[Etat-major]Après la tempête et avant l'ouragan [PV Halya]

Comme a son habitude, Halyalindë ne s'était pas embarrassée de grandes pompes pour aller quérir les avis des uns et des autres après les débuts houleux de leur petite réunion d'armée. Ëninril, la Dame de Naëlis lui étaient même tombés dessus. Elle commençait à comprendre quel pouvait être réellement son rôle dans cette guerre, non plus en tant que militaire mais bien en tant que Protectrice. Et elle n'était pas au bout de ses peines, loin s'en fallait.

Pour l'heure, elle avait encore quelques affaires à régler avant de se mettre en marche avec sa petite troupe de cavalier à la rencontre des Noss du protectorat d'Eraison. La plus urgente, et la plus risquée, était sans doute celle qu'elle s’apprêtait à prendre par les cornes.

La journée était déjà avancée lorsque Halyalindë arriva au camp des Baar'Ane accompagnée de Randil et, une fois n'était pas coutume, de deux gardes. Peut-être était-il temps de se reposer un peu sur les autres pour sa propre sécurité. Il fallait au moins tester...

Inconsciente du drame qui venait d'avoir lieu, elle s'était présentée poliment aux premiers chasseurs qui l'avaient interceptée et attendit tranquillement à l'endroit indiqué. Profitant de ces quelques instants pour mettre en pratique les conseils d'Ëninril, elle expira à fond, tentant de faire le vide dans son esprit pour s'emplir de la Symphonie. Les mélodies étaient bien présentes mais si complexes qu'elle ne les interprétait qu'avec grand-peine. Même en essayant de se concentrer, elle...

Un coup humide sur sa nuque attira son attention. Randil passa devant elle puis vint se coller sur son flanc droit. Sa fourrure épaisse était hérissée, sa truffe haute pour humer l'air. Elle lui donna un petit coup sur l'épaule en réponse. Sa posture était tendue. Quelque chose le rendait anxieux. L'attention d'Halya se reporta alentours. Cela ne pouvait être la simple présence des chasseurs, le loup était habitué à la proximité d'hommes armés... Quelque chose d'autre planait. Il réagissait presque comme s'il sentait la présence d'un autre prédateur.

Mais l'arrivée d'une dizaine de chasseurs menés par le Gardien l'empêcha de chercher davantage. La salutation était assez inattendue compte tenu de la tension qui flottait sans arrêt sur le visage du chef Noss lorsqu'elle le croisait.

-Le plaisir est partagé, Gardien... Mais je ne me souvenais pas que vous étiez si prompt aux compliments, ajouta-t-elle avec un sourire non dissimulé.

Ce n'était pas la veille que la Protectrice avait commencé à être sensible à ce genre d'attentions et ça ne s'arrêterait certainement pas de sitôt. Certain considérait se manque de modestie comme un énorme défaut, mais essaierait-elle de s'en défaire si cet énorme défaut permettait d'égayer quelques heures d'une journée ?

-Je vous cherchais, comme vous vous devez vous en douter, pour revenir sur ce qu'il s'est produit lors de l'Etat major.

Elle jeta un coup d'œil aux visages des guerriers avant de revenir à Voronwë. Elle aurait voulu ajouter plus de précision, mais elle ne voulait pas l’incommoder devant les siens, aussi s'arrêta-t-elle là en se serrant un peu plus contre Randil qu'elle sentait se tendre de seconde en seconde.

-Préférez-vous que nous parlions en privé ?

Après un sourire légèrement crispé pour principale réponse, elle fit signe à sa très légère garde de ne pas aller plus loin, mais pour Randil c'était autre chose. Pas à pas, ils suivirent le Gardien. Et une fois de plus ses propos la surprirent. Elle ne s'attendait décidément pas a autant de préoccupation pour une enfant des pierres mais la franchise de Voronwë était bien là.

-Je n'y vois aucun inconvénient.

Malgré tout, l'atmosphère restait... Étrange. Peut-être n'était-ce dû qu'au fait que Randil ne parvenait pas à se calmer, mais quelque chose dans le camp rendait la Protectrice suspicieuse. Elle s'assit donc en tailleur à distance respectable de la marre, ne sachant pas exactement ce que le Gardien entendait par lieu secret et ne voulant pas interférer avec un endroit sacré. Ainsi, le loup blanc, resté debout près d'elle, faisait deux fois sa taille.

-A vrai dire, je voulais savoir si vous alliez bien. Attaqua-t-elle, la parole libérée par l'absence de spectateurs... Avant de se sentir obligé de se justifier. Je vous prie de m'excuser si cette question vous paraît déplacée. Après ce qu'il s'est produit lors de votre arrivée et votre départ rapide de l'Etat Major, je pensais que peut-être votre santé était en cause...

Sa question pouvait sans doute paraître étrange, mais connaître l'état d'une personne qui combattait à vos côtés, savoir si lui-même connaissait ses limites, évitait souvent bien des erreurs... Et même au-delà de ça, le bonheur global commençait par le bien-être de chacun. L’indifférence n'avait jamais fait partie de la guerrière.

Halya aurait put se demander pourquoi sa simple question semblait si désopilante, mais Voronwë répondit à son interrogation avant même qu'elle ait à la formuler. Oui, la destruction de l'Ëala avait sûrement été un choc pour tout le monde... Les chants d'Ëninril contant son histoire résonnaient encore dans le cœur de l'elfe.

Mais ce fut à son tour de sourire lorsque l'homme à la tête de tant de guerriers Noss se venta de son âge. Étant bien plus jeune que lui, elle préféra taire son propre âge. Se mettre innocemment en position de faiblesse à cause de son jeune âge pour une protectrice n'était pas dans ses envies du jour.

-Je ne sais pas si c'est égale dans toutes les Noss mais dans les Cités et dans celle de ma mère, vieillesse est synonyme de sagesse. Les plus âgés sont souvent les plus aptes à diriger.

Puis on en arrivait finalement au sujet épineux...
L’intention du Gardien était claire, mais ses méthodes beaucoup moins. Et quelqu'un de véritablement prêt à tout pour vaincre les drows et unifier les Noss pouvaient être un grand atout, comme un danger plus grand encore... Pour l'heure, il fallait mieux parier sur l'atout. Même si garder un œil sur ce qu'il se passait, la méfiance ne servirait à rien sans preuve.

-D'ici la fin du mois, le nombre de Noss aura déjà doublé voire triplé. Les convaincre de travailler ensemble et de suivre une seule personne serait déjà exceptionnel. Si vous avez des idées à ce sujet, cela ne peut pas faire de mal.