla virer au rouge en découvrant la nature de la relation de sa pupille avec un homme de la région. Si Eloi n'eut pas le temps de réagir, ce n'était pas le cas du jeune Hadjaoui qui redoutait ce genre de réaction de la part de Varlar. Il arrêta son bras juste à temps et, serrant sa prise, il planta son regard dans celui du tuteur de sa compagne.

-Recommencez ça et la prochaine fois je ne me contenterai pas d'arrêter votre geste. Lança-t-il sur un ton froid et dur qu'Aislinn ne devait pas lui connaître.

Elle avait toujours voulu le protéger mais c'était lui qui la protégeait en cet instant. Il était hors de question que cet homme la touche, même s'il était son tuteur et même si celle qui l'avait confiée à lui était la Main de la Déesse de la Mort. Pour ce qu'il en savait, Katalina aimait sa fille même si elle n'était pas de son sang et elle ne l'avait jamais frappée. Varlar n'était rien pour elle finalement et le pouvoir que la Dame de Tyra lui avait donné ne lui permettait pas de se comporter de la sorte à ses yeux.
Enfin, il le lâcha, repoussant son bras pour l'éloigner d'Aislinn.

-L'homme qui ne sait gagner le respect que par la violence n'en mérite aucun. Vous êtes son tuteur, votre rôle est de veiller sur elle. Si vous ne découvrez mon existence qu'aujourd'hui, vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même.

Même si la jeune femme n'avait jamais parlé de lui, il aurait pu comprendre ce qu'il se passait bien avant. Encore fallait-il qu'il lui accorde un minimum d'attention en passant quelques heures avec elle de temps en temps autrement que pour les affaires et en prêtant égard à son humeur.


Dernière édition par Sauveur Hadjaoui le Dim 7 Avr 2019 - 19:41, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeSam 6 Avr 2019 - 9:40

Sanaa

Quelque chose n’allait pas.

Tandis que Sauveur s’occupait d’elle et que des vagues successives de plaisir lui faisaient perdre pied, Sanaa ne pouvait se départir d’une certaine frustration qu’elle ne comprenait pas. Pourtant, ses ébats avec le gladiateur auraient dû la combler ; l’Hadjaoui s’était vite révélait être un amant attentionné et passionné, expert dans l’art de provoquer et d’entretenir l’excitation d’une femme et Sanaa n’avait jamais rien ressenti de comparable auparavant.

Quand il embrassa à pleine bouche son intimité, électrisant d’un seul coup tout son corps et sa conscience, tout devint limpide.

En creux de son désir pour Sauveur, dès le départ, il y avait cette envie de transgression qu’elle portait sur elle comme un manteau depuis des années. Elle avait souhaité se donner à son amant du soir autant pour le plaisir charnel qu’elle en retirait que pour s’extirper de cette laisse invisible que Varlar continuait d’utiliser contre elle ; le choix du lieu de leurs ébats ne laissait rien au hasard. Or, depuis qu’elle avait fait choir sa robe sur le sol, Sanaa ne maîtrisait plus rien. Volontairement ou non, le gladiateur avait soigneusement gardé le contrôle des événements, en imposant son rythme et en se refusant à satisfaire la demande pressante de la Vaanie.

Et elle avait aimé cela.

Parce qu’elle était jeune et inexpérimentée, impressionnée par son partenaire contre elle, curieuse des plaisirs qu’il l’aidait sans le savoir à découvrir ; pour ces raisons et mille et mille autres, elle s’était laissé guider et son acte de transgression, finalement, était devenu une initiation et, mécaniquement, une nouvelle forme de subordination.

D’où sa frustration.

Sanaa ne voulait pas être une simple spectatrice de leurs ébats ; elle désirait s’émanciper, participer, imprimer sa marque… et dans le même temps, chaque geste, chaque caresse, chaque coup de langue de son amant la faisait chavirer un peu plus.

Elle voulait qu’il arrêtât ce qu’il était en train de faire et qu’il la prît sans plus tarder.

Elle voulait qu’il continuât son jeu du chat et de la souris avec son clitoris.

Ses mains, qu’elle avait gardées autour de sa tête à elle depuis qu’il avait commencé sa — trop — lente descente jusqu’à son bassin et en dessous, entreprirent un voyage similaire le long de son corps. Elle se caressa furtivement les seins, découvrant cette étrange sensation de se donner un peu de plaisir quand un mâle s’activait à faire de même, mais ses doigts ne s’attardèrent guère sur ses mamelons et quelques instants plus tard, elle glissait ses phalanges dans la chevelure du gladiateur. Elle commença à y imprimer une légère pression pour l’encourager à continuer, tandis qu’elle s’arquait pour lui faciliter l’accès à son intimité.

Peu de temps avant que Sauveur ne parvînt totalement à ses fins en déclenchant en elle un premier orgasme, elle croisa ses jambes en tailleur sur son dos et se cambra plus encore… pour, au moment fatidique et surprise par l’intensité de ce qu’elle ressentait, faire le mouvement inverse et enserrer la tête du jeune homme contre ses cuisses.

Il était bon que l’alcool aidât Aimé à dormir, car Sanaa ne fit aucun effort pour réprimer ses gémissements.



Aislinn Noblegriffon

Il était ainsi qu’elle l’avait imaginé. Trop vieux, trop austère, trop sérieux.

À l’image du traître qui l’avait attiré jusqu’ici.

Aislinn s’était souvent demandé ce qu’elle devait penser des agissements de Varlar. Il avait été honnête avec elle et n’avait rien caché de ses projets. Il était son tuteur légal, chargé par sa mère de prendre soin d’elle et de préparer son avenir. D’un point de vue froidement « stratégique », retourner en Péninsule dans le duché natal de la gardienne faisait sens, si l’on acceptait l’idée qu’après près de quinze longues années d’absence, le nom de Noblegriffon avait une quelconque légitimité à présider la destinée des comptoirs de Katalina avait fondé au crépuscule de Xe cycle. Il ne lui avait certes jamais demandé ce qu’elle pensait de tout cela, mais dans le même temps, elle avait laissé filer bien des occasions de faire valoir son opinion. Peut-être Sanaa avait-elle tort et j’ai commis une grave erreur, songea-t-elle non sans anxiété tandis que le Langecin furibond s’approchait. Il m’aurait peut-être écouté.

La suite devait balayer ses doutes, car mis en défaut, Varlar perdit complètement pied, jusqu’à chercher à purement et simplement la frapper.

Elle le vit lever le bras, main tendue, et se surprit à se préparer instinctivement au choc plutôt que d’essayer de faire quelque chose pour se soustraire à son coup. Digne, quant à lui, se montra plus réactif et parvint à arrêter la paume du vieil homme avant qu’elle ne pût s’abattre sur le visage de l’héritière.

À quoi ont servi toutes ces heures d’entraînement, si le moment venu, je reste la même petite fille sans défense que j’ai toujours été ? se demanda-t-elle, choquée malgré elle par la violence à laquelle elle avait échappé.

Elle n’entendit pas les paroles dures du benjamin des Hadjaoui, car son regard avait accroché celui d’Eloi. Le chevalier ne cachait pas son agacement, mais elle ne parvenait pas à déterminer quel élément de sa désastreuse soirée l’énervait le plus. Il avait essayé de s’interposer et elle lui était indubitablement reconnaissante de ce simple geste, eût-il été vain. À sa grande surprise, il inclina légèrement la tête dans une forme d’amende honorable.

« Hadjaoui parle vrai, Varlar, intervint le Serramirois dans la langue diantraise sans se départir de son ton mesuré, quoique, ma propre fille n’ayant pas survécu, je serai bien en peine de vous donner le moindre conseil en la matière.

Les amourettes ridicules d’une adolescente ne devraient pas remettre en cause les projets dont nous avons déjà largement discuté, protesta le Langecin sans plus chercher à feindre le calme.

Elles changent tout, le contredit Eloi en posant cette fois son regard sur Digne. Je n’ai guère le goût de forcer une femme à partager ma couche et je gage que votre protégée se battra pour s’en tenir éloignée tant qu’il lui restera une once d’énergie. » Il reporta son attention sur Varlar. « Ne faites pas l’enfant, vous êtes trop âgé pour cela. Le mariage n’est absolument pas nécessaire à nos arrangements. »

Assurément, le concerné ne s’était pas attendu à ce que la soirée se déroulât de la sorte, mais il lui semblait que tout et tous se liguaient contre lui. Isolé, il resta coi quelques secondes.

« Si cela peut atténuer votre rancœur, Varlar, je ne comptais pas épouser Aislinn. J’ai besoin d’or et c’est ce que je suis venu chercher, finit par intervenir une nouvelle fois Eloi. Je demeure un vassal et je doute que mon suzerain soit ravi à l’idée d’apprendre que j’ambitionne de devenir le gendre de la gardienne de Tyra qui a tué un archonte et un roi en une petite année. » Il darda un regard légèrement amusé pour Aislinn, avant d’ajouter : « En vérité, je ne pense pas que vous parveniez un jour à la marier de mon côté de l’Olienne.

Ce ne serait pas la première fois que Varlar agit hâtivement sans avoir pris le temps de considérer tous les tenants et aboutissants, » fit remarquer froidement une Aislinn qui était restée étrangement silencieuse jusque là.

Elle chercha ensuite le visage de Digne des yeux, curieuse de découvrir comment il réagissait à l’annonce du chevalier. Elle-même était encore trop secouée pour vraiment réaliser ce que ses paroles impliquaient.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeSam 6 Avr 2019 - 22:18

Sauveur observait les réactions de Sanaa et les ondulations de son corps au rythme des attentions qu'il prodiguait à son sexe. Le spectacle était si beau qu'il ne la quittait plus des yeux, son regard se remplissant d'une avidité nouvelle qu'il déversait sur son clitoris. Il vit ensuite les mains de la belle descendre lentement le long de son corps, s'arrêtant furtivement sur ses seins. Il regretta que cela ne dure pas plus longtemps. Il aurait voulu remplacer les doigts de la vaanie par les siens mais la position de des bras de cette dernière l'en empêchèrent.
Il n'avait pas forcément prévu de demeurer entre ses jambes plus que nécessaire mais, aux pressions qu'elle exerçait sur son crâne, il se plia bien volontiers à sa requête de continuer à lui procurer du plaisir seulement avec sa bouche. Puisqu'il ne pouvait pas faire grand chose de ses mains, il les posa quelque part entre les hanches et les fesses de son amante, l'attirant un peu plus vers lui, ainsi que la langue et les lèvres qu'elle réclamait tant. Il sentit le corps de Sanaa s'agiter de plus en plus et saisit alors son clitoris pour le sucer langoureusement. Les cuisses de son amante se refermèrent alors sur sa tête, bouchant ses oreilles et l'empêchant de profiter pleinement de ses gémissements d'extase qui ne lui parvinrent qu'à moitié. Peu importait, la soirée n'était pas encore finie...

Jusqu'à ce que la belle le libère et même quelques secondes après, il continua de prodiguer à son sexe quelques attentions plus douces et plus mesurées quoi que toujours aussi sensuelles. Une fois que le voie fut libre, ses baisers remontèrent le long du corps de Sanaa plus rapidement qu'ils n'étaient descendus, s'arrêtant brièvement sur sa poitrine qu'elle n'avait pas auto-gratifié bien longtemps de ses caresses. Il savait qu'elle était jeune, aussi cela ne le surprenait-il pas qu'elle n'ose encore faire ce genre de choses. Peut-être était-ce même la première fois qu'elle se touchait de cette manière. Auquel cas, il était ravie qu'elle ait osé avec lui. Cela prouvait à quel point elle se sentait en confiance.
Il remonta ensuite bien vite afin d'embrasser la jeune femme. Si elle se montrait toujours réceptive à ses attentions, l'orgasme qu'il venait de lui prodiguer l'avait grandement apaisée. Il se fit donc plus doux et moins enfiévré afin de la laisser profiter et se remettre de ses émotions. Il se coucha sur elle, prenant soin de ne pas l'écraser en s'appuyant sur ses coudes. Leur nouvelle étreinte ne demeura guère sage très longtemps car, déjà, il sentait Sanaa s'animer d'une passion nouvelle. Que cela soit causé par son propre désir encore inassouvi ou vienne d'elle, peu importait finalement. Il se laissa porter par leur envie partagée qui ne demandait qu'à aller jusqu'à son terme.
Alors que leur passion avait déjà repris sa place dans leurs échanges, Sauveur sentit une main essayer de se glisser entre leurs bustes plaqués l'un contre l'autre. Sans cesser de l'embrasser, un sourire étira les lèvres du gladiateur en comprenant à quel point le désir de la belle était ravivé et il souleva alors son corps, relevant ses genoux pour les passer sous les cuisses de la rousse. Toujours vêtu de son pantalon, il sentit les fins doigts de Sanaa venir effleurer son membre à travers le tissu avant de tenter maladroitement de l'en extirper. Il se redressa alors totalement pour se mettre sur ses genoux, défit le nœud qui retenait le vêtement et l'envoya bien vite rejoindre le reste de leurs frusques éparpillées au sol. Puis il se pencha de nouveau sur la belle pour la laisser reprendre là où elle en était. Il aurait pu simplement s'asseoir et entrer en elle. Il aurait voulu la regarder tandis qu'il la pénétrait lentement, voir son regard brûlant de désir se fermer dans un soupir alors qu'ils arrivaient enfin à la conclusion de toutes ces heures passées à s'observer sans pouvoir se toucher. Mais elle l'avait à peine touché depuis qu'ils avaient commencé devant la chambre où dormait Aimé. Peut-être prenait-il trop de place dans leurs échanges et ne lui laissait-il pas assez la possibilité d'agir ? Alors, si elle se sentait de prendre un peu les devants, il ne l'en empêcherait pas. Bien au contraire. Le sexe, ça se partage.

S'il s'attendait à ce que la main de Sanaa saisisse son sexe, il fut un peu surpris de ne sentir que le bout de ses doigts. Le manque d'action de la belle ne venait peut-être pas de lui finalement. Elle n'avait peut-être pas encore beaucoup d'expérience et restait donc assez timide. Mais, après quelques secondes, il fut pris d'un doute. Il comprenait bien qu'elle essayait de l'attirer à elle et de le guider pour qu'il la pénètre enfin mais elle s'y prenait si mal... Ce n'était pas son premier coup d'essai tout de même ?
Après quelques tentatives laborieuses et un petit peu d'aide de la part du gladiateur, son membre se présenta enfin devant le sexe de la jeune femme. Il s'installa alors un peu plus confortablement et poussa très légèrement avec son bassin pour commencer à entrer en elle. Il s'attendait à ce qu'elle soit étroite, mais à ce point... Sans compter que quelque chose changea légèrement dans les réactions de Sanaa. Au lieu du soupir de soulagement et de plaisir qu'il espérait, elle sembla se crisper alors qu'il avait seulement fait entrer la tête de son vis.

Oh putain...

Sauveur ragea intérieurement. Tout devenait subitement clair. Alors qu'il s'était jeté sur elle après avoir couché son frère, il avait mis sa maladresse sur le compte de la surprise mais il avait fallu plus d'un baiser à la jeune femme pour se mettre au diapason. C'était son premier baiser ?! Et le fait qu'elle ne le touche pas, en fait elle ne savait pas quoi faire ? Et sa façon d'essayer de le guider, de toute la soirée, elle n'avait jamais manqué autant d'assurance qu'à ce moment-là. Sans parler du fait qu'elle ne savait pas comment tenir son sexe.
Le gladiateur ne montra rien de sa colère mais il arrêta toute tentative de progression, allant même jusqu'à retirer son membre. Il passa un bras sous le corps de Sanaa puis se laissa rouler sur le côté puis le dos, entraînant sa partenaire avec lui. Dans ses bras, elle semblait aussi légère que les coussins de leur couche (qui se trouvaient à côté d'eux puisqu'ils n'avaient pas pris la peine de se remettre dans le sens de la marche). Enfin, il se redressa afin de s'asseoir, elle a califourchon sur lui, et reprendre ses baisers passionnés. Il n'avait pas renoncé à passer à l'acte mais il ne le ferait pas de cette manière. Lina lui avait suffisamment parlé de sa première fois pour savoir ce qu'il convenait de faire pour s'assurer que la vaanie souffre le moins possible. Et, puisqu'elle avait suffisamment d'audace pour se mettre nue devant lui, elle en avait pour ce qui allait suivre.

Après quelques baisers, il la prit par les hanches et la souleva doucement, l'amenant à se redresser sur ses genoux. Ainsi, la poitrine de la belle se trouvait à hauteur de son visage et il embrassa chacun de ses seins, titillant la pointe avec la langue et provoquant de nouveaux soupirs chez sa partenaire. Enfin, d'une main, il l'amena à redescendre lentement. Quelques centimètres plus bas, elle put sentir la pointe de son membre qu'il dirigeait avec expertise de manière à ce qu'il se présente devant son sexe. Là, il cessa toute pression sur son bassin et la laissa libre de ses mouvements. Dans cette position, l'ouverture de la femme était plus large, ce qui était idéal pour celles qui étaient encore novice. Sanaa pouvait également choisir la façon dont elle voulait gérer la chose. Elle pouvait descendre lentement ou décider d'en finir en s'asseyant franchement. La première solution était plus longue et l'autre plus douloureuse mais au moins elle avait le choix.
Quelque soit la décision de Sanaa, la première insertion et la rupture de l'hymen restait une épreuve. Dès que la douleur de cette dernière saisit la jeune femme, Sauveur la prit dans ses bras pour l'étreindre avec force et tendresse afin de la réconforter. Elle lui sembla soudain si fragile contre lui... Mais la seule manière de vraiment chasser la souffrance était de la faire bouger. Alors, après quelques instants, il usa de ses mains sur ses hanches pour lui intimer un mouvement et la guider les premiers temps. Dès qu'elle fut assez à l'aise, il la laissa gérer et guetta l'arrivée de ses premiers soupirs de plaisir pour profiter enfin de leurs ébats car il ne concevait pas de prendre du plaisir seul...
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeDim 7 Avr 2019 - 14:20

Sanaa

De doutes de Sauveur, de sa fulgurance et de la colère qu’elle provoqua, Sanaa ne devina rien. Elle était trop portée par les sensations vivaces qui continuaient d’affluer de chaque parcelle de son épiderme et des tréfonds de son bas-ventre pour s’en soucier. Elle ne prit donc aucunement la mesure de la prévenance du gladiateur, quand il la plaça au-dessus de lui pour la laisser maîtresse de ce qui allait suivre. Le souffle court, le regard brûlant, elle le dévora des yeux tandis qu’elle ondulait lentement son bassin et qu’elle lui frayait un chemin en elle.

Toute sa frustration passée s’était complètement évaporée.

Elle agrippa les épaules de son amant, se cambra et rejeta la tête en arrière au moment où elle achevait sa descente ; il y avait quelque chose de libérateur dans la douleur qui l’envahit lorsque son hymen se déchira.

Le gladiateur ne resta pas inactif et elle le laissa faire, encore déboussolée par ce qu’elle était en train de ressentir. Il commença à bouger en elle et la douleur revint, lancinante toujours, mais moins forte aussi, à la manière d’un écho que chaque rebond atténuait ; et au diapason de cette souffrance qui peu à peu s’effaçait, il était une seconde vague qui montait. C’était si étrange que l’une ne parvînt pas à étouffer l’autre ; quand la respiration de Sauveur s’accéléra et qu’elle le sentit chercher à ralentir ses va-et-vient, elle le prit à contre-pied, accentuant ses propres mouvements de bassin, elle le porta jusqu’à l’orgasme et ses gémissements à elle complétèrent subtilement ses râles à lui.

Ils se figèrent tous les deux, essoufflés et couverts de sueur, puis Sanaa se dégagea précautionneusement de lui, prenant bien soin de ménager son intimité endolorie malgré la prévenance de son amant. Sans un mot, mais avec un sourire ravi, elle se pencha ensuite sur lui et lui vola un dernier baiser passionné, avant de s’allonger à ses côtés et de commencer à lui caresser le torse.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeDim 7 Avr 2019 - 19:38


Sanaa était bien trop préoccupée par les sensations nouvelles qui l'habitaient et l'apprentissage de ce nouveau déhanché pour témoigner la moindre attention à son amant en dehors de la douleur et du plaisir qu'il provoquait en elle. Sauveur le savait et ne lui en voulait pas. De son côté, il ne resta pas passif et parcourrait le corps de la belle de ses mains et de ses lèvres sans timidité aucune. C'était un amant aussi doux que passionné et aussi tendre qu'avide. La sentant bien moins réceptive que précédemment, il était près à tout arrêter mais elle s'y refusa, accentuant ses mouvements pour lesquels il avait cessé de la guider. Il se laissa faire car elle y prenait du plaisir malgré tout. Cependant, après plusieurs minutes, il lui parut évident qu'elle ne parviendrait pas à nouveau à l'orgasme, comme souvent la première fois. Aussi décida-t-il de ne pas éterniser trop longtemps leurs ébats. Encouragé par les gémissements de la vaanie, il se laissa aller, serrant son corps dans ses bras et laissant sa voix s'étouffer dans son cou.

Son souffle était encore court lorsqu'il posa une main sur la taille de Sanaa pour lui faire savoir qu'elle pouvait arrêter. Il ne la retint pas lorsqu'elle voulut le retirer d'elle, la sensation ne devait pas être des plus agréables. Il l'y aida même, la soulevant doucement, une main de chaque côté de ses hanches. Il vit alors qu'elle avait perdu un peu de sang mais ne dit rien. C'était chose courante pour une première fois et il serait toujours temps pour elle de s'en préoccuper plus tard.
Au sourire qu'elle lui adressa, il monta une main jusqu'à son visage. Elle semblait heureuse et satisfaite. Du bout du doigt, il dégagea une mèche de cheveux roux pour la repasser derrière son oreille puis dans son dos, glissant une main derrière sa tête alors qu'elle l'embrassait une dernière fois. Il l'accompagna tandis qu'elle s'étendait sur le lit puis il étira son bras pour saisir la couverture qui recouvrait les draps. Il la rabattit sur eux, prenant soin de bien couvrir Sanaa au passage. Si elle avait chaud pour le moment, le froid la saisirait bien assez vite, la fine couche de sueur qui les recouvrait n'aidant pas. Puis il s'allongea à ses côtés, l'invitant d'un geste à venir se blottir contre lui.
Ils restèrent ainsi un bon moment, les doigts de la rousse effleurant sa peau. Leurs souffles s'apaisèrent assez vite et le silence se fit enfin dans la pièce si bien que les ronflements d'Aimé finirent par leur parvenir de très loin. Sauveur eut un sourire amusé et un peu coupable mais il ne dit rien. En d'autres circonstances, il aurait pu en rire. Mais il n'en avait pas vraiment le cœur...

-Ça va ? Demanda-t-il d'une voix presque basse après de longues minutes.

Elle lui répondrait sûrement que oui. Elle avait eu l'air satisfaite après tout. Pensait-elle seulement qu'il avait compris ? Son esprit avait été bien trop occupé pour réaliser que la décision de son amant de changer de position n'était pas anodine. Quelque soit sa réponse, Sauveur se redressa pour prendre appui sur son coude, lui offrant son avant-bras comme oreiller. Il posa une main sur sa joue, la caressant non sans faire preuve d'une certaine tendresse, avant de plonger son regard dans le sien.

-Sanaa, pourquoi tu ne me l'as pas dit ?...

Même s'il semblait un peu contrarié, il ne lui en voulait pas. Enfin pas tout à fait. Nombre d'hommes auraient été ravis de dépuceler une femme mais ce n'était manifestement pas son cas. A ses yeux, cela se préparait et il avait réalisé juste à temps pour prendre certaines précautions mais ils étaient passés à deux doigts de lui faire vraiment mal... Il voulait comprendre ce qui l'avait poussé à ne pas lui en parler au préalable. S'il était frustré pour le moment, il le serait peut-être moins lorsqu'il aurait pu s'expliquer avec elle et sans doute profiterait-il mieux de cette étreinte d'après l'amour qu'il appréciait tant d'ordinaire.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeDim 7 Avr 2019 - 21:35

Sanaa

Quand ? avait-elle envie de lui répondre. Quand aurais-je dû te le dire ? Elle avait beau essayé de faire preuve d’imagination, elle ne voyait pas à quel moment elle aurait pu prévenir son amant de sa virginité ; pas sans risque de gâcher ce que son ventre avait appelé de ses vœux dès l’instant où elle avait laissé pour la première fois glisser son regard sur sa personne.

Ce qu’ils venaient de faire ensemble, elle ne l’avait ni anticipé ni préparé ; elle s’était contentée de le vivre, complètement dépassée par le charme presque magnétique de Sauveur. Il ne pouvait pas lui reprocher quoique ce fût ; pas après l’avoir séduite comme il l’avait fait. Elle avait très vite compris qu’elle le désirait, mais avant qu’il commençât à jouer avec elle dans la cuisine, elle n’aurait jamais osé passer à l’acte ; une fois qu’il lui avait murmuré son invitation détournée dans le creux de son oreille, tout avait changé. Elle darda sur lui son regard clair, mais se garda bien de lui répondre ; ce n’était pas tant qu’elle ne le voulait pas, c’était surtout qu’elle ne savait pas quoi lui dire.

Malheureusement, Sauveur prit son silence pour ce qu’il n’était pas.

« Je parle du fait que tu étais vierge, » crut-il judicieux de préciser.

Elle aurait préféré qu’il la giflât ; c’était irrationnel et elle s’en rendit compte, mais elle rejeta cet éclat de sagesse et embrassa les caprices du Prisonnier.

« J’avais deviné, » grinça-t-elle en rassemblant ses jambes sous elle avant de s’agenouiller, nue comme le jour de sa naissance.

Quelques secondes plus tôt, elle reposait contre lui, contentée et heureuse ; elle dardait désormais sur lui des prunelles courroucées sans même chercher à comprendre pourquoi. Ne pouvais-tu pas te satisfaire de ce que nous avions ? avait-elle envie de lui demander. Elle avait la désagréable impression que le gladiateur était déçu, finalement, du temps qu’il avait passé avec elle ; elle n’aurait pas cru que cette pensée la mortifierait autant.

« Je ne vois pas pourquoi j’aurais dû, » finit-elle par asséner et elle n’avait besoin de personne pour réaliser qu’elle faisait preuve d’une mauvaise foi évidente ; cela l’agaçait encore plus.

Elle pouvait l’entendre lui expliquer ce qu’elle avait déjà compris. Elle avait beau être jeune et ignorante de bien des arcanes de l’amour, elle savait que Sauveur avait été particulièrement patient et prévenant à son égard ; l’idée qu’il se servît de cela pour la sermonner accentua un peu plus sa contrariété.

Elle voulait juste qu’il se tût et qu’il la laissât se blottir à nouveau contre lui.

« J’en avais envie. Tu en avais envie. Les choses n’avaient pas besoin d’être plus compliquées que cela. »

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeLun 8 Avr 2019 - 7:49


Sauveur laissa Sanaa lui échapper, fermant les yeux dans un soupir de la voir ainsi contrariée par sa question. Il ne regrettait pas de l’avoir posée, il voulait une réponse, mais il sentait venir un mauvais moment à passer… Il se retourna finalement vers elle, se redressant à son tour. Appuyé sur une main, il replia une jambe pour y poser son second bras. Elle n’avait visiblement aucun complexe à demeurer nue devant lui et il n’en éprouvait pas davantage.
La jeune femme ne semblait pas comprendre son point de vue et il prit sur lui pour ne pas réagir aussi impulsivement que d’habitude. C’était sa première fois et il ne voulait pas que cela se termine en dispute et qu’ils se quittent contrariés. Même s’il avait l’impression que, quoi qu’il dise, ça finirait pas…

-On en avait envie tous les deux, je dirais pas le contraire. C’est bien pour ça que j’ai pas tout simplement tout arrêté : tu es assez grande pour savoir ce que tu fais et prendre tes décisions. Tu le voulais ce soir et avec moi et pour le coup je suis honoré par la confiance que tu m’as accordée. Mais une première fois, ça ne s’appréhende pas de la même manière que les autres. Si je t’avais prise quand tu me l’as demandé -parce que, crois-moi, je me suis retenu de le faire-, je t’aurais fait extrêmement mal. Ca aurait coupé court à tout : tu n’aurais qu’un souvenir de douleur pour ta première expérience et je m’en serais voulu de t’avoir fait aussi mal.

Ce qui le contrariait le plus n’était pas tant qu’elle ne lui avait pas dit mais plutôt ce qui aurait pu se passer s’il s’était laissé emporter comme elle le voulait. Elle ne semblait pas prendre la mesure de ce qui aurait pu se passer et de ce à quoi son initiation aurait pu se résumer. Il aurait pu entrer en elle lorsqu’elle le lui avait soufflé à l’oreille, il était capable de faire durer leurs ébats, la jouissance étant plus longue à venir sans préliminaires mais c’était tout aussi bon. Mais tout ce que cela aurait donné en l’occurrence, ç’aurait été un cri de douleur pour Sanaa et le retour brutal à la réalité pour elle mais aussi pour lui. Comment pourrait-elle envisager de renouveler l’expérience sereinement dans des conditions pareilles ?

-Je m’y suis qu’à moitié mal pris au final. Et heureusement, je m’en suis rendu compte juste à temps pour te faire changer de position car tu aurais eu beaucoup plus mal si j’étais resté au-dessus.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeLun 8 Avr 2019 - 21:13

Sanaa

Dès l’instant où le gladiateur avait décidé de soulever le sujet de sa virginité, Sanaa s’était demandé où Sauveur voulait en venir ; elle ne comprenait pas ce qu’il espérait obtenir d’elle à la confronter ainsi, une fois leurs ébats terminés. Dans quelques heures tout au plus, ils étaient appelés à se séparer et la Vaanie doutait fortement qu’ils eussent l’occasion de se recroiser avant longtemps, moins encore de partager à nouveau une couche.

Quand bien même elle avait effectivement commis une erreur en ne le prévenant pas que son hymen était intact au début de leurs étreintes, cette affaire-là appartenait au passé et il était peu probable que la membrane qui gardait jusqu’à récemment l’entrée de sa matrice se reformât un jour ; Aislinn lui avait bien expliqué que là-bas en Péninsule, pendant la Malenuit, certaines femmes trop proches de l’Ailée étaient redevenues vierges, mais enfin Sanaa ne pariait pas être témoin d’un nouveau Voile de son vivant.

Sauveur souhaitait comprendre les raisons de son mutisme ? Elle était de son côté indubitablement curieuse de deviner pourquoi ; autrement dit et pour un temps au moins, la conversation entre les deux amants avait peu de chance de finir sous les meilleurs auspices.

« Tu veux que je te remercie, en fait ? » demanda Sanaa avec un ton qui laissait planer le doute sur ce qu’elle pensait de cette idée.

Ce n’était pas exactement ce qu’il avait dit, mais c’était l’essentiel de ce qu’elle avait retenu. Bien entendu, dans le fond, il avait raison : s’il avait pris moins garde à ménager son corps jusqu’alors préservé, les chances étaient grandes que leurs ébats eussent duré beaucoup moins longtemps ; quoiqu’ils ne pouvaient pas le savoir, car de son point de vue, elle n’avait pas eu si mal que ça quand il avait essayé de la pénétrer la première fois.

« Dans ce cas, merci, Sauveur, déclara-t-elle sans changer d’intonation. Grâce à toi, mon premier coït restera un souvenir impérissable. »

Il lui suffit de prononcer ces mots pour se persuader qu’ils n’étaient pas dénués de vérité. Elle laissa ensuite son regard se promener sur le corps de Sauveur pour la première fois depuis qu’ils avaient commencé leur houleuse discussion ; cela lui permit, à tout le moins, de rafraîchir dans sa mémoire pourquoi ils s’étaient retrouvés nus l’un contre l’autre en premier lieu. Les lippes de la diablesse se tordirent en un sourire carnassier, puis elle s’étendit de tout son long à côté de lui, lui offrant au passage une vue de choix sur ses courbes sans le moindre regret.

Le message avait le mérite d’être clair ; de son point de vue, la conversation était close. Quant à ce qui pouvait venir après… elle-même n’en avait aucune idée.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeMer 10 Avr 2019 - 9:08


A la réaction de Sanaa, Sauveur ferma les yeux dans un soupir. Elle n'avait pas l'air de comprendre ce qu'il voulait dire ou bien elle était d'une mauvaise foi encore jamais vue. Dans tous les cas, il était clair que la discussion ne servait à rien car elle n'était pas réceptive à ses paroles. Seul le temps saurait peut-être lui apprendre ce qu'il avait tenté de lui dire... Et encore. Il essayait de s'en convaincre lorsque la belle s'allongea de nouveau, mettant un terme à leur conversation. Cela ne ressemblait pas au gladiateur de se taire lorsque quelque chose le contrariait mais il reconnaissait une cause perdue quand il en voyait une. De plus, il ne tenait pas à ce que cela se termine en réelle dispute. Surtout sachant ce que leurs ébats représentait pour la vaanie.
Et puis, ils avaient simplement répondus à une pulsion. Ce genre de choses se reproduisait rarement deux fois avec la même personne, surtout sans aucun affect. Il était inutile qu'ils se prennent davantage la tête.

Sans même prêter un regard au corps qui s'offrait à sa vue, il s'étendit à son tour sur le dos. Il laissa s'écouler quelques instants avant de proposer d'un geste à Sanaa de revenir se blottir contre lui. Lorsqu'elle fut installer, il tira à nouveau la couverture sur eux puis ils restèrent là sans plus bouger. Sauveur était assez contrarié mais prit sur lui pour le montrer le moins possible. Il devait cependant reconnaître que le doux contact du corps entièrement nu de la jeune femme conte le sien apaisait un peu son humeur, si bien qu'il se tourna sur le côté pour la serrer entièrement dans ses bras. Il s'endormit ainsi, la belle rousse tout contre lui.
Le lendemain, il se réveilla dans cette même position. Le jour ne s'était pas encore levé mais l'horizon avait commencé à s'éclaircir. Il aurait pu se dégager discrètement de leur étreinte mais il choisit plutôt de réveiller doucement Sanaa, préférant ne pas partir comme un voleur. Ce ne fut qu'en se rhabillant qu'il observa la pièce dans laquelle ils se trouvaient.

-Ce n'est pas ta chambre ça ?...

Peu lui importait de savoir où ils l'avaient fait et dans le lit de qui il avait dormi. L'audace de Sanaa l'amusa autant qu'il lui permit de réaliser le risque qu'elle avait pris en faisant ça. Ils avaient eu de la chance que personne ne les ait surpris... Il n'appartenait certes pas à la maison mais il n'en restait pas moins esclave et lui aussi aurait passé un sale quart d'heure. C'était à croire qu'elle voulait s'attirer des ennuis et qu'elle se moquait bien de l'entraîner avec elle...

Pour les Hadjaoui et la maison Noblegriffon, la version officielle fut que Sauveur était parti juste après avoir couché Aimé. Mais son absence avait été remarquée à l'Aile Blanche et Hashar ne manqua pas de lui tomber dessus dès qu'il apprit qu'il était rentré. L'eunuque le fustigea comme il savait si bien le faire. Les gladiateurs en permission avaient un couvre-feu à respecter et le jeune homme allait être privé de liberté pendant un bon moment après son écart de conduite. Mais cela ne sembla pas inquiéter l'Hadjaoui le moins du monde...

-Tu as la mémoire courte, dis-moi.
-Hein ? De quoi tu parles ?
-Si mes souvenirs sont exacts, j'avais le droit de passer la nuit dehors dans un certain cas. Devant le regard interloqué du péninsulaire, il poursuivit. Tu as dis, et je te cite, que je pouvais "découcher" si c'était pour me "vider les couilles".

Les mots n'étaient clairement pas de lui car, s'il lui arrivait d'être vulgaire, il ne l'était pas sur ce plan là. Et Hashar de se remémorer soudainement ses paroles de la veille. Il avait conseillé à Sauveur de se détendre un peu et de se trouver une nana pour l'y aider mais le gladiateur lui avait laissé entendre qu'il n'était pas du genre à payer pour ce genre de service. Aussi, une soirée ne serait pas suffisante pour cela. Il était vrai que s'il fallait prendre le temps de trouver une femme ouverte à l'idée, de la draguer et de la motiver à passer à l'acte, ses quelques heures de permission s'avéraient un peu justes... D'autant qu'on n'abandonnait pas ses femmes-là dès l'acte accompli, c'eut été bien mal la considérer. D'où le fait de lui avoir donné sa nuit s'il faisait mouche mais l'eunuque ne pensait pas une seconde qu'il le ferait... Aussi, il lui était difficile de croire que c'était effectivement arrivé. Il voulut donc en savoir plus et Sauveur se contenta de lui décrire son amante d'un soir sans lui donner son nom et sans apporter de détails concernant leurs ébats. Une rousse, au teint bronzé et aux yeux clairs, ça paraissait effectivement difficile à inventer... Hashar était encore dubitatif mais il le laissa rejoindre ses collègues à l'entraînement et il n'y eut pas de répercussion quant au non respect du couvre-feu.
Enfin si, il y en eut une : la prochaine sortie de Sauveur n'eut pas lieu avant deux ennéades. Aimé trouva cela bizarre étant donné que Courtois avait eu droit à deux sorties pendant ce temps mais il ne chercha pas plus loin. Lorsque les portes de l'école s'ouvrirent à nouveau pour lui, il retrouva tout le petit groupe à une taverne. En apprenant que Sanaa était là, il pesta intérieurement, ce qui n'avait rien de très surprenant étant donné la teneur de leur dernière conversation... Mais lorsqu'il la vit, il se remémora cet instant où elle se tenait nue devant lui alors qu'elle venait tout juste de retirer sa robe, le souffle court et le regard brûlant. Lui tendant un verre, leurs doigts se frôlèrent et il sentit son grain de peau contre la sienne, se rappelant les caresses qu'il lui avait offerte. Passant non loin d'elle, l'odeur envoûtante de ses cheveux lui serra le ventre. Bien vite, il réalisa qu'il avait de nouveau envie d'elle et il crut lire la même chose dans le regard de la rousse. Profitant d'un moment de battement dans leur soirée où tous étaient éparpillés à droite et à gauche, il attira discrètement Sanaa dans une cage d'escalier réservé aux employés. Après une très brève discussion pour le mois acidulée, les choses reprirent bien vite comme lors de leur précédente soirée... Et il les entraîna dans un placard dissimulé sous les marches pour goûter une seconde fois à cette chair qui l'appelait avec tant de force et qui soupirait au moindre de ses gestes, debout contre le mur du fond, la soulevant telle une plume. Puis ils rejoignirent le reste du groupe, séparément, faisant mine d'être aller se soulager ou prendre un verre. Mais le malaise qui demeurait entre eux après la première fois de Sanaa était déjà presque effacé.

Et cette pulsion refit surface chaque fois que leurs chemins se croisèrent. Au début, ils se laissèrent surprendre, assouvissant leur désir soudain dans des endroits plutôt insolites. Puis, peu à peu, ils s'organisèrent, s'arrangeant pour se retrouver une fois la soirée finie ou anticipant la suivante pour combler leur désir au préalable. Une fois, Sauveur lui confia entre deux soupirs qu'elle le rendait complètement fou... Dès qu'il la voyait, il se remémorait leurs précédents ébats. Dès qu'il sentait son odeur, il devait résister à l'envie de plonger sa tête dans son cou pour la goûter. Dès qu'il la frôlait, il voulait sentir sa peau nue contre la sienne. Jamais il n'avait désiré quelqu'un à ce point. Et ce n'était que cela : du désir. Car si une relation s'installa entre eux, elle était purement charnelle. Ils n'évoquèrent jamais le moindre sentiment ou l'envie de faire d'eux un véritable couple. Dans le cas contraire, Sauveur aurait refusé, quitte à mettre un terme à leur liaison. Il ne voulait pas une relation amoureuse, il ferait déjà souffrir suffisamment de monde s'il devait tomber dans l'arène. Dans leur cas, ce n'était sans doute pas plus mal de toute façon car ils étaient rarement d'accord et se disputaient facilement. Cependant, même s'ils se quittaient fâchés, ils finissaient toujours par se réconcilier sur l'oreiller la fois suivante. C'était plus fort qu'eux. Et plus le désaccord était important, plus leurs ébats étaient intenses.

Mais à force de cachotteries et de pulsions incontrôlées, Aimé finit par soupçonner quelque chose. Il avait capté des regards un peu trop soutenus, souligné des paroles pleines de sous-entendus et remarqué des petites absences des deux vaanis au cours de leurs soirées. Sauveur parvint à éviter ses questions jusqu'au jour où son frère lui demanda s'il savait qu'elle avait quatorze ans. Il n'avait alors pas pu cacher sa stupéfaction. Il la croyait plus près de l'âge adulte que de l'enfance... Cela expliquait bien des choses... A commencer par le fait qu'elle était encore vierge au moment de leur première fois alors qu'elle semblait pourtant ne pas avoir froid aux yeux. A partir de ce jour-là, Aimé n'eut plus besoin de soupçonner quoi que ce soit, il sut. Son cadet lui avoua qu'il s'y prenait un peu tard pour le convaincre de ne pas passer à l'acte et qu'ils ne pouvaient pas s'en empêcher, ni l'un ni l'autre. Ils étaient tels deux aimants qui s'attiraient avant de se repousser pour mieux se retrouver par la suite... Mais ce n'était que purement physique, il n'y avait rien d'autre et c'était pour cela qu'ils gardaient la chose secrète.
Néanmoins, Aimé voulut s'assurer que Sanaa était du même avis que lui car elle aurait très bien pu lui mentir pour pouvoir le garder. Il choisit un moment purement informel, profitant que les deux amoureux dansaient et que ses autres frères ne soient pas là. Il soigna son approche afin qu'elle ne prenne pas sa démarche pour un jugement ou un conseil paternel. Il n'avait clairement pas son mot à dire dans leur histoire après tout. Il joua donc sur leur complicité pour la chahuter gentiment sur le sujet et la mettre en confiance. Elle lui apporta une réponse assez similaire à celle de son frère, quoi que bien plus légère à son goût. C'était pour "s'amuser". Il ne fut pas convaincu que les choses s'en tenait au sexe entre eux mais il ne dit rien. Les grands jeux qui s'annonçaient bientôt saurait vite lui apporter des réponses plus sincères car il ne doutait pas que Sauveur parviendrait à franchir les premières épreuves. Il glissa rapidement une allusion sur le tournoi et le fait que ses frères devaient s'y inscrire afin de voir la réaction de la jeune femme. Cela ne laissait cependant pas place à la discussion car Digne et Aislinn ne les rejoignirent bien vite. Pour eux aussi, les choses avaient évoluées.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeJeu 11 Avr 2019 - 15:35

Aislinn Nobglegriffon

Oglicos 52 Verimios de l’An 13:XI, le lendemain de sa rencontre avec Eloi du Vertbois, dans la demeure de Varlar.

Depuis qu’elle s’était réveillé une petite heure plus tôt, Aislinn n’avait pas esquissé le moindre mouvement. Elle s’était contentée de ressasser les événements de la veille, les yeux rivés sur le plafond.

Aislinn avait vu Varlar prendre la mesure de sa défaite, lorsqu’Eloi avait finalement révélé qu’un mariage avec l’héritière Noblegriffon n’avait jamais fait parti de ses projets. Elle avait vu le visage du vieux Langecin se fermer comme une huître et son regard dur et froid passer de sa protégée à Digne. Il ne me fera plus jamais confiance, avait-elle compris et elle ne pouvait pas étouffer complètement le sentiment de culpabilité que cette pensée avait engendré. Il a toujours servi ses intérêts, mais jamais au détriment des miens. D’où ils venaient tous deux, qu’une jeune femme s’offrît en mariage à un bon parti pour s’assurer une vie confortable était la norme, pas l’exception.

La trahison était réciproque, cependant ; elle était prête à assumer ses fautes, mais aucune ne méritait qu’il levât la main sur elle.

« Maintenant que je vous ai rencontré, je ne peux m’empêcher de regretter les actes de votre mère… avait soupiré Eloi avant d’emboîter le pas à Varlar, si elle n’avait pas tué un Roi, je n’aurais pas hésité longtemps à faire de vous mon épouse. »

Et le chevalier de darder un regard sur Digne, comme pour jauger quel rival il aurait fait ; le sourire en coin dont il les avait gratifiés avant de prendre congé fut l’unique indice qu’il consentit à leur donner quant au résultat de ses réflexions.

Elle avait eu de la chance.

Elle avait cru qu’il lui suffisait de tenir tête à Varlar pour mettre en défaut ses projets ; que sa volonté seule pouvait défaire cette voie qu’il avait commencé à tracer pour elle — pour lui — sans la consulter avant. Les quelques mots d’adieu d’Eloi lui avaient cruellement remémoré où était sa place ; même les regards doux et les paroles d’amour de Digne n’avaient pu totalement lui changer les idées.

« Sanaa ? » appela-t-elle son amie qui, supposait-elle, dormait toujours à quelques mètres d’elle.

Elle était rentrée tard et n’avait pas été très surprise de découvrir la demeure de Varlar entièrement vide ; il n’était pas rare que le vieux Langecin s’absentât plusieurs jours et elle ne savait pas quand il referait surface cette fois-ci — encore moins dans quel état d’esprit. Quant à Aimé et Sauveur, ils avaient dû tirer leur révérence plus tôt dans la soirée ; en tout cas Sanaa était couchée, ce qui était déjà plus inattendu. Aislinn s’était tout de même réjoui de ne pas avoir à revivre sa confrontation avec son tuteur pour la raconter à la Vaanie. Elle s’était contentée de se changer aussi rapidement et silencieusement que possible, avant de se glisser sous ses draps à son tour.

Se redressant sur son coude, l’héritière Noblegriffon fronça les sourcils quand elle posa enfin son regard sur le matelas à côté du sien. Soit Sanaa avait doublé de volume en quelques heures, soit…

« Aimé ? lâcha-t-elle estomaquée en reconnaissant l’aîné des Hadjaoui. Qu’est-ce que tu fais là ? Où est Sanaa ? Et… »

Le souvenir des événements de la veille et la manière dont elle s’était dévêtue sans gêne à ses côtés la rattrapèrent et elle manqua s’étrangler en ce sentant rougir. Il devait dormir à ce moment-là et même s’il n’en était rien, il faisait si noir qu’il n’avait rien pu voir.

« Sanaa ? » appela Aislinn en haussant la voix avec fébrilité.

La Vaanie ne mit guère de temps à les rejoindre, fraîche comme un gardon et visiblement amusée par l’étrange scène matinale qui se déroulait sous ses yeux pétillants de malice. Elle n’eut aucun mal à expliquer le fin mot de l’histoire, tandis qu’Aimé émergeait péniblement de sa soirée arrosée. Trop prompt à vider ses verres, l’ancien gladiateur avait vite sombré dans un profond sommeil ; Sauveur et Sanaa, avinés eux aussi du propre aveu de la concernée, l’avait aidé à aller se coucher dans la chambre des adolescentes… seulement pour se rendre compte qu’il ronflait si fort que jamais la Vaanie ne pourrait dormir dans son lit. Elle avait donc décidé « d’emprunter » celui de Varlar, tandis que Sauveur s’en était retourné à l’Aile Blanche.

« La nuit a été bonne, au moins, Aimé ? » l’alpagua une Sanaa résolument taquine.

Aimé gronda gentiment alors qu’il peinait à ouvrir les yeux tant la faible lumière qui éclairait la pièce lui faisait mal au crâne. Ses paupières ne semblant pas suffire à l’en protéger, il mit une main par dessus. S’il avait bien dormi ? Elle n’avait jamais dû être saoule pour poser cette question.

« Au lieu de te moquer, tu n’aurais pas plutôt un verre d’eau ? Peut-être même un pichet… »

Plusieurs heures plus tard, dans le courant de l’après-midi.

Sanaa avait insisté pour qu’Aaimé déjeunât avec elles avant de s’en aller et comme souvent avait obtenu gain de cause. Le Hadjaoui ne s’était cependant pas énormément attardé, car il était attendu à l’auberge. Dès qu’elles avaient été seules, Sanaa avait assailli son amie de questions, mais Aislinn avait fermement refusé d’y répondre et s’était à la place enfermée dans le bureau de Varlar.

L’idée lui était venue en se réveillant : elle voulait profiter de l’absence de son tuteur pour tenter de percer tous les secrets qu’il gardait toujours par-devers lui. Elle ne pouvait plus se permettre de le laisser mener leurs affaires avec autant de liberté. Elle avait déjà commencé à enquêter dans la plus grande discrétion — elle n’avait confié ses édifiantes trouvailles à personne, pas même à Sanaa ou Digne —, mais il lui manquait encore des plusieurs pièces du puzzle. C’était sa chance de lever plus d’un voile sur les activités plus ou moins licites de Varlar et elle entendait bien la saisir. Le moins que l’on pouvait dire, c’était qu’elle n’était pas déçue. Cela faisait quatre heures qu’elle s’était enfermée dans l’antre austère de Varlar et le sol était jonché de parchemins qu’elle avait dévorés avidement avant de les abandonner sur place.

Les Cinq en fussent témoins, elle avait sous-estimé le Langecin ; le faquin trempait dans pas moins de trois opérations hautement risquées — qui pouvaient toutes leur faire perdre une bonne partie de leur capital si les calculs d’Aislinn étaient corrects — dont une qui s’appuyaient lourdement sur des réseaux et des mécaniques parfaitement scandaleuses.

Si Aislinn s’en était douté, elle en avait la preuve désormais : son or était sale.

Cela l’horrifiait, mais dans le même temps, elle savait qu’elle avait trouvé là toutes les informations qui lui manquaient pour s’émanciper de Varlar sans plus tarder.

Un cri l’arracha à ses lectures et chassa au moins momentanément de son esprit ces préoccupations qui la dépassaient. Elle avait tout de suite reconnu la voix.

« Sanaa ? » appela-t-elle en se redressant.

Elle rassembla ses robes dans ses mains pour qu’elles ne la gênassent pas, puis se mit à trottiner vers la sortie du bureau… seulement pour entendre un second hurlement, accompagné d’un juron chargé d’une colère noire.

« Espèce de petite conne ! Tu vas te calmer, oui ? » La Rivoise se figea en reconnaissant Varlar, qui avait donc décidé de retrouver le chemin de sa demeure plus vite qu’elle ne l’avait anticipé. « Puisque je te dis que tu viens avec moi ! »

Il était hors de lui et ses projets n’avaient rien de pacifique. Veut-il se venger de mon audace en s’attaquant à elle ? se demanda-t-elle en se sentant prise de vertige à cette idée. Il avait beau lui avoir offert l’adolescente deux ans plus tôt, légalement il en était toujours le propriétaire. Rien ne l’empêchait en théorie de l’amener sur un marché d’esclaves et de la vendre au plus offrant, voire de la donner au premier venu ou même de la tuer…

Le souvenir encore cuisant de la veille la retint de se ruer sans plus tarder au secours de son amie ; quand il avait levé la main au-dessus de sa tête pour la frapper, elle s’était sentie si impuissante et démunie qu’elle n’avait rien pu tenter pour l’arrêter. Il était hors de question que ce scénario se reproduisît, pas alors que la survie de Sanaa en dépendait. Elle se précipita donc jusqu’à l’âtre froid et poussiéreux de la pièce — Varlar ne s’en servait jamais — et saisit sans y réfléchir le tisonnier qui y trônait.

« Aislinn ! » l’appela directement Sanaa et la panique qui transpirait dans sa voix fit l’effet d’une gifle à l’héritière.

Rassurée par le poids de son arme improvisée, elle quitta enfin cette pièce maudite pour se porter au secours de l’adolescente.



Sanaa

Quand Aislinn avait refusé de répondre à la moindre de ses questions, Sanaa avait compris que sa confrontation avec Varlar n’avait pas dû aussi bien se passer qu’elles l’espéraient de prime abord ; lorsqu’elle avait vu le vieux Langecin débouler dans sa chambre comme un fou furieux, elle avait mesuré combien sa première intuition était à la fois juste et terriblement loin de la réalité Il avait saisi son bras avec une violence dont il n’avait jamais fait preuve jusque là et qui l’avait laissée complètement pantoise. Elle avait essayé de protester et de se débattre, mais il n’avait rien voulu entendre et lui avait même asséné un coup sec à l’arrière du crâne pour lui intimer le silence.

Ce simple geste avait fait remonter en elle des souvenirs qu’elle pensait avoir réussi à sceller loin dans son inconscient et elle s’était ratatinée sur elle-même.

« Ta maîtresse a dépassé les bornes, lui expliqua-t-il d’une voix dure tandis qu’il la jetait presque dans le couloir devant lui. Il est plus que temps que je lui rappelle que ses actions ont des conséquences. Allez, viens avec moi.

Arrête, » protesta-t-elle en essayant de libérer son poignet.

Elle avait cru que les quelques heures qu’elle avait passées avec Sauveur l’aideraient à s’affranchir des remarques et des insultes de Varlar, qu’elle pourrait se sentir plus libre après ça… mais elle se rendait compte désormais qu’il la molestait combien elle avait été stupide. Elle ne savait pas quoi faire, sinon se débattre, mais il lui semblait que ses ruades ne faisaient aucun effet à son agresseur ; pis, il lui donna un violent coup de pied dans les jambes pour l’immobiliser et elle lâcha son premier cri sous le coup de la douleur.

« Espèce de petite conne ! Tu vas te calmer, oui ? rugit-il hors de lui. Puisque je te dis que tu viens avec moi !

Non, non, non ! glapit-elle en se laissant cependant guider malgré elle. Lâche-moi ! Arrête ! » Puis, n’y tenant plus, elle leva la tête et hurla de toutes ses forces. « Aislinn !

Sanaa ! » lui répondit l’héritière sur le même ton.

Elle s’approchait.

En entendant la voix de sa protégée, Varlar se figea, puis posa un regard un peu fou sur sa victime.

« Tu n’as rien à espérer de cette traîtresse, » lui asséna-t-il en relâchant légèrement sa prise. Elle voulut essayer d’en profiter, mais seulement pour voir son ouverture lui échappait. Le Langecin recommença à la traîner derrière lui. Aislinn déboula dans leur dos en courant, le souffle court. Varlar ne lui fit même pas l’honneur de se retourner pour l’accueillir. « Ta petite rébellion s’arrête aujourd’hui et maintenant, lui annonça-t-il avec mépris. Quand je reviendrai, seul après m’être débarrassée de ta précieuse Vaanie, tu sauras que tu ne peux pas me défier comme tu l’as fait sans en souffrir les… »

Il ne termina pas sa phrase ; Sanaa eut tout juste le temps de voir la pointe du tisonnier fondre sur lui et il couina comme un proc quand il sentit le métal froid lui entailler profondément la joue. Aislinn attrapa sa confidente par l’épaule et la tira vers elle pour qu’elle pût se mettre à l’abri de son tyran, qui se retournait en écarquillant les yeux.

« Je serai la dernière femme que vous sous-estimerez, Varlar, » lui promit-elle d’une voix vibrante de colère.

Sous le choc, Sanaa tituba de quelques pas en arrière, fascinée comme le Langecin par la pointe de l’arme d’Aislinn et par les goûtes carmines qui s’en échappaient.

« J’aurais pu vous tuer, » lui apprit Aislinn.

La Vaanie n’avait aucune idée de l’état d’esprit de la Rivoise en cet instant précis, d’autant qu’elle lui tournait le dos. Elle était cependant bien placée pour juger de l’effet que son assurance avait sur Varlar. Le péninsulaire avait plaqué sa sénestre sur sa plaie et donnait l’impression de ne plus savoir quoi faire face à la furie qui venait de le blesser.

« Ne sois pas ridicule, finit-il par protester. Un courant d’air te fait sursauter, jamais tu… »

Il ne termina pas sa phrase, car l’héritière Noblegriffon raffermit sa prise sur le manche de son arme improvisée, avant de lever la pointe du tisonnier à hauteur du visage de son adversaire, qui pâlit sous la menace.

« Digne m’a appris à me servir d’une épée, lui apprit-elle d’une voix blanche. Je ne pensais pas avoir à utiliser ses leçons un jour et encore moins contre vous, mais je vous le promets, Varlar : si vous touchez à nouveau à un seul des cheveux de Sanaa, je n’hésiterai pas. » Il voulut répondre quelque chose, mais elle lui coupa l’herbe sous le pied en haussant le ton d’un coup. « Assez ! Vous aviez mille et mille occasions de parler et je vous aurais écouté à chaque fois ; il est trop tard, désormais. Je. sais. tout. »

Ou en tout cas, elle en savait bien assez.

Réduite au rang de spectatrice de cette confrontation dont elle ne comprenait plus rien, encore ébranlée par le déchaînement de violence dont avaient fait preuve tant Varlar qu’Aislinn, Sanaa était perdue. La Rivoise dut s’en rendre compte, car elle posa un instant ses prunelles sur elle et tendit son bras libre pour lui caresser les cheveux avec douceur ; heureusement pour eux trois, Varlar ne se sentit pas l’audace de profiter de son court moment d’inattention pour tenter quoique ce fût.

« Ça va aller ? lui souffla-t-elle avec une bienveillance infinie.

Ne t’occupe pas de moi, la pressa Sanaa sans quitter du regard le Langecin et le danger qu’il représentait.

Bien sûr que si, la contredit-elle en esquissant un rapide sourire avant de redevenir mortellement sérieuse. Il t’a blessée ? Tu peux marcher ? » Et Sanaa d’opiner de répondre par quelques hochements de tête. « Très bien, alors ne reste pas ici. File à l’auberge de Kassim, je viendrai te rejoindre quand j’en aurai terminé avec lui. »

Elle voulut protester, mais quelque chose dans les yeux d’Aislinn l’en empêcha.



Aislinn Nobglegriffon

Une fois Sanaa partie, Aislinn reporta pleinement son attention sur Varlar, qui avait sagement préféré s’abstenir de commenter la fuite de la jeune esclave. La Rivoise aurait tellement voulu pouvoir suivre la Vaanie ; pour autant, elle avait conscience qu’il lui restait encore beaucoup à accomplir pour couper définitivement à son tuteur la moindre envie de se venger à nouveau et qu’elle ne pouvait plus attendre.

Ces découvertes de l’après-midi et cette altercation avait au moins l’avantage de l’avoir libérée de la culpabilité qu’elle avait pu ressentir.

« Nous savons tous les deux que tu n’es pas une tueuse, Aislinn, » finit-il par asséner. Cet interlude lui avait permis de retrouver un peu de contenance. « Je dois cependant t’avouer que je ne te pensais pas capable de tout cela. »

Il essaie de reprendre la main, comprit-elle en plissant les yeux, soupçonneuse. Ce ne devait pas être la première fois que ses manières et ses affaires le plaçaient du mauvais côté d’une arme ; qu’elle fut tenue par une adolescente devait être inédit, mais Aislinn ne doutait pas que cela changeait peu de choses en fin de compte. Il joue ; l’or est l’étalon dont il se serre pour compter les points, rien de plus… Mère partageait cette vision du monde, fut un temps. C’est peut-être pour cela qu’elle lui a si souvent passé ses offenses.

Aislinn, cependant, n’était pas Katalina Noblegriffon ; et jamais la gardienne n’aurait fermé les yeux sur ce qu’il avait fait à Sanaa.

« Il faut que nous parlions — et pas seulement de ce que vous venez de faire. J’ai quelque chose à vous montrer, » lui intima-t-elle en lui indiquant de la pointe du tisonnier la direction de son bureau.

Elle avait pris sa décision. Elle ne devait plus attendre : elle devait le mettre hors d’état de lui nuire, à elle, mais aussi à ceux qu’elle aimait, aujourd’hui.

Surpris par ce soudain changement de ton et d’attitude, il ne chercha pas à protester et après un temps d’hésitation, haussa les épaules et se mit en marche. Elle lui emboîta le pas, sans se départir de sa précieuse arme. Elle lui semblait si légère — alors qu’elle ne l’était pas et que l’engourdissement de son bras finirait bien par la rattraper. Quand il poussa la porte de son antre, il lâcha un juron en constatant le désordre qu’Aislinn y avait mis pendant la journée. Sans se soucier de ce menu détail, elle le dépassa, dardant son regard sur les sol avant de ramasser un parchemin en particulier et de le parcourir rapidement des yeux. Elle reporta ensuite son attention sur Varlar.

« Au début du mois, j’ai visité les quatre entrepôts que nous possédons et le comptoir qui nous sert à vendre nos biens, commença-t-elle. Savez-vous ce que j’y ai trouvé ?

Ce qui me permet de t’acheter ces robes que tu te plais tant à porter ? suggéra acerbement le Langecin. Je ne vois pas en quoi cela concerne notre différend actuel. À moins que tu espères encore que je vais tout te pardonner et fermer les yeux sur… ça ?

Des esclaves, Varlar, asséna-t-elle en ignorant la vilaine blessure qu’il cherchait à lui agiter sous le nez. Trois esclaves pour chaque homme libre que nous employons, très exactement. »

Elle darda sur lui des prunelles révoltées. Elle avait eu beaucoup de mal à garder pour elle cette découverte, car elle ne savait pas comment elle devait la gérer. Cela ne sembla pas impressionner Varlar plus que cela, bien au contraire. Elle le sentit même se détendre et quand elle le vit commencer à ricaner un peu bêtement, elle comprit qu’il ne saisissait pas la mesure de ce qui était en train de se jouer. Comment pouvait-il croire qu’il s’en tirerait à bon compte, après ce qu’il avait fait subir à Sanaa ? Si Aislinn, dans ces circonstances entre toutes, prenaient la peine d’évoquer ces sujets avec lui, c’était qu’il devait être grave, non ?

« Voyons, Aislinn, soupira-t-il en adoptant ce ton paternaliste qu’elle avait appris à détester récemment. Nous avons déjà eu l’occasion d’en parler. Tu fais ce que tu veux de Sanaa, mais l’esclavage fait parti des traditions locales.

Chez les autres ! » explosa-t-elle. Elle redressa vivement le tisonnier vers lui et Varlar recula d’un pas en levant les mains devant lui. « Chez les autres, pas dans notre maison ! Et en même temps, quelle sotte je fais. Vous m’avez offert Sanaa après tout et jamais n’avez consenti à la libérer. » Sa candeur et naïveté lui faisaient honte. « Ne vénérez-vous pas les Cinq, à la fin ? Ne priez-vous pas la DameDieu ? Ou bien l’or est-il le seul Dieu que vous servez encore ?

Que veux-tu que je te dise ? » Le peu de contrôle de soi qu’il avait réussi à rassembler recommençait à lui échapper. « Je ne fais pas les règles, je me contente de les suivre. La liberté coûte cher ici et si je souhaite dégager un tant soit peu de marges, je ne peux pas me permettre de…

Nous. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire preuve d’humanité si nous voulons nous enrichir… Je savais que vous me répondriez cela, sauf que nous faisons des profits, le coupa-t-elle en attrapant un parchemin au hasard et en l’agitant devant elle. Beaucoup, beaucoup trop en réalité ; c’est ce que j’ai découvert tout à l’heure et pendant que je me pavane dans ces robes que vous m’achetez, nos esclaves mangent à peine deux repas par jour car il y a deux ans, vous vous êtes rendu compte que cela ouvrait la voix à des économies substantielles ; et ils s’entassent les uns sur les autres pour dormir, parce que vous avez appliqué la même logique pour régler le moindre aspect de leurs existences ! »

Cela dépassait de loin le seul sort de Sanaa.

Même s’il n’avait pas armé la main sur elle, Aislinn se serait peut-être armé de son tisonnier.

« Je fais ce qu’il faut pour t’offrir la vie que Katalina voulait pour toi, argua le Langecin ; comme s’il était autorisé à jouer cette carte-là.

Je vous interdis de parler de Mère aussi familièrement, asséna-t-elle en jetant le parchemin dans sa direction. Si je suis certaine d’une chose, c’est que vous ne vous seriez jamais permis tout cela si elle avait été là pour garder un œil sur vous.

Petite, je connaissais déjà ta mère que tu n’étais pas encore née, gronda le Langecin. Si elle t’a confiée à moi, c’est bien parce qu’elle avait foi en mon jugement… Je découvre aujourd’hui que j’ai misérablement échoué dans cette seconde tâche, à mon grand désarroi !

Oh, mais elle ne vous a jamais fait confiance, objecta Aislinn. Je dois d’ailleurs vous remercier, car sans vous, je ne l’aurais sans doute jamais compris… mais en lisant ses Mémoires, tout est devenu plus clair. Vous auriez dû vous y intéresser un tant soit peu avant de me conseiller de me les procurer.

Nous n’avons peut-être pas toujours entretenu les relations les plus cordiales qui soient, convint-il en grimaçant à cause de la douleur que lui causait son entaille, mais elle savait ce qu’elle faisait en te confiant à moi.

En cela, je ne peux qu’être d’accord avec vous, acquiesça-t-elle. Cet homme est un piètre marchand, mais un très bon escroc ; il vous fait fructifier une fortune en tarissant sa source, puis migre à la recherche d’un nouveau cours d’eau. Je la cite. Mère se moquait bien de ce comptoir qu’elle vous a laissé fonder avec son nom, tant qu’il me gardait de la misère à laquelle elle s’était persuadée m’avoir condamnée quand elle a croisé ma route.

Elle a vraiment écrit ça ?

Et d’autres choses, mais cela ne devrait pas retenir plus longtemps notre attention, car voyez-vous, mes découvertes ne se limitent pas à votre mépris absolu de la dignité humaine. Vous êtes aussi un idiot, qui pensez que défier le conseil marchand de Thaar en vous soustrayant à l’impôt du guet est autre chose qu’une folie. »

C’était la seconde pépite qu’elle avait déniché dans cet amoncellement de documents. Cette nouvelle accusation prit de court Varlar, qui voulut répondre quelque chose, mais sentit ses mots mourir dans sa gorge avant qu’il n’eût l’occasion de les cracher. Cela doit vous rappeler de bien mauvais souvenir, n’est-ce pas ? le provoqua-t-elle du regard. Quand Mère vous a défait, il y a de cela bientôt vingt ans, est-ce que vous avez ressenti la même chose ?

« J’ai beaucoup de respect pour les princes marchands du conseil, Aislinn, mais cet impôt est une escroquerie sans nom. Il est exorbitant et…

… et nécessaire ! Il est ce qui permettra un jour aux Thaarii de marcher dans toutes les rues de leur propre ville sans craindre de s’y faire molester ou pire. Vous êtes vous déjà promené hors des Soieries, à la nuit tombée ? » Elle marqua une pause, qu’elle mit à profit pour séparer ses mains et les reposer une nouvelle fois bien à plat pour se calmer. « En tout cas, c’est à cela qu’il devrait servir, mais là n’est même pas la question. Est-ce que vous vous êtes renseigné sur ce qui arrivait aux petits bourgeois comme nous qui sont découverts la main dans le sac à défier l’autorité du conseil ? Même moi je le sais ! » Elle secoua sa dextre pour lui signifier qu’elle n’avait pas fini. « Oh, mais je connais déjà la réponse, car je ne vous crois pas assez courageux pour avoir pris un tel risque consciemment.

Il n’y a aucune chance que cela nous soit reproché, protesta Varlar Tout le monde cherche ce genre d’arrangement depuis la réforme du guet. Ils n’ont pas le choix… et moi non plus.

Sombre buse ! Nous ne sommes pas des Vaanis, nous. Si le conseil doit faire un exemple, c’est vers nous qu’il se tournera le premier ! »

Chaque seconde de leur confrontation qui passait ne faisait qu’accentuer un peu plus le mépris qu’elle ressentait depuis qu’elle avait fouillé ses archives. Cet homme n’a aucun honneur et moins encore de moral. Si ses pairs se nourrissaient de bambins, il irait les chercher dans le ventre de leurs mères. C’était peut-être cela qui l’énervait le plus : Varlar n’assumait rien et blâmait le reste du monde. Elle était jeune et idéaliste assurément, mais elle voulait pouvoir se regarder dans le miroir sans la honte qu’elle ressentait en cet instant.

« Ce que vous avez fait aujourd’hui à Sanaa est impardonnable, ce que vous avez comploté pendant des années en mon nom — car vous avez toujours pris soin de vous auréoler du nom des Noblegriffon — est inqualifiable. Je ne veux plus vous voir. Vous allez retourner à Ys et vous ne reviendrez pas à Thaar tant que j’y vivrai, est-ce que c’est clair ? » Elle darda sur lui des regards brûlants en ajoutant. « Vous continuerez à percevoir une part des profits de mes comptoirs, ainsi que Mère vous l’a promis, mais vous n’aurez plus jamais votre mot à dire si quoique ce soit qui me concerne de près ou de loin… Et si je découvre un jour que vous cherchez à vous soustraire à cette injonction, je vous le jure Varlar : vous le regretterez. J’ai bien assez de cordes à mon arc désormais pour vous réduire au silence. Et si ce n’est pas moi qui le fait, alors ce sera le Vaisseau de la Voilée qui s’en chargera. »

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeJeu 11 Avr 2019 - 18:58

Aislinn Noblegriffon

Arcamenel 71 Verimios de l’an 13:XI, à la tombée de la nuit, dans la chambre d’Aislinn.

Varlar avait quitté Thaar pour Ys moins de vingt jours auparavant, mais tandis qu’elle sentait sur son corps à moitié dénudé les caresses et baisés de Digne, Aislinn ne pensait plus du tout au vieux Langecin. Il fallait dire que depuis que Sanaa avait investi la chambre laissée vacante après son départ, sa relation avec le jeune Hadjaoui avait pris un tournant à la fois attendu et redouté par la Rivoise ; fort heureusement, son compagnon faisait en tendresse comme pour tout le reste preuve d’un savant mélange de passion, de patience et de retenue qui avait permis à la Rivoise de s’initier aux jeux du plaisir sans ressentir de pression particulière.

« Je t’aime, Digne Hadjaoui, » susurra-t-elle au creux de son oreille tandis qu’elle l’aidait à retirer sa tunique ; et si elle en pensait chaque mot, elle le disait aussi en cet instant précis parce qu’elle avait bien compris quel effet cela faisait à son partenaire. Elle adorait voir son visage s’illuminer, les poils de ses bras se soulever et ses homoplates étaient secouées de léger frémissement d’anticipation. Elle se souvenait encore quand, presque timidement, il avait laissé ses mains s’aventurer sur son ventre et remonter sur ses seins pour la première fois. Elle avait senti son envie d’elle, mais sa peur aussi de la brusquer ; elle l’avait encouragé à continuer ses explorations en caressant ses épaules avant de l’embrasser. Ils n’étaient pas allés beaucoup plus loin ce soir-là, mais cela n’avait pas semblé le déranger. Quatre jours plus tard, elle s’était dénudée quasiment entièrement devant lui pour s’offrir, conquise, à ses cajoleries pleines de douceur. Le lendemain, elle l’avait poussé à se débarrasser de ses vêtements à son tour et elle avait pour la première fois promené son regard sur le corps d’un homme en proie au désir. Cette nuit-là, elle avait caressé timidement son sexe sans oser aller bien loin, avant de se laisser mener à son premier orgasme et d’en ressortir pantoise et déboussolée.

Chaque soirée passée en sa compagnie dans le secret de sa chambre lui ouvrait — leur ouvrait — de nouvelles perspectives, mais amenait aussi de nombreuses questions qu’elle ne savait à qui confier. Digne avait notamment commencé à s’aventurer dans son intimité avec son index lors de leur dernière « séance » et le plaisir induit par cette excursion n’avait pas réussi à supplanter une gêne persistante, presque une douleur qu’elle avait instinctivement tout fait pour lui cacher. Aislinn avait beaucoup changé depuis qu’elle avait échangé son premier baiser avec le Hadjaoui, mais elle restait tout de même fidèle à elle-même et elle ne voulait pas l’inquiéter plus que nécessaire. On l’avait prévenue que la première fois serait douloureuse et elle avait intériorisé cette idée. Tout ce qu’elle pouvait ressentir de négatif quand elle était avec son compagnon était donc normal et elle n’avait pas besoin de le troubler avec quelque chose contre lequel il était impuissant. Surtout, elle craignait que cela l’encourageât à repousser le moment où ils essaieraient ; or, si elle restait anxieuse à l’idée de l’accueillir en elle, elle s’était surprise à le vouloir aussi.

Par Arcam, elle en avait même rêvé à deux reprises.

« Digne ? l’appela-t-elle et son cœur battait déjà la chamade. Je crois que… » Elle darda sur lui des prunelles qui trahissaient tout ce qu’elle pouvait éprouver en cet instant précis : de l’amour, de la confiance, de la peur, mais du désir aussi. « Je crois que je suis prête, si tu l’es également. »

Elle ne doutait pas qu’il le fût, en l’occurrence.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeVen 12 Avr 2019 - 14:06

[justify]En voyant débarquer Sanaa à l’auberge, le sang de Digne se glaça. Elle était paniquée, inquiète et sous le choc tout à la fois. Elle résuma maladroitement ce qu’il venait de se passer, soulignant qu’elle venait de laisser Aislinn armée d’un tison face à un Varlar blessé et en fureur après elle. Sans plus attendre ni chercher à obtenir la permission de quitter son poste, le jeune homme sortit en trombe et partit droit en direction des Soieries. Kassim le héla en lui disant qu’il lui restait une heure à faire et Aimé lui répondit qu’il en ferait deux. Hors de question pour lui de demander à son frère de rester ne serait-ce qu’une minute de plus. Pas alors qu’Aislinn était peut-être en danger.
Lorsqu’il arriva sur place, Digne frappa jusqu’à ce qu’on vienne lui ouvrir. Le serviteur, ne le connaissant pas, n’eut pas le temps de l’empêcher de se glisser à l’intérieur. Digne se dirigea directement dans les couloirs, appelant sa bien aimée avec inquiétude et empressement. Elle vint bien vite à sa rencontre et il la prit dans ses bras. Il s’assura qu’elle allait bien et s’enquit de ce qu’il s’était passé depuis le départ de Sanaa mais il n’était pas temps d’en discuter. Varlar sortit de sa chambre, les bras chargés, les toisant d’un regard noir. Voyant la tenue du jeune homme, bien plus chiche que celle de la veille, il sut ses intuitions justes à son sujet mais se garda bien de dire ou faire quoi que ce soit. Aislinn venait déjà de le défaire et il ne pouvait pas savoir si l’Hadjaoui n’avait pas quelques grands noms dans ses papiers malgré sa basse condition…
Ce ne fut que le soir venu, alors que le péninsulaire avait quitté les lieux, qu’Aislinn lui raconta tout. Même si elle lui avait caché bon nombre de choses, Digne comprenait ses raisons d’agir de la sorte et se trouva même fier de ce qu’elle venait d’accomplir. Elle s’était désormais affranchie de l’influence de son tuteur et pouvait vivre pleinement sa vie comme elle l’entendait.
Avec lui...

Comme pour se remettre de leurs émotions et se rassurer mutuellement, cette nuit-là fut la première que le benjamin des Hadjoui passa en compagnie de la belle Noblegriffon. Ils s’étaient contentés de s’allonger dans les bras l’un de l’autre pour s’endormir après s’être administré mutuellement quelques caresses pudiques. Cependant, les choses commencèrent à évoluer assez rapidement après cela.
Au début, Digne parcourait seulement les parties accessibles du corps d’Aislinn, laissant ses doigts caresser sensuellement son cou, ses clavicules et la naissance de son décolleté. Elle vêtue d’une fine robe de nuit, lui torse nu, ils s’étreignirent avec la sensation d’être presque nus l’un contre l’autre. Puis, un jour, il avait réalisé un geste un peu plus osé. Il parcourait son corps à travers le tissu lorsqu’il frôla pour la première fois un de ses seins. Il avait rapidement retiré sa main mais la jeune femme l’avait embrassé avec cette pointe de passion qui éveillait tant son désir. Il prit cela pour ce que c’était : une invitation à continuer ce qu’il avait commencé et non de passer à l’acte. La fois suivante, il réitéra son geste et fut tenté de découvrir son sein pour sentir son contact chaud sous ses doigts… Aislinn avait dû le comprendre car elle l’invita à passer sa main sous son vêtement. A partir de ce jour, Digne comprit qu’ils avaient tous les deux les mêmes désirs : apprendre à appréhender lentement la chose en allant progressivement un peu plus loin dans leurs explorations. Alors il n’attendrait plus qu’elle lui en donne la permission pour partir à la découverte de cette envie qu’ils partageaient. Cependant, il voulut lui rappeler une chose, répétant ce qu’il lui avait déjà dit de nombreuses ennéades auparavant.

-Si je fais quoi que ce soit qui te gêne, n’hésite pas à m’arrêter.

Lorsque les choses furent clairement établies entre eux, Digne réprima un peu moins ses désirs, partant toujours plus à la conquête de ce corps dont il avait tout à apprendre. Leurs étreintes duraient chaque fois un peu plus longtemps, répétant les gestes qu’ils avaient déjà réalisés mais avec un peu plus d’assurance que la fois précédente avant d’aller un peu plus loin. Ainsi, après avoir découvert ses seins de ses doigts et de sa bouche, il avait lentement remonté l’intérieur de sa cuisse d’une main, soulevant les pans de sa robe, pour venir effleurer l’intimité d’Aislinn. Puis la caresser avec précaution. Lorsqu’elle s’offrit nue à lui, ses mains et ses lèvres partirent à la rencontre de l’ensemble de ce corps qui l’appelait désormais avec plus de force que jamais. Elle en fit bientôt de même pour lui, quoique bien plus timidement. Cela ne le frustra aucunement et il ne lui demanda rien de plus que ce qu’elle s’était senti capable de faire ce jour-là. Il avait apprécié le contact timide de ses doigts sur son membre avant de reporter à nouveau son attention sur elle. Dans ses tentatives, alors qu’il restait attentif à tout ce qui provoquait une réaction de plaisir chez son amante, il finit par lui procurer un orgasme sans vraiment avoir compris ce qu’il avait fait pour y parvenir. Il était alors remonté à sa hauteur et l’avait étreinte pour l’aider à revenir lentement à elle. La nuit qui s’en suivit lui sembla différente des précédentes car Aislinn lui parut bien sereine et détendue que jamais auparavant.

-Je t’aime, Digne Hadjaoui.

Un frisson parcourut sa colonne vertébrale. Il aimait qu’elle lui murmure cette phrase, et plus encore dans ces moments d’intimité qui n’appartenaient qu’à eux, qu’ils aimaient et redoutaient en même temps. A chaque fois, ses lèvres s’étiraient en un sourire heureux, comme si tout ce temps passé aux côté d’Aislinn était irréel et ne prenait forme que lorsqu’elle lui avouait ses sentiments. Cela provoquait chez lui la même joie que la première fois qu’elle le lui avait dit, la formulation aidant un peu…

-Je t’aime, Aislinn Noblegriffon. Lui répondit-il avant de revenir retrouver ses lèvres, oubliant qu’elle essayait tant bien que mal de l’aider à retirer sa tunique.

Une fois le vêtement négligemment envoyé au sol, il vint l’étreindre. Elle était encore habillée mais le col de sa robe était distendu par les attentions qu’il avait porté à sa poitrine avant de la rhabillée pudiquement. Ses épaules en étaient découvertes et il les embrassa avec envie. Si lui se sentait prêt depuis déjà plusieurs jours -malgré une légère pointe d’appréhension tout à fait naturelle-, il n’avait jamais essayé de brusquer les choses. Aussi abordait-il cette soirée de la même manière que les autres, sans la moindre intention de vraiment passer à l’acte.

Mais…

-Digne ?

Le souffle court, il sortit la tête du cou de la belle pour toiser son regard. Il brûlait de désir mais savait le contenir suffisamment pour elle. Puisqu’elle venait de le dévêtir à moitié, il l’imaginait assez mal qu’elle n’avait pas envie de ses attentions ce soir-là. Cependant, il était prêt à entendre ses éventuelles requêtes et lui prêtait une oreille des plus attentives malgré le sang qui frappait ses tympans avec violence.

-Je crois que je suis prête, si tu l’es également.

Digne ne s’était pas attendu à cela. Il savait que cela finirait par arriver. Il l’attendait, l’espérait et le craignait tout à la fois. Même s’ils maîtrisaient désormais les préliminaires, l’acte d’amour restait encore une grande source d’inconnus et d’inquiétudes. Lui non plus n’ignorait pas qu’il lui ferait certainement mal et c’était ce qui le freinait le plus dans ses actions.

-D’accord… Répondit-il maladroitement, rendu confus par le sens des mots qu’il venait d’entendre. D’accord. Répéta-t-il avec plus d’assurance.

Il posa une main sur la joue d’Aislinn tandis qu’un sourire naissait sur ses lèvres. Un sourire aimant et qui se voulait rassurant malgré cette pointe de crainte dont il ne pouvait se départir.

-S’il y a quoi que soit, arrête-moi. Entendu ?

Elle n’avait même pas de raisons à lui fournir pour qu’il obéisse. Qu’elle ait mal, que quelque chose la gêne ou tout simplement qu’elle change d’avis, tout était justifié à ses yeux pour qu’il s’interrompe même en plein ébat.
Puis il l’embrassa avec un désir nouveau après qu’elle ait acquiescé.


~~~~~~~~~~~~


Étendus sur la couche de la jeune femme, Digne avait juste pris le temps de les recouvrir du drap avant de venir la serrer dans ses bras. Même s’il essayait de le cacher, il était mortifié… Il se sentait à la fois mal à l’aise et coupable. Il se repassait le fil des dernières minutes écoulées et cherchait où il s’y était mal pris. Il n’y avait pourtant rien de bien compliqué et la chose semblait pourtant bien engagée. A la réaction d’Aislinn, il avait compris qu’elle ressentait une gêne alorsq qu’il s’insérait lentement en elle mais rien d’anormal. Puis il avait rencontré un obstacle et tout avait dérapé. Elle n’avait pas eu besoin de le lui demander pour qu’il prenne la décision de se retirer alors qu’il n’avait visiblement pas passé l’hymen. Son désir avait bien vite disparu, cédant la place à une sensation bien plus inconfortable.
Cependant, ce n’était pas le moment d’exprimer son propre malaise, et ce même si Aislinn ne manquerait pas de s’en inquiéter. Il ne lui mentirait pas mais se garderait bien de lui avouer à quel point il se sentait mal.

-Aislinn, ça va ?

La voix inquiète de Digne avait finit par rompre le silence qui s’était installé en chassant les gémissements de plaisir et les soupirs de désir qui emplissaient la pièce moins d’un quart d’heure auparavant.

-Je sais que tu vas me dire que ce n’est pas ma faute mais je suis désolé...

Il avait pris toutes les précautions… Et alors que le désir le brûlait, il avait agit avec douceur alors qu’il commençait à entrer en elle. Mais la gêne avait finalement laissé la place à la douleur. Une douleur qu’elle ne pouvait pas lui cacher. Et puis il essayait, plus elle avait mal. Il n’avait pas insisté très longtemps mais cela avait été suffisant pour qu’il comprenne qu’il était vain de continuer… Surtout vu comment sa compagne souffrait. Il tenait à s’excuser parce qu’il n’en restait pas moins le responsable de sa douleur.
Il avait sûrement fait quelque chose de travers… Mais il s’inquiéterait de quoi plus tard. Pour l’instant, il voulait uniquement s’assurer de l’état d’Aislinn et savoir s’il pouvait faire quelque chose pour la soulager.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeSam 13 Avr 2019 - 8:43

Aislinn Noblegriffon

On lui avait dit qu’elle aurait mal.

Quand Digne avait posé son membre sur son intimité, elle avait instinctivement bloqué sa respiration, prête à accueillir la douleur qui devait accompagner les premiers mouvements du jeune homme ; puis, elle s’était souvenue qu’il était important qu’elle se détendît, alors elle avait essayé de faire exactement cela. Ensuite seulement elle avait opiné discrètement du chef et son amant avait compris qu’elle l’invitait en elle.

Très vite, elle sentit que quelque chose n’allait pas.

Digne ne voulait pas lui faire mal, il le lui avait assez dit et l’avait assez prouvé ; si bien qu’Aislinn devinait qu’il hésitait sur la manière dont il devait s’y prendre. Elle aurait souhaité pouvoir le guider, lui dire ce qu’elle ressentait, mais de son côté l’héritière avait clairement l’impression qu’il s’attaquait à une muraille qui ne lui offrait aucun passage. Elle essaya de se convaincre que tout était normal, que mille et mille femmes avant elle avaient vécu exactement la même chose et qu’elles avaient surmonté cette épreuve ; elle ferma les yeux, toute notion de plaisir oubliée, seulement concentrée sur la douleur qui ponctuait chacun des mouvements de l’Hadjaoui.

« Est-ce que tu es… dedans ? » demanda-t-elle timidement.

Elle n’osait pas regarder ou aller vérifier par elle-même ; sa question, cependant, dut trahir plus qu’elle ne l’avait anticipé et Digne prit l’initiative de se retirer d’elle à ce moment-là. Elle comprit alors que, non, leur première fois n’était pas normale et cela la mortifia. Dans le même temps, elle était soulagée, car cela voulait dire que la douleur allait lentement refluer.

Le Vaani fut le premier à parler et elle darda sur lui des prunelles surprises, car la voix de son compagnon était lourde de regrets et de culpabilité ; cela faisait trop écho à ce qu’elle ressentait elle-même et elle avait cru qu’il lui reprocherait quelque chose, pas qu’il se blâmerait lui-même.

« Digne… » souffla-t-elle en se redressant sur son coude.

Elle hésita sur les mots qu’elle devait prononcer et décida d’abord de se pencher sur lui pour l’embrasser. Leur baiser ne fut ni long, ni passionné, mais il était tendre et sincère.

« Tu as été parfait, » lui assura-t-elle avec beaucoup de douceur.

La Noblegriffon fit ce qu’elle savait faire de mieux ; elle rassembla tout ce qu’elle pouvait ressentir de négatif et de douloureux en cet instant et érigea une muraille tout autour, pour pouvoir se concentrer sur ce qui comptait vraiment pour elle : Digne. Elle refusait que leur tentative avortée minât le jeune homme.

« J’ai voulu aller trop vite et j’étais trop tendue, expliqua-t-elle en lui caressant la joue. La prochaine fois, les choses seront différentes. D’accord ? » Elle sourit et posa son front sur celui du Vaani. « Tu n’as rien à te reprocher. »

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeSam 13 Avr 2019 - 20:09

Digne soupira, sa bouche s'étirant dans une moue tandis qu'il regardait son incorrigible compagne. Il l'avait prédit... Elle cherchait encore à le protéger alors que c'était elle qui avait souffert. Il ne dit rien de plus puis, posant une main derrière ses cheveux blonds, il sépara leurs deux fronts pour déposer un baiser sur le sien avant de l'inviter à revenir se blottir contre lui. Le silence s'installa de nouveau jusqu'à ce qu'il trouve un sujet de conversation totalement différent. Un sujet qui leur permit de se changer les idées, de se détendre, et même de rire. Ainsi, ils purent trouver le sommeil, oubliant presque ce qu'il s'était passé.
Après cet échec, ils furent moins prompt à se relancer dans l'aventure, cantonnant leurs nuits à des séances de baisers et de douces étreintes. Mais un soir qu'ils s'étaient particulièrement amusés, l'alcool désinhibant leurs craintes, ils retentèrent l'expérience... Et cela se termina de la même manière. Digne avait pourtant appliqué tous les conseils qu'Aimé lui avait prodigué en secret, ajustant même quelques erreurs mineures au passage. Normalement, il n'y aurait dû y avoir aucun problème. Pourtant, il ne parvenait pas à passer l'hymen de la jeune femme. A partir de ce jour, les deux amoureux se mirent à craindre plus que jamais ce cap de leur relation qu'ils ne parvenaient pas à franchir... Leur attitude l'un envers l'autre resta toujours aussi tendre mais c'était tout ce qu'il demeurait... De la tendresse. Ils s'aimaient sincèrement mais ils avaient peur de se l'exprimer d'une autre manière. Le sujet ne fut même plus abordé et fut bientôt supplanté par un problème bien différent.

A l'approche du grand tournoi de gladiateurs, Digne redevint un peu le jeune homme taciturne qu'il était avant de rencontrer Aislinn. Si la demoiselle craignit que cela vienne de leur relation rendue au point mort, elle n'eut pas besoin de le dire pour qu'Aimé le lise dans son regard. Son compagnon l'aurait vu s'il n'avait pas été si préoccupé... L'aîné des Hadjaoui s'empressa alors de détromper l'héritière Noblegriffon en lui confiant la culpabilité que le jeune homme avait toujours éprouvé d'être libre tandis que ses frères étaient encore à l'Aile Blanche. Tous les hommes de sa famille avaient dû se battre pour s'en sortir. Il était le seul à ne jamais en avoir eu besoin. Il continuait de s'entraîner parce qu'il avait l'impression que c'était le seul point commun qu'il avait avec eux : le maniement des armes. Sauveur et Courtois allaient s'inscrire aux jeux qui étaient organisés avec les drows. Si seul le dernier duel était à mort, l'ensemble du tournoi ne se déroulerait pas comme d'habitude... D'ordinaire, les combats étaient au premier sang, ce qui réduisait les pertes chez les gladiateurs. Cette fois, les blessures pouvaient être multiples, voire mortelles...
Les Hadjaoui avaient déjà perdu un père et un frère dans l'arène. Digne aurait du mal à supporter d'en perdre davantage.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeLun 15 Avr 2019 - 6:19

Le Vaisseau de la Voilée

Panahos 67 Karfïas de l’an 14:XI, dans la taverne des Hadjaoui.

La gardienne avait posé sa main sur sa poitrine, entre ses deux seins ; sous ses doigts, elle pouvait sentir le tracé irrégulier et boursouflé de sa cicatrice. Je ne suis plus cette femme, soupira-t-elle intérieurement et même si elle n’ignorait pas, en disant cela, qu’elle se mentait à elle-même, elle laissa retomber son bras le long de son corps. Elle expira l’air de ses poumons et les souvenances de sa vie avec l’héritière Noblegriffon fuirent son inconscient ; elle inspira profondément et d’autres prirent sa place. Je ne peux plus être cette femme, mais je sais pourquoi je suis venue.

« Tu vas bien ? » lui demanda une petite voix à côté d’elle.

Elle était arrivée à Thaar cinq jours plus tôt et, déjà, on l’avait confiée à un enfant. Illio ne l’avait pas quittée depuis. La gardienne s’accommodait bien de sa présence, car il était un jeune novice prometteur. L’affection qu’elle pouvait éprouver à son égard restait cependant très mesurée. Dans quelques ennéades tout au plus, elle reprendrait la route et lui demeurerait au service d’Ysmir Jhabar, le responsable du Sanctuaire dans lequel elle avait élu domicile.

« Ne t’inquiète pas, » le rassura-t-elle en tendant le bras dans sa direction. Ses doigts rencontrèrent son oreille et, partant de ce premier repère, elle longea la courbe de son crâne avant de lui caresser les cheveux. Illio se dégagea bien vite, presque vexé qu’elle sous-entendît qu’il pouvait avoir peur.

« Je ne suis pas inquiet pour moi, » lui expliqua-t-il en croisant les bras.

Et la gardienne de sourire pauvrement. Illio n’était définitivement pas Aislinn ; la Rivoise avait vécu pour ces gestes d’affection qu’elle ne lui avait accordés que trop rarement.

« Ouvre-moi la voie, » lui ordonna-t-elle enfin.

Quelques secondes plus tard, ils pénétraient ensemble dans la bâtisse chaleureuse et bruyante de Kassim, à la recherche d’Aimé Hadjaoui. Contrairement à Aislinn, la gardienne n’avait pas oublié le nom de l’auberge dans laquelle Aimé leur avait expliqué travailler. Pour la trouver, elle n’avait eu qu’à solliciter son concours au clergé de Tyra.

Après qu’elle eut fait quelques pas vers le centre de la pièce, guidée par Illio, les clients de Kassim commencèrent à la remarquer et ils se turent, un par un, pour darder sur cette étrange femme un regard mal à l’aise.

« Je cherche Aimé Hadjaoui, » déclara-t-elle avec lenteur et sa voix éraillée porta à peine jusqu’au cœur de la salle ; très vite pourtant, son appel fut relayé par les habitués, qui se demandaient bien ce que l’ancien esclave avait pu faire pour attirer l’attention d’une telle sorcière.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeMer 17 Avr 2019 - 7:47

-Aimé !

Du fond de le cellier, une voix gronda gentiment en réponse. Le jeune commis de cuisine s’avança un peu dans la pièce mal éclairée, cherchant le géant sans parvenir à le voir.

-Quelqu’un te demande en salle.
-Qui dont ?
-Je sais pas… Une femme.
-Aislinn ?
-Non, elle je l’avais jamais vue…

Soudain, le jeune homme sursauta. Aimé venait de sortir de l’ombre juste à côté de lui. Il en était passé à moins de deux mètres de lui sans remarquer sa présence. Il porta une main sur son coeur, espérant vainement que cela calmerait le ramdam qu’il produisait sous ses côtes.

-D’accord… Et c’était si urgent que ça ne pouvait pas attendre que je remonte avec les oignons pour le chef ?
-C’est Kassim qui m’a envoyé te chercher. Elle fait un peu peur à tous les clients.
-Peur ?...

D’abord étonné par ce qualificatif, Aimé devint subitement plus sérieux, comme s’il croyait déjà savoir ce qui il s’agissait mais n’osait pas vraiment l’espérer.

-Qu’est-ce à dire ?
-Ben… Elle dégage une aura… Puis elle a plein de cicatrices et il lui manqu…
-... un bras.
-Tu la connais vraiment alors ?!

Sans plus attendre, l’aîné des Hadjaoui quitta la pièce, oubliant ses oignons, et se dirigea droit dans la salle commune de l’auberge.

Entrant d'un pas rapide dans la pièce, Aimé découvrit la silhouette de la Gardienne qu'il n'avait jamais oublié vraiment. N'entendez pas par là les cicatrices et autres handicaps physiques mais bien sa posture, son maintien et les contours de son corps. Il soupira, à la fois heureux et soulagé. Aislinn elle-même ignorait où se trouvait sa mère adoptive et il la connaissait assez bien maintenant pour savoir qu'elle taisait ses craintes. Pour autant, elles étaient bel et bien présentes aussi se gardait-il donc de partager les siennes. Il ne l'avait connu que l'espace de quelques heures mais c'était le rôle qu'il avait dû jouer toute sa vie et dans lequel il se complaisait : être celui qui veille et qui protège.

Un client à quelques pas de lui attira son attention.

-Tu connais vraiment cette créature ?
-Occupe-toi plutôt de son verre, Fernand. Rétorqua gentiment le géant avant de se diriger vers la Noblegriffon.

Il s'arrêta devant elle et ne put s'empêcher de la regarder une seconde avant d'enfin lui adresser la parole.

-Je ne m'attendais pas vraiment à une telle visite...

Aimé marqua une pause. Il se surprit lui-même à ne pas savoir s'il devait la vouvoyer ou la tutoyer. Le protocole lui indiquait sûrement la première solution mais il préférait la seconde... Parce qu'il était ainsi ou parce qu'Aislinn lui avait tant parlé d'elle qu'il s'en sentait presque proche désormais ? Difficile à dire... Il n'était même pas sûr qu'une de ces solutions soit la bonne.

Ce fut Illio qui, le premier, prit la parole, non sans s’être positionné entre la gardienne et le géant avant.

-Tu es Aimé ?

Le champion d'arène posa un regard surpris et amusé sur le petit garçon qui venait de s'interposer tel un jeune homme courageux. Puis un sourire attendri étira ses lèvres avant qu'une autre vois n'attire son attention.

-Il l’est, répondit Katalina avec un pauvre sourire dans la voix. Elle posa sa dextre sur l’épaule du garçon, avant de tourner son visage vers Aimé. Cela faisait longtemps, Aimé.
-Un peu trop... Rétorqua-t-il, ayant subitement l'impression de répondre comme s'il parlait pour Aislinn. Venez vous asseoir.

La gardienne ne réagit pas tout de suite, mais préféra baisser la tête pour s’adresser à son jeune protecteur.

-Tu peux rentrer au sanctuaire, maintenant… Aimé acceptera sans doute de me ramener.
-Mais… ! commença à protester Illio.
-Je te promets de veiller sur elle. Assura-t-il au garçon avec un sourire avant de revenir sur la Gardienne. Ce ne serait pas la première fois.

Ce n’était pas tant qu’Illio n’était pas convaincu ; c’était surtout qu’il se découvrait fort frustré d’être ainsi écarté de la conversation qui s’annonçait. Katalina sut toute fois trouver la bonne inflexion pour le convaincre qu’il avait trop à perdre à s’entêter et il finit par rendre les armes et les laisser seuls. La gardienne tendit le bras, pour qu’Aimé puisse la guider là où il désirait l’emmener. Le géant cueillit la main qu'on lui tendait pour la poser sur son avant-bras et la conduisit jusqu'à une table un peu en retrait. Là, il l'installa tel un gentilhomme, prenant soin de glisser la chaise sous ses genoux lorsqu'elle commença à s'asseoir. Puis il alla se placer en face d'elle.

-Vous semblez aller bien. Qu'avez-vous fait de votre bâton ?
-Il a été mon offrande à l’Aînée, répondit-elle sans rien trahir des affres dans lesquels cet événement particulier l’avait plongée, qu’Elle a réclamé en paiement de mes erreurs passées.

Elle posa ses doigts bien à plat sur la table devant elle et expira lentement ; Aimé, qui avait déjà partagé avec elle un repas, pouvait reconnaître dans certaines de ses mimiques l’un de ses courts moments d’absence, mais celui-ci ne dura qu’un battement de cœur. Lorsqu’elle inspira une nouvelle bouffée d’air, elle était « à nouveau là ».

-Je sais qu’Aislinn est venue te trouver, quand ses pas l’ont amenée à Thaar. Comment va-t-elle ?

A l'écoute du nom de sa fille adoptive, Aimé s'adossa à sa chaise. Il n'était pas vraiment surpris qu'elle lui parle d'elle mais le fait qu'elle sache qu'il était en contact avec elle expliquait la raison de sa visite. Mais, si cela le ravissait, il ne pouvait nier qu'il était aussi chagriné un peu aussi pour la jeune femme.

-Pourquoi ne pas aller la voir pour le lui demander ? Questionna-t-il sans porter le moindre jugement.
-Parce que je ne peux plus être la femme qu’elle a connu, répondit-elle avec gravité. Nous rencontrer ne lui causerait qu’un peu plus de peine ; et à moi aussi, car les chants du Prisonnier continuent de me lier à elle.

Aimé expira lentement par le nez. Il ne comprenait pas totalement ce que voulait dire Katalina mais il ne pourrait la convaincre de changer d'avis en se montrant trop direct. Il essaierait donc de s'y prendre autrement, conscient que cela risquerait de ne faire aucun écho dans l'esprit de son interlocutrice.

-Elle aurait été heureuse de vous revoir. Dit-il afin de clore cette question tout en soumettant l'idée qu'Aislinn tenait toujours autant à elle.
-La peine peut prendre bien des visages et surgir à bien des occasions. J’ai sur moi l’Œil de la Voilée ; il est un manteau lourd à porter, mais ne fais pas l’erreur de croire que je suis la seule qu’il écrase, asséna-t-elle pour clore, elle aussi, le sujet.

L'ex-gladiateur acquiesça. Comprendre Katalina n'était pas chose facile et, pourtant, il y parvenait en cet instant précis. Il savait qu'elle avait un rôle important à jouer auprès de la Déesse de la mort et pouvait comprendre qu'elle veuille éloigner sa fille d'elle.

-Elle pense à vous tous les jours. Elle s'est même procuré vos mémoires...
-Vraiment ? De cela, je ne me souviens pas... Ce qu’elle a pu tirer de ses lectures, je l’ignore aussi.

Elle eut un léger mouvement de menton, comme pour tendre l’oreille à une voix qu’elle était la seule à entendre, puis elle ferma les yeux en bloquant sa respiration. Elle ne prêta donc qu’une oreille discrète quand Aimé lui répondit.

-Elle essaie de vous comprendre un peu mieux. Elle y est parvenue, en un sens. Aimé s'interrompit, comprenant que son interlocutrice n'était pas tout à fait avec lui. Il se pencha pour poser une main sur la sienne. Katalina ?

La gardienne retira vivement ses doigts, mais le fugace contact initié par Aimé avait au moins eu le bénéfice de chasser les fantômes qui la hantaient.

-Il ne faut pas… souffla-t-elle avant de s’interrompre et de poser sa main sur son entre-sein. Je suis là.
-Pardon. Je ne le referais pas. Assura-t-il, à la fois surpris par la réaction de la dame, frustré par la façon dont elle s'était échappée aussi vite et compréhensif quant à ses raisons.
-La rumeur de ma venue l’atteindra vite, enchaîna-t-elle en retrouvant son masque d’impassibilité. Elle voudra venir à ma rencontre. Elle marqua une légère pause, avant de continuer. Tenteras-tu de la dissuader ?

Un sourire à demi amusé se dessina sur les lèvres d'Aimé.

-J'essaierai. Mais elle sait se montrer opiniâtre quand elle le veut. Il n'y a qu'à voir comment elle est parvenu à se défaire de la mauvaise influence de son tuteur...

Si Aimé voulait piquer sa curiosité, il avait activé le bon levier. Katalina se redressa légèrement et son visage prit un plis soucieux.

-Varlar devait veiller sur elle et j’ai peine à croire à sa trahison… commença-t-elle avant de froncer les sourcils. Où est-il ?
-Aislinn lui a ordonné de retourner à Ys après avoir trouvé des preuves des affaires louches dans lesquelles il trempait. Sans compter les esclaves qu'il utilisait de manière à réduire les frais de main d'oeuvre ainsi qu'une histoire de dîmes impayées...
-Il vous fait fructifier une fortune en tarissant sa source, puis migre à la recherche d’un nouveau cours d’eau, récita-t-elle en fermant les yeux sans forcément se rendre compte qu’elle se faisait ainsi écho aux paroles que son héritière avait asséné à son ancien associé. J’ai cru que cette fois serait différente, mais Varlar reste Varlar et Aislinn demeure Aislinn.

Il était évident que l’histoire que lui rapportait Aimé affectait la gardienne, mais plus difficile de deviner quelle facette en particulier. Elle entretint involontairement le doute quand elle souligna :

-Elle est donc livrée à elle-même, désormais.
-Pas tout à fait... Mais je suis sûre qu'elle saura s'entourer des bonnes personnes si le besoin s'en fait ressentir.
-Seul le Prisonnier le sait et il garde jalousement ses secrets, soupira Katalina.

Mais déjà, Aimé pouvait la voir retrouver un visage plus distant ; la surprise provoquées par les actions d’éclat de son héritière passée, elle redevenait cette femme étrange et par trop froide à laquelle elle ne pouvait jamais vraiment échapper. Il la regarda, fronçant légèrement les sourcils de la voir remettre son masque d'impassibilité, un peu chagriné de le retrouver. Il décida d'alléger un peu l'ambiance en y joignant un soupçon de convivialité.

-Vous voulez boire quelque chose ? Nous avons de très bons nectars. Quel fruit vous préférez ?

La question d’Aimé était relativement innocente, mais elle arracha à la gardienne un sourire infiniment las.

-Je me souviens de mille et mille saveurs et de les avoir aimer et détester tout à la fois, souffla-t-elle avec fatalisme. Elle n’avait besoin de personne pour remarquer les efforts que déployaient Aimé pour se montrer agréable et patient avec elle, mais elle avait renoncé depuis longtemps à l’idée de parvenir à donner le change. De l’eau suffira très bien.

Aimé fit une moue dubitative et contrariée. Ce n'était pas elle qui provoquait cette réaction, ou pas vraiment tout du moins. C'était plutôt la situation dans laquelle elle se trouvait et qui semblait l'empêcher de prendre le moindre plaisir, ses souvenirs se mélangeant avec ceux de tous les morts qui l'effleuraient. Il finit par se lever et ramena deux pichets et deux gobelets. Il servit un fond de jus de pomme dans le verre de la Gardienne avant de l'inviter à goûter.

-Si vous n'aimez vraiment pas, j'ai rapporté de l'eau aussi.

La gardienne tâtonna un peu maladroitement devant elle, le temps qu’Aimé lui fourre son verre entre les doigts. Elle inclina légèrement la tête en guise de remerciement, puis le porta à ses lèvres. Juste avant d’en boire une première gorgée, elle inspira avec lenteur et laissa les fragrances du breuvage agiter le marasme de sa mémoire. Ainsi qu’elle l’avait prévu, plusieurs souvenirs contradictoires remontèrent à la surface, mais la plupart étaient pâles et fades ; ceux-là, elle les écarta sans regret et elle esquissa un léger sourire tandis que ceux qui restaient la ramenaient à des époques révolues et peut-être un peu plus heureuses. Cela dura quelques longues secondes qui purent paraître une éternité à l’Hadjaoui ; s’il tenta de lui parler, elle ne réagit pas. Elle finit par lui faire l’heur de boire une courte lapée de son jus de pomme, avant de reposer son verre.

-Aislinn a beaucoup de chance de pouvoir compter sur ta présence à ses côtés, souligna-t-elle avec sincérité… et gratitude.

Aimé arborait un doux sourire tandis que Katalina se prêtait au jeu et appréciait de moment qui semblait la ramener à ce qu'elle était autrefois. Il avait choisi ce fruit parce qu'il était bien rare que quelqu'un de l'aime pas. Et puis il était si commun en Péninsule... Il ne s'était pas trompé et il était heureux de la voir sourire vraiment pour la première fois depuis qu'il la connaissait.

-Je n'ai ni titre ni influence mais je fais de mon mieux pour la soutenir. Et il n'y a pas que moi. Varlar lui avait acheté une esclave qu'elle s'est promis de libérer dès qu'elle en aurait l'âge. Sanaa est plus qu'une amie pour elle, c'est presque une sœur. Il marqua une pause avant de continuer. Et... Il y a Digne.
-Je me souviens de Sanaa et de Digne, souffla-t-elle tandis que l’envahissait des souvenirs mettant en scène l’impudente Vaanie et le benjamin des Hadjaoui. Aislinn n’a jamais eu besoin de Varlar, je m’en rends compte à présent ; c’était une erreur de la lui confier.

Elle médita sur ces paroles quelques secondes, avant de commencer à rassembler sa robe dans sa main et de se tourner avec l’intention apparente de se lever. Elle avait obtenu ce qu’elle était venue chercher.

-Elle est la maîtresse de sa propre vie, désormais… releva-t-elle et sa voix trahissait tant une fierté simple et sincère qu’une inquiétude diffuse née des incertitudes qui entouraient les prochaines épreuves qui attendaient indubitablement la jeune Rivoise. Varlar avait ses torts et ils étaient graves et nombreux, mais il demeurait que pendant près de trois années, il l’avait protégée. Libérée de son joug, elle se retrouvait aussi privée de sa tutelle. Arcam seul savait ce que cela impliquerait.
Aimé avait moins d'inquiétudes que la Gardienne mais il avait la chance de pouvoir côtoyer Aislinn au quotidien. Il savait ce qu'elle vivait et comment elle gérait la situation. Il le voyait tous les jours. Katalina, elle, n'avait pas cette chance.

-Si je sais comment vous contacter, je pourrais vous tenir informée si vous le souhaitez. Mais faites-moi plaisir, finissez votre verre d'abord. Dit-il alors qu'il le remplissait à moitié de jus de pomme. Ensuite, si vous voulez partir, je vous ramènerai.

Katalina se plia à son exigence mais cela prit un certain temps. Elle semblait vouloir s'alimenter un peu plus que lors du repas qu'ils avaient partagé à Ys mais cela n'était pas devenu chose aisée pour autant. Elle en profita pour l'informer où la trouver. Elle demeurait dans un Sanctuaire mais il ignorait pour combien de temps encore. Ses allées et venues étaient imprévisibles... Il ne pourrait donc que venir frapper à sa porte de temps en autre en espérant qu'elle soit là.
Lorsqu'elle eut enfin but la dernière goutte de son verre, Aimé raccompagna la Dame. La confiant à qui de droit, il la regarda s'éloigner, ne pouvant s'empêcher d'espérer la revoir prochainement. Réalisant cela, il ferma les yeux.

Aimé... Qu'est-ce que tu fais ?...
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeJeu 18 Avr 2019 - 21:31

Sanaa

Pendant la neuvième ennéade de Favriüs de l’An 14:XI, dans les Grands Sablons

Sanaa avait envie de hurler. De pleurer. De frapper quelqu’un. De se ruer dans l’arène. De fuir cet enfer. Depuis qu’elle avait appris que Sauveur devait affronter Urgoll’Ven, celui qu’on appelait à Thaar le Gobelin, mais qui régnait avec le reste de son Triumvirat sur les masses grouillantes du Puy d’Elda, Sanaa n’avait pratiquement pas fermé l’œil et n’avait guère plus mangé. Quelques jours avant les grandes mêlées, le gladiateur lui avait annoncé qu’il ne pourrait plus venir la retrouver pendant toute la période des jeux ; prise de court, elle avait préféré feindre l’indifférence plutôt que de faire face l’oppressante angoisse qui lui avait saisi la gorge à ce moment-là. Elle se souvenait avoir cherché à donner le change en pariant peut-être un peu mesquinement sur le fait que leur séparation serait brève ; Sauveur n’avait guère goûté la plaisanterie — l’adolescente avait blâmé son stress — et elle-même n’avait pas mis beaucoup plus de temps à se vexer. Ils s’étaient quittés les cœurs lourds des choses qu’ils s’étaient dites, mais surtout de celles qu’ils avaient tues.

Le principal regret de Sanaa, au moment où Sauveur avait levé ses deux lames vers son impressionnant adversaire, demeurait que sa boutade ne se fût pas révélée prophétique.

Elle n’était bien entendu pas la seule que les grands jeux de Thaar épuisaient, tant moralement que physiquement. Aislinn, Digne, Aimé — et Courtois, que Sanaa connaissait cependant à peine — était tous de plus en plus taciturnes, agressifs et anxieux à mesure que Sauveur surmontait les épreuves de Mamba. La Vaanie s’était vite refermée sur elle-même, chose à laquelle elle n’était pas coutumière ; elle avait tout fait pour fuir Aimé autant que faire se pouvait, car l’aîné de son amant savait ce qu’elle avait tû par ailleurs et, la voyant devenir l’ombre d’elle-même, avait essayé de percer sa carapace. Elle ne lui en tenait par rigueur — comment l’aurait-elle pu, quand tout ce qui lui importait était son bien-être, au point même de faire abstraction pour un temps des propres affres auxquels l’opiniâtreté de son frère le confrontait ? —, mais si elle avait érigé ainsi ses défenses, c’était pour se protéger d’un monde décidément par trop cruel pour elle. Elle aurait tout le loisir de les mettre à bas si Sauveur survivait.

Si.

Le soir de son impressionnante victoire pendant la désormais célèbre épreuve des hordes de morts, il était venu la retrouver, à la faveur de la nuit, dans sa chambre de ce qui restait en théorie la demeure de Varlar. Elle avait senti son cœur manquer un battement quand il l’avait poussée vers son lit, le regard brûlant et avait répondu à son baiser pressant avec une passion matinée de désespoir. Ce soir-là, elle s’était offerte à lui comme jamais elle ne l’avait fait auparavant ; comme si c’était la première fois ; comme si c’était sa dernière chance. Puis, elle l’avait supplié de provoquer sa propre défaite et avait vu son monde s’effondrer lorsqu’il avait refusé.

Il avait déjà tant fait qu’il avait l’impression de pouvoir toucher sa liberté ; encore quelques victoires et il pourrait s’en saisir, enfin.

Il devait continuer.

Elle s’était souvenu sa conversation avec Aimé et l’assurance qui avait été la sienne alors, quand elle avait affirmé à l’ancien esclave « qu’il n’y aurait jamais rien de sérieux » entre elle et son frère. Qu’ils ne faisaient que s’amuser.

Quelle sotte elle avait été.

Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle ressentait pour Sauveur ; elle avait simplement conscience que la possibilité qu’il pût ne pas survivre avant qu’elle le découvrît la rendait folle. Quant aux sentiments qu’il entretenait, lui, pour elle… Elle ne préférait même pas y songer. Elle ne doutait pas qu’Aimé l’avait confronté aussi et elle aurait parié tout ce qu’elle possédait que ses mots à lui avaient été à l’image des siens.

« Tu seras libre, si tu meurs, » lui avait-elle répondu avec une lueur mauvaise dans le creux du regard.

En cet instant, elle avait décidé de lui en vouloir ; elle avait trouvé cela plus simple que de chercher à le comprendre. C’était la dernière fois qu’elle l’avait vu d’assez près pour humer son odeur, pour entendre sa voix, pour toucher sa peau, pour goûter ses lèvres.

Cette nuit-là, elle l’avait repoussée ; et finalement, elle était condamnée à le regarder se battre, non pas pour sa liberté comme il le lui avait affirmé, mais bien pour sa vie tout en sachant qu’une erreur de sa part pouvait les priver d’une chance de se réconcilier.

Elle ne croyait pas avoir été jamais si horrifiée ; elle était livide et tremblante et lorsque les armes du Gobelin trouvaient leur chemin jusque dans la chair de son amant, c’était comme s’il la blessait elle aussi. Ces maudits jeux étaient devenus une chaîne invisible qui la liait à Sauveur ; ils étaient des vents qui avaient soufflé sur les étincelles d’une passion dont elle n’avait pas eu le temps de découvrir les clefs et du brasier qui en résultait, elle goûtait la terrible morsure.

« Sauveur ! » hurla-t-elle avec horreur quand le noirelfe porta le coup de grâce.

Ses pires craintes venaient de se réaliser, elle en était certaine : le gladiateur, transpercé par l’épée du sombre, mourrait.

Se dressant d’un bon sur ses pieds, elle oublia qu’elle n’était pas seule et commença à se frayer un passage entre les badauds devant elle. Elle vit à peine le vainqueur du combat dominer son adversaire défait et d’un coup de pied, le pousser à terre. Ce qu’elle contempla, c’était la tête de son amant frapper le sol et son corps ne plus bouger.

« Sauveur ! » s’égosilla-t-elle à nouveau et cela eut l’heur de disperser les Vaanis autour d’elle.

Arrivée au bord des gradins, elle s’agrippa à la rambarde et se pencha autant que possible, uniquement pour être la témoin impuissante d’une scène plusieurs fois cauchemardée.

Les soigneurs évacuaient le vaincu sur un brancard.

Sauveur ne bougeait toujours pas.

Derrière elle, elle crut entendre quelqu’un l’appeler par son nom, mais elle n’y prêta aucune attention.

Elle pivota sur ses pieds et se rua vers la sortie la plus proche, le cœur battant la chamade et les joues baignées de larmes.

Quelques jours plus tôt, mue par un terrible pressentiment, elle avait mené sa petite enquête. Elle savait exactement où on était en train d’amener l’Hadjaoui et avait même été en mesure de découvrir comment elle-même pouvait s’y rendre depuis les tribunes. Elle fonça, sans la moindre hésitation ou sans se soucier ni de son souffle court ni des prunelles interloquées qui accompagnaient son passage.

Elle avait vaguement conscience de toucher au but quand quelque chose stoppa net sa progression. Son épaule agrippée par un garde moins aviné que les autres, elle manqua tomber misérablement ; il commença à lui expliquer qu’elle n’avait rien à faire ici, mais elle n’avait aucune envie de l’écouter ou de se laisser ralentir, alors elle lui griffa le dos de la main avec une violence dont elle ne se savait pas capable. Le Vaani lâcha un juron avant de l’envoyer valser par là où elle était venue. Sanaa s’étala de tout son long, les yeux écarquillés par la surprise et le choc ; puis, elle darda sur son agresseur un regard meurtrier et, après s’être relevé, lui sauta pratiquement dessus dans l’espoir de le dépasser.

Ce fut peu ou prou à ce moment-là qu’Aimé la rattrapa, bientôt suivi par Aislinn et Digne ; le garde lui aussi recevrait sous peu des renforts.

« Sauveur ! » hurla Sanaa par-dessus la cohue, sans savoir elle-même si elle espérait encore entendre le gladiateur lui répondre…

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeVen 19 Avr 2019 - 12:06


Cette fille était insupportable... Tout du moins, c'était la pensée qui tournait dans l'esprit de Sauveur après qu'ils se soient séparés un peu avant le début du tournoi. Il allait risquer sa vie dans l'arène, dans des épreuves bien différentes de celles qu'il connaissait et dont plus d'une pouvait conduire à la mort. Il était anxieux, bien évidemment, mais c'était aussi sa meilleure chance de briller et de se faire remarquer afin d'approcher de sa liberté. Et tout ce qu'elle avait trouvé à lui dire, c'était qu'ils ne seraient pas séparés bien longtemps. Très classe...
Pour le gladiateur, son attitude tenait plus de la frustration à l'idée de ne pas l'avoir pour assouvir ses désirs pendant un mois que de l'aveu sincère. Mais est-ce qu'elle était vraiment obligée de lui sortir un truc pareil ?! On avait déjà vu plus motivant.

Les épreuves s'enchaînèrent pour Sauveur et cette mésaventure devint bien vite de l'histoire ancienne. Il accumulait les entraînements visant à le préparer à chaque étape du tournoi et les journées étaient bien courtes. Le soir, il s'écroulait dans un sommeil lourd et sans rêve dont il se réveillait aux premières lueurs du jour pour reprendre là où c'en était arrêté la veille.
Après son coup d'éclat pendant les hordes des morts, on lui avait octroyé une soirée de liberté. Il était allé boire un verre avec ses frères. Ceux-ci étaient de service donc il n'avait pu en avoir qu'un à la fois et était parti tôt mais au moins il avait pu les voir. Il avait demandé une dérogation pour pouvoir aller voir "sa blonde" comme disait Hashar. Aussi, le fait qu'Aime et Digne ne soient pas disponibles l'arrangeait un peu. Il se faufila discrètement chez Aislinn et surprit la belle dans sa chambre. Ils n'avaient eu besoin d'aucun mot pour se retrouver, leurs baisers passionnés parlant pour eux.
Sauveur était en manque... En manque de l'odeur de ses cheveux. En manque du contact de sa peau sous ses doigts. En manque de ses soupirs. En manque de son regard brûlant. Il retrouva tout cela en quelques instants dans une étreinte langoureuse qui appelait à bien davantage. Tout en l'embrassant, il l'avait lentement attirée vers le lit où il l'avait allongée. Ses mains parcourraient sa silhouette sans la moindre pudeur tandis que ses lèvres baisaient sa peau, étirant le vêtement qu'elle portait pour découvrir son corps centimètres par centimètres. Il lui semblait qu'elle était bien plus réceptive que d'habitude mais cela venait peut-être de lui et de sa longue absence...
Déjà haletante alors qu'il n'en était qu'à la naissance de sa poitrine, elle lui fit une demande qui le stoppa dans sa progression. A quatre pattes au-dessus d'elle, il releva son visage de sa peau et plongea son regard dans le sien. Il ne comprenait pas pourquoi elle voulait qu'il perdre. Il tenta de lui expliquer que cela desservirait son avancée vers sa liberté mais elle ne voulait rien entendre. Leur entrevue prit fin bien plus rapidement que d'habitude et Sauveur s'en alla, sa colère amplifiée par son désir attisé par leurs premiers échanges et inassouvi à cause de sa partenaire.

Qu'est-ce qui lui prenait à Sanaa de se montrer froide et même incisive depuis quelques temps ?!
Certes, ils entretenaient une relation mouvementée qu'aucun d'eux ne cherchait à apaiser puisque ce n'était que physique. Lui aussi avait parfois été à l'origine de leurs disputes, ses mots dépassant sa pensée ou son idée s'exprimant avec maladresse. Mais, cela faisait deux fois que la jeune femme était blessante sur un sujet qui ne la touchait pas particulièrement. Elle avait peur de perdre son jouet ou quoi ?!
Puisqu'il lui restait du temps, Sauveur retourna voir Aimé auprès de qui il évacua sa colère à propos de Sanaa. Contrairement à ce que cette dernière pensait, l'aîné des Hadjaoui n'avait plus cherché à ouvrir les yeux à son frère depuis un bon moment. Il savait qu'il devait rester concentré sur le tournoi, d'autant qu'il avait les capacités pour aller jusqu'aux duels... Il était déjà un gladiateur apprécié du public mais tout le monde retiendrait les noms des duellistes. Alors il se contenta de servir d'exutoire à son cadet, l'écoutant sans prendre partie ni lui parler des sentiments dont il était convaincu que les deux jeunes gens ressentaient. Et il repartit, un peu plus apaisé.

Le combat à trois se déroula sans trop d’accrocs pour Sauveur qui s'ouvrit ainsi les portes aux huitièmes de finale. A partir de là, il n'était plus obligé de gagner mais il devait tout faire pour malgré tout. Les quatre frères savaient que c'était ce qu'il y avait de mieux pour lui, et pour cette quête de liberté par laquelle tous étaient passés, même s'il risquait de plus en plus sa vie à mesure qu'il gravissait les marches menant au podium.
Un peu avant de rentrer dans l'arène pour son premier duel, le jeune homme avait fait une rencontre impromptue dans les geôles des gladiateurs... Patience avait fait son apparition. Il n'avait pas pu lui parler longtemps, c'était tout juste s'il avait pu constater qu'elle allait bien et que son ventre présentait un doux arrondi... Mais cela lui avait fait mis un tel baume au cœur qu'il entra dans l'arène gonflé à bloc et qu'il en sortit grand vainqueur.

Dans les jours qui suivirent, Aimé reçut la visite de sa sœur à l'auberge. Sauveur ne pouvant toujours pas sortir, il n'avait pas pu le prévenir qu'il l'avait croisée et lui avait indiqué où trouver les deux affranchis de la famille... Il passa plusieurs heures avec elle, échangeant des nouvelles d'un côté comme de l'autre. Il fut peiné d'apprendre que les femmes Hadjaoui avaient visiblement été séparées quand les hommes avaient été vendus en lot. Au moins, elle allait bien et était bien traitée même si elle ne se sentait pas en sécurité dans l'univers qu'était celui du Puy d'Elda. Il n'avait pas eu à insister beaucoup pour apprendre de sa bouche ce qu'elle avait vécu ; elle avait toujours pu se confier à son frère aîné et il savait ce qu'il devait taire ou partager avec les autres membres de la famille. Cependant, l'enfant qu'elle portait, s'il n'avait pas été anticipé, avait été conçu avec le seul homme qu'elle ait jamais aimé jusque là. Et cela était un soulagement. Puis, il revint à Aimé la lourde tâche d'apprendre à sa sœur la mort de leur père et de Serein... Patience n'avait vécu que dans le passé, se forçant à toujours penser comme si tous les membres de sa famille était encore en vie. C'était sa façon à elle de tenir le coup. Apprendre que deux d'entre eux n'avaient pas survécus, c'était ouvrir la porte à la possibilité qu'il en était de même pour les autres... Qu'il pourrait en être de même pour Sauveur et Courtois... Elle fut très heureuse d'apprendre que Digne avait échappé à tout cela et qu'il vivait une idylle avec une jeune femme. Celle de Sauveur était beaucoup plus mouvementée... Courtois restait égal à lui-même, mais en version adulte. Aimé, quant à lui, prenait soin de tout ce petit monde, compagnes comprises. Ses sentiments à lui étaient... compliqués. Mais il n'était pas moins heureux pour autant.
Ils s'étaient quittés en fin de journée, Patience promettant de tout faire pour obtenir le droit de repasser avant son départ et d'entretenir une correspondance avec eux par la suite.

Depuis le début des jeux, assis dans les gradins, Aimé et Digne portaient sur les combats et le public des regards experts. L'aîné était plus confiant que le benjamin qui craignait tant de perdre un nouveau frère. La disqualification de Courtois fut presque un soulagement pour lui. En revanche, Sauveur s'en sortait à merveille et brillait de plus en plus aux yeux du public. Déjà un minimum connu au départ, la horde des morts l'avait sacralisé et les spectateurs suivaient sa progression avec de plus en plus d'attention, chacune de ses victoires créant toujours davantage d'émules. Cependant, ce jour-là, Aimé était bien plus sérieux que d'habitude et Digne plus inquiet. S'ils ne pouvaient assister à tous les combats du fait de leur travail, ils s'étaient néanmoins renseignés sur le fameux Gobelin... S'il n'en avait rien dit, le géant savait que son frère n'avait que peu de chances de gagner et Digne était assez intelligent pour l'avoir compris lui aussi. Tout comme Sanaa, le benjamin avait commencé à perdre l'appétit et le sommeil sous le regard soucieux de sa compagne. Elle l'empêchait néanmoins de s'isoler avec ses tourments, l'invitant à dormir chez elle chaque jour pour l'envelopper de cet amour sincère et devenu platonique depuis leurs précédents déboires.

Sauveur ne s'en sortit pas si mal. Certes, Urgoll'Ven domina le duel tout du long mais le gladiateur se défendit vaillamment, profitant de la moindre petite ouverture pour infliger des blessures non négligeables au sombre. Il n'aurait pas fallu grand chose pour que le jeune homme prenne le dessus mais, malheureusement, le Gobelin était aussi habile que puissant. Lorsque la lame traversa l'épaule de l'Hadjaoui, Aimé ferma les yeux une seconde tandis que Digne se figea. Cette blessure, il ne s'en relèverait pas cette fois... Non seulement il avait perdu le combat mais il avait besoin de soins urgents.
Sans même avoir eu le temps d'encaisser le choc, l'attention du petit groupe fut rapidement attirée par un cri. Sanaa se leva aussitôt après avoir vainement appelé Sauveur sous le regard médusé de Digne. Aimé, quant à lui, n'était guère surpris par sa réaction. Si l'un comme l'autre lui avaient toujours assuré ne se fréquenter que pour s'amuser, lui savait qu'il n'en était rien. Il se leva donc à sa suite et essaya de la suivre tandis que le benjamin des Hadjaoui tournait vers Aislinn un regard interrogateur, des fois qu'elle puisse répondre à sa question silencieuse concernant le comportement de son amie et confidente...

Si la vaanie n'eut que peut de mal à se frayer un chemin dans la foule, Aimé, plus grand et plus massif, éprouva quelques difficultés à la suivre. Il l'appela à plusieurs reprises sans pour autant espérer que cela l'arrête. Il ne parvint à la rattraper qu'après qu'elle se soit jetée sur les gardes, réclamant à corps et à cri celui qui était si cher à son cœur.
Pouvait-elle encore nier ses sentiments ?...
Le géant entoura la jeune femme de ses bras, l'écarta et la retint de s'en prendre encore aux gardes. Derrière eux, les deux amoureux les rejoignirent sans comprendre ce qu'il prenait à Sanaa. De ce qu'ils savaient, Sauveur et elle se connaissaient tout juste à travers les quelques soirées qu'ils avaient partagé en compagnie de leurs amis. Cependant, le discours qu'Aimé lui servit à l'oreille mit le doute sur ce qu'ils croyaient savoir de leur relation.

-Sanaa, je sais que tu es au moins aussi inquiète que moi mais ce n'est pas comme ça que tu obtiendras ce que tu veux. Ils sont probablement déjà en train de le soigner et ce que tu fais ne lui rend pas service. Calme-toi, s'il te plaît.

Aimé la maintint dans ses bras aussi longtemps que nécessaire, d'abord pour l'entraver puis se tenant prêt à l'étreindre si nécessaire. Il croisa le regard de son frère qui n'était pas encore totalement sûr de comprendre ce qui était en train de se jouer devant lui. Puis, lorsque la jeune femme fut suffisamment apaisée, l'aîné de la fratrie se tourna vers les gardes qui avaient reçu quelques renforts restés pour le moment en retrait grâce à son intervention.

-Excusez-la. Nous sommes les frères de Sauveur Hadjaoui, le gladiateur "Noble Lame". Dit-il en désignant Digne du regard avant de montrer Sanaa à son tour. Et voici sa compagne. Il a été sévèrement blessé, nous voudrions nous rapprocher de l'infirmerie pour être près de lui et savoir s'il va bien.

C'en suivit une conversation houleuse et mouvementée durant laquelle Aimé essaya de négocier un droit de passage entrecoupé par les intervention d'une Sanaa furibonde qu'il s'évertuait à contenir et à calmer comme il le pouvait. Finalement, l'ex-champion demanda à ce que l'on aille mander le dénommé Hashar qu'il savait être le sumarudi et l'entraîneur personnel de son frère. L'un des gardes partit alors en quête de l'eunuque et revint après un moment, accompagné d'un homme que l'aîné des Hadjaoui n'avait fait que croiser jusque là.
En arrivant sur place, le dornien reconnut le frère de son poulain mais il ne connaissait pas les trois autres, quoi que la ressemblance familiale était frappante... Découvrant Sanaa, il resta planté une seconde sur elle.

Bordel, il disait vrai ce con...

Hashar n'avait jamais totalement été convaincu par la description de Sauveur mais, à présent, il était forcé de reconnaître qu'elle existait bel et bien. S'il était vrai qu'elle était belle, il avait néanmoins omis de lui préciser qu'elle était si jeune et apparemment si riche. Sans doute que ses parents n'étaient pas d'accord pour qu'ils fricotent et encore moins pour payer la liberté du gladiateur.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeLun 22 Avr 2019 - 17:37

Aislinn Noblegriffon

Aislinn ne se souvenait pas avoir jamais vu Sanaa dans un état pareil. L’adolescente était à fleur de peau et réagissait comme une animale blessée. Par trois fois, elle chercha à se dégager de l’étreinte solide d’Aimé et l’héritière Noblegriffon n’était pas certaine de ce qu’elle aurait tenté si elle était parvenue à ses fins.

Décidant qu’elle avait assez tergiversé, la jeune Rivoise s’approcha de l’aîné des Hadjaoui et de son amie ; quand elle la vit s’avancer dans leur direction, Sanaa détourna le regard. Aislinn ne se laissa pas arrêter par ce qu’elle ne pouvait, en l’état, qu’interpréter comme une nouvelle marque de défiance. Elle posa sa dextre sur l’épaule de la Vaanie et l’attira vers elle. Aimé, comprenant son manège, la libéra de son étreinte et la seconde d’après, Sanaa se réfugiait contre la Noblegriffon sans plus chercher à faire barrage à ses sanglots.

« Tout va bien, Sanaa, lui souffla Aislinn à l’oreille en commençant à caresser ses cheveux. Je suis là. »

La Rivoise coula un regard désolé vers Digne ; elle aurait préféré pouvoir rester aux côtés du jeune homme, qui assurément avait besoin lui aussi de soutien. Il était clair que, s’il ne réagissait pas avec autant de violence, il avait été affecté par le spectacle cruel de son frère tombant sous les coups du Gobelin. Malgré tout l’amour qu’elle pouvait porter sur sa cadette, Aislinn ne pouvait pas s’empêcher d’en vouloir à Sanaa. Ces terribles moments de doutes et de crainte n’auraient pas dû être à propos d’elle.

Et en même temps, elle n’avait qu’à la sentir trembler dans ses bras pour comprendre que la Vaanie ne surjouait rien.

Sans cesser de caresser la chevelure si particulière de Sanaa de sa dextre, Aislinn tendit sa senestre vers Digne. L’Hadjaoui esquissa un de ses sourires que sa compagne aimait tant, puis il parcourut la distance qui le séparait des deux femmes avant d’entremêler les doigts aux siens. Elle l’attira à elle et posa son front contre le sien.

« Néera veille sur lui, » chuchota-t-elle et elle ne savait pas à qui elle s’adressait. Elle tourna ensuite son attention sur Aimé qui semblait avoir fini de négocier leur passage et surprit le regard avec lequel il les couvait tous les trois. Malgré toute l’horreur du moment, l’ancien gladiateur lui donnait l’impression d’être… heureux. Ou rassuré. Je prendrai toujours soin d’eux, aurait-elle voulu lui promettre en cet instant. De vous tous. Quelque chose dans les prunelles de l’Hadjaoui lui laissa penser qu’il le savait, qu’il le comprenait. Leur échange muet prit cependant fin avant qu’elle n’eût eu l’occasion de trancher, car l’attention d’Aimé fut tout entière accaparée par le nouveau venu.

« Décidément, les Hadjaoui resteront toujours une pointe de flèche dans mes godasses, » déclara-t-il en guise de salutations en promenant son regard sur chacun d’eux.

Il sembla tiquer en découvrant Sanaa, mais n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche pour continuer. Aimé non plus n’eut pas l’occasion d’en placer une. La Vaanie s’échappa de l’étreinte d’Aislinn pour darder sur leur nouvel interlocuteur des prunelles impérieuses — mais encore rougies par ses larmes.

« Je veux le voir, asséna-t-elle en faisant son possible pour paraître inflexible. Sauveur, Noble Lame, peu importe le nom que vous lui donnez, je veux le voir.

Nous nous inquiétons tous pour lui, » intervint Aislinn sans parvenir à se retenir de foudroyer Sanaa du regard. Elle n’avait pas entendu la discussion animée qu’avait eue Aimé avec les gardes des Grands Sablons et n’avait donc aucune idée de l’identité de l’homme à laquelle elle s’adressait. Il ne fallait cependant pas beaucoup d’imagination pour deviner qu’il avait son mot à dire sur qui était autorisé à se rendre au chevet de Sauveur et qui ne l’était pas. Que Sanaa fût incapable de le voir et qu’elle mît en péril cette éventualité, pour elle-même, mais surtout pour les deux Hadjaoui présents, la dépassait complètement.

« Le gamin va s’en sortir, lui répondit l’inconnu non sans esquisser un rictus amusé. Ce n’est pas forcément passé loin, mais il ne gardera aucune séquelle de ce combat. Il est entre de bonnes mains, mais il va avoir besoin d’un peu de repos.

Je veux bien rester ici avec Sanaa, continua-t-elle en ignorant le regard de bête blessée de la principale concernée, mais ses frères devraient avoir le droit de le rejoindre. »

Elle sut en disant cela que Sanaa ne lui pardonnerait pas cette « trahison », mais la Noblegriffon n’avait aucune envie de lui céder sur ce point. Peu importait la force de ses sentiments pour le gladiateur, Digne et Aimé étaient de son sang et ils n’avaient pas à pâtir de son manque de tempérance.

Dans le même temps, l’adolescente venait enfin d’obtenir la confirmation que son compagnon — si Aislinn en croyait les propos d’Aimé — était hors de danger et il sembla que cette nouvelle était tout ce dont elle avait besoin pour laisser s’effondrer ses défenses. Pourtant une main à sa bouche, elle inspira profondément. « Ô, Arcam… gémit-elle faiblement avant de se jeter dans les bras d’Aimé en sanglotant : Il est vivant, il est vivant, il est vivant… » C’était comme si elle ne parvenait pas encore à s’en convaincre.

« Les soigneurs sont des énergumènes têtues, intervint l’homme en haussant les épaules, mais je peux bien ramener l’un d’entre vous avec moi sans risquer de m’attirer leurs foudres. » Il posa ensuite son regard sur Aimé, lui laissant de facto le dernier mot sur l’identité du ou de l’heureuse élue.

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeLun 22 Avr 2019 - 20:26

Aimé accueillit volontiers Sanaa dans ses bras alors qu'elle s'effondrait en apprenant que Sauveur allait s'en sortir. Il avait bien tenté de la rattraper avant qu'elle ne se jette sur Hashar mais l'avait manquée de peu. Et, de toute manière, à moins que l'eunuque ne l'envoie bouler, elle n'allait visiblement pas lui sauter à la gorge. Désespérée, elle s'était contentée de lui demander -certes à sa manière- à pouvoir voir son amant.

-Les soigneurs sont des énergumènes têtus mais je peux bien ramener l’un d’entre vous avec moi sans risquer de m’attirer leurs foudres.

Croisant le regard du sumarudi, le géant comprit que c'était à lui que revenait de choisir qui irait au chevet de son frère. Il se tourna alors vers Digne et échangea avec lui une conversation silencieuse, lui demandant de bien vouloir passer son tour. Le jeune homme ne sut quoi répondre et se contenta de froncer légèrement les sourcils.

-A sa place, qui préfèrerais-tu avoir à tes côtés ? L'un de nous ?... Ou Aislinn ?

Le benjamin lâcha un soupir en fermant les yeux. La réponse était toute trouvée. Il tenait à ses frères, cela ne faisait aucun doute, mais la personne qui lui ferait le plus de bien était celle que son cœur avait choisi d'aimer plus que tout. Par cette simple question, Aimé avait levé le voile sur bien des points concernant la relation entre Sauveur et Sanaa et il était clair désormais que le gladiateur avait besoin de la vaanie... Alors, il hocha la tête en signe d'acceptation. Il était mort d'inquiétude mais on venait de lui assurer que la vie de son frère n'était plus en danger. Il fit donc ce qu'il y avait de mieux pour qu'il se remette au plus vite.
Aimé rendit son signe de tête à Digne pour le remercier avant de desserrer son étreinte sur la rousse, la prenant par les épaules pour figer son regard dans le sien.

-Je sais que vous ne vous êtes pas quitté en bon terme. Ça l'a tellement affecté qu'il est venu m'en parler et j'ai joué les exutoires. Je ne dis pas ça pour te culpabiliser mais parce que je sais que ça t'a fait plus de mal encore qu'à lui. Depuis le début, vous êtes maladroits l'un envers l'autre. Vous passez votre temps à mentir, et pas seulement à moi. A vous-même surtout. Faites-moi plaisir... Puis il posa une main sur sa joue avant de dire plus bas. ... et ouvrez les yeux tous les deux...


~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~


<< RP précédent : Plus on résiste, plus dure est la chute


Lorsqu'Hashar revint, Ulk était déjà parti. Il ne restait plus auprès de Sauveur que le soigneur non mage et un infirmier qui allait et venait pour retirer le matériel sale et en ramener du propre. Le gladiateur était allongé sur le côté droit, tournant le dos à la porte. Le saignement de son épaule avait été largement arrêté et l'avant de la plaie était fraîchement recousu. A présent, le médecin travaillait sur la plaie, côté dos, et l'entaille du flanc attendait patiemment son tour, simplement recouverte d'un tissu déjà tâché de sang.
L'eunuque d'arrêta net en voyant les deux humains affairés.

-Il est où le drow ?
-Il a dit qu'il continuerait demain.
-Il a fait quoi de plus depuis que je suis parti ?
-Il a fini de soigner la brûlure et il a entamé la réparation des deux côtés cassées. Il était fatigué.
-Fatigué, mon œil... Qu'il s'attende pas à recevoir son salaire complet.

Hashar avait suffisamment d'expérience avec les blessures et les soins pour avoir une petite idée de ce que le sombre aurait été capable de faire s'il s'en était vraiment donné les moyens. Sauveur allait certainement passé une sale nuit rien qu'avec ses quatre côtes fêlées...

A la tension qui saisissait le coup du gladiateur alors que le soigneur plantait son aiguille dans la chaire, le dornien comprit qu'il était toujours plus ou moins conscient. Difficile de vraiment dormir pendant qu'on vous recoud avec une aiguille à viande en même temps...

-Eh, gamin. T'as de la visite.

Sauveur fit mine de bouger sensiblement la tête pour voir derrière lui mais sans en avoir ni la force ni même la volonté avant de la reposer aussi sec sur ce qui lui servait d'oreiller. Ses yeux peinaient à s'ouvrir tant la fatigue s'était emparée de lui. L'énergie qu'il avait déployée pour le combat à elle seule avait de quoi le faire dormir pour quelques heures. Alors avec la douleur provoquée par ses blessures et celle des soins qui en résultaient, il était assommé et n'attendait qu'une chose : que le soigneur en ait fini avec ses points et ses bandages pour pouvoir sombrer enfin...
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeMer 24 Avr 2019 - 13:58

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Aislinn assista, impuissante, à l’échange muet entre Digne et Aimé et elle vécut sa conclusion comme une trahison.

Elle n’insista pas, cependant, s’estimant mal placée pour intervenir. Elle se contenta de retourner aux côtés de Digne pour le couver de sa présence. Avec douceur, elle prit sa dextre dans ses deux mains et plongea son regard dans celui du jeune homme. Il la connaissait assez, désormais, pour deviner sans peine tout le malaise que cette situation lui inspirait ; c’était d’ailleurs peut-être la première fois qu’il la découvrait dans cet état. Elle lui sourit en faisant de son mieux pour masquer son trouble, mais l’obstination avec lequel elle tournait le dos à la discussion pourtant riche en enseignements entre Aimé et Sanaa ruinait tous ses efforts.

Quelques instants plus tard, l’homme apparemment responsable de Sauveur invitait la Vaanie à le suivre.

« J’espère qu’ils vous laisseront aller le voir… après, » se permit-elle de lâcher quand ils furent à nouveau seuls.

Elle posa son front contre celui de Digne pour lui témoigner une nouvelle fois tout son soutien, puis poussa un profond soupir en ressassant les événements éprouvants qu’ils venaient de traverser. Sauveur est vivant, se répéta-t-elle en essayant d’évacuer la pression qui lui nouait encore les épaules. Le gladiateur n’était définitivement pas le Hadjaoui dont elle se sentait le plus proche, loin s’en fallait — il lui faisait même un peu peur, en réalité ! —, mais quand elle l’avait vu s’effondrer, vaincu, son cœur avait manqué plusieurs battements. Elle devait encore prendre le temps de digérer l’effroyable sensation d’horreur et d’impuissance à laquelle cette histoire l’avait confrontée.

Elle finit cependant par tourner son attention vers Aimé, esseulé depuis le départ de Sanaa. Leurs regards se croisèrent et, tandis qu’elle se plongeait dans ces prunelles qui l’avaient troublée pendant plus d’ennéades qu’elle ne pouvait en compter, elle mesura pleinement le fossé qui s’était creusé entre elle et sa turbulente amie depuis le début de l’année.

Qu’avait-elle fait de mal, pour que Sanaa se fût tournée vers l’aîné des Hadjaoui plutôt que vers elle ?

Cette question ajouta à la fatigue et à la peur et au stress juste ce qu’il fallait de tristesse et, se refusant à laisser perler les larmes d’angoisse qu’elle sentait venir, elle ferma les yeux le temps de retrouver un peu de contenance.



Sanaa

Tandis qu’elle suivait, inhabituellement silencieuse, le dénommé Hashar dans les couloirs tortueux des Grands Sablons, Sanaa s’étonnait presque d’être encore capable de mettre un pied devant l’autre. Malgré les nouvelles rassurantes de l’eunuque, l’adolescente gardait imprimée dans sa rétine l’image de son amant, l’épaule en sang, jeté à bas de sa gloire récente par un adversaire trop puissant pour lui. Elle ne pouvait penser à rien d’autre ; ni aux paroles pleines de sagesse d’Aimé, qu’elle avait à peine écoutées ; ni aux reproches d’Aislinn, qu’elle n’avait pas compris ; ni à la détresse de Digne, dont elle n’en avait pas même pris la mesure.

Resté silencieux pendant tout leur périple, Hashar allait pour ouvrir une énième porte, mais figea son geste au dernier moment et se tourna plutôt vers elle.

« Pour ma gouverne, quel âge as-tu ? » lui demanda-t-il à brûle-pourpoint. Sanaa leva un regard interloqué vers lui et il haussa les épaules. « Laisse, ce n’est pas très important. »

Et les deux éphémères de pénétrer dans l’infirmerie, enfin.

Sanaa n’eut aucune difficulté à trouver Sauveur et la torture à laquelle on le soumettait — quand bien même fût-elle en définitive pour son bien — lui retourna l’estomac. Hashar, qui avait vu des chairs se faire recoudre une bonne partie de sa vie, ne partagea pas son malaise et préféra s’enquérir des derniers développements relatifs au soin de son poulain.

Quand le Dornien tenta d’attirer l’attention de Sauveur sur sa visiteuse imprévue, Sanaa aurait donné tout ce qu’elle possédait pour pouvoir disparaître purement et simplement ; heureusement pour elle, son amant lui fit l’heur de ne pas se tordre le cou pour pouvoir contempler son visage livide.

« C’est le sang qui te met dans cet état là ? » lui demanda doctement Hashar sans chercher à dissimuler un rictus amusé.

La Vaanie secoua piteusement la tête de droite à gauche avant d’esquisser quelques pas dans la direction du Hadjaoui. Quand elle fut parvenue à son niveau, toujours dans son angle mort, elle tendit une main tremblante pour lui caresser le front. Il était brûlant et couvert de sueur, mais elle n’en avait cure.

« Je t’avais dit de perdre vite… » souffla-t-elle faiblement et les trémolos dans sa voix trahissait toutes les émotions qui la malmenaient. Elle se moquait que Hashar pût l’entendre. C’était sa faute à lui et à son école maudite si jamais Sauveur était dans cet état.

Elle le contourna, en prenant bien garde à ne pas gêner les soigneurs qui s’affairaient toujours, pour qu’il pût enfin la voir. Elle le vit esquisser une grimace à cause de la douleur et s’agenouilla face à lui avant de prendre sa sénestre entre ses deux mains tremblantes.

« Je suis désolée, lui assura-t-elle sans avoir la moinde idée de quoi elle s’excusait exactement. Pour tout. » Elle ne savait pas quoi lui dire, alors elle préféra se taire. Elle lui fit seulement cette promesse : « Je ne te lâche plus. »

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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeJeu 25 Avr 2019 - 11:45


Aimé resta là à regarder Sanaa disparaître dans les couloirs en priant intérieurement pour qu’elle écoute son conseil et accepte enfin de se libérer de ses sentiments qu’elle réprimait autant que Sauveur. Cette situation leur faisait du mal à tous les deux et créait ces tensions qui les amenaient si souvent au conflit… Puis il se tourna vers Digne. Celui-ci s’était mis un peu en retrait, accusant le coup à sa manière. Aislinn était venue le retrouver et le berçait de toute l’attention dont elle était capable, ce qui n’était pas peu dire… L’aîné se rapprocha pour les rejoindre et entendit les paroles de la jeune femme. Lorsqu’elle se détacha de son frère, il posa une main sur l’épaule du jeune homme. Digne tourna son regard vers lui, plus contrarié que ce à quoi le géant s’attendait.

-Depuis combien de temps ça dure entre eux ?

Etant donné l’attachement que Sanaa venait de montrer envers le gladiateur, cela ne devait pas dater d’hier… Sauveur et elle n’en lui en avaient pas parlé. Il était son frère et elle était la seule amie qu’il avait et aucun d’eux ne lui en avait parlé. Aislinn ne semblait pas plus au courant que lui. Pourtant, Aimé, lui, savait. Cela le frustrait qu’il en sache plus sur son amie que lui.

-De la manière que tu l’imagines, seulement d’ici quelques minutes, j’espère…

Digne lui répondit d’un froncement de sourcils, ne comprenant pas ce qu’il voulait dire.

-Ils se fréquentent en secret depuis plusieurs ennéades en pensant qu’ils ne font que s’amuser sans s’attacher l’un à l’autre…
-Attends… L’arrêta le jeune homme en achevant de se tourner entièrement face à son frère. Ils ont couché ensemble ?! Il a dix ans de plus qu’elle !

Dix ans, cela pouvait représenter si peu et tant à la fois. Entre des personnes de trente et quarante ans, quel mal y avait-il à entretenir une relation charnelle ? Mais, dans le cas présent, cela signifiait que la partenaire du gladiateur n’était qu’une adolescente alors qu’il était un homme accompli.
Aimé leva la main en guise d’appel au calme.

-Sauveur n’en savait rien. C’est ce qui m’a permis de le confondre. J’avais des doutes sur ce qu’il se passait entre eux mais il s’obstinait à me répéter qu’il n’y avait rien. Quand je lui ai dit son âge, il s’est figé. Et il faut bien avouer que Sanaa passe facilement pour une jeune femme. Ils m’ont tous les deux servi le même discours concernant leur relation mais j’ai compris depuis longtemps qu’ils se voilaient la face concernant leurs sentiments. J’ai arrêté d’en parler avec Sauveur pour qu’il reste concentré sur le tournoi mais Sanaa gardait ses œillères… Sa réaction de tout à l’heure prouve que j’avais raison… Tout ce que j’espère, c’est qu’elle acceptera enfin de s’en rendre compte.

Digne secoua la tête de gauche à droite comme si le flot d’informations avait du mal à trouver leur place dans son esprit. Toute cette histoire le dérangeait profondément.

-Et toi ? Comment tu l’as su ?

Aimé soupira longuement. Il n’était pas pressé de répondre à cette question car il savait que cela ne plairait pas à son frère…

-Pendant les permissions que Sauveur passait avec nous, quand Sanaa était là, ils disparaissaient à chaque fois au même moment tous les deux. Et il y a eu quelques signes…

Le jeune homme passa une main à l’arrière de son crâne. C’était de pire en pire… Tout ça s’était passé sous ses yeux et il n’avait rien vu. Il avait tant de préoccupations, entre cette étape qu’il ne pouvait pas franchir avec Aislinn pour une raison qui lui était encore inconnue et ce tournoi durant lequel Courtois et Sauveur risquaient leurs vies… Si Aimé se rendait compte qu’il ne pouvait pas être partout à la fois, Digne ne le voyait pas et se reprochait silencieusement d’avoir été si aveugle.


~~~~~~~~~~~~


Une main qui lui semblait bien fraîche se posa sur son front et Sauveur ouvrit les yeux. Sans bouger la tête, il tenta de voir la personne qui se tenait au-dessus de lui mais il ne vit rien. Pas même le début d’une silhouette. Finalement, la voix de Sanaa vint se glisser jusqu’à son oreille. À demi-conscient, il n’eut pourtant aucun mal à comprendre ses mots et il émit un grondement sourd. Si elle était là pour lui envoyer encore des piques…
Lorsqu’elle saisit sa main, ses doigts se refermèrent aussitôt sur les siens avec la force tendre qui était la sienne. Elle provoquait sa colère et, pourtant, sa présence lui faisait du bien.

-Je suis désolée.

Les paupières fatigues de Sauveur se rouvrirent pour découvrir la jeune femme devant lui. Ça, il devait admettre qu’il ne s’y attendait pas… De toutes les disputes qu’elle avait provoqué, jamais elle ne s’était excusée en quoi que ce soit. Ils se contentaient de se réconcilier avec passion. Bon, certes, il était loin d’être en état pour ça à cet instant, ni même d’être d’humeur… Mais de là à ce qu’elle prononce ces mots qu’elle n’avait jamais énoncé auparavant… Cela lui coupait l’herbe sous le pied pour ce qu’il allait lui répondre la seconde d’avant.

-Je ne te lâche plus. Promit-elle.

Sauveur soupira tandis que ses yeux se refermaient. Il prit une inspiration mais fut coupé dans son élan par la sensation de l’aiguille qui perçait à nouveau sa chaire. En soi, ce n’était pas une si grande douleur que celle de cette piqûre… Ou elle n’aurait pas été si forte si elle ne touchait pas une zone où la chaire était déjà fortement ébranlée, la rendant extrêmement sensible. Le soigneur avait bientôt fini mais il avait conscience qu’il y avait encore la grande entaille à faire avant qu’il puisse enfin respirer. Et, respirer, il ne le faisait qu’avec précaution à cause de ses côtes…
Sa voix parvint enfin à quitter sa gorge autrement qu’en un gémissement de douleur étouffé. Elle était rauque et trahissait son état de faiblesse générale.

-Tu n’as pas à t’infliger ça.

Sauveur savait très bien de quoi il avait l’air étendu de cette manière. Lui habituellement si solide, rendu impressionnant par sa taille et sa masse, le voilà qui était alité, bien incapable de ne serait-ce que ce redresser seul. Tous ses muscles commençaient à lui faire mal à cause de l’effort physique qu’il avait fourni et de la tension que représentait un tel combat. Ses blessures n’étaient pas très belles à voir. Sans compter qu’assister à une séance de couture sur chaire n’avait rien de très agréable… Elle aurait un haut le cœur qu’il n’en serait pas surpris.
Elle n’avait aucune raison de rester là.

-Aimé fera ça très bien tu sais.

À la façon dont il tenait sa main, il était aisé de comprendre qu’il n’avait aucune envie qu’elle s’en aille mais il comprendrait parfaitement qu’elle le fasse. Qu’étaient-ils l’un pour l’autre officiellement ? Juste des amants… Peut-être un peu plus pour lui… Il avait commencé à se poser des questions à force de tourner son regard vers les gradins en espérant tomber sur elle… Mais sa concentration avait bien vite dû se reporter sur le tournoi et les épreuves pour lesquelles il devait se préparer.
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MessageSujet: Re: Amours de jeunesse   Amours de jeunesse - Page 3 I_icon_minitimeVen 26 Avr 2019 - 6:59

Sanaaa

Surprise par la « violence » des paroles de Sauveur, Sanaa ne put qu’écarquiller les yeux, incapable de trouver quoi lui répondre dans un premier temps. Peut-être avait-elle péché par orgueil, mais elle n’avait pas imaginé qu’il la repoussât ; pourtant, il était là, face à elle, à lui expliquer qu’il aurait préféré à sa présence à elle celle de son aîné.

Les mots du gladiateur lui faisaient mal.

Elle ferma les yeux, inspira profondément pour essayer de reprendre un peu de contenance, puis chercha à ramener ses mains vers elle. Je n’aurais pas dû venir, était-elle forcée de constater la mort dans l’âme. J’aurais dû écouter Aislinn et laisser ses frères se porter à son chevet.

Elle était sur le point de rompre une promesse qu’elle avait à peine formulé.

Lorsqu’elle desserra ses doigts, il se passa cependant quelque chose qui remit toutes les émotions corrosives qu’elle ressentait à ce moment-là. Peut-être était-ce à cause d’un éclat de douleur, ou par pur réflexe, ou bien il ne voulait vraiment pas qu’elle partît ; Sanaa ne se posa pas la question. Tout ce qu’elle nota, c’était que Sauveur, lui, avait subitement serré le poing et l’empêchait effectivement de se dégager.

« Tu es un idiot, soupira-t-elle et sa voix chantait tout le soulagement qu’elle pouvait éprouver. Je t’ai dit que je ne te lâchais plus, non ? »

Elle avait failli se parjurer ; elle ne commettrait pas deux fois la même erreur.

Elle se pencha en avant, posant son front sur celui de son amant et souffla, pour lui seul.

« Je reste avec toi. »

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