En l’An 12:XI, le Zagazorn se remet péniblement des épreuves imposées par Mogar lors du Voile.
L’Althinkalan, le sacre d’un Grand-Roi, puis
la reconquête d’Almis la rebelle et
le réaménagement progressif de Kirgan — la cité des Grands-Rois — ont permis de pacifier temporairement le royaume, mais des menaces pèsent toujours sur les terres du Nord.
La plus importante de ces menaces reste le dragon noir.
La créature a d’abord été aperçue durant le siège d’Almis en Barkios de l’An 9:XI et sa tanière fait depuis l’objet de nombreuses recherches. Ce sont finalement des prisonniers gobelins qui, en l’An 11:XI, avouent sous la torture l’emplacement de la tanière, ainsi que les chemins de montagne qu’il faut emprunter dans le Septentrion pour s’y rendre. En l’An 13:XI, après plus d’un an de préparatifs et de planifications, une expédition solidement équipée est dépêchée depuis Kirgan. Elle atteint le nid présumé du dragon en Verimios pour n’y trouver qu’un nid vide et des cadavres méconnaissables dans les cachots souterrains. Quelques ennéades plus tard, des rapports en provenance d’Almis indiquent que des créatures ressemblant à de jeunes drakes — en fait, la progéniture du dragon noir, ainsi qu’il est rapidement établi — rôdent autour de la cité et certains guetteurs affirment avoir vu le dragon noir lui-même dans la région, à quelques distances au nord-est de la cité. Le dragon — surnommé le Grand-Ver par les dawi — avait-il déserté son ancien nid suite à l’approche des nains ou pour toute autre raison ? La réponse demeure un mystère, mais importe peu au fond aux dawis du Zagazorn qui voient en lui et sa progéniture une menace pour Almis. Ordre est donc donné de les tuer s’ils approchent de la cité, en utilisant les nouvelles balistes fabriquées à Thanor et étudiées spécialement pour le tir sur des cibles situées en altitude.
À partir de Favrius de l’An 14:XI, les éclaireurs dawis signalent que les mouvements des clans gobelins s’intensifient à un rythme anormal, mais ce qui apparaît d’abord comme une menace imminente aux généraux d’
Hardrek Poing-de-Fer se révèle rapidement être une véritable aubaine pour le peuple du Grand-Roi. Il est rapidement établi que les peaux-vertes quittent leurs refuges souterrains pour prendre la route du Sud ou pour s’attrouper dans les zones de pâturage et non pas pour mener de nouveaux assauts contre les cités naines. Les dawis ne peuvent qu’émettre des hypothèses pour expliquer ce mouvement migratoire inespéré : les plus probantes incluent des famines, des guerres internes ou un nouveau caprice des dieux. Ce second mystère ne parvient pas à juguler l’euphorie des cités naines, qui voient les galeries souterraines du Zagazorn libérées de cette infestation comme jamais de mémoire de dawis encore en vie. Il apparaît clairement que les gobelins cherchent à rallier et à s’établir en Basse-Virnée ou dans les plaines du Brissalion. L’armée ne reste bien évidemment pas inactive et assaille des meutes de gobelins sans leur laisser le moindre répit. L’An 14:XI est rapidement surnommé « l’année des oreilles de gobs » en référence aux colliers que se confectionnent les soldats du Grand-Roi pour compter leurs victimes. L’un des pires massacres se déroule au pied de l’Hunzrung Langk, qui barre la route du Sud et où le bûcher des cadavres brûle durant une ennéade entière. Ce sanglant épisode permet notablement à
Thorgrel Poing-de-Fer de faire connaître largement son statut
Gormisson d’Ikthor. L’An 15:XI marque la fin de ce mouvement migratoire sans précédent ; la population des gobelins dans les hautes montagnes du Zagazorn est historiquement basse et les nombreux combats qui ont précédé l’implantation des clans des peaux-vertes dans la Basse-Virmée ont considérablement réduit la menace qu’ils peuvent constituer ces indésirables. Toutefois, des groupes isolés de peaux-vertes continuent de hanter les montagnes du Septentrion et le Nivor, prêts à fondre sur un fortin mal défendu ou une ferme isolée.
En l’An 15:XI, les entrailles du Zagazorn sont donc en grande partie libérées du fléau gobelin, ce qui permet aux les dawis de les réinvestir. Hardrek Poing-de-Fer mène une politique de grands travaux aux quatre coins du Royaume, avec comme objectif affiché d’effacer la décennie éprouvante qu’a dû affronter le Zagazorn. Le projet phare de cette politique est le réaménagement des Grandes Voies — d’imposants tunnels souterrains comme seuls les nains peuvent en creuser — entre les cités de Kirgan, Almis et Thanor. Les Grandes Voies avaient originellement été érigées par les nains plusieurs cycles auparavant, mais la présence des gobelins les avait rendues inutilisables depuis plusieurs générations. Leurs sécurisations et réaménagements sont complétés par d’importants travaux pour relier Thanor à Lante, ainsi qu’
il avait été acté pendant le conseil de Thanor en Karfias de l’An 10:XI. Grâce aux travaux préparatoires du dawi
Morek, ces derniers avancent à un rythme impressionnant et il est estimé qu’ils aboutiront d’ici au début de l’An 19:XI.
En Karfias de l’An 15:XI apparaît un autre phénomène aussi surprenant qu’inquiétant. Lors des grands travaux ordonnés par Hardrek à Almis, les ouvriers nains trouvent dans d’antiques tunnels situés sous le Temple de Mogar — toujours scellé — une anomalie magique dont la nature exacte échappe même aux meilleurs runistes dawis. Elle se présente sous la forme d’une marre figée, impossible à vider ou à déplacer. Sur ordre du roi, des runistes encerclent la marre d’un bouclier magique pour empêcher quiconque d’y pénétrer… ou d’en sortir. L’ensemble de la zone est méticuleusement minée et sapée afin de pouvoir s’effondrer en cas d’alerte. Hardrek ne cache pas son envie de mettre ce plan d’urgence à exécution sans plus tarder, car il aurait le bénéfice de détruire le temple de Mogar. Dans les dernières ennéades de l’An 16:XI, le contenu de la marre reprit une contenance liquide, ce qui attise la curiosité des runistes chargés de l’étudier.
Peu avant cela, dans les premières ennéades de Favrius de l’An 16:XI, les Thanes de tout le Zagazorn sont convoqués à Kirgan pour écouter le Grand-Roi, qui leur fait une annonce d’importance. Les frontières du Zagazorn seront sous peu rouvertes aux longues-jambes ! Depuis son avènement, Hardrek Poing-de-Fer a en effet imposé une autarcie quasi totale au royaume, à l’exception des enclaves commerciales de Lante et de Thanor où se pressent des marchands venus d’aussi loin que la Péninsule ou l’Ithri'Vaan. Conscient malgré tout que son royaume ne peut éternellement se couper du reste du monde, le roi assouplit cette politique d’autarcie par un décret qui autorise les Thanes à nommer «
Ongrumthrong » (littéralement « l’allié du clan » dans l’ancienne langue du Zagazorn) des étrangers non-dawis qui seront autorisés à voyager librement dans les terres de Lörn, les plaines du Brissalion et la Basse Virnée. Le Kirgion restera quant à lui fermé à l’exception des
Ongrumthrong du clan du Grand-Roi. Quant aux autres régions plus au Nord, elles demeureront rigoureusement interdites d’accès. Revers de la hache toutefois et volonté du roi pour limiter le nombre d’entrants, le Thane se trouveront légalement responsable de l’ensemble des actions des
Ongrumthrong durant leurs séjours.
Au sortir de l’An 16:XI, l’horizon du Zagazorn est donc porteur de bien des promesses, à peine obscurcies par l’ombre menaçante d’un dragon noir par trop discret ces dernières années. Le pouvoir du Grand-Roi Hardrek Poing-de-Fer est reconnu de Lante à Thanor, de Kirgan à Almis. Les dawis réinvestissent leurs cités séculaires et se lancent dans des grands travaux comme eux seuls savent en conduire. Le prestige et l’influence des cultes des demi-dieux nains, enfin, jouissent d’un important essor, car il faut bien combler le vide laissé par l’imposante figure tutélaire de Mogar.